Fait partie du dossier : Visite d'État au Portugal.

Le Président de la République s'est rendu au Portugal pour une visite d’État les jeudi 27 et vendredi 28 février 2025, à l’invitation du Président de la République portugaise, Marcelo Rebelo de Sousa. 

À son arrivée à Lisbonne, le chef de l'État a été accueilli par le Président portugais au monastère des Hiéronymites où ils ont longuement échangé, avant de poursuivre leur entretien au Palais national de Belém. 

Le Président Emmanuel Macron s'est également entretenu avec le Premier ministre Luís Montenegro et le Président de l’Assemblée José Pedro Aguiar-Branco. 

Cette visite était notamment l'occasion d'organiser la passation de relai entre la France et le Portugal dans la perspective de la Conférence des Nations Unies sur l’Océan (UNOC) de Nice en juin 2025.

Les deux chefs d'État ont réaffir­mé leur engagement commun pour la pro­tection des océans.

Revoir l'événement en intégralité :

27 février 2025 - Seul le prononcé fait foi

Télécharger le .pdf

Discours du Président de la République lors passage de relai entre le Portugal et la France dans la perspective de la conférence des Nations- Unies sur l’océan de Nice en juin 2025.

Emmanuel MACRON

Merci beaucoup Monsieur le Premier Ministre.

Messieurs les ministres, Messieurs les parlementaires, Madame l’ambassadrice, Monsieur l’ambassadeur, Mesdames, Messieurs en vos grades et qualités.

Je suis très heureux de vous retrouver ici et je suis sûr que nous rattraperons d’avoir manqué le pont du Santa Maria Manuela puisqu’il se rendra à Nice, et donc nous serons à vos côtés. Et heureux aussi qu'une partie de la délégation qui m'accompagne et qui, dans la culture et dans de nombreux domaines, porte l'amitié entre nos deux pays, soit présente aujourd'hui.

Je veux ici adresser mes remerciements à la Fondation Oceano Azul, opératrice de beaucoup de ces initiatives et partenaire très fort avec le gouvernement portugais de ce relais qui est passé entre le Portugal et la France. Nos deux nations sont des grandes nations maritimes. Vous l'avez rappelé, tu l'as rappelé, cher Luís, à l'instant, depuis des siècles, et nous assumons ce destin maritime qui n'est plus un destin de conquête prédatrice, mais qui consiste plutôt, en effet, à essayer de conquérir une coopération internationale, une coopération économique, une meilleure connaissance scientifique de nos océans et une meilleure préservation de ces derniers grâce à nos chercheurs, à nos chercheuses, à nos exploratrices et explorateurs. Et je veux remercier évidemment l'ensemble des organismes de recherche ici présents et qui sont embarqués dans cette aventure, et toutes celles et ceux qui portent cette aventure de la mer.

Alors, à Lisbonne, en 2022, vous l'avez rappelé, beaucoup de choses ont été annoncées, un mouvement a été lancé, et c'est là que nous avons ensemble annoncé, et la France, tout particulièrement, était favorable à l'élaboration d'un cadre légal pour mettre un coup d'arrêt à l'exploitation minière des fonds en haute mer. Et depuis, nous avons pris des dispositions en France et nous suivons avec beaucoup d'intérêt et d'espérance aussi les discussions en cours au Portugal. Et je suis honoré de ce passage de témoin, et je sais que sur les solides fondations que le Portugal et le Kenya ont réussies à accomplir il y a 3 ans, avec le Costa Rica, nous pourrons mener une conférence des Nations-Unies, cet UNOC3 à Nice, en juin prochain, ensemble, et que celle-ci pourra porter des résultats décisifs. Et je sais pouvoir compter sur ta présence, cher Luís, Monsieur le Premier ministre.

Alors, sur ce chemin vers Nice, beaucoup d'initiatives ont déjà été prises, et je remercie notre envoyé spécial, Monsieur l'ambassadeur, et en particulier la feuille de route franco-portugaise que nous adoptons lors de cette visite d'État marque une avancée et le fruit d'une coopération exemplaire entre nos deux nations, et elle trace aussi les contours d'un avenir où l'océan sera enfin protégé à la hauteur de son importance.

Alors, j'évoquais déjà lors de l'UNOC2, ici même, il y a deux ans et demi, l'urgence d'agir résolument à mesure que l'horizon de 2030 approchait, et avec lui des objectifs de développement durable. Et sur ces objectifs, nous savons, soyons lucides, que nous sommes plutôt en retard. Et donc, c'est la mobilisation qu'il faut en effet sonner. Nous devons à cet égard tous nous inspirer de ce qui a été fait par le Portugal. En 2022, nous avons franchi des étapes décisives. L'UNOC2 a permis une prise de conscience collective de tous les participants et de prendre des engagements qu'on a ensuite portés au One Ocean Summit à Brest et qui se sont concrétisés fin 2022 avec l'adoption, le Premier ministre l'a évoqué en parlant du 30-30, c'est de protéger 30 % des mers et des terres d'ici 2030. C'est l'objectif que nous nous sommes donnés et il a été consacré en 2022. Et début 2023, nous avons adopté ce qui était un combat, oserais- je dire homérique, depuis des décennies dans le cadre des Nations-Unies, ce fameux traité de la Haute-Mer dit BBNJ, et qui a été un très gros travail diplomatique.

Alors maintenant, il nous faut, sur le chemin de Nice, appliquer cela et l'appliquer davantage. Nous sommes très fiers d'avoir ouvert la voie, mais on a un premier enjeu pour Nice, qui est que ce fameux traité BBNJ, il faut le voir ratifié. L'Espagne, la France ont ouvert le bal, le 5 février. Je sais que le Portugal comptera parmi aussi les précurseurs de cette ratification d'ici à l’UNOC, mais il nous faut en effet que 60 pays, d'ici le mois de juin, aient ratifié ce traité. Parce que c'est ce qui lui permettra de rentrer en vigueur.

Et imaginez, ce n’est rien de moins qu'au fond la gouvernance internationale, la juste protection de 60 % de la surface de nos océans. Et jusqu'à présent, cette surface était en quelque sorte complètement dérégulée, il n'y avait pas de cadre international. Et donc ce traité BBNJ, c'est très bien de l'avoir négocié, de l'avoir finalisé.

Donc le combat, et je compte sur le Portugal pour aller démarcher à nos côtés le maximum de pays, il faut qu'on trouve 60 ratifications d'ici le mois de juin. Et ce sera à ce moment-là une avancée considérable qui permettra d'avoir une véritable gouvernance de la haute mer et de lutter contre toutes les prédations qu’il y a aujourd'hui, et je dirais même l'absence de règle totale, de ces 60 % de la planète bleue. C'est ce qui nous permettra aussi d'améliorer la fragmentation de la gouvernance de la mer. Et c'est un défi colossal. Aujourd'hui, c'est la FAO qui régule la pêche, c'est l'OMI qui régule la décarbonation du transport maritime, c'est la Convention sur la diversité biologique qui régule la biodiversité marine et côtière. Et au fond, personne ne régule véritablement, à l'échelle de la planète, nos océans. C'est comme si toutes ces questions pouvaient être traitées indépendamment les unes des autres. Et c'est pourquoi aussi ces conférences des Nations unies sur les océans jouent un rôle majeur, parce qu'elles permettent à des spécialistes du transport maritime, de la biodiversité, de la pêche, etc., de se concerter et de gérer cet espace qui est commun, et souvent, d'ailleurs, les conflits d'usage, comme on l'appelle, qui s'y jouent.

Je parlais de l'objectif des 30 % de protection, y compris de nos mers d'ici à 2030. Nous n'y sommes pas. La tâche est en effet encore importante. Nous ne dépassons pas à ce jour, à l'échelle de la planète, les 9 %. Alors, nous, nous avons avancé. Et s'agissant des aires marines protégées, le Portugal est une source d'inspiration. En 2021, le Portugal crée la plus grande réserve marine entièrement protégée d'Europe en étendant sa zone de protection, 50 ans après la première création. Et en octobre dernier, la région des Açores a accordé le statut de zone protégée à 30 % de la zone maritime entourant l'archipel, soit 287 000 kilomètres carrés, ce qui en fait désormais la plus grande zone maritime protégée de l'Atlantique Nord, ce qui fait de Portugal un des pays exemplaires en matière de cet objectif. La France a atteint cet objectif aussi, elle l'a même un peu dépassé, et ce, parce qu’aussi, nous avons, comme vous, une très grande surface maritime. La France est la deuxième puissance maritime au monde, et ce, par ses territoires ultramarins. Mais d'ici à Nice, nous avons encore beaucoup de travail, d'abord pour convaincre les autres de passer de 9 % protégés à 30 %, ensuite, pour améliorer nos résultats en termes de haute protection — il faut qu'il y ait 10 % qui soient atteints, on fera le maximum — et puis aussi pour améliorer les pratiques dans les zones les plus sensibles où la biodiversité est en jeu, où il y a encore certaines pratiques qui ne sont pas totalement conformes à ce qu'on devrait faire. Là, nous le ferons avec les scientifiques, avec l'ensemble des parties prenantes, avec, pour Nice, des annonces importantes.

Enfin, nous devons aller plus loin et nous devons continuer à découvrir l'océan. Car aujourd'hui, nous ne le protégeons qu'à la mesure de ce que nous en connaissons. Et imaginez, seuls 5 % de nos océans ont fait l'objet de véritables missions d'exploration. 5 %. Et donc, nous parlons là d'un véritable continent caché, de trésors qui sont à découvrir et, au fond, quand d'autres vont vers Mars, nous, nous avons décidé d'embrasser Neptune. C'est le nom de la mission choisie et on l'annoncera à Nice.

Mais en effet, au moment même où l'immense majorité de la haute mer est encore inconnue et non cartographiée, il s'y trouve des ressources inestimables, notamment génétiques, qui pourraient faire avancer la science, la santé humaine de manière décisive. Et c'est pourquoi, aux côtés de l'Union européenne, nous allons œuvrer pour ce pacte européen pour l'océan que nous adopterons avant l'été et qui doit marquer le lancement de nouveaux efforts d'exploration de nos océans, qui permettra ainsi de mobiliser des financements au service de nos scientifiques pour continuer ce travail d'exploration. Au-delà de cela, beaucoup d'autres initiatives seront prises pour lutter contre le plastique et même chercher à l'éradiquer sur plusieurs zones, pour transformer les pratiques de pêche, pour pousser et promouvoir d'autres initiatives de recherche.

Je ne vais pas ici faire le menu de ce que sera la conférence à Nice, parce que ce sera à la fois une grande mobilisation de la recherche, de la société civile, des gouvernements, du monde économique également. Mais, je le dis ici avec beaucoup d'enthousiasme et Monsieur Premier ministre, au fond, a rappelé le cadre en évoquant le contexte géopolitique où nous nous trouvons, c'est précisément dans ce moment qu'un tel travail est plus indispensable encore. On voit bien le monde se fragmenter, on voit bien les valeurs qui étaient les nôtres et qui reposaient sur un universalisme de nos valeurs, une coopération dont le multilatéralisme se disloquer. Réussir à coopérer et à agir ensemble pour que ce qui est un bien commun de la planète et donc de l'humanité soit préservé.

Retrouver le sens de ce qui est notre capacité à habiter cette planète, c'est-à-dire retrouver le fait que le progrès humain n'est compatible que s'il y a la préservation de notre biodiversité et, en même temps, l'atténuation de nos émissions de CO2. Retrouver le sens même de ce que nous avons encore vécu il y a quelques années, c'est que nous ne sommes pas des vivants séparables des autres et que la santé humaine est inséparable de la santé animale et de la compréhension des écosystèmes. C'est réconcilier plusieurs combats internationaux au cœur de nos agendas, celui de la santé, celui de l'environnement, celui de la recherche, celui du progrès humain. Et tout cela, c'est ce que nous voulons faire pour cette conférence de Nice. C'est pourquoi elle est ô combien importante.

Et je veux ici dire toute ma gratitude au Portugal, à votre fondation, la Fondation Oceano Azul, son président José Soares DE SANTOS, son directeur général Tiago Pitta E CUNHA, et toute l'équipe ont fait un travail remarquable. Et vous pouvez être très fiers, Monsieur le Premier Ministre mais je voulais vous donner rendez-vous ici, sous cette pluie prometteuse, qui rappelle à certains ici le temps breton, et au fond, les destins océaniques qui nous lient ; je voulais vous donner un rendez-vous à Nice dans moins de 4 mois pour poursuivre notre engagement commun pour l'océan. En tout cas, Monsieur le Premier ministre, merci pour votre accueil dans cette visite d'État, pour le traité d'amitié si important que nous allons y signer.

Vivent nos océans, vive le Portugal, vive la France et vive l'amitié qui nous lie.

De Lisbonne à Nice : déclaration franco-portugaise sur l'Océan.

Le Président Emmanuel Macron a également rencontré des acteurs de la tech franco-portugaise au Beato Innovation District. 

Revoir l'événement :

En fin de journée, le chef de l'État, accompagné de son épouse, ont assisté au dîner d'État offert par le Portugal. 

Revoir la déclaration du Président :

À consulter également

Voir tous les articles et dossiers