
Le Président Emmanuel Macron s'est rendu à Madagascar dans le cadre de la tournée dans l’océan Indien, les 23 et 24 avril 2025.
Lors de sa deuxième journée de déplacement à Madagascar, Le Président a participé à une cérémonie de restitution de biens culturels malgaches.
Revoir la cérémonie :
le Président Emmanuel Macron a ensuite participé au Sommet de la Commission de l’océan Indien. Ce forum a permis de renforcer la coopération régionale face à plusieurs défis communs : sécurité maritime, protection des ressources halieutiques et lutte contre les trafics illicites. Le chef de l’État a insisté sur la nécessité d’une approche coordonnée pour répondre aux enjeux climatiques et géopolitiques qui affectent ces territoires insulaires.
La sécurité alimentaire a été au cœur des discussions, avec le prolongement de l’initiative FARM (Fondation pour l'agriculture et la ruralité dans le monde) qui a permis dès la guerre d'invasion de 2022 de faciliter l’exportation des céréales ukrainiennes, dont dépendent plusieurs pays de l'Océan Indien.
Revoir le discours du Président de la République :
24 avril 2025 - Seul le prononcé fait foi
Sommet de la Commission de l’Océan Indien - Discours du Président de la République Emmanuel Macron.
Emmanuel MACRON
Monsieur le président de la République de Madagascar, merci infiniment pour votre accueil et vos mots. Monsieur le Président de l'Union des Comores, monsieur le Premier ministre de la République de Maurice, monsieur le président de la République des Seychelles, mesdames les Premières Dames, monsieur le secrétaire général de la Commission de l'Océan Indien, monsieur les chefs d'institution de la République de Madagascar, messieurs les premiers ministres, mesdames et messieurs les ministres, madame la présidente et messieurs les présidents des collectivités françaises ultramarines présentes dans la délégation française, mesdames, messieurs les parlementaires, mesdames, messieurs les ambassadrices et ambassadeurs, mesdames, messieurs les représentants et membres des gouvernements, les observateurs de la COI, mesdames et messieurs les partenaires de la Commission de l'Océan Indien, mesdames et messieurs en vos grades et qualités, chers amis, permettez-moi tout d'abord d'adresser mes remerciements les plus chaleureux à la fois à notre hôte, le président RAJOELINA, cher Andry, merci infiniment à vous et à madame la Première Dame pour le formidable accueil à la fois d'hier soir et d'aujourd'hui, et d'avoir pris l'initiative de nous réunir à Antananarivo aujourd'hui.
Et permettez-moi de féliciter le président Azali, mon cher frère, qui co-préside ce sommet. Je souhaite d'ailleurs, réitérant les félicitations à la République des Seychelles pour le formidable travail qui a été fait, vous souhaiter le plein succès pour la présidence comorienne de la Commission de l'Océan Indien qui vient de débuter.
Je suis très heureux d'être à vos côtés aujourd'hui pour célébrer ensemble les 40 ans de la Commission de l'Océan Indien. Et je rends hommage ici à cette occasion à la vision des fondateurs et à l'engagement de tous ceux qui ont façonné cette institution depuis 4 décennies. Monsieur le secrétaire général, cher Edgar, en continuant à la faire vivre au quotidien avec vos équipes, vous êtes les dépositaires de cet héritage. Vous donnez corps à l'amitié et à la communauté de destin qui existe entre nos îles, entre nos peuples, ici, dans cet espace maritime et insulaire entre l'Afrique et l'Indopacifique, car nos îles sont nées d'un même monde. Et pour citer l'homme de lettre mauricien Malcolm De Chazal, « une île est une éclosion de la mer ». Et mon premier sentiment est d'abord celui-là, le sentiment d'une fraternité profonde.
La France est fière d'être membre de la COI et l'océan Indien fait partie de l'identité de notre pays. Oui, ce sont plus d'un million de nos concitoyens ultramarins, expatriés ou binationaux qui vivent et travaillent dans cette région du monde et qui ont souvent des attaches fortes, familiales, unissant d'ailleurs toutes les îles de notre Commission. Ce qui nous réunit, c'est une histoire, une culture francophone, une tradition de solidarité et d'échange entre nos populations, nos jeunes, nos étudiants, nos artistes, nos entrepreneurs. J'avais évoqué, lors d'un précédent déplacement à La Réunion en 2019, la culture des rivages qui nous rassemble et fait notre identité commune. Aujourd'hui, l'état du monde nous impose encore davantage de nous unir autour de cette culture, de cette identité, et d'en faire le carburant de notre méthode multilatérale pour unir et protéger davantage, à travers des projets communs, nos peuples qui ont l'océan Indien et l'insularité en partage. Mesdames et Messieurs, depuis notre dernier sommet en 2014, l'ordre international a été profondément bousculé, bouleversé par des crises historiques et des changements brutaux. Nous avons vécu une décennie où tant de nos certitudes ont été ébranlées, où les défis se sont accumulés, quand parfois aussi les règles communes ont été mises à l'épreuve, et nous l'avons encore vu ces dernières semaines.
Voilà pourquoi nous devons y répondre ensemble, de manière solidaire. Et notre Commission en a démontré sa capacité en travaillant à notre sécurité alimentaire, à celle de nos partenaires, c'est travailler à la sécurité et la stabilité de nos territoires respectifs. C'est le meilleur investissement à la paix et à la prospérité. C'est d'ailleurs pourquoi nous avons lancé, dès le début de la guerre d'agression russe en Ukraine, en mars 2022, l'initiative FARM qui a permis de libérer des voies de passage pour le blé ukrainien, dont beaucoup, y compris dans la région, étaient dépendants. Mais surtout, nous avons initié une initiative au long cours avec nos instruments, Bpifrance, le groupe AFD, nos partenaires, comme le Fonds international de développement agricole, pour investir de manière durable dans nos filières agricoles. Et c'est ce même engagement, beaucoup d'entre vous étaient présents à Paris il y a quelques semaines, que nous avons renouvelé lors du dernier sommet nutrition pour la croissance, où j'ai pu annoncer à cette occasion que la France investirait plus de 750 millions d'euros sur la sécurité alimentaire et la nutrition dans le monde d'ici 2030.
Cet engagement se décline évidemment dans le sud-ouest de l'océan Indien, et nous y menons, notamment avec l'Union européenne, plus de 120 millions d'euros de projets en matière de sécurité alimentaire qui tiennent compte des défis spécifiques de notre région, car on le sait, à la fois l'insularité, mais également la multiplication des aléas climatiques, cyclones et autres, conduit à rendre ce défi encore plus vital. Mais nos îles ont aussi beaucoup d'atouts et sont souvent à la pointe de la recherche, de l'innovation, de la production. Et nous avons ainsi des trésors endémiques. Ce n'est pas par hasard si nos îles se réunissent sous le label des Îles vanilles. Et il y a beaucoup d'autres exemples, l’ylang-ylang, la canne à sucre, le girofle, le copra et j'en passe. Et nous avons aussi des ressources naturelles pour subvenir aux besoins de nos populations, notamment les ressources halieutiques, dont l'exploitation doit être conciliée avec le plus haut degré de protection, y compris contre les prédations extérieures. Pour ce grand archipel qu'est le sud-ouest de l'océan Indien, ces ressources agricoles et halieutiques sont un bien commun régional. Et je vois au moins trois chantiers pour mieux les valoriser.
D'abord, stimuler la production, comme vous l'avez dit, et améliorer les infrastructures, en particulier agro-logistiques. Et pour cela, il nous faut plus d'investissements du secteur privé, ce qui exige notamment un climat des affaires sûrs, prévisibles, ce qui suppose aussi davantage de formations dans les métiers agricoles. Engageons-nous sur ces projets. Vous pouvez compter sur la France et l'ensemble de ses opérateurs. Ensuite, c'est consolider un cadre normatif qui nous protège. Les normes sanitaires et phytosanitaires ne sont pas un obstacle au développement de la production, mais un atout pour la compétitivité à l'export, pour la santé de nos populations. Mais nous voulons, pour ce faire, avoir un cadre commun au niveau de la COI.
Cessons les barrières qui empêchent la circulation de nos productions agricoles et la solidarité nécessaire. C'est ce qui donnera plus de profondeur à notre marché, plus d’investissement privé, plus de solidarité et une réponse plus efficace à la lutte contre la vie chère. Enfin, c'est aussi le chantier qui consiste à mieux intégrer les chaînes de valeurs régionales, et je salue ici l'idée d'un espace de production et d'échanges agricoles et alimentaires au sein de la COI, ce qui permettra d'accélérer cette dynamique, d'avoir, là aussi, l'espace qui permet les bons investissements. Ceci m'amène au deuxième thème que je souhaite aborder, à savoir la sécurité et la sûreté maritimes. En effet, pour prévenir les pollutions marines, aider les navires en difficulté, lutter contre les trafics, qu'il s'agisse de la pêche illégale, des trafics de drogue, nous avons besoin d'une action structurée et coordonnée autour de l'architecture de sécurité maritime dont nous sommes dotés. Tous, nous sommes touchés par ces fléaux. Tous dans la région, nous sommes touchés par ces trafiquants qui viennent prélever ce qui n'est pas à eux et qui viennent, en quelque sorte, exploiter aussi les difficultés déjà présentes. L'exercice interarmées, Tulipe, qui se tient en ce moment même à Madagascar et qui rassemble près de 1 500 militaires des États membres de la COI, illustre cette dynamique commune. Le renforcement de notre interopérabilité, la bonne coordination entre nos moyens militaires contribuent à notre crédibilité collective et renforcent notre capacité conjointe d'action.
Je suis très heureux à cet égard que les FAZSOI puissent agir à vos côtés, et au-delà de nos forces qui sont prépositionnées dans l'océan Indien, dont nous sommes en train d'accroître la présence, la France va dans les deux prochaines années, accroître de plus de 15 % sa présence à La Réunion avec les FAZSOI, démultiplier aussi sa présence maritime à La Réunion et à Mayotte, je suis fier que, dans le cadre des exercices Tulipe, nous ayons déployé plus de 500 militaires, des moyens exceptionnels, Frégates A400M, pour démontrer notre solidarité et notre participation à la sécurité collective de l'océan Indien. Preuve supplémentaire de notre engagement, j'ai la fierté d'annoncer que nous avons lancé une académie de l'océan Indien basée à La Réunion pour coopérer avec nos partenaires de la région sur les défis sécuritaires, et qui sera pleinement complémentaire des actions de la COI.
Le troisième sujet que je voudrais aborder avec vous est celui de la gestion des risques naturels. Les cyclones Chido et Garance ont durement éprouvé, et Mayotte et La Réunion. Ils ont aussi montré que la solidarité était essentielle sur ce sujet comme sur les autres. Et je veux très sincèrement remercier les autres États de la COI pour leur soutien à nos collectivités affectées par ces catastrophes. Vous n'avez pas ménagé votre solidarité dans tous les domaines, et nous y avons été extrêmement sensibles. En filigrane, il y a bien sûr la question climatique, l'enjeu de la préservation de la biodiversité, qui est l'enjeu de notre siècle, est un défi existentiel pour nos îles. Et la coopération que nous déployons au sein de la COI est essentielle pour y faire face. Pour répondre à ces défis communs et urgents, la France, qui est le premier bailleur de la COI, continuera de mettre ses capacités au service de notre communauté à travers ses opérateurs, notamment l'AFD, qui déploie à ce jour un portefeuille de 125 millions d'euros de projets au profit de la COI. Mais aussi grâce à l'appui des services de l'État positionnés dans la région, des forces armées de la zone sud de l'océan Indien, de l'université, de La Réunion, des organismes de recherche et de coopération, je pense à l'IRD, au SIRAD, à l'Institut Pasteur ou aux agences régionales de santé. Et la contribution des collectivités ultramarines françaises, dont je salue l'engagement, est évidemment des plus décisives. Mesdames et messieurs, je ne saurais être complet sans évoquer l'intégration de l'ensemble de nos îles du sud-ouest de l'océan Indien dans la coopération régionale. J'ai dit que la COI se caractérisait par un esprit d'amitié, de fraternité, de solidarité et de coopération depuis 40 ans. C'est ce qui fait notre force. Et nos territoires font face, en effet, aux mêmes défis. Et ces défis ne connaissent pas les frontières. Parce que nous devons partager cette ambition commune au service de l'intérêt de tous, nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes. Je pense bien évidemment à Mayotte, île et territoire de l'océan Indien, que dans les faits, vous avez mis au cœur de votre solidarité quand elle a été si durement éprouvée.
L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité dans la pluralité de ces dimensions, maritime, alimentaire et pour la santé, sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région. Et je sais pouvoir compter sur l'engagement de tous pour avancer de manière pragmatique vers cet objectif. Mesdames et Messieurs, la France se mobilisera pour que la préservation de nos biens communs dans l'océan Indien figure en bonne place dans les discussions de la Conférence des Nations unies sur l'océan que nous accueillerons à Nice du 9 au 13 juin 2025. Plusieurs de nos États membres ont montré leur plein engagement par la signature et la ratification du Traité pour la protection de la haute mer et de la biodiversité marine, dit traité BBNJ. J'encourage tous les États, y compris nos observateurs, qui ne l'ont pas encore fait à ratifier ce texte majeur pour la protection de nos océans. C'est une opportunité historique et je compte sur vous. Dans un contexte international de plus en plus complexe, singulièrement dans la zone Indopacifique, la COI est un modèle de coopération pour le développement et l'attractivité de nos îles. Aucune de nos îles ne peut relever seule les défis qui se présentent à tous.
Mais je suis convaincu d'une chose, c'est qu'ensemble, en conjuguant nos atouts, en mutualisant nos idées et nos savoir-faire, en investissant sur les projets concrets que nous nous sommes donnés, nous pouvons tracer une voie nouvelle, singulière, adaptée à nos réalités insulaires, une voie de fraternité, d'engagement et de courage.
Vive l'Indien Océanie, vive notre communauté de la Commission de l'Océan Indien et vive la fraternité entre l'ensemble de nos pays, l'ensemble de nos îles !
Je vous remercie.
Le chef de l’État a également visité le centre humanitaire Akamasoa, fondé par le Père Pedro Opeka, récemment élevé à la dignité d'officier de la Légion d'honneur.
Revoir le discours :
24 avril 2025 - Seul le prononcé fait foi
Visite de l’œuvre humanitaire Akamasoa fondée par Père Pedro Opeka – Discours du Président de la République.
Emmanuel MACRON
Comment vous voulez que je parle après ça ? Ce n'est pas possible.
Mon père,
Mesdames, Messieurs les ministres,
Mesdames, Messieurs,
D'abord, merci parce que vous nous avez fait le plus beau des cadeaux, le plus beau des cadeaux. Vous voyez, dans quelques instants, on va partir avec mon épouse, avec la délégation, et on partira avec vos visages, vos danses, vos chants, dans le cœur et dans la tête, et au fond des yeux. Ils ne nous quitteront plus jamais. Ça, je vous promets.
Je voulais vous remercier énormément pour cela, énormément. Parce que je sais que vous y avez mis beaucoup de cœur.
Je n'ai pas tellement de long discours à faire, mon père, mais je voulais simplement que les enfants qui sont là, les adultes aussi, et chacun prennent conscience de ce que vous avez fait, vous, et avec vous, ceux qui vous accompagnent.
Imaginez, en 1989. Alors, pour vous, vous n'étiez pas nés du tout, du tout. Pour quelques-uns ici, vous étiez nés et jeunes. Ici, c'était une décharge, et il y avait des fumées qui montaient, et c'était un endroit qu'on ne voulait pas voir. Et vous vous êtes rendu compte de ça, et avec quelques-uns, mon père, vous avez décidé de tout changer.
Alors, vous avez nettoyé, vous avez planté les arbres, toute cette forêt qu'il y a autour de nous, et un à un, vous avez construit ces bâtiments, ces maisons, avec tous ceux qui vous ont fait confiance, vous vous êtes occupés de ces enfants, et vous avez créé cette ville, cette communauté, cette magie qu'est Akamasoa.
Aujourd'hui, ce sont plus de 20 000 enfants qui sont scolarisés, ce sont plus de 5 000 logements, ce sont des milliers d'emplois et ce sont des vies qui changent grâce à cela. Je voudrais que vous ayez ça en tête, vous, chacune et chacun. Vous êtes là parce qu'il y a eu quelque chose d'unique.
C'est un alliage qui n'arrive pas souvent, c'est la bonté avec la volonté. C'est ça le Père Pédro et tous ceux qui l'ont suivi. C'est ça Akamasoa.
Vous savez, dans le monde où on vit, il y a des gens qui ont de la bonté. Parfois, ils ont la bonté en mots, et c'est déjà très important, ils la portent, mais ils n'ont pas toujours la volonté de changer les choses. La bonté sans volonté, c'est déjà très important. Ce sont des sentiments où on fait le bien avec sa famille, ses plus proches, mais ça ne suffit pas à changer le monde.
Puis, il y a beaucoup de gens qui ont de la volonté. Quand on fait de la politique, quand on fait de l'entreprise, ils font des choses, ils construisent, mais ils n'ont pas toujours la bonté avec. Alors, ils font des choses, mais parfois pour eux-mêmes ou pour trop peu, mais ils ne changent pas le monde non plus.
Mais le mariage de la bonté et de la volonté, et ce qu'a fait le père, avec toute la communauté d'Akamasoa, ça, c'est unique. C'est la bonté et la volonté ensemble. Ça, ça change le monde. Alors pour ça, mon père, merci infiniment.
Alors lui, c'est un père, donc il montre le ciel. Moi, je suis le président d'une République, qu’on dit laïque. Mais dans la République française, avec sa liberté, son égalité, sa fraternité, il y a tellement de choses qui ressemblent à l'universalisme chrétien, et donc, on aura chacun nos interprétations. Mais je sais une chose, c'est qu'à la fin, la racine est la même.
Je finirai là-dessus, c'est la confiance en vous, c'est-à-dire en la dignité de chaque être humain. Vous savez, le plus beau cadeau, je pense, pour le Père et toute la communauté, mais pour nous, en vous voyant, c'est chacun de vos sourires, parce que chacune et chacun d'entre vous est nécessaire, comme disait un autre pape, mais surtout parce que chacune et chacun, vous est unique.
Je vous regardais, il n'y a pas un sourire qui se ressemble, il n'y avait pas une danse qui se ressemblait, et vous étiez une harmonie parfaite. N'oubliez jamais ça, chacune et chacun d'entre vous est unique.
C'est parce que vos maîtres vous regardent comme ça qu'ils vous font grandir. Et, à votre tour, vous aurez ça à porter. Ce que vous avez à apporter à votre pays, à vos enfants demain, à notre planète, c'est unique. En vous regardant, je me disais, ce sont des milliers d'enfants uniques, mais qui bâtissent une harmonie.
Dans ces temps devenus fous, où nous nous débattons, vous êtes la plus belle armée du monde. Vous êtes une armée de paix, de fraternité, de bonté, de sourire. Cette armée-là, elle est inarrêtable.
Alors, nous, on va essayer de continuer de se battre pour arrêter les armées folles de ceux qui veulent conquérir des bouts de terre, qui veulent semer la misère. On va essayer de se battre pour réduire un peu les inégalités qui sont déjà tellement grandes. On va essayer de se battre pour rendre notre terre plus vivable, pour le climat, la biodiversité, pour essayer de vous céder la meilleure planète possible. En disant ça, j'ai déjà conscience qu'on ne sera pas au rendez-vous que nous devrions avoir. Mais je vous promets qu'on mettra toutes nos forces pour que vous puissiez faire mieux que nous, parce que vous ferez mieux que nous, j'en suis sûr.
C'est pour ça qu'en étant là, devant vous, aux côtés du Père, de tous ceux qui vous élèvent, Ça nous donne beaucoup de force. Ça nous dit qu'on n'a jamais le droit de nous arrêter parce que vous êtes là et parce que vous, vous avez le droit de vivre dans un monde qui est un peu meilleur que celui qu'on connaît aujourd'hui.
Alors n'oubliez jamais que la bonté et la volonté ensemble, personne ne les arrête. N'oubliez jamais que chacune et chacun d'entre vous est unique. N'oubliez jamais que vous avez de grandes choses à faire, vous toutes et tous, les enfants malgaches, parce que vous êtes cette armée inarrêtable de la fraternité et de la bonté.
Merci pour la leçon immense que vous nous avez donnée aujourd'hui.
Mon père, je voulais vous dire simplement qu'on continuera de vous accompagner, qu'à l'occasion de cette visite d'État, la République française cédera 100 000 euros à Akamasoa pour continuer son œuvre, et que ça n'est qu'une étape, et qu'aujourd'hui, et demain, nous serons là, parce que ce que vous faites est la plus belle chose au monde.
Soyez fiers, et nous, nous sommes extrêmement fiers et heureux d'être là.
Vive Madagascar ! Vive la France, vive l'amitié entre nous, et vive Akamasoa ! Merci, mon père.
Pour conclure la visite, le Président de la République s'est exprimé devant la presse.
Revoir sa déclaration :
24 avril 2025 - Seul le prononcé fait foi
Échange du Président de la République avec la presse depuis Madagascar.
Emmanuel MACRON
C’est dur de parler après là.
Journaliste
Oui, je sais.
Emmanuel MACRON
Je ne vais pas vous mentir, c’est assez émouvant.
Journaliste
Parce que vous étiez très ému pendant…
Emmanuel MACRON
Oui, c’était très émouvant.
Je veux d’abord remercier le président RAJOELINA pour cette visite d’État et ce que nous avons fait avec Madagascar et là remercier le père Pedro. C'était très émouvant d'être avec les enfants ici et la France aide ce magnifique travail, mais avoir en effet plus de 20 000 enfants qui sont ici scolarisés à Akamasoa.
C'est, je crois vous l'avez tous vécu, très bouleversant de lutter contre la pauvreté comme le fait le père Pedro et c'était pour nous un bonheur de finir cette visite d'État par ce moment avec les enfants et avec eux. Cette visite d'État a été aussi l'occasion d’abord de signer beaucoup d’accords, d'échanges sur le plan culturel, sur le plan économique, sur le plan politique avec Madagascar parce que cette relation, elle est profonde, elle est historique, elle est aussi nourrie par le lien humain. Je le rappelais hier, la plus grande communauté malgache à l'étranger est en France. Nous avons ici largement plus des 20 000 ressortissants qui sont enregistrés. Elles sont racines dans notre histoire et on a décidé, cette histoire, justement, de la reprendre ensemble.
J’étais ce matin au Palais du Rova avec les ministres. Vous le savez, depuis 2017, on a engagé un travail de restitution. Il y a tout un travail historique, scientifique et culturel qui est engagé avec Madagascar que nous aurons fait avancer lors de cette visite, à la fois en visitant le Palais du Rova et la couronne qui a été remise avec le dé de la reine, la dernière reine. Avec le retour des crânes Sakalava qui arriveront au mois d'août, et qui sont la traduction des règles d'une loi que nous avons fait passer en 2023, et aussi le fruit d'une coopération scientifique, muséale et culturelle entre les équipes françaises et malgaches, c’est un moment très important. Et puis des artistes, malgaches et nous l’avons décidé, vont faire tout un travail de création sur cette histoire commune pour avancer.
Je voulais aussi vous annoncer que nous avons décidé, avec le président RAJOELINA, ce matin, d'installer une commission mixte franco-malgache d'historiens autour de 1947 et des guerres de décolonisation et des atrocités qui ont été commises à cette époque qui reste encore une plaie très forte dans l'histoire, évidemment, de Madagascar, mais qui est aussi un moment de notre histoire commune qu'il faut rouvrir. Nous allons installer ensemble, de manière commune, ce travail.
Ensuite, ça a été un moment aussi de consolidation de nos liens politiques. Nous avons, en 2019, avec le président RAJOELINA, décidé d'une commission mixte pour les îles Éparses. Et nous avons annoncé qu'elle se réunirait le 30 juin prochain. Je crois que c'est une manière extrêmement pragmatique et positive d'avancer sur ce qui avait été très longtemps des différends entre nos deux pays pour aller purger et pour protéger justement notre espace naturel, ce que nous avons fait depuis 2019, ce que nous allons consolider au moment de l'UNOC et également pour protéger les chemins de pêche aux alentours contre les prédations et la pêche illicite.
Au-delà de ça, on a signé beaucoup d'accords bilatéraux, économiques pour le barrage hydroélectrique, pour les transports, pour la coopération en matière agroalimentaire avec la fourniture de blé, pour la coopération scientifique. Nous avons décidé aussi de faire travailler nos équipes sur une feuille de route commune autour de l'énergie, de l'agriculture, de l'éducation et de la santé.
Enfin, cette visite d'État a été l'occasion, après la séquence que nous avons eue hier, qui était formidable avec les Young Leaders, et puis un moment économique et une rencontre avec la communauté française ici, de tenir le sommet de la Communauté de l'Océan Indien dont nous sommes membres et de pouvoir échanger sur la sécurité alimentaire qui est au cœur des coopérations que nous avons mises pour la COI.
Ça fait 40 ans que cette commission existe et qu'elle noue justement dans cette région du sud-ouest de l'océan Indien les partenariats entre justement la France à travers ses territoires, La Réunion et Mayotte, les Comores, Maurice, les Seychelles et Madagascar. Cet espace est absolument unique, c'est un espace de richesse économique, de biodiversité, culturel qui est extrêmement contesté et dans lequel nos coopérations sont importantes.
Je l'ai rappelé, coopération militaire et sécuritaire avec l'opération Tulipes en ce moment, ce qui est une des justifications de la présence française avec nos forces armées à La Réunion. Nous les augmentons d'un peu plus de 15 %. Dans l'opération Tulipes, on a plus de 500 militaires français qui sont engagés.
Coopération dans la lutte contre les événements climatiques et les réponses d'urgence et puis coopération en matière de sécurité alimentaire. D'ailleurs, nous l'avons vécu au moment des différents cyclones que nous avons pu vivre, où il y a eu une très grande solidarité alimentaire de toute la région. Et j'ai rappelé notre volonté, justement, de nouer des partenariats avec tous les pays de la région et d'avancer sur cet agenda commun de la COI.
Voilà les quelques mots que je voulais dire pour exprimer combien cette visite était importante à mes yeux. Et elle consacre cet agenda, justement, dans l'océan Indien, cet agenda indopacifique que la France porte depuis 2018. Dans cette région de la COI, on a près de 100 millions d'habitants qui sont là. C'est un marché qui est très puissant. C'est aussi une zone de très grande richesse qui est contestée, qui sera de plus en plus contestée. Et donc la présence de la France est importante par ses territoires, par aussi ses diasporas, ses binationaux. C'était pour moi important d'être là.
Journaliste
Monsieur le Président, vous n'avez pas réussi à faire avancer le dossier de Mayotte, de l'inclusion de Mayotte dans la COI. Est-ce que vous êtes reparti déçu ?
Emmanuel MACRON
Non, parce que nous l'avons posé, et je crois que c'était le but de cette visite, c'est-à-dire de sortir des hypocrisies. Nous avons une méthode qui est celle de l'honnêteté, de la bonne volonté et du pragmatisme.
C'est ce que j'ai dit ce matin, nous avons un différend avec l'Union des Comores qui ne reconnaît pas le caractère français de Mayotte, qui est le fruit, vous le savez, d'un choix exprimé par référendum, par le peuple mahorais qui a choisi lui-même d'être Français et de devenir département français. Donc je pense que c'est très important d'abord de restaurer les faits, la vérité historique dans un moment où il y a beaucoup de confusion et où certains utilisent cela pour justifier les impérialismes du moment et les guerres. Ce n'est pas le cas. Mayotte est française par le choix du peuple mahorais, un référendum très fort et un choix auquel tiennent les Mahoraises et les Mahorais que je salue.
Je n'ai pas fait le choix de la provocation. Nous connaissons nos différends. Ce sommet n'a pas été l'expression d'une découverte ou d'un changement de position. Mais au fond, j'ai dit au président Azali, dans une relation qui est respectueuse que nous avons depuis le début, vous parlez de coopération et de fraternité, allons jusqu'au bout. Quand il y a eu Chido, vous avez été dans la coopération avec Mayotte, vous avez livré de l'alimentation, c'est ce que nous voulons. Et au fond, il est juste, normal, que Mayotte fasse partie des territoires qui sont inclus dans la coopération et les programmes de la COI. D'ailleurs, dans la séquence huis clos, c'est ce que le consensus a dégagé.
Donc, nous allons finaliser le travail en bilatéral de manière respectueuse avec le président Azali. Mais mon objectif, il est simple, c'est qu'on puisse avoir Mayotte éligible au programme de la COI et en particulier, les programmes de sécurité alimentaire, grand programme que nous portons, là où la France représente 40 % du financement. C'est ce que j'ai expliqué et déployé dans la séquence à huis clos, ce qui a été, bien compris aussi par les collègues, et qui sont portés par cet esprit, parce que c'est ce que nous faisons avec Madagascar. On ne pousse pas nos différends, on les règle, pour le bien de tous. C'est ce qu'on fait avec Maurice, on les règle, on va faire une commission mixte, et c'est ce qu'on doit faire avec Les Comores.
Journaliste
Monsieur le Président, vous avez dénoncé, il y a quelques instants, dans votre discours, ici : « les armées folles qui veulent s'emparer de petits bouts de terre ». Pourtant, le président ZELENSKY, il y a quelques minutes, a dit que la pression n’est pas assez forte sur la Russie à un moment où les États-Unis s'apprêtent à, visiblement, reconnaître une Crimée russe. Est-ce qu'aujourd'hui, la paix s'éloigne ?
Emmanuel MACRON
D'abord, je ne veux parler pour personne. Vous savez, la position de la France, elle est constante. Elle ne changera pas. Nous sommes pour la souveraineté des peuples et pour l'intégrité territoriale, respectant le droit international. Il n'y a, d'ailleurs, pour la France, pas de double standard. Ça vaut pour l'Ukraine, ça vaut pour le Proche et Moyen-Orient, ça vaut pour le continent africain. Et je m'honore de cette position.
Donc nous continuerons à défendre le droit du peuple ukrainien à vivre en paix sur son territoire et dans ses frontières internationalement reconnues. C'est pourquoi nous avons toujours condamné la guerre d'agression russe.
Nous sommes à un moment où, j'espère, la paix pourra se bâtir, et je veux saluer les efforts faits par la diplomatie américaine. Mais je veux rappeler les faits, là aussi. Il y a un agresseur, la Russie, et un agressé, l'Ukraine. Il y a quelques semaines, sous l'impulsion américaine, le président ZELENSKY a fait un geste incroyable. Il a dit : « Je suis d'accord pour un cessez-le-feu inconditionnel ».
La seule chose que nous avons à faire, la seule chose, je l'ai redit au président Trump que j'ai eu il y a deux jours nuitamment, la seule chose, c'est qu'enfin, le président Poutine arrête de mentir. Quand le président Poutine parle aux négociateurs américains, il leur dit : « je veux la paix. » Quand il parle à la planète entière, il dit : « moi, je veux la paix. » Il continue de bombarder l'Ukraine. Il continue de tuer des vies en Ukraine. Il n'y a qu'une seule réponse qu'on attend. Est-ce que le président Poutine est d'accord pour un cessez-le-feu inconditionnel ? Les Américains l'ont proposé, les Européens le soutiennent, le président ZELENSKY a dit oui. Si le président POUTINE dit oui, les armes se taisent demain, les vies sont sauvées. La communauté internationale n'a qu'une chose à faire, et l'énervement américain ne doit se porter que sur une seule personne, le président POUTINE. Il doit répondre à la question qu'il leur pose. A ce moment-là, nous pourrons construire une paix juste, solide, durable, robuste, c'est-à-dire une paix qui permettra de trouver des concessions territoriales, des garanties de sécurité solides.
Mais au moment où je vous parle, ce n'est pas comme s’il ne s'était rien passé ces dernières semaines. Les Américains ont proposé quelque chose, les Ukrainiens ont dit oui, et nous, nous le soutenons. Il faut maintenant que la Russie donne sa réponse. Si la Russie dit je ne suis pas prêt à cessez-le-feu, elle aura menti au président américain, elle aura menti à tous ceux à qui elle dit qu'elle voulait la paix, et il faudra en tirer les conséquences. S'il dit oui, demain, nous avons à cessez-le-feu.
Moi, je ne veux pas aller dans les faux débats. Il n'y a qu'une seule voix maintenant à entendre et une seule réponse à entendre : est-ce que la Russie dit qu'elle fait le cessez-le-feu ? C'est tout.
Journaliste
Vous allez parler au président TRUMP ?
Emmanuel MACRON
Je lui ai parlé il y a 24 heures, dans la nuit d'avant-hier à hier.
Journaliste
Vous pensez qu’il peut infléchir sur sa position ? Ou il reste sur des positions difficilement conciliables avec celles des Européens ?
Emmanuel MACRON
Il veut trouver des accords, et je le respecte tout à fait. Il veut un accord de paix complet, c'est le négociateur aussi. Mais je remets les choses dans le bon ordre. Il ne peut pas y avoir d'accord de paix s'il n'y a pas déjà un accord sur ce qu'il a obtenu du président ZELENSKY, qui était une avancée très forte du président ZELENSKY.
Je le dis avec ici beaucoup de force, la première, la réponse qui est, si je puis dire, le commencement à tout, c'est le cessez-le-feu inconditionnel que les Russes doivent accepter.
Journaliste
Donc, pas de gel sur la ligne du cessez-le-feu, sur la ligne de front actuel ?
Emmanuel MACRON
Mais toutes les autres questions sont des questions qui relèvent d'une négociation de paix, qui doit ensuite se faire et qui prendront en compte les positions militaires, les questions territoriales, les questions sécuritaires. Mais alors même que la Russie continue de bombarder Kiev, on ne peut pas demander d'accepter ceci ou cela. Imaginez-vous à la place du président ZELENSKY, est-ce que vous pensez qu'il peut faire des gestes d'ouverture quand aujourd'hui sa capitale est bombardée ? Soyons raisonnables.
Journaliste
Monsieur le Président, vous parlez d’intégrité de territoire, mais Madagascar, justement, réclame cette intégrité de territoire concernant les Iles Éparses. Vous avez dit en 2019 que les îles Éparses sont la France. Est-ce que vous envisagez une restitution de ces îles ?
Emmanuel MACRON
Non. Ce que nous avons décidé de faire avec le président RAJOELINA, c'est d'avoir cette commission mixte, ce qui était inédit, et de dire justement, il y a eu des avis internationaux, tout ça a été fait, on sait.
Plutôt que de rester dans la confrontation de point de vue, nous allons nous concerter pour prendre les grandes décisions qui touchent les îles Éparses. Et donc on a mis en place cette commission, elle s'est réunie. Elle va d'ailleurs se réunir, nous en avons pris la décision ensemble, le 30 juin prochain à Paris, et en quelque sorte, on la gère ensemble, en bonne intelligence. Et c'est comme ça, je crois, qu'il faut faire. Et donc ces îles Éparses, elles ne doivent absolument pas être un sujet de différend entre Madagascar et la France.
On a tellement de défis, tellement de défis. Aider un pays qui a 80 % de sa population sous le seuil de pauvreté à réussir, c'est beaucoup plus important que revenir dans ces débats qui sont picrocholins.
Par contre, ce que nous devons faire, c'est réussir à le gérer de manière respectueuse. Et donc, on a classé, on protège, on protège ensemble. La France s'engage pour mettre à disposition aussi sa flotte pour assurer cette protection, mais on décide ensemble de manière respectueuse. On se respecte et on discute. C'est comme ça qu'on va continuer d'avancer. Pour moi, la bonne solution, c'est cette commission mixte. Au fond, c'est exactement l'illustration de nos discours de tout à l'heure, main dans la main, solidarité, ensemble.
Journaliste
Donc, Madagascar n’aura jamais la souveraineté sur ces Iles Éparses ?
Emmanuel MACRON
Mais, est-ce que vous pensez que la priorité aujourd'hui des Malagasys, c'est d'avoir la souveraineté ?
Journaliste
C’est ce que Madagascar demande.
Emmanuel MACRON
Madagascar, certains le demandent, d'autres non, il y a des désaccords. Par contre, je crois que ce que demande Madagascar, c'est d'avoir un partenaire qui les respecte. Ce que fait la France avec cette commission mixte, c'est d'avoir un partenaire qui l'aide à réussir ses vrais défis, qui sont plutôt celui de la sécurité alimentaire, de la réussite économique, de la sortie de la pauvreté, de la réussite éducative, et c'est ce qu'on fait.
Journaliste
Il y a des résolutions des Nations unies qui demandent à la France de restituer ces îles.
Emmanuel MACRON
Il y a des résolutions qui disent les deux choses, comme vous le savez si vous êtes honnête et transparente. Parce qu'on a décidé justement d'avancer, nous avons considéré ensemble, nous deux, présidents souverainement élus par chacun de nos peuples, d'avancer sur cette commission mixte. Je pense que c'est la meilleure solution.
Journaliste
Allez-vous retirer la Légion d’honneur à Nicolas SARKOZY s’il vous plaît ?
Emmanuel MACRON
Non. Je vais vous dire. Il y a des décisions de justice. Le Président de la République que je suis n'a pas à les commenter parce que je suis à la fois le garant de nos institutions et aussi d'une autorité judiciaire qui doit pouvoir agir de manière sereine.
Moi, je pense que c'est très important que les présidents, évidemment, et les anciens présidents soient respectés. Et donc, le Président de la République que je suis en tant que grand maître ne prendra aucune décision de ce type. Après, il y a un code, le grand chancelier est en train de regarder cela et de regarder ses marges de manœuvre. Mais moi, je pense qu'au moment même où le président SARKOZY a des procès qui sont en cours, où, certes, il a épuisé les voies de recours en France qui ont conduit à une condamnation, mais a un recours devant les autorités européennes, et compte tenu du fait qu'il a été élu président par le peuple souverain il y a maintenant un peu plus de 10 ans, je pense qu'il mérite le respect.
Il a mon respect, je crois qu'il a le respect du peuple français. De mon point de vue, de là où je suis, je pense que ça ne serait pas une bonne décision. Vous parlez des règles, je dis les règles, et maintenant, vous me demandez mon avis. Si la marge de manœuvre m'est donnée, je préférerais qu'un ancien président puisse rester là où il est dans l'ordre qui est le sien, parce que c'est quelque chose d'avoir été Président de la France. Ce n'est pas d’une décision de justice dont je vous parle. C'est une question de respect, et parce que je pense qu'il mérite ce respect. Et ensuite, il y a la justice qui passe son chemin, et il y a en effet les textes. Et ça, ça ne dépend pas de moi.
Journaliste
Monsieur le Président, en quelques mots, vous avez été réélu il y a trois ans, jour pour jour, en 2022.
Emmanuel MACRON
Imaginez-vous.
Journaliste
Hier, on a écouté votre discours, notamment devant les jeunes du Forum économique à Madagascar. Vous disiez, “ça fait 8 ans que j'occupe ces fonctions, il y a encore une montagne de choses à faire”.
Emmanuel MACRON
Oui.
Journaliste
En quelques mots, la montagne de choses à faire, qu'est-ce que c'est ? Est-ce que ça passe par une nouvelle dissolution ? Et est-ce que vous avez réfléchi plus sur ces référendums ?
Emmanuel MACRON
Non, alors d'abord, je ne ferai pas ici des commentaires. J'ai vu qu'un de vos confrères avait écrit n'importe quoi. Ce n'est pas sérieux de la part de Bloomberg d'avoir écrit ça en répétant ce que des gens qui, je ne sais pas où vous avez cette information, ont dit. Je n'ai jamais dit une telle chose ni envisagé une telle chose.
Ensuite, notre pays a d'immenses défis. Pas que notre pays, le continent européen, et regardez ici, le monde entier. Pourquoi ? Parce que notre monde, d'ailleurs depuis au fond, le covid, traverse des crises répétitives. Nous avions déjà le défi climatique et le défi de la lutte contre les inégalités. C'est ajouté à ça une pandémie qui a déstabilisé beaucoup de choses et une géopolitique qui s'est totalement déréglée depuis 5 ans, on le voit bien, des guerres qui sont revenues sur le sol européen, une brutalité internationale, maintenant une guerre commerciale qui se rajoute. Et donc, de là où je suis, mon obsession pour les années qui viennent, ce sera de rendre la France plus forte, plus libre, plus indépendante au sein d'une Europe aussi plus forte, pour essayer justement de nous protéger de ces aléas internationaux, et donc de dire, regardons les choses, nous devons consolider notre modèle social, mais on doit pour ça réussir à être encore meilleur en recherche, en innovation, produire davantage, continuer à investir dans notre armée, dans la protection de nos frontières, parce que ce monde se dérègle, et donc, pour nos compatriotes et nos enfants, il faut nous protéger.
Et donc, je crois qu'il nous faut continuer à mener des grands chantiers qui sont très ambitieux et qui doivent embarquer tout le monde pour ne pas dépendre des autres. Et ça, je crois que c'est encore plus important qu'avant. Et peut-être que pendant des décennies, on a pu vivre dans une France, je dirais, où on croyait que tout était ouvert, qu'il y avait un doux commerce, qu'il n'y avait plus la guerre, et donc, voilà, les choses allaient bien se passer toutes seules. Ça n'est plus vrai. Et donc, il faut un moment de sursaut qui exige, de la part de tous, avec beaucoup d'unité et avec un consensus qui doit progressivement se forger, parce qu'on sait les différences, on sait la fragmentation qu'il y a dans notre vie politique.
Elle est là. Elle correspond aux divisions, aux doutes qu'il y a dans la société. Il faut les regarder en face. Et moi, je vais essayer de créer le maximum de consensus, d'unité pour agir.
Journaliste
C'est ça le référendum auquel vous faites allusion ?
Emmanuel MACRON
Je l'ai dit, ils viendront en temps voulu. Je ne vais pas ici annoncer un référendum. Mais les référendums peuvent être un instrument, l'action du Gouvernement doit l'être. Mais la prise de conscience aussi collective, le gouvernement fait sa part du travail et on doit continuer de le faire. C'est que notre pays a des grandes transformations à conduire et au-delà de ça, notre Europe a des grandes transformations à conduire si on veut moins dépendre des autres, et si on veut, pour nous-mêmes et pour céder à nos enfants, une France plus forte. Donc, on a un travail immense.
Journaliste
Ceux qui disent qu'en deux ans, on ne peut rien faire, où il n'y a pas de capacité à bouger...
Emmanuel MACRON
Je leur dis, ne perdez pas une semaine. Mais moi, je suis fasciné. Il y a toujours des gens qui vous disent, vous allez voir ce que vous allez voir. Quand je vais arriver, alors là, ça va chauffer. Mais venez. Mais vraiment, on n'a pas le droit d'attendre. Pas de cynisme, pas de faux-semblants. C'est maintenant qu'il faut agir. Et donc, ne perdons pas une minute. On n'a pas le droit de perdre une minute. Regardez tous les défis qui sont devant nous, ici, sur nos sols français, partout. Donc, on agit.
Moi, j'ai essayé depuis maintenant 8 ans, sans relâche, d'agir, et je continuerai d'agir. Et c'est ce qu'on doit. Vous savez, j'ai essayé de faire des choses bien, j'ai sans doute commis des erreurs, j'ai fait des choses qui, parfois, n'étaient pas comprises. C'est sans doute le cas de la dissolution. Je pensais qu'elle était nécessaire parce que je voyais les gens se diviser, la colère monter. Ça n’a pas été compris, mais j'espère réussir à la réunifier autour de cela et de ces voix plurielles qui, quand même, sont là et doivent travailler ensemble. Mais il y a une chose que je n'ai jamais faite. Je n'ai jamais fait semblant. Je n'ai jamais été cynique et je n'ai jamais calculé. Et je me suis toujours battu pour que, pour avoir le constat le plus lucide possible et avoir toujours de l'audace et dire à nos compatriotes, on y va. Et même quand des choses étaient parfois difficiles à faire. Et donc je nous dis à tous, on y va. Notre pays est un trésor.
Franchement, quand je vois le monde, la France est un pays d'une richesse, d'une force, avec une jeunesse, une capacité innovée. C'est fou. Je veux dire, il suffit de voyager pour voir combien on nous admire, on nous envie. Mais on doit bouger des choses. On doit bouger des choses. Parce que quand on regarde nos grands équilibres, si on reste comme on est aujourd'hui, ça nourrit d'ailleurs l'inquiétude que nos compatriotes sentent bien. Ils se disent, nos enfants vont moins bien vivre que nous. Il n'y a pas de fatalité si on a le sursaut. La vraie solidarité, c'est ça, c'est le vrai sens du collectif, c'est de dire : on est tous dans la même galère. Ce n'est pas une vraie galère, en fait, on est dans une situation qui a ses défis. Si on est lucide ensemble, qu'on accepte de voir les vrais problèmes et qu'on décide d'agir dans la même direction, on peut y arriver. Et donc, il y a quelques grandes transformations qu'on doit mener.
Journaliste
Quand Donald Trump dit que l'Ukraine a perdu la Crimée depuis des années, est-ce qu'il se trompe ? Est-ce qu'il fait le jeu de la Russie ?
Emmanuel MACRON
Non, il décrit une situation de faits. Mais est-ce que c'est notre rôle de décrire une situation de faits ? Il y a une armée qui a conquis depuis 2014, de manière totalement illégale, par la violence, et en tuant un territoire. C’est décrire une situation de faits, ce qu'il dit. Est-ce que pour autant, il faut en donner quitus ? Non, en tout cas, pas maintenant. Et ce n'est pas à nous de le faire, j'ai toujours dit, c'est à l'Ukraine et à ses représentants de dire cela. Donc, nous, notre rôle collectif, c'est ce qu'a engagé le président Trump, c'est de dire cessez-le-feu.
C'est pour ça que je vous dis : la seule chose, maintenant, c'est de se tourner vers les Russes : alors ce cessez-le-feu. Voilà.
Journaliste
Monsieur le Président, une dernière question pour Madagascar. Le cas de Paul Maillot a-t-il été évoqué avec votre homologue, RAJOELINA, ce franco-malgache ?
Emmanuel MACRON
Bien sûr qu'il a été évoqué. Et je veux ici dire à sa famille que nous faisons toutes les démarches dans le cadre qui convient, c'est-à-dire, si vous m'autorisez à le dire ainsi, en en parlant le moins possible directement à vous et en essayant de respecter, évidemment, la souveraineté malagasy le plus possible, mais en ayant plaidé pour aussi notre compatriote, certes, binational et pour sa famille. Voilà. Et donc j'espère qu'on trouvera les voies et moyens pour que les choses puissent s'améliorer.
Journaliste
Monsieur le Président, espérez-vous un pape français ?
Emmanuel MACRON
Alors, vous savez, je viens de parler de tous les projets que j'avais pour notre pays, et je me battrai jusqu'à la dernière seconde avec la même force, la même vigueur, oserai-je dire, en Président de la République laïque, la même foi, c'est-à-dire la confiance dans ce que nous sommes. Mais je ne m'en mêle pas des sujets du Vatican et des élections à venir. Je verrai nos cardinaux par attachement, fidélité, affection et par plaisir d'échanger. Mais je pense que ce n'est pas du tout le rôle d'un président de la République française de s'en mêler. Et je pense que c'est très bien ainsi. Le conclave a ses règles et elles iront jusqu'au bout. Et je le dis avec un infini respect pour cette grande institution.
En tout cas, j'ai une pensée pour le pape François en étant ici, je vois son visage. Je sais qu'il avait vécu des moments de grande joie. Et en vous quittant, je veux avoir un mot pour le moment de très grande humanité qu'on a partagé grâce au père Pedro et à tous ceux qui, ici, élèvent les enfants et la grande confiance dans cette jeunesse, la jeunesse malagasy, mais la jeunesse française aussi et tous nos jeunes.
Journaliste
Vous avez restitué l'ornement du dais royal, mais il n'y a pas de législation qui acte le transfert définitif de propriété d'État à État. Donc est-ce que c'est une vraie restitution ?
Emmanuel MACRON
Oui, c'est une vraie restitution. Et tout ça sera complété comme on a fait la loi cadre 2023. Donc, je vous le confirme, c'est une vraie restitution. Et tout cela sera finalisé et par le comité scientifique et par tous les textes qui s'imposent. Je vous le confirme.
Journaliste
Non, mais vous avez remis l'ornement du dais royal en 2020. On est en 2025, il n'y a toujours pas de législation.
Emmanuel MACRON
C'est normal parce qu'il n'y avait pas de loi cadre possible pour cela. Donc après, c'est du cas par cas. Et donc tous les textes seront pris, qui le permettent, je vous rassure. Merci beaucoup.