Le Président Emmanuel Macron s'est rendu en République arabe d’Égypte pour sa quatrième visite, à l’invitation d'Abdel Fattah al-Sissi, Président de la République arabe d’Égypte, du 6 au 8 avril 2025.
Moins de deux ans après le dernier déplacement du chef de l’État en Égypte, en octobre 2023, cette visite était l’occasion d’élever notre relation au rang de partenariat stratégique et d’approfondir les coopérations entre la France et l’Égypte notamment dans de nombreux domaines.
Lors de cette visite, le Président de la République a rappelé le plein soutien de la France à l’Égypte et au peuple égyptien dans ce moment de graves crises régionales.
Revoir la déclaration conjointe :
7 avril 2025 - Seul le prononcé fait foi
Déclaration du Président de la République en Égypte.
Mesdames, messieurs les ministres,
Messieurs les ambassadeurs,
Mesdames, messieurs,
Permettez-moi avant toute chose de remercier chaleureusement le président Sissi pour son accueil et son hospitalité dès hier soir dans un quartier, qui vous est cher, monsieur le président, et merci de la délicatesse et la générosité de ce geste et aujourd'hui avec nos délégations.
Je suis très heureux d'être à vos côtés en Égypte, dans ce grand pays qui est un partenaire historique et stratégique pour la France. Je souhaite, à travers cette visite dans votre pays, honorer les liens d'amitié qui unissent l'Égypte et la France et réaffirmer notre volonté de faire encore davantage et de vous accompagner dans le chemin de stabilité et de prospérité que vous avez choisi pour l'Égypte, mais aussi dans votre agenda régional.
L'Égypte est, je le redis, un partenaire stratégique de notre pays, et je me félicite que ce lien étroit se soit matérialisé aujourd'hui par la signature d'un accord de partenariat stratégique que nous venons de signer. Je continuerai pour ma part à m'employer personnellement, à porter ce partenariat et à le renforcer à vos côtés.
Je souhaite aussi ici réaffirmer l'attachement de la France à la stabilité de l'Égypte, en particulier dans un contexte régional dégradé, et alors que l'économie égyptienne est mise à l'épreuve. À cet égard, Monsieur le président, la France continuera de soutenir le dialogue de l'Égypte avec le Fonds Monétaire International, la Commission européenne, pour la mise en œuvre de l'assistance macro-financière, ainsi, aussi que la facilitation d'une mise en place de toutes les réformes qui sont nécessaires.
Nos longs échanges ce matin avec le président ont permis d'évoquer les très nombreux domaines de coopération bilatérale denses et historiques et les multiples crises qui secouent l'environnement régional et nous préoccupent.
S'agissant d'abord de la coopération bilatérale, vous en avez rendu compte un instant, Monsieur le président, elle est nourrie par une volonté constante de contribuer au développement et à la prospérité de l'Égypte et du peuple égyptien. À cet égard, la France se tient aux côtés de l'Égypte pour soutenir son agenda de 2030 et le développement à travers les investissements de ces entreprises et son aide bilatérale européenne et multilatérale.
Ce matin, nous avons réitéré notre engagement à poursuivre une coopération financière bilatérale riche pour la réalisation de projets prioritaires pour l'Égypte, qui contribuent à sa stabilité et à son développement. À ce titre, je salue le rôle de l'Agence française de développement, premier partenaire financier bilatéral de l'Égypte, avec 4 milliards d'euros d'engagement dans le pays depuis 2006. À l'occasion de cette visite, l'AFD signera plus de 260 millions d'euros de prêts et dons associés aux bénéfices de la population égyptienne dans des secteurs aussi variés que le transport, l'énergie, l'eau, l'assainissement. Nous aurons tout à l'heure un forum d'affaires franco-égyptien que nous conclurons et qui témoigne aussi des liens économiques étroits qui existent entre nos deux pays. À titre d'exemple, la France est le premier investisseur européen hors hydrocarbures en Égypte, avec un stock de 7 milliards d'euros d'investissement et plus de 50 000 emplois créés par nos entreprises.
Nos domaines de coopération, je le disais, sont nombreux, mais je souhaite ici en mentionner quelques-uns, prioritaires. Il y a bien sûr les transports urbains, vecteurs de croissance, en particulier dans une ville comme Le Caire. Nous emprunterons cet après-midi la ligne 3 du métro du Caire. Nous sommes engagés aux côtés de l'Égypte en matière de construction de métro depuis 1984. Et cet engagement se poursuit à travers, d'une part, la modernisation du matériel roulant de la ligne 1, dont le financement a mobilisé un montant exceptionnel de 777 millions d'euros en prêts concessionnels, et d'autre part, le projet de construction de la ligne 6, qui constitue une priorité pour l'Égypte et pour la France. Nos entreprises sont mobilisées et elles seront à nos côtés cet après-midi.
Il y a également la coopération en matière de santé, qui s'inscrit dans le cadre des efforts qui sont les nôtres, et de la signature du partenariat en matière de lutte contre le cancer avec l'IGR, à des signatures industrielles avec Sanofi et d'autres groupes français. Ceci marque un renforcement de notre partenariat bilatéral, mais également des efforts humanitaires et sanitaires que nos deux pays font en faveur de la population civile de Gaza, qui vient d'être renforcée avec la signature d'un nouveau protocole. Il y a de nombreux domaines que je pourrais ici convoquer, l'agroalimentaire, l'énergie, les services, tout ce que nous signerons cet après-midi aussi avec Capgemini, une mobilisation exceptionnelle pour l'embauche des jeunes talents et des ingénieurs égyptiens.
Évidemment, le domaine de la défense est au cœur de la relation bilatérale de confiance. Vous avez été le premier, à l'export, à faire confiance aux Rafale français. Beaucoup vous ont suivis ensuite. Et en effet, de l'aérien au maritime, dans toutes les catégories, nous avons un partenariat très étroit que nous allons encore renforcer à l'occasion de cette visite avec l'Egypte, au jour même où les deux Rafale du deuxième lot arrivent sur votre sol et au moment où nous nous exprimons, ils sont dans les airs. Il y a également notre coopération éducative et universitaire.
La tenue des assises franco-égyptiennes de l'enseignement supérieur et de la recherche aujourd'hui, à laquelle j'assisterai, constitue une étape importante dans le rapprochement des établissements de nos deux pays. La refondation de l'Université française d'Égypte et la construction en cours de son nouveau campus participent directement à ces efforts. Et nous sommes engagés à promouvoir le développement des écoles francophones en Égypte avec un objectif de 100 écoles fixées et améliorer l'enseignement du français comme deuxième langue. Nous en avons longuement parlé.
Et puis, il y a la coopération en matière culturel, évidemment, notre coopération archéologique qui est au cœur de cette relation. J'aurai l'occasion, ce soir, de rencontrer beaucoup d'artistes qui tressent la relation entre nos deux pays, mais de nos musées, nos ballets, nos orchestres et nos artistes, nous souhaitons en effet faire, là aussi, davantage pour renforcer le lien entre l'Egypte et la France.
Au-delà de cette relation bilatérale, c'est évidemment notre vision commune de la situation dans la région qui nous unit. Et je me souviens, comme d'hier, de l'automne 2023, où j'étais à vos côtés quelques semaines après l'attaque terroriste lancée par le Hamas contre Israël, et alors que la situation tragique humanitaire à Gaza avait déjà commencé, et nous nous exprimions d'une même voix, cher président. Et merci de nous accueillir demain à El-Arich, et je suis très heureux d'être à vos côtés dans cet avant-poste du soutien humanitaire aux populations civiles gazaouies. L'Égypte et la France partagent une convergence de vues qui rend notre travail en commun essentiel.
Nous condamnons la reprise des frappes israéliennes à Gaza, qui constitue un recul dramatique pour la population civile, les otages, leurs familles et l'ensemble de la région. Nous appelons à un retour immédiat au cessez-le-feu, à la libération de tous les otages encore détenus par le Hamas à Gaza. Les négociations doivent reprendre sans délai et de manière constructive, et à cet égard, je veux saluer les efforts inlassables déployés par l'Égypte en faveur justement du cessez-le-feu et de la libération des otages.
La France rejoint aussi l'Égypte sur un point majeur, et je veux le redire ici avec force : nous nous opposons fermement aux déplacements de population et à toute annexion de Gaza comme de la Cisjordanie. Il s'agirait d'une violation du droit international, d'une menace grave pour la sécurité de toute la région, y compris celle d'Israël. Je réitère également mon plein soutien au plan de reconstruction pour Gaza endossé par la Ligue arabe le 4 mars dernier, et je salue ici le travail crucial de l'Égypte sur ce plan, qui offre une voie réaliste à la reconstruction de Gaza et qui doit aussi ouvrir la voie à une nouvelle gouvernance palestinienne dans l'enclave dirigée par l'Autorité palestinienne. Le Hamas ne doit avoir aucune part à cette gouvernance, ne doit plus constituer une menace pour Israël. Nous en avons parlé encore ce matin et hier soir avec le président, et nous aurons l'occasion dans un instant d'être rejoints par le roi de Jordanie pour évoquer plus longuement ce sujet essentiel pour toute la région et au-delà. Mais nous avons la conviction profonde que c'est en effet seule la réponse politique qui permettra d'assurer la stabilité et la sécurité à Gaza et dans toute la région. Et c'est en ce sens que nous allons œuvrer, c'est-à-dire dans la perspective de la conférence internationale pour les deux États, que la France coprésidera dans quelques mois avec l'Arabie saoudite, et que nous souhaitons travailler en détail avec vous.
Au-delà, la France partage avec l'Égypte un agenda plus général de stabilité régionale. Nos deux pays sont préoccupés des risques d'escalade en mer Rouge, où la liberté de navigation doit être préservée. Et le passage de notre groupe aéronaval dans le canal de Suez illustre la mobilisation de la France à cet égard. Nos deux pays souhaitent également une solution diplomatique à la crise nucléaire iranienne, nous l'avons évoqué avec le président hier, qui risque sinon d'aggraver sérieusement l'insécurité dans toute la région. La France y travaille avec ses partenaires pour limiter drastiquement le programme nucléaire iranien, mais aussi traiter la question des missiles et de l’interférence régionale.
Le Président a évoqué la Syrie. Je sais que vous avez eu l’occasion d’échanger avec le président de transition. J'ai eu à deux reprises ce dernier, et longuement ces dernières semaines. La France soutient la transition vers une Syrie unie, stable, souveraine et inclusive, dans le respect de toutes les composantes de la société syrienne, en refusant tout entrisme étranger, toute déstabilisation, mais avec une Syrie pleinement engagée dans la lutte contre le terrorisme et dans la stabilisation de la région. C'est en particulier une nécessité pour le Liban. Vous avez eu des mots forts à l'instant en soutien du président Aoun et du Premier ministre Nawaf Salam. Je les partage. Nous sommes attachés à la souveraineté du Liban et à sa stabilité. Là aussi, le cessez-le-feu doit être respecté et, le Liban pleinement recouvrer sa souveraineté pour que les forces armées libanaises, aidées par le mécanisme de suivi et par les Nations unies et de la Finul, puissent assurer la sécurité sur son sol et la lutte contre tous les mouvements terroristes.
Nous avons évoqué également le Soudan et l'Éthiopie avec le Président. Au Soudan, à quelques jours du deuxième anniversaire du déclenchement de ce terrible conflit, nous n'oublions pas les souffrances du peuple soudanais, ce grand peuple ami de la France et frère de l'Égypte qui subit aujourd'hui l'une des pires crises humanitaires au monde. L'un comme l'autre, nous agissons pour y répondre. Nous n'abandonnerons pas le Soudan et nous continuerons à agir ensemble en faveur d'un règlement négocié et du retour de la paix, fidèle en cela aux engagements pris lors de la conférence de Paris il y a bientôt un an. Et quant à l'Éthiopie, pays ami de la France également, nous ferons tout notre possible, je l'ai dit au président, pour que les questions les plus sensibles et les plus vitales, quand on parle de l'eau et de ce fleuve central pour la région et pour l'Égypte, pour que les accords qui s'imposent soient trouvés et que le voisinage, que le partage de ce fleuve puisse être harmonieux.
Enfin, j'aimerais ajouter un dernier mot sur l'Ukraine. Nous soutenons l'objectif de mettre fin à la guerre, objectif poursuivi par le Président Trump, et nous souhaitons une paix solide et durable qui garantisse, vous le savez, la sécurité de l'Ukraine et celle de tous les Européens. Cette paix sera bénéfique pour tous, car nous mesurons, et ici pleinement, les conséquences de la déstabilisation, et en particulier en termes agroalimentaires, que l'agression russe en Ukraine a pu faire vivre à de nombreux peuples, l'Égypte et beaucoup d'autres dans le continent africain. C'est pourquoi il est désormais urgent que la Russie cesse les faux-semblants, et les tactiques dilatoires et accepte le cessez-le-feu sans condition, qui a été la proposition du président Trump, proposition agréée par le président Zelensky à Djeddah le 11 mars dernier. Cela fait presque un mois que non seulement la Russie y impose une fin de non-recevoir, mais qu'elle accroît les bombardements contre les civils avec encore des pertes tragiques il y a quelques jours en Ukraine, et je veux redire ici au peuple ukrainien notre amitié. Et je veux ici saluer la constance de vos prises de position internationales, de vos votes aux Nations unies et la clarté et la fermeté avec laquelle vous tenez cette voix. Et je le dis ici alors qu'il y a pu avoir parfois beaucoup de commentaires, nous avons en commun avec le président Sissi qu'il s'agisse de Gaza ou qu'il s'agisse de l'Ukraine eu une même voix, celle de la paix. Et il y a une chose qui unit l'Égypte et la France, il n'y a pas de double standard. Et la position que vous tenez sur l'Ukraine est très forte. Et vous savez la position que nous tenons sur Gaza. Quand on défend la paix, on la défend partout. Quand on défend la souveraineté, on la défend partout. C'est la position qui unit l'Égypte et la France.
Merci infiniment, monsieur le président, de votre accueil. Et au fond, l'histoire nous dépasse, qui a lié nos deux grands peuples. Elle est au quotidien nourrie par les coopérations que nous avons signées ce jour. Et je crois aussi pouvoir dire qu'elle est nourrie par l'amitié qui nous lie. Alors à nous de continuer à faire de grandes choses. Merci, président.
La situation à Gaza a été largement discutée notamment à l’occasion d'un sommet trilatéral avec le Président Sissi et le Roi Abdallah II de Jordanie, l’Égypte et la Jordanie étant des partenaires indispensables au règlement du conflit.
Le Président Macron et le Président Sissi se sont ensuite rendus à la clôture du forum d’affaires franco-égyptien.
Revoir le forum :
7 avril 2025 - Seul le prononcé fait foi
Discours du Président de la République en clôture du Forum d’affaires franco-égyptien.
Merci beaucoup monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs les ministres,
Messieurs les ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs les chefs d'entreprise et responsables du secteur privé et merci pour vos témoignages tout particulièrement.
Président, merci d'abord infiniment pour votre accueil depuis hier soir qui me touche beaucoup, vous l'avez rappelé Madame, et je veux remercier à la fois vos ministères, mais également Business France, MEDEF International, CCI France Égypte et nos conseillers du commerce extérieur de la France avec notre ambassade pour l'organisation de cet événement et de ce forum.
La France, président, vous savez, aime l'Égypte et a confiance dans l'Égypte, ce qui fait de nous le premier investisseur hors hydrocarbure d'Europe sur le sol égyptien avec un peu plus de 7 milliards d'euros d'investissement privé et 50 000 emplois directs créés par nos entreprises à travers leurs projets.
À ça s'ajoute l'engagement de l'Agence française développement, je le rappelais ce matin, dans notre conférence de presse qui d'ailleurs accompagne plusieurs projets ici mentionnés et qui sont déployés et qui dans les secteurs de l'eau, de l'assainissement, de l'énergie, de la santé, de l'éducation est aux côtés de l'Égypte.
Nous sommes des partenaires de confiance et nous avons su en effet vous accompagner aussi sur les grandes infrastructures durables, ce qui sont une force de l'offre française, qu’il s'agisse des transports, des systèmes de connexion, de la gestion de la complexité des villes ou bien des sujets de défense comme nous l'avons ensemble bâti ces dernières années. Et au fond parce que nous avons la conviction, plusieurs d'entre vous l'ont rappelé dans vos propos et vous venez d’y faire référence, président, d'abord, que nous pouvons construire de la prospérité ensemble.
Pour nous, investir en Égypte, c'est investir dans un pays qui a de la stabilité et je veux saluer depuis 10 ans votre leadership qui a un potentiel de croissance extraordinaire ; c'est aussi dire qu'on a confiance dans l'écosystème égyptien et investir pour créer de l'emploi, pas simplement avoir des marchés.
La deuxième chose, c'est que nous avons la conviction l'un et l'autre qu'au fond dans un monde de plus en plus incertain, il faut bâtir un chemin d'indépendance, et pas de l'autarcie, mais qui est une forme, je ferai référence en clin d'œil à une histoire géopolitique qui dit quelque chose de particulier dans votre pays, mais une forme de non-alignement géopolitique. On n'a pas tout à fait envie de dépendre des deux premières grandes puissances mondiales. Et je crois qu'on a raison.
Et puis la troisième chose, vous l'avez dit, ce sont des points d'entrée dans nos régions réciproques. La France doit être vue comme un point d'entrée dans l'Europe et l'Égypte est vue comme un point d'entrée dans l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient et d'ailleurs en septembre dernier à Marseille, il s'est tenu un sommet important et je vais ici dire que je sais qu'au mois de mai se tient ici même un sommet important à l'Afrique du Nord et à l'Orient avec plus de 400 responsables et j'appelle nos ministres et nos entrepreneurs à poursuivre cet effort.
Au fond, les trois secteurs que vous avez mis en lumière disent beaucoup de cette volonté d'indépendance, de non-alignement et de prospérité choisie.
La santé à travers le témoignage qui a été donné, l'engagement de Sanofi l'a montré, l'accord qui a été signé ce matin avec l'Institut Gustave Roussy, c'est la démonstration du fait que nous avons, si je puis dire, retenu la leçon. Nous avons vécu les conséquences du Covid, c'est-à-dire de l'expérience cruellement ressentie de la dépendance en matière de santé. Nous n'avons de cesse depuis lors de dire que pour à la fois détecter, diagnostiquer, soigner, mais aussi nous équiper et innover, nous voulons moins dépendre des autres.
Il y a une confiance qui s'est faite entre les deux rives, je crois pouvoir le dire. J'avais eu l'honneur d'être invité par le bureau de l'Union africaine au tout début de l'épidémie et nous avons développé avec ACT-A et avec plusieurs autres initiatives un partenariat qui après n’a plus jamais cessé. En matière de santé, nous voulons faire davantage entre l'Égypte et la France parce que c'est un levier prospérité, une vie meilleure, je sais vos projets sur meilleure couverture également en termes de santé qui sont très importants et que nous accompagnons, mais c'est pour nous un levier formidable de développement. J'ajouterai qu'en termes de santé, nous avons la conviction que la poursuite de nos partenariats sur l'agroalimentaire sont un levier de santé et nous en avons déjà beaucoup que nous sommes en train de consolider, nous voulons là aussi aller plus loin.
La deuxième chose, c'est l'énergie. Ça a été très bien démontré par vos témoignages, je salue votre volonté d'accroître la part de renouvelable dans votre mix électrique qui est à la fois une manière de décarboner votre énergie, mais en dépassant les 40 % à l'horizon 2030, aussi de gagner en souveraineté énergétique et de moins dépendre d'une énergie qui est plus polluante, mais pas produite localement. La France a ici toutes les compétences du renouvelable au nucléaire en passant par aussi l'économie d'énergie à apporter et ce qui a été montré par Voltalia, ce que nous portons aussi avec Schneider Electric, avec EDF, c'est une offre française qui veut ici créer davantage d'emplois, apporter des solutions, se développer à vos côtés et je veux saluer ce qui a été là aussi très bien montré. Là aussi l'expérience des conséquences de la guerre d'agression russe en Ukraine a été la démonstration de nos dépendances énergétiques et donc je crois que nous devons en tirer toutes les leçons en développant des offres beaucoup plus résilientes et ce que nous sommes en train de déployer par ce partenariat sur le renouvelable va en ce sens.
Enfin, il y a la bataille pour l'intelligence artificielle, ça a été démontré, je crois que les annonces de Capgemini, qui double ses effectifs, sont là pour témoigner de la confiance dans l'Égypte, son savoir-faire, la qualité de sa formation. Mais ce que vous avez l'un et l'autre ici montré, c'est notre conviction qu'il y a dans l'intelligence artificielle beaucoup de ce qui est déjà la révolution technologique en cours qui va nous permettre de gagner en productivité, qui va nous permettre de complètement transformer et repenser les chaînes de production, qui touchera d'ailleurs tous les secteurs précédemment évoqués, de l'énergie, à la pharmacie, la santé et autres.
Nous voulons en être, mais nous voulons en être avec des solutions que nous maîtrisons, c'est-à-dire des femmes et des hommes qu'on forme, qu'on recrute, qu'on garde et avec une capacité à déployer à la fois des chaînes de valeur qui se créent chez nous, mais aussi des solutions qui ne sont pas dépendantes des jeux géopolitiques. Je veux vous dire que vous avez dans la France, je pense pouvoir le dire, la première puissance européenne d'intelligence artificielle, on a annoncé il y a quelques semaines 109 milliards d'euros d'investissements privés en France parce qu'il y a des talents, parce qu'il y a un savoir-faire, parce qu'il y a de l'énergie peu chère et pilotable et en partenariat avec nos grands partenaires du golfe, particulièrement les Émirats arabes unis, on a là la possibilité de développer un axe Europe, Afrique du Nord, Moyen-Orient qui en matière aussi d'intelligence artificielle nous donne beaucoup plus de résilience, d'indépendance et une capacité à créer des emplois. Au fond, c'est ça, pour moi, le fil directeur de ce que nous sommes en train de faire.
Nous nous connaissons bien, nous avons des partenariats forts et des infrastructures au secteur de la défense, nous avons su les développer, les déployer avec confiance. L'Égypte est une grande puissance géopolitique, militaire, mais aussi démographique. Elle a donc une capacité de croissance derrière qui est pour nous, Français, un levier de confiance exceptionnelle. C'est pourquoi, au-delà de ces secteurs, nous allons continuer d'être à vos côtés dans les réformes que vous êtes en train de conduire et qui sont très importantes ; le ministre en a fait rapport un peu plus tôt dans notre échange, mais les réformes de stabilité du monde des affaires, en termes de fiscalité, en termes d'investissement sont très importantes et nous les soutenons. Mais nous voulons les soutenir par un investissement dans la durée, dans des secteurs clés pour notre prospérité partagée et notre indépendance géopolitique, et créer de l'emploi ici.
Je finirai par un dernier mot. Ça veut dire que nos entreprises vont continuer aussi de recruter des talents égyptiens. Je voulais vous remercier pour vos mots sur la langue française et l'enseignement dans la langue française. J'ai dit ce matin au président que, quelles que soient les réformes, nous voulions que l'Égypte continue d'être ce grand pays francophone qui forme le plus de locuteurs en langue française de toute la région.
Nous serons aussi à ses côtés pour les réformes qui conduit dans l'enseignement primaire, secondaire, dans les partenariats universitaires. Et nous voulons continuer ici d'aider à former des jeunes femmes et des jeunes hommes qui évoluent entre la langue arabe et la langue française pour le bien de l'Égypte, pour le bien de la France et pour notre prospérité partagée. C'est aussi ça l'investissement dans la durée, c'est un investissement dans le capital humain.
En tout cas, merci infiniment pour vos témoignages et vous comprenez là qu'à travers la prise de parole du président Sissi et la mienne, c'est une grande confiance qu'il y a de nous deux en vous tous et notre volonté d'aller encore plus loin dans le partenariat très profond et dans la durée entre l'Égypte et la France.
Merci beaucoup.
Le Chef de l'État a également visité le métro de la ville du Caire dont les trains ont été fabriqués par l'entreprise Alstom en France.
Le Président Emmanuel Macron a ensuite participé au lancement du nouveau campus de l’Université française d’Égypte en présence d’étudiants à l'Université du Caire.
Il a également tenu un discours devant les étudiants pour clôturer la première journée des assises de l’enseignement supérieur et de la recherche.
Revoir le discours :
Clôture du Président de la République des Assises de l'enseignement supérieur.
7 avril 2025 - Seul le prononcé fait foi
Clôture du Président de la République des Assises de l'enseignement supérieur.
Messieurs les ministres,
Monsieur le président de l'université,
Monsieur le secrétaire général du conseil suprême des universités,
Monsieur le président de France Universités,
Mesdames, messieurs les présidentes et présidents,
Mesdames, messieurs les chercheuses, chercheurs, enseignants, étudiantes et étudiants,
D'abord, merci beaucoup de l'immense honneur qui nous est fait d'être parmi vous dans cette institution et du caractère, au fond, très singulier de ce moment. Quand on vient en Égypte parler à sa jeunesse, c'est venir parler dans une des plus vieilles civilisations du monde à un des pays les plus jeunes au monde. Et c'est le merveilleux paradoxe de l'Égypte aujourd'hui, c'est que vous avez tout à la fois, en effet, une civilisation de laquelle Champollion disait : "L'Europe doit le principe de toute sa connaissance à l'Égypte" et qu'en même temps, un Égyptien sur deux a moins de 25 ans, ce qui est un trésor et ce qui montre l'importance d'investir sur ce capital humain, ce que vous êtes toutes et tous en train de faire.
Alors, je voulais vous dire d'abord ma confiance et ma gratitude à l'égard de celles et ceux qui font vivre la relation universitaire, qu'il s'agisse de l'enseignement, de la recherche et de ce qui a été annoncé aujourd'hui, et de ce que vous portez et ce que vos histoires ont pu nous dire. Et puis, je vais essayer de répondre à la question à votre question. Ensuite, vous dire, en effet, que notre partenariat est ancien, qu'il a souvent reposé sur l'archéologie, le patrimoine, mais aussi des filières de recherche, et que, quand on regarde aujourd'hui l'Égypte, elle est impressionnante par sa qualité académique, qui en fait l'une des places fortes de la recherche de l'enseignement dans la région. La qualité aussi et la vitalité de son innovation la place comme un des principaux écosystèmes d'innovation au monde parmi les 20 premiers. A coup sûr le premier du continent africain et du Moyen-Orient. Et qu'il s'agisse d'énergie, de pharmacie, de tourisme, d'informatique, d'agriculture, j'aurais du mal à citer toutes les filières, votre nation se place à l'avant-garde de la qualité de ses formations, ce qui fait que nous avons su, à travers le temps, nouer des relations. L'École de droit de la Sorbonne au Caire est fière d'avoir ce partenariat avec cette université.
Et puis, nous avons en effet, monsieur le ministre l'a rappelé, une cinquantaine de diplômes communs déjà consolidés, 42 protocoles parachevés qui permettent de consolider 70 programmes. On a, vous en êtes l'incarnation, à peu près 3 000 étudiants qui viennent à un moment poursuivre leurs études en France, ce qui est une augmentation très importante ces dernières années. On a fait plus 22 % d'augmentation pour les étudiants égyptiens accueillis en France, ce qui est une force, une chance. Et je veux, chère Anna, reprendre ce que vous nous avez proposé : chiche, allons-y !
Je souhaite qu'on puisse vous accompagner dans les idées que vous avez portées pour vous permettre d'avancer. Et ça va nous permettre, avec Campus France qui est là à nos côtés, de faire encore mieux, d'accueillir encore mieux, et pour tout ce programme d'accompagnement des étudiants, de faire encore davantage.
Alors ce partenariat avait été marqué par un tournant il y a un peu plus de 20 ans avec l'UFE, qui nous réunit aussi. Et il faut bien dire que pendant plusieurs années, ce projet a tâtonné. Et avec le président Sissi, en 2019, on a voulu lui donner une nouvelle orientation. Je voulais vraiment dire ma gratitude à l'égard de notre ambassadeur, monsieur le président du conseil, de toutes les équipes, de vous, cher président, de nos architectes qui nous ont présenté le magnifique projet qui est en train d'être parachevé, et de toutes les équipes éducatives et de recherche. Car notre université, maintenant, va prendre un nouveau tournant.
L'UFE est d'ores et déjà maintenant revenue sur une trajectoire magnifique qui va nous permettre d'arriver, dans quelques années à peine, monsieur le ministre, nous en sommes convaincus, je le sais, aux 7 000 étudiants que nous visons, dans un campus magnifique avec, une architecture à l'avant-garde à la fois du beau et du durable. Cela va nous permettre d'avoir, des étudiants égyptiens, mais également de tout le continent parce que c'est votre ambition, qui seront formés dans ce partenariat et cette Université française d'Égypte. Et je veux vous dire la très grande fierté de voir cette maquette tout à l'heure, mais de savoir que dans quelques mois, pour le 1er tronçon, ce sera une réalité pleine et entière, et que d'ici à deux ans, deux ans et demi, ce sera une réalité pour l'ensemble de ce site. Et donc, dans quelques années à peine, ces 7 000 étudiants seront là.
C'est une vraie révolution et je veux remercier l'ensemble des universités qui ont été présentes aujourd'hui pour signer ces partenariats et pour ainsi accompagner ce magnifique projet de notre université française d'Égypte, qui sera cette tête de pont, mais la tête de pont d'un partenariat qui est, au fond, beaucoup plus large et qui veut regrouper les organismes de recherche français. Je salue toutes les présidentes et présidents qui sont là dans mes délégations, CNRS, IRD, CIRAD et tant d'autres, l'Inserm, le CNES et beaucoup d'autres organismes de recherche sont impliqués dans les projets, et remercier toutes les universités qui sont là et saluer le consortium aussi d'établissements français, coordonné par l'université de Cergy Paris Université, qui contribue plus largement à, justement, l'offre de formation de l'établissement ainsi élargi.
Alors, au-delà de l'UFE, de ces partenariats signés aujourd'hui, la France veut continuer d'être aussi un partenaire de confiance pour l'Égypte. Nous avons la chance, depuis beaucoup d'années, d'être là avec nos écoles françaises, notre réseau, avec aussi tout le partenariat que nous nouons avec le réseau, le tissu des écoles françaises, justement, d'Orient, et nous continuons de les accompagner. Et j'ai croisé tout au long de ce déplacement beaucoup d'entre vous qui aviez appris dans ces écoles, quel que soit le réseau.
Je dis souvent que c'est notre carte du tendre, et c'est d'ailleurs le visage magnifique d'une laïcité à la française que vous, Égyptiennes et Égyptiens, connaissez bien. C'est-à-dire qu'on peut avoir appris dans le réseau des écoles publiques françaises, mais chez les sœurs ou chez les frères, ici ou ailleurs, on a appris une langue qui nous unit et qui nous a appris l'universel. Et on les a appris même si on était d'une autre religion. Ici, dans ce pays où la fierté du président, et il me le disait encore hier, est que quand on ouvre une mosquée, de pouvoir ouvrir une synagogue et une église, et de le faire dans un pays qui porte ce goût de l'universel, cet amour de toutes les religions et cette conviction qu'elles peuvent vivre ensemble. C'est ça, l'universel.
Alors, je voulais d'abord vous dire qu'on va continuer de soutenir nos écoles françaises, la langue française à travers toutes ces écoles, pour que les sœurs, les frères, les enseignants, dans tous nos tissus publics, quel que soit leur statut, continuent d'apprendre à des jeunes enfants en Égypte et plus largement dans toute la région le Français. Ensuite, j'ai dit au président que, dans les réformes qu'il voulait faire, nous voulons être un partenaire et que le Français continue d'être au cœur du baccalauréat égyptien, et même si ce n'était plus dans la maquette, parfois comme on dit chez nous, je crois, que ce soit une option qui donne plein de crédits, et donc qu’il y ait beaucoup d'incitation pour les jeunes Égyptiennes et Égyptiens à apprendre le français.
Ensuite, je lui ai dit qu'on voulait continuer d'aller plus loin et il a des grandes ambitions pour sa jeunesse, il a raison. Et donc nous voulons, au-delà de l'UFE, au-delà des partenariats signés aujourd'hui, être des partenaires de confiance pour vos universités. En faisant quoi ? En aidant à former les enseignants, à le faire d'ailleurs pour les enseignants en langue française du cycle primaire et secondaire, mais pour les universités aussi. Ensuite, en continuant à avoir des doubles diplômes et en donnant davantage de moyens à nos universités qui ont déjà signé aujourd'hui et qui sont vos partenaires, mais en contractant d'autres partenariats encore pour qu'il y ait plus de doubles diplômes. Enfin, en aidant à financer ces projets, ce que fait déjà l'Agence française de développement, mais en mobilisant aussi le secteur privé, vous l'avez très bien dit. Et beaucoup sont là qui sont prêts à le faire. Capgemini qui croit dans la jeunesse, par exemple, égyptienne, qui va venir ici embaucher des jeunes ingénieurs, des développeurs, va être un partenaire, j'en suis sûr, aussi, pour aider à former, elle l'est déjà. Et donc, on va aussi mobiliser nos universités pour faire des programmes communs et être, en quelque sorte, des partenaires de ce formidable développement que veut le président Sissi pour votre université.
Puis, on va le faire également avec toute la francophonie. Parce que pourquoi j'ai cet amour de la langue en partage ? C'est parce que dans votre pays, malgré toutes les idées reçues, c'est là qu'on continue de former et d'avoir le plus de locuteurs en langue française dans toute la région. Et c'est un trésor. Et en effet, cette richesse qu'il y a aujourd'hui autour de la francophonie, c'est presque 3,5 millions de locuteurs français, ce qui fait de vous le plus grand pays francophone de la région. C'est un trésor sur lequel on veut s'appuyer. Et donc ces partenariats, on va aussi les renforcer avec la francophonie, l'Université Senghor à Alexandrie, les 23 universités et institutions membres de l'agence universitaire de la francophonie, et permettre à l'Organisation internationale de la Francophonie, l'Égypte et la France, d'être aux avant-gardes de ce projet, de se dire : on a ici un trésor, on a un pays où les moins de 25 ans, c'est près de 60 millions d'habitants. C'est fou. Et donc, on veut développer pleinement la francophonie ici. Et donc, je reviendrai en France et j'irai à Villers-Cotterêts. Je vous invite tous à venir visiter Villers-Cotterêts, où nous avons le lieu où, en France, notre langue est devenue la langue administrative qui a unifié le pays par une décision de François 1ᵉʳ au XVIe siècle. C'est le lieu qui a vu naître Alexandre Dumas, qui vous a tous fait rêver, que vous l'ayez lu en français ou pas, et qui est maintenant l'épicentre de la francophonie parce qu'on y a fait la Cité internationale de la langue française et un des lieux où on va permettre de former les maîtres en langue française. Donc nous allons, avec la francophonie aussi, être au cœur de ce projet.
Et le cœur de ma présence aujourd'hui, c'était ça, c'était vous dire ma confiance dans l'université, les grands programmes de recherche, égyptiennes et égyptiens, notre volonté, notre confiance avec le président Sissi d'ouvrir ce nouveau cap pour l'Université française d'Égypte, mais plus largement cette ambition que je veux porter avec vous pour ces programmes de recherche, d'enseignement, cette jeunesse et la langue française dans ce projet.
Maintenant, ça, c'était mon discours à l'origine, mais ça allait me poser une autre question, c'est quel est mon avenir ? Et qu'est-ce que vous voyez pour moi ? Alors, ça ouvre évidemment un continent, mais au fond, le faire ici, dans cette université, et essayer de vous répondre à vous, c'est m'adresser plus largement à toute cette jeunesse qui est une chance pour votre pays, pour le continent et pour nous tous, parce que c'est notre avenir.
Ma première réponse sera de vous dire, je n'ai aucune réponse ou aucun conseil sérieux à vous donner, parce que ce sera à vous de l'écrire, votre avenir. Mais ma conviction profonde, c'est que notre responsabilité à nous, plus âgés que vous, c'est de vous donner toutes les chances pour pouvoir, à chaque instant de votre vie, vous poser librement cette question et choisir votre avenir. C'est d'être sûr que par le savoir, par l'apprentissage, par ce que vous pourrez conduire, cette réponse ne sera jamais dictée par d'autres, que vous aurez toujours le luxe de poser à quelqu'un, qu'est-ce que je dois faire ? Quels conseils me donnez-vous ? Parce que ça voudra déjà dire que vous êtes en situation d'être autonome, c'est-à-dire de pouvoir choisir vous-même, sur la base de conseils qu'on vous aura donnés, votre chemin à venir. Et c'est ça la responsabilité qui est la nôtre. Au fond, rien d'autre, pas de vous dicter le chemin, mais de vous mettre en situation de pouvoir choisir cet avenir et de le choisir vous-même, ce qui est stricto sensu la définition de l'autonomie.
Alors, je dirais, la première esquisse de réponse que je pourrais faire c'est d'étudier, d'apprendre pour pouvoir inventer, innover, comme vous avez commencé à le faire. Parce que ma conviction, c'est que vous serez dans un monde où vous pourrez choisir l'avenir, si vous n'avez pas simplement à consommer, à vous voir imposer des innovations qui seront faites ailleurs. Et notre défi, à nous, Européens, Africains, c'est de pouvoir être des lieux d'excellence, d'enseignement et de recherche, où on va continuer d'innover pour inventer notre avenir, pour le façonner, le faire avec nos valeurs, avec l'excellence de nos talents, mais ne pas avoir un avenir qui sera dicté par d'autres. C'est la clé. Et donc oui, étudiez, apprenez, inventez, innovez pour être à l'avant-garde de l'esprit humain, parce que c'est ce qui vous permettra de dessiner le monde dans lequel vous vivrez. Ne soyez pas des consommateurs de ce monde. Ne vous laissez pas dicter à ce monde. Ce n'est pas un avenir de consommer les innovations qui sont faites en Chine ou aux États-Unis. C'est un avenir de faire ces innovations, de les inventer au Caire ou à Paris. Ensuite, voyagez, apprenez, soyez ces ménages nomades dont parlait Andrée Chedid entre nos deux rives, mais n'oubliez jamais où vous habitez, n'oubliez jamais d'où vous venez. Je vous dis ça parce que vous qui êtes cette jeunesse, nos générations ont fait de terribles erreurs. On a pensé, beaucoup ont pensé, que pour réussir, il fallait voyager et oublier d'où on venait, qu'il fallait forcément aller ailleurs et qu'au fond, il y a une forme d'élite mondialisée qui s'est installée là et qui a parfois oublié qu'on ne réussissait jamais tout seul.
Je vous le dis pour vous qui commencez déjà à être un succès reconnu par vos pères. Le seul succès qui compte, c'est celui qui permet à votre pays, à vos voisins de vivre mieux. Et vous arrivez à un moment du monde qui fait peur, j'en ai conscience, qui est en pleine bascule. La région fait peur, le monde fait peur. Les certitudes sur lesquelles tout s'appuyait depuis tant de décennies sont en train d'être bousculées. N'ayez pas peur de cela, vous avez inventé un monde à venir. Mais le monde auquel moi, j'ai appartenu, c'était un monde où on a voulu nous faire croire que c'était la fin de l'histoire, la fin du tragique, et qu'il n'y avait plus de frontières, ce n'est pas vrai. Et les élites dans ce monde-là avaient considéré qu'en quelque sorte, le plus de frontières, c'était pour elles, parce que les gens les plus modestes continuaient à avoir des frontières. Ils n'avaient pas beaucoup bougé, ils ne voyageaient pas beaucoup plus, et ils n'avaient pas toujours le juste retour de ce monde mondialisé. Et donc, vous avez à inventer un monde qui doit continuer à avoir une discussion internationale pour le meilleur, mais qui doit penser le juste retour pour les endroits où nous vivons, pour que les équilibres soient maintenus, pour que la justice se tienne, et les universités sont faites pour cela.
Et je le dis avec beaucoup d'humilité, je suis là dans la plus vieille université de votre pays, l'une des plus vieilles des continents, et dans un monde où l'innovation semble tout bousculer chaque jour. Regardez la vieille Europe, regardez mon pays, regardez tous les pays d'Europe. Je suis frappé, j'ai fait tous les pays de l'Union européenne. Quand vous allez dans un de ces pays, quel est l'endroit le plus ancien ? Ce n'est pas une usine, ce n'est pas un lieu de présidence de la République, un lieu de Premier ministre, ni même un Parlement. C'est une université. Les universités sont les lieux les plus anciens qui existent, XIᵉ, XIIᵉ, XIIIᵉ siècle, parce que ce sont ces lieux où l'universel, par le savoir, a essayé d'être conçu à un moment, qui a permis le progrès de tous dans une société. Chérissez ces lieux. Ne vivez pas dans un monde sans lieux, atopique, dans un monde en quelque sorte qui deviendrait liquide. Chérissez ces lieux de savoir où l'universel se pense par le savoir, par la coopération des esprits, mais au service justement de chacun. Aimez les universités, faites-les grandir. Elles sont plus que jamais à la mode parce qu'elles sont ces lieux les plus anciens qui nous ont permis de penser l'universel.
Et regardez, regardez le paradoxe de ces gens qui nous ont inventé la mondialisation, les réseaux sociaux, et qui, dans le même temps, dans ces mêmes réseaux sociaux, véhiculent des discours de peur, des discours de haine, des discours de fermeture des frontières. C'est eux qui sont paradoxaux, pas nous. Et donc, il faut aimer un monde où les idées circulent librement, il faut aimer un monde où on n'a pas le droit d'interdire le savoir, il faut aimer un monde où on n'a pas le droit de dire à un chercheur « tu n'as pas le droit de chercher sur cela, tu n'as pas le droit d'utiliser ce mot dans ton programme de recherche », où la recherche doit rester libre, académique, indépendante parce que c'est le seul moyen de faire avancer l'esprit humain.
Chérissez ces lieux et donc, pour votre génération, sortez des réseaux sociaux, allez dans les universités, apprenez, inventez, soyez libres par le savoir, l'esprit critique, par la compréhension de l'autre plutôt que par l'invective, et alors vous ferez avancer votre génération et notre monde. Parce que qu'est-ce qui me fait peur pour vous, les plus jeunes, et pour nous tous ? C'est que nous sommes entrés dans un monde où il y a une forme d'inversion des valeurs, et où, là où, dans les démocraties les plus grandes, on devait d'habitude guider, on regarde vers l'arrière. Qu'est-ce qui fait que nous nous trouvons là aujourd'hui, que nous pouvons inventer, qu'on peut parler d'intelligence artificielle, de technologies vertes, qu'on peut parler des innovations qui vont changer la santé ou que sais-je ? C'est parce qu'il y a cette sédimentation des savoirs à travers le temps que les meilleurs esprits ont appris, consolidés, et qui permet à d'autres d'innover aujourd'hui et qui, par l'alliance des intelligences, des femmes et des hommes et du capital, permet à l'humanité d'avancer.
Mais tout ça repose sur quoi ? Une connaissance libre, une recherche libre, un accès libre de chacune et chacun pour que, d'où qu'on vienne, on puisse accéder à ce savoir et donner le meilleur pour le bien de tous, la construction d'un esprit critique pour chacun qui permet d'être libre, qui permet de regarder le monde qui est devant nous en essayant de le comprendre, en le critiquant, qui permet d'apprendre peut-être de croire ou de ne pas croire, mais de ne jamais être l'otage d'une idéologie, et qui permet, ce faisant aussi, de bâtir un rapport à la vérité qui seul nous permet de vivre en société.
Et nous entrons dans un monde largement construit par ceux qui étaient supposés donner exemple, qui est quoi depuis quelques années ? Le complotisme. Ce virus est-il un virus ? Ce vaccin est-il un vaccin ? Ou ceci ou cela et toutes les idées les plus folles. En quelque sorte, la fin d'un rapport à la vérité factuelle, scientifique, qui est en quelque sorte la fin d'un rapport au savoir, la fin même de la possibilité d'un savoir, les mêmes aujourd'hui, sont en train de fermer ce savoir en cassant des programmes de recherche, en empêchant des chercheurs de voyager, en construisant en quelque sorte une réalité postmoderne, mais même pas une réalité, une inversion des valeurs qui consiste à dire « je ne crois pas dans ta recherche, donc je t'interdis de la poursuivre, parce qu'elle ne sert pas en quelque sorte mes intérêts. » Mais la recherche, l'université ne sert pas des intérêts, si ce n'est l'intérêt général, c'est-à-dire la possibilité d'apprendre, de savoir, et un savoir qui est au service de l'humanité tout entière et qui peut-être fera émerger ici un talent qui gagnera beaucoup, peut-être là un autre talent qui ne gagnera rien et qui sera plus grand encore, mais elle fera progresser l'humanité tout entière.
Et donc, je vous le dis pour vous toutes et tous, résistez, innovez et inventez, apprenez, apprenez, apprenez. Ne respectez qu'une autorité, celle de vos maîtres, car cette autorité repose sur quelque chose. Ils ont lu plus de livres que vous, et c'est la seule autorité qui compte. Apprenez l'esprit critique et accumulez les savoirs pour être véritablement libre, libre de choisir. Inventez et doutez, doutez chaque jour, mais construisez un rapport solide à la vérité, le seul qui vous permettra d'avancer et de mettre un pied devant l'autre. Construisez la seule culture qui vaille, celle du respect ; respect des textes, respect des faits, respect des autres. Et essayez d'inventer ce monde que nous avons, pour l'instant, échoué à bâtir, un monde ouvert où les talents et les idées peuvent librement circuler, et où les plus talentueux essaient de bâtir pour l'intérêt général ou pour que chacun, chez eux, vive un peu mieux.
C'est l'avenir que je vous souhaite et rien d'autre.
Merci pour votre attention.
Et vive l'amitié entre l'Égypte et la France, et vive la jeunesse de nos deux pays, celle dans laquelle nous devons remettre notre espoir, et celle qui ne doit céder à aucune tyrannie du moment, à aucun impérium d'où qu'il vienne ! L'avenir, c'est vous !
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