Le Président Emmanuel Macron et son épouse Brigitte Macron ont reçu Leurs Majestés le Roi Frederik X et la Reine Mary de Danemark, à l’occasion d’une visite d’État en France du lundi 31 mars au mercredi 2 avril 2025.
Cette première visite d’État d’un souverain de Danemark depuis 1978 fait suite à la visite effectuée par le chef de l’État et Brigitte Macron au Danemark les 28 et 29 août 2018.
Elle a permis d’approfondir la relation bilatérale par la conclusion d’un partenariat stratégique entre la France et le Danemark.
Cette visite était également l’occasion de renforcer les coopérations et partenariats dans les secteurs de la santé, de la défense, de la transition écologique et énergétique, de la culture et du patrimoine.
Les deux dirigeants ont notamment inauguré le forum économique franco-danois au Palais Brongniart.
Revoir l'inauguration :
1 avril 2025 - Seul le prononcé fait foi
Discours du Président Emmanuel Macron lors de l' inauguration du forum économique franco-danois.
Vos majestés, mesdames, messieurs, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, madame l’ambassadrice, monsieur l’ambassadeur, mesdames et messieurs les Parlementaires, mesdames et messieurs les dirigeants d’entreprises, mesdames, messieurs en vos grades et qualités, chers amis, c'est un honneur, votre majesté, de vous recevoir à Paris et de voir l'amitié que vous portez à la France, à notre langue.
Nous l'avons encore vu hier pour cette visite d'État historique. Et de vous avoir, l'un et l'autre, à nos côtés, est un immense privilège pour mon épouse et moi. Et en effet, être parmi vous aujourd'hui pour cette réunion est, dans le moment que nous sommes en train de vivre, particulièrement important. Alors, m'inscrivant dans les pas de votre majesté à l'instant, je voudrais dire quelques mots sur l'importance des sujets que vous allez évoquer aujourd'hui et du chemin commun qui peut être le nôtre pour assurer une plus grande indépendance de notre Europe par ces entreprises, ces projets d'investissement, ces politiques publiques. Ça fait en effet plusieurs années que nous croyons, et je crois pouvoir dire que le Danemark et la France sont unis sur ce chemin, dans un agenda de souveraineté, d'autonomie stratégique, d'indépendance, parce que nous avons vécu dans notre chair les conséquences de la dépendance excessive. Et au fond, si je prends les trois sujets que vous avez choisis pour votre journée, ce sont trois illustrations parfaites.
Souvenez-vous, ça paraît très loin, mais c'était au fond hier, il y a 5 ans. Il y a 5 ans, nos pays vivaient ensemble la pandémie du covid-19. Et nous avons vécu dans nos pays les conséquences de la dépendance, les manques de masques, les manques de telles ou telles molécules. Et nous avons tous ensemble aussi vécu le risque d'une trop grande dépendance lorsqu'un an plus tard, nous sommes arrivés en situation de pouvoir faire un vaccin et, je dois dire, sans une Union européenne forte, nous n'aurions pas vacciné dans nos pays. Parce que notre système de santé s'était ainsi structuré, que nous avions créé des dépendances irréparables en quelques semaines avec d'autres géographies. Et même nos meilleurs alliés, et nous n'avons peut-être pas suffisamment entendu à l'époque les alertes, dans ces moments-là, ont préféré leurs intérêts aux nôtres. Et alors même que nous avions laissé la grammaire d'un monde ouvert fonctionner lorsqu'il a fallu construire le vaccin, les États-Unis d'Amérique ont dit « je vais réserver tel et tel ingrédient, telle et telle molécule aux États-Unis avant de livrer l'Europe ». Et nos amis indiens, qui sont des partenaires formidables en matière de santé, nous ont dit « je vais d'abord livrer mes propres doses et m'occuper de moi avant de m'occuper de mes partenaires européens ou africains ». Nous avons payé le coût d'une dépendance excessive en matière de santé.
Quelques mois plus tard, nous sortions à peine du covid. La guerre revenant sur le sol européen, avec l'agression russe en Ukraine, nous avons vécu le coût de la dépendance énergétique. Nous avions un modèle formidable qui fonctionnait pour grande partie, la France dépendant moins que d'autres à ce titre, d'un gaz peu cher qui venait de Russie. Et les hypothèses de base étaient connues, et dans les forums d'affaires, quelques années plus tôt, quand je disais « soyons prudents sur les gazoducs qui arrivent, ne soyons pas trop dépendants de tel ou tel », on disait « vous n'êtes pas raisonnable, il faut baisser les coûts de production ». En quelques semaines, il a fallu s'adapter et apprendre à produire en Europe sans l'énergie à bas coût qui venait de Russie. Et les dernières semaines, nous ont montré ce qu'était le coût de la dépendance en matière de défense à l'égard des États-Unis d'Amérique. Alliés formidables depuis tant de décennies, mais je ne vais pas le dire à une audience danoise, alliés qui peut susciter des troubles par ses déclarations, ses intentions et ses priorités. Et rien ne nous dit que dans 5 ans, dans 10 ans, dans 15 ans, les priorités américaines devenant peut-être plus asiatiques qu'européennes lorsqu'il faudra livrer tel ou tel matériel, elles nous diront en regardant les Européens, ce n'est pas ma priorité, je ne peux pas le faire aujourd'hui.
Les trois sujets que vous avez choisis illustrent parfaitement le coût de la dépendance. Et je crois que ce que nous devons poursuivre pour nos deux pays et plus largement pour notre Europe, c'est un agenda de souveraineté, d'indépendance qui n'est pas un agenda d'autarcie, mais qui est de dire on veut avoir des partenaires, nous croyons dans un monde ouvert, mais on veut pouvoir choisir ces partenaires, mais ne jamais en dépendre. C'est pourquoi, en matière de santé, il nous faut investir davantage et il nous faut regarder dans toutes les chaînes de valeur comment bâtir des solutions européennes. Je ne vais pas le dire ici, nous avons de part et d'autre, Novo Nordisk, Sanofi, tant de start-up, des champions dans ce domaine. Il nous faut continuer à bâtir ces partenariats, à évidemment produire à travers le monde, mais nous assurer que les solutions européennes sont bien consolidées, que nous n'avons pas pour tel ou tel médicament, telle ou telle molécule, et je sais que nos ministres y sont attachés, une dépendance qui nous mettra en situation de danger.
Pour l'énergie, et je parle sous le contrôle de Fatih BIROL, qui est sans doute notre meilleur expert, nous avons tous les moyens de réduire nos dépendances. Sobriété, renouvelable, nucléaire. Nous avons la possibilité d'abord d'économiser davantage d'énergie par l'innovation, de produire sur le sol européen, par des solutions européennes, davantage d'énergie décarbonée, compétitive. Et au fond, ils nous font réconcilier l'objectif climatique, l'objectif de souveraineté, l'objectif de compétitivité dans les politiques qui sont les nôtres. C'est l'agenda que nous poursuivons pour la neutralité carbone 2050. C'est celui-là qu'il faut tenir. Et là aussi, nous avons ici beaucoup d'entreprises innovantes et de solutions. Et je souhaite que les partenariats soient encore accrus pour permettre de répondre dans nos deux pays et plus largement dans notre Europe à une réponse d'indépendance pérenne.
En matière de défense, là aussi, nous avons des capacités. Et je souhaite que les entreprises qui sont ici présentes, et je vous félicite, Votre Majesté, pour la qualité de la délégation qui est la vôtre, puissent bâtir des partenariats et qu'au fond, nous puissions commencer à utiliser les instruments mis en place par l'Europe avec ReArm EU pour acheter ensemble et européens, car il ne s'agit pas simplement de dépenser plus d'argent en matière de défense. Si nous continuons pour beaucoup d'entre nous à acheter trop américain ou sud-coréen. Non, il faut que ce réinvestissement dans notre défense et notre sécurité signifie aussi investir dans l'innovation, la base industrielle technologique de défense européenne et donc produire en Europe pour pouvoir y créer des emplois, mais aussi nous assurer que nous avons des solutions qui sont soutenables, pérennes, sur notre sol et qui répondent à nos priorités. Et donc dans tous les domaines capacitaires, il nous faut en effet concevoir des programmes communs européens, acheter ensemble et donner une profondeur de marché à une solution de défense européenne. C'est l'objectif que nous devons nous fixer. And in this regard, I consider that we have a very important agenda where competitiveness and defense and security work closely together. And in order to deliver such an agenda, what we need is precisely to fournir une accélération de ce que nous avons déjà disponible. Nous savons ce que nous devons faire.
Tout d'abord, la simplification. Si nous voulons aller plus vite, nous devons simplifier. Si vous regardez le cadre de la santé, de l'énergie, de la défense et également d'autres secteurs, eh bien si vous comparez la période consacrée à ces développements entre les États-Unis et l'Europe, vous verrez la différence. Les États-Unis, cela peut prendre trois mois pour développer une solution, et chez nous, c'est un an. En fait, pour nous, il faut arriver à simplifier pour arriver à rendre des solutions plus accessibles. Deuxièmement, nous devons également renforcer le marché unique. Tant que nous avons des règlements dans tous nos pays qui sont indépendants et différents, nous allons perdre du temps et nous n’allons pas fournir les marchés domestiques nécessaires. Si nous voulons être compétitif avec les États-Unis et la Chine, nous devons réintégrer nos marchés européens. Et c'est là qu'il est indispensable de renforcer notre marché unique dans le numérique, mais également dans le secteur de l'énergie. Ceci est très important. Bien sûr, ce n’était pas conçu au départ, mais aujourd'hui, cela est devenu tout à fait nécessaire. Si nous voulons être compétitifs et décarboniser, nous devons arriver à un marché unique de l'énergie en Europe afin de fournir les fournitures de l'énergie à bas coût et, librement, c'est pourquoi ce marché unique doit devenir de plus en plus fort dans ce secteur. Troisièmement, nous avons besoin d'investissements rapides. Si vous regardez le cas de l'IA, la santé, la Défense et tous les autres secteurs, et si vous comparez encore une fois les investissements en Europe et aux États-Unis, vous verrez les différences.
Nous sommes plus lents et nous avons besoin également d'investissements publics et privés. C'est pourquoi nous devons revoir nos budgets et nous devons fournir une souplesse plus importante pour nos entreprises. C'est ce que nous avons déjà commencé à faire dans le secteur de la Défense, mais nous devons le faire également dans notre secteur. Si nous perdons ce moment, cette fenêtre qui s'ouvre, eh bien, nous aurons un retard trop important. C'est pourquoi nous devons investir beaucoup plus tout de suite. Mais nous avons parlé également des investissements privés. Et là, je pense que le marché des capitaux qui est important également. Si nous voulons vraiment arriver à un bon rythme d'investissement, nous devons garder l’épargne privée que nous avons dans notre continent. En fait, il existe d’épargnes beaucoup plus importantes en Europe qu'aux États-Unis. La difficulté est que cet argent est investi surtout dans des obligations. Et un tiers de ces économies sont utilisées pour financer des fonds propres aux États-Unis. Donc la solution reste entre nos mains. Nos devons trouver les bases et les clauses des autres pour être sur le même pied que les États-Unis. Et nous devons faire pour ré-utiliser cette épargne d'une autre façon. Nous devons resynchroniser notre système d'utilisation de cette épargne et les utiliser dans les bonnes géographies et dans les bons secteurs. Et dernièrement, nous devons également maintenir une façon équitable en Europe. J'ai parlé de la vitesse des investissements, mais si vous regardez ce que nous faisons aujourd'hui, nous sommes vraiment les lieux uniques où la production locale n'est pas favorisée. Les marchés chinois et américains sont très protégés. Or, l'Europe est un marché complètement ouvert où nous appliquons les feuilles de route de l'OMS. Et ceci ne peut pas continuer. Si nous faisons ceci, nous allons en permanence renforcer les exigences, les formulaires, les démarches administratives pour nos entreprises. Tout le temps, nous ouvrons nos marchés pour les produits et les biens qui sont produits avec des normes beaucoup moins rigoureuses en société, quelque chose qui est très négatif et mauvais pour nos marchés. Ce n'était pas conçu comme cela au début.
Quand nous avons créé le marché unique, l'idée était d'avoir un marché unique entre nos pays sans avoir à avoir des distinctions entre nos marchés. Mais en fait, nous n'avons jamais vraiment réfléchi à comment protéger ce marché. Et maintenant, si nous voulons arriver à être véritablement compétitif, eh bien, nous devons avoir une bonne égalité et équité entre nos entreprises et arriver à une préférence européenne dans nos secteurs critiques. Et là, il ne s'agit pas tout simplement de la Chine et des États-Unis, surtout cette administration-ci. En fait, il y a des Européens même qui ne comprennent pas les effets de l'acte de réduction de l'inflation qui a été choisie par l'administration du président BIDEN, mais qui a eu un impact très grave et très fort sur nos jeunes entreprises. C'est pourquoi nous devons être robustes, nous devons être sérieux, et nous devons livrer les résultats que nous voulons. Voilà mesdames et messieurs les quelques convictions que je voulais partager avec vous au début de cette journée, en remerciant le Danemark pour sa contribution à la croissance et l'attractivité de la France. Vos entreprises sont présentes en France et fortes. Ce sont 400 filiales d'entreprises danoises implantées en France, 40 000 personnes employées par des groupes emblématiques, Novo Nordisk, William Demant, Carlsberg, DSV Group et beaucoup d'autres ici présents. Et durant la dernière décennie, le Danemark a réalisé plus de 270 projets d'investissement et créé près de 6 000 emplois. Mais nous avons la conviction que nous pouvons faire encore davantage, et c'est pourquoi, à l'issue de cette journée, vous serez aussi invités à l'événement Choose France que nous organisons au mois de mai prochain à Versailles, comme chaque année, qui est pour le 19 mai prochain au Château de Versailles, ce moment où nous poursuivrons ce travail pour l'attractivité française et aussi pour bâtir plus de projets entre nos deux pays, permettre à vos entreprises de continuer d'investir en France, permettre aux partenaires français qui sont ici présents de continuer à développer des projets communs avec vous. Je ne serai pas plus long.
Je vais ici vous redire en tout cas ma confiance. Il y a une formidable capacité d'innovation dans nos deux pays, il y a des valeurs partagées et communes. Et au fond, dans ce moment où ces valeurs sont menacées, y compris par des alliés qu'on pensait les plus historiques, je crois qu'elles retrouvent de leurs forces et de leurs selles. Et nous ne nous manquons pas. Et à chaque fois que les temps sont difficiles, d'un côté ou de l'autre, nous sommes côte à côte. Ne négligez jamais ce point. Il vaut beaucoup de ce qui, parfois, décide d'une décision d'investissement. Et il montre qu’habiter en Europe signifie quelque chose. Et que la relation entre le Danemark et la France signifie quelque chose. Je le rappelais hier soir, nos deux pays sont parmi les très rares d'Europe qui ne se sont jamais fait la guerre. Et quand les vents mauvais soufflent au Danemark, la France est là. Et quand les vents mauvais ont soufflé en France, le Danemark était là à nos côtés. Ce lien d'amitié à travers les siècles, c'est en quelque sorte le terreau le plus fertile sur lequel vous avez à bâtir. C'est celui qui existe entre des peuples, entre des femmes et des hommes et que l'histoire rend encore plus fort aujourd'hui. Alors vive le Danemark ! Vive la France ! Et vive l'amitié entre nos deux pays ! Bonne journée de travail.
Cette visite a permis enfin d’affirmer les convergences entre la France et le Danemark sur le soutien à l’Ukraine et l’agenda de souveraineté européenne, alors que le Danemark exercera la présidence du Conseil de l’Union européenne au 2ème semestre 2025.