Fait partie du dossier : Forum de Paris sur la paix.

Dans le cadre de la 6ème édition du Forum de Paris sur la paix, le Président Emmanuel Macron a co-présidé ce vendredi le 5ème Sommet de l’Appel de Christchurch avec Jacinda Ardern, envoyée spéciale du Premier ministre de Nouvelle-Zélande.

Lancé à l’Elysée conjointement par les deux pays après l’attentat de Christchurch le 15 mars 2019, l’Appel rassemble une communauté d’acteurs engagés pour améliorer les dispositifs technologiques et la coopération pour lutter contre les contenus terroristes et extrémistes violents en ligne.

Le Sommet a été l’occasion d'inviter les derniers acteurs à se joindre à l’Appel, notamment les grands acteurs de l’IA générative qui pourront contribuer activement à la lutte contre les contenus extrémistes en ligne, et a également permis d’explorer comment les résultats très probants obtenus dans le cadre de l’Appel peuvent être répliqués face à d’autres enjeux comme la protection de l’enfance en ligne.

Revoir le Sommet :

10 novembre 2023 - Seul le prononcé fait foi

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Ouverture du Sommet de l’Appel de Christchurch de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent en ligne.

Chère Jacinda, désormais Madame l'Envoyée spéciale pour l'appel de Christchurch. 
Mesdames, Messieurs les chefs d'État et de gouvernement, 
Ministres, 
Ambassadeurs, 
Chefs d'entreprises, 
Représentants d'organisations non-gouvernementales, 
Chercheurs, 
Praticiens, 
Chers amis,

Je suis très heureux qu'on puisse se retrouver à l'Élysée aujourd'hui où nous avons lancé l'Appel de Christchurch il y a quatre ans avec Madame la Première ministre à l'époque, Jacinda ARDERN, après la terrible attaque terroriste que la Nouvelle-Zélande avait subie. Je veux vraiment vous remercier pour votre engagement personnel et la mobilisation que nous avons réussie à quelques-uns à avoir ces dernières années pour bâtir des résultats qui sont d'ores et déjà tangibles. 

C'est le cinquième sommet que nous tenons, qui se déroule en marge du Forum de Paris sur la paix, ce qui est porteur de sens parce qu’avec l'appel de Christchurch, nous avons construit une plateforme pour contribuer à un monde plus pacifique en ligne et aussi par ricochet dans la vie réelle, parce que nous avons constaté que les services que vous offrez pouvaient être utilisés pour des desseins qui ne sont pas ceux que vous portez et que vous partagez et donc détournés. On a en quelque sorte dans une approche multi-stakeholders, comme on dit en bon français, décidé d'agréger les volontés gouvernementales, non-gouvernementales, les acteurs du secteur privé. Et je pense qu'aujourd'hui, on a déjà bâti des résultats importants. On a inscrit au cœur de notre communauté un mandat très clair, une intention ferme et résolue de répondre avec la plus grande efficacité à la propagation de la haine et de la violence. 

Depuis, nous avons malheureusement, si je puis dire, éprouvé l'Appel : on a réussi à obtenir les retraits de contenus terroristes. Et je crois qu’il ne faut pas céder sur la qualification, il faut garder une approche très simple, elle a fonctionné malheureusement à chaque fois qu’on a été confrontés à cela. Lors de l’assassinat de Samuel Paty en France en octobre 2020, on a pu obtenir de manière proactive un retrait immédiat des contenus, aussi dans les vidéos qui tournaient après l’assassinat ignoble du professeur Dominique Bernard. Donc on a eu plusieurs situations où on a vu les plateformes s'inscrire pleinement dans justement l’approche de la golden hour et les engagements très clairs de retrait de contenus terroristes. 

Depuis notre rencontre de New York l’année dernière, on a un contexte qui évidemment a évolué, on y reviendra, d’abord parce qu’on a des progrès très rapides liés à l’intelligence artificielle, et c’est une chance d’avoir Greg [Brockman] parmi nous aujourd’hui, et je remercie OpenAI d’être représenté à ce niveau ; on a aussi Anthropic et d’autres qui sont là et c’est très important ; parce qu’on a évidemment une situation internationale qui a testé encore plus notre résilience sur ce sujet, avec l’Ukraine, le Sahel et maintenant le Proche-Orient. On y reviendra aussi parce que la diffusion massive de vidéos du Hamas en ligne, l’instrumentalisation pour glorifier ou inciter à la haine et à la violence a conduit là aussi à beaucoup de retraits. 

Si je ne devais donner que quelques chiffres, au 14 octobre 2023, X avait supprimé 100 000 éléments de contenus terroristes, 10 000 éléments de contenus pour discours violents, suspendu 1 000 comptes liés au Hamas. TikTok avait déclaré avoir supprimé 500 000 vidéos et 8 000 vidéos en direct. Donc ces chiffres montrent qu’il y a eu un effort qui a été fait, qu’il y a eu du travail, mais qu’on a encore collectivement du chemin. 

On avait lancé aussi une approche très importante sur les algorithmes qui, je pense, est pour nous quelque chose qui est extrêmement structurant et sur lequel on avance bien. En parallèle de ça, on a vu aussi évidemment des régulations voir le jour et se développer, en particulier en Europe mais dans plusieurs autres espaces qui ont avancé sur nos sujets. L'Appel de Christchurch incarne vraiment l'efficacité d'une méthode - et je pense que c'est très utile - qui doit s'attaquer à de nouveaux problèmes et d'autres défis en ligne. Je pense à la protection des enfants ou les violences faites aux femmes. 

Sur la protection des enfants, je voulais vraiment insister sur ce point, il y a eu l'initiative lancée l'an dernier, plusieurs étaient là aussi, du Laboratoire pour la protection de l’enfance en ligne, qui vise à créer avec les entreprises du secteur les solutions techniques innovantes qui permettront de mieux protéger nos enfants en ligne. Il y a un point qui a été fait dans le cadre du forum qui a montré là aussi les avancées. Je me félicite que les Etats-Unis, la Corée et plusieurs autres joignent l'initiative. Il s’agit vraiment un changement important avec des expérimentations sur la vérification de l'âge, le partage non consenti de photos intimes, l'engagement de plusieurs de vos plateformes qui ont permis d'avancer, et ce qu'on doit continuer à faire sur le cyberharcèlement. 

Donc voilà, je pense qu'on a fait des choses très fortes sur le terrorisme. On doit encore faire plus sur la lutte contre les contenus haineux, la propagande, ou tout ce qui est un peu gris, on le sait. On doit continuer à agir contre les violences faites aux femmes et les enfants, et on doit garder cette approche multi-stakeholder. Je pense que Jacinda y reviendra, mais pour moi c'est important qu'on pérennise cette structure. Elle a donc mon plein soutien pour les évolutions de notre structure, de l'Appel de Christchurch, et la France sera là dans la durée, vous pouvez compter sur nous. 

Je remercie les pays qui sont aussi à nos côtés. Mais je vais être assez direct, comme toujours. Je suis très heureux, moi, dans la salle, il n'y a que des gens qui sont enthousiastes et qui y croient. C'est super qu'il y ait Greg [Brockman], vraiment Brad [Smith] est formidable depuis le début, à son niveau, il prend le temps. En tout cas, je veux vraiment dire que pour Meta et Google, on a bien reçu le message. Parce que le fait qu'il n'y ait aucun top manager qui était disponible, ni à New York en septembre, ni ici à Paris, quand il y a des chefs d'État et de gouvernement qui peuvent se déplacer, ça veut dire qu'ils veulent plus jouer. S'ils veulent plus jouer, moi je suis le premier à valoriser les actions, mais je suis le premier vraiment à dire quand les gens ne jouent plus. 

Quand on me dit qu'on régule les contenus, je me suis fait donner un chiffre tout simple, c'est le nombre de modérateurs dans les langues qu'il y a par plateforme et moi je continuerai à suivre comme cela les choses. Mais c'est sûr que quand on me dit qu'il y a 52 modérateurs pour X en langue française, j'ai du mal à considérer que le contenu est modéré. Langue française, pas la France : Il y a 330 millions de locuteurs en langue française. Ces 52 personnes sont des génies ou ont beaucoup de travail. Il y en a 226 pour Méta. TikTok est pas là autour de la table parce qu'on doit clarifier des sujets de statut, mais enfin ils en ont déjà 687. Je le dis pour créer de la compétition, de la bonne compétition. 

Donc, ça marche, l'Appel de Christchurch, que s'il y a des gens qui collectivement se prennent au sérieux. À la seconde où les gens ne sont plus sérieux, on devient moins coopératifs, en tout cas pour ce qui me concerne. Donc je pense que voilà, c'est un wake-up call. Nous, on a envie de continuer à élargir le domaine de la lutte, à avancer avec cette approche multi-stakeholders parce qu'on y croit beaucoup. Je suis en plein soutien. Je pense que c'est une énorme chance d'avoir Jacinda ARDERN qui va continuer le travail à nos côtés. Moi, je serai toujours là. Mais je considère que quand des entreprises qui s'étaient engagées, nous avaient dit des choses formidables, s'organisent pour pas être là et font pas ce qu'elles ont dit qu'elles le feraient, la confiance se réduit, surtout quand d'autres continuent de faire le boulot. Je préférais le dire parce que sinon les compliments que je fais n'ont pas de valeur si je ne peux pas dire quand il n'y a pas de résultat. En tout cas, nous, on est pleinement mobilisés au travail. On a des résultats, mais on a encore beaucoup de choses à faire. Je ne serai pas plus long. La parole est à Jacinda ARDERN. 

Déclaration de la coprésidence : Sommet des dirigeants de l’Appel de Christchurch 2023.

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