Fait partie du dossier : Déplacement en Océanie.

Relation entre la France et le Vanuatu

La relation bilatérale qu’entretient la France avec le Vanuatu s’est considérablement renforcée ces dernières années, notamment autour du soutien aux politiques de résilience en Océanie face aux vulnérabilités des États de la région dans le contexte d’accélération du changement climatique.

À Port-Vila, le Chef de l'État a tenu un discours où il a illustré la montée en puissance du rôle de la France dans l’Indopacifique, un axe majeur de notre politique étrangère. 

Le Président de la République a également annoncé le lancement d'un appel commun avec le Vanuatu à la communauté internationale pour une action immédiate face au changement climatique : l'appel d'Ifira.

Appel d’Ifira pour une action immédiate face au changement climatique.

Revoir le discours : 

27 juillet 2023

DISCOURS DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE.

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Monsieur le Premier ministre, 
Mesdames et Messieurs les ministres, 
Monsieur le Président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie, 
Monsieur le Président du gouvernement de Polynésie française, 
Mesdames et Messieurs les ambassadrices et ambassadeurs, 
Mesdames et Messieurs en vos grades et qualités, 

Merci infiniment, Monsieur le Premier ministre, et je tiens à remercier aussi Monsieur le Président pour l'échange que nous avons eu, pour l'accueil très chaleureux et les discussions très franches que nous venons d'avoir. 

C'est pour moi aussi un symbole fort d'amitié entre nos peuples, historique même, car aucun chef d'État français ne s'était encore rendu au Vanuatu indépendant. Et le faire en étant accompagné de plusieurs ministres du Gouvernement de la France, mais également avec les présidents MAPOU et BROTHERSON, est un symbole de cette France indopacifique et en particulier océanienne dans laquelle nous croyons. Et en étant accompagnés par des femmes et des hommes qui incarnent aussi nos relations économiques, universitaires, scientifiques, culturelles, c'est marquer la diversité de la relation entre nos deux pays. 

L'histoire commune de la France et du Pacifique se conjugue au temps long des siècles, - je vous rassure, je ne ferai pas tout le parcours ici, - depuis le premier tour du monde réalisé par la marine française, celui de la Boudeuse et de l'Etoile de Bougainville, il y a précisément 255 ans. C'est une histoire faite d'audace, d'avancées scientifiques ; faite de triomphes, de tragédies aussi, comme le naufrage de l'expédition de La Pérouse disparue corps et biens dans l'immensité bleue en 1788. 

C'est une histoire faite de sacrifices également, dont celui des Français du Pacifique et des Ni-Vanuatu qui se portèrent volontaires en 1916 pour défendre notre sol et de leurs enfants qui, une génération plus tard, allèrent à nouveau au-devant de leur destin quand le Vanuatu devint le premier territoire d'Outre-mer rallié à la France libre le 22 juillet 1940. Nous n'oublierons jamais que la Résistance à l'Étrange défaite a aussi commencé ici, à 16 000 kilomètres de Paris, au milieu de l'océan, et que ces volontaires du Pacifique furent de tous les combats de la France. Et nous avons rendu encore ce matin, et nous allons ensemble rendre hommage à 13 d'entre eux morts pour la France durant les deux conflits mondiaux. 

Pourtant, malgré cette histoire, nul président français n'était venu ici, parmi vous, depuis le général de Gaulle, il y a 57 ans, lorsque l'on désignait encore cet archipel du nom de Nouvelles-Hébrides. Il n'y a pas forcément là de logique, mais il y a en tout cas une logique à ma présence devant vous aujourd'hui. C'est que, très clairement, depuis maintenant un peu plus de cinq ans, la France assume une stratégie indopacifique et une présence renouvelée, renforcée, réinventée, tout particulièrement en Océanie. 

D'abord parce que nous assumons l'importance de cette région qui représente 40 % du PIB mondial et plus d'un tiers de notre commerce en dehors de l'Union européenne. C'est en Indopacifique, où la France compte 1,5 million de ressortissants, et un peu plus de 7 000 militaires qui contribuent à la paix et la sécurité. Oui, par ces territoires ultramarins, par cette présence forgée par l'histoire, la France est une puissance indopacifique, et nous reconnaissons très clairement l'importance de ce territoire. 

J'ai présenté depuis 2018 cette stratégie en Inde, en Australie, à la Réunion, et nous l'avons ensuite déclinée au niveau de l'Union européenne, avec une boussole : la souveraineté des peuples et l'indépendance des États. Cette boussole est pour moi extrêmement importante, parce qu'en effet, l'Indopacifique tout particulièrement, et peut-être l'Océanie plus encore en son sein, a une souveraineté et une indépendance qui est bousculée par le monde contemporain. 

D'abord, la prédation des grandes puissances. Les navires étrangers pêchent de manière illégale dans une Zone économique exclusive. Dans la région, de nombreux prêts aux conditions léonines étranglent littéralement les développements. Les pratiques commerciales sont de plus en plus détournées de leurs fondements. Les ingérences se multiplient. Il y a, en Indopacifique, et tout particulièrement en Océanie, de nouveaux impérialismes qui apparaissent et une logique de puissance qui vient menacer la souveraineté de nombreux États, les plus petits, souvent les plus fragiles. Et il y a dans le même temps les conséquences directes du changement climatique. La vulnérabilité climatique est une réalité contemporaine dans la région. Le trait de côte recule, les cyclones se multiplient, et tout ce qui déstabilise précisément l'indépendance au sens le plus profond du terme, qui vient remettre en cause votre souveraineté, votre indépendance, est là. 

C'est pourquoi notre stratégie indopacifique consiste d'abord et avant tout à défendre, par ces partenariats, l'indépendance et la souveraineté de tous les États de la région qui sont prêts à travailler avec nous. Je le dis, en quelque sorte, de là où je parle. Je peux le faire avec d'autant plus de liberté, parce que nous reconnaissons notre passé colonial ici, au Vanuatu. L'histoire des Nouvelles-Hébrides est une histoire d'accaparement des richesses et d'exploitation des populations. Nous sommes les héritiers de ce passé de souffrances et d'aliénation, du trafic d'êtres humains dans le cadre de ce qui est appelé blackbirding, à l'exploitation des travailleurs tonkinois au profit des grandes exploitations agricoles coloniales, en passant par les atteintes à la coutume dans toutes ses expressions. Le Vanuatu a subi une colonisation aussi brutale que celle qui a sévi ailleurs, en Afrique ou en Asie. Cet héritage ne doit pas être oublié pour pouvoir se projeter vers l'avenir. 

Aujourd'hui, nous sommes en quelque sorte à l'avant-garde de l'autodétermination des peuples. Venir ici avec plusieurs membres du Gouvernement, dont une ministre calédonienne, et elle-même en responsabilité dans une province ; le faire aux côtés de deux présidents de Gouvernement, élus indépendantistes, et le faire à côté du président MAPOU, après les trois référendums que nous avons organisés conformément aux accords de Nouméa, sous l'observation des Nations unies ; c'est venir comme Président d'une France qui a fait tout ce chemin, celui que j'ouvrais hier à Nouméa, chemin de pardon et d'avenir, qui reconnaît son passé, mais qui assume aussi le principe d'autodétermination, qui regarde ensemble l'avenir, mais qui, par ce biais-là, veut aussi exister, assumer sa présence en Indopacifique. 

En quelque sorte, cette présence et la stratégie que nous proposons, elle est respectueuse de l'histoire des peuples autochtones, respectueuse des cultures qui sont présentes, respectueuse des collectivités, mais elle assume complètement la force et l'ambition qu'elle veut porter dans la région. Et c'est cette France que vous avez devant vous et qui veut réengager avec le Vanuatu.
 
And this is why in this very context I mentioned, Mister Prime minister, that for me this Indo-Pacific strategy has clearly the willingness to be shoulder to shoulder with governments and countries of the region to strengthen your independence and sovereignty based on this common history, and to build the strategy, first based on our international law. The global order is completely disturbed by the willingness of new imperial powers jeopardizing this rule-based order because they invade some countries, like the Russians invading Ukraine, which is clearly putting at risk our common order. Our UN Charter, our international law, the one we built all together, is today jeopardized by the willingness of other big regional powers testing you, testing us, on our territories, on our maritime sovereignties, on your financial sovereignties, on your raw material, on our rare earths; on what makes, in substance, your sovereignty. And this new imperialism is the basis of a new colonialism, let's be clear. The French strategy is clearly to build with you the defense of this liberty of sovereignty in the region. And I do believe this is exactly the pillar of our presence here, our re-engagement and what we want to do with Vanuatu. 

Cette stratégie repose d'abord sur notre réengagement diplomatique et militaire. Nous avons, par notre présence militaire en Polynésie française et plus encore en Nouvelle-Calédonie, nos forces armées en Nouvelle-Calédonie qui sont là. Ce sont, à moins d'une heure d'avion, 1 600 militaires, des capacités aériennes, maritimes, terrestres. Et par la loi de programmation militaire que la France vient de voter et que je promulguerai dans quelques jours, nous allons investir 150 millions d'euros en équipements, en matériel de dernière catégorie, et nous allons déployer 200 militaires supplémentaires. 

La force de cette présence, c'est sa complétude, mais c'est aussi sa réactivité, comme en témoigne le patrouilleur maritime de dernière génération sur lequel nous serons ensemble dans quelques instants, Monsieur le Premier ministre. Il va deux fois plus vite que son prédécesseur. Et cette réactivité, vous l'avez vu, quand, grâce à nos forces armées, le lendemain du cyclone de mars, la France a pu déployer du matériel humanitaire ici même pour venir en aide aux populations. Plusieurs tonnes de matériels déployés. Nous étions le premier pays à réagir grâce à ces capacités.

Ce que je veux ici vous proposer solennellement, c'est de consolider cette alliance respectueuse, géopolitique, militaire par des missions communes, celles que nous avons faites sur le plan maritime il y a encore récemment, il y a quelques semaines. Nous avons fait des échanges de savoir-faire, des formations pour l'action en mer, à Nouméa en mars dernier. Nous avons mis en place un cadre d'action commune pour lutter contre les prédations en mer, ainsi que, l’a encore démontré la mission du D'Entrecasteaux la semaine dernière avec nos amis de Nouvelle-Zélande. Et l'arrivée en avril de l’Auguste Bénébig, ce dernier patrouilleur maritime, que nous allons visiter tout à l'heure, illustre encore cette action. 

Mais nous voulons aussi mettre en place de plus en plus de missions communes. Encore récemment avec le PRAIRIAL en Asie du Sud-Est, pour défendre cette liberté de navigation, et la mission PEGASE 2023, qui vient de s'achever, qui a traversé 10 pays de l'Indopacifique et qui nous a conduits à déployer plusieurs RAFALE qui étaient, si je puis m'exprimer ainsi, à mes côtés en Nouvelle-Calédonie il y a quelques jours. C'est un engagement de plus de 300 militaires, en particulier aviateurs français, s'appuyant sur ces forces, qui ont démontré, en coopérant donc avec plusieurs dizaines de pays de la région, la capacité de la France à se déployer, à se projeter, à agir en partenariat avec vous tous pour défendre cette souveraineté. Le faire sans hégémonie, en étant pleinement respectueux, avec cette capacité d'action, cette rapidité et cette volonté de défendre un Indopacifique ouvert, libre, pleinement souverain, et un territoire océanien respecté par tous, dans ses eaux comme dans ses airs. 

C'est aussi pourquoi nous allons renforcer, je le disais, ces actions, nos actions de lutte contre la pêche illégale et non régulée, et renforcer nos actions de formation en déployant une Académie du Pacifique qui sera basée en Nouvelle-Calédonie, qui nous permettra de former plusieurs sous-officiers de la région ; c'est l'offre aussi de coopération que nous vous proposons. 

Cette action, ce partenariat, nous voulons le compléter par un engagement aussi diplomatique, scientifique et d'action, qui repensent en quelque sorte la relation par un partenariat de développement et un investissement solidaire renforcé. En effet, la France porte un changement profond de philosophie de la relation entre le Nord et le Sud, sur la manière de lutter contre les défis contemporains. Très longtemps, on a parlé « d'aides publiques au développement », ce qui, dans l'approche même, a quelque chose de condescendant. Et nous avons laissé beaucoup de pays avoir à choisir ces dernières années entre la lutte contre la pauvreté et la lutte contre le changement climatique. Nous avons porté avec force un changement de philosophie profond que je veux appliquer de manière très concrète dans la région. 

D'abord, nous parlons maintenant « d'investissements solidaires », parce que nous voulons, par un partenariat sur la base de ce qui est porté, voulu par vos pays, investir ensemble face aux défis globaux. Parce que c'est notre intérêt mutuel, et c'est le faire avec le secteur public et le secteur privé. C'est exactement le sens du réengagement que nous voulons ici mener et je vais le détailler. Mais aussi, nous voulons refonder très profondément la manière à l'international d'articuler cette action. C'est ce qu'en France, nous avons porté avec un nouvel agenda, et ce pacte de Paris pour les peuples et la planète. Nous l'avons d'ailleurs porté en s'inspirant de plusieurs autres États insulaires, caribéens, pacifiques et autres. La Barbade a joué un rôle absolument essentiel. Ce pacte de Paris pour les peuples et la planète repose sur des principes très simples. 

Le premier : nul ne doit avoir à choisir entre la lutte contre la pauvreté et la lutte contre le réchauffement climatique, parce que nombre de pays comme les vôtres ont les deux combats à mener. Le deuxième : chacun doit pouvoir souverainement choisir son chemin. Il n'a pas à être dicté par des grandes enceintes multilatérales qui ont été construites dans leur gouvernance au moment où nombre de ces États qui en sont eux-mêmes victimes n'existaient pas dans l'ordre international. Le troisième principe, c'est qu'il nous faut pour cela, mener un choc profond de financement international et que les pays du Nord acceptent de dépenser beaucoup plus, ce que nous avons fait en augmentant nous-mêmes nos budgets. Mais il nous faut pour cela, et on a commencé à le faire à Paris, réformer la Banque mondiale, réformer le Fonds monétaire international pour qu'ils prennent plus de risques, pour qu'ils financent davantage la lutte contre les conséquences du réchauffement climatique et contre la pauvreté. Le dernier principe, c'est qu'il nous faut mobiliser plus d'argent privé en parallèle avec nous. Regardez les sommes qu'on entend chaque jour. Le financement privé est partout, dans des grands fonds qui cherchent des projets. Ils sont dans nombre de vos pays. Encore faut-il adapter les règles. 

Et l'un des éléments clés que nous avons adoptés à Paris, qui fait partie de ce pacte de Paris pour les peuples et la planète, c'est de prendre en compte dans nos critères financiers la vulnérabilité climatique et de dire que lorsqu'une catastrophe arrive, on doit la prendre en compte pour rééchelonner la dette des États qui ont été touchés. On doit la prendre en compte pour apporter des garanties adaptées à l'égard du secteur privé pour vous aider. Sinon, les pays pauvres, les pays en développement et les pays à revenus intermédiaires qui sont touchés de manière injuste, les premiers, souvent parce qu'ils sont insulaires, par les conséquences du dérèglement climatique sont ceux-là même qui ne pourront plus se financer dans l'ordre international, ni avec de la dette publique, ni avec du financement privé. 

Ce changement profond d'organisation de stratégie, c'est celui que nous portons et que je suis venu ici défendre et qui, à mes yeux, est essentiel. This is why we will advocate globally this new order and this for peace. The Paris pact for people in planet and this for peace is clearly the new bases of the renovation of global consensus and global order. De manière très concrète, nous allons appliquer cette philosophie ici, en nous réengageant. 

L'Agence française de développement va se réengager dans toute la région. 200 millions d'euros seront consacrés au Pacifique par l'Agence française de développement sur ce quinquennat, soit cinq fois plus que les cinq années passées, et beaucoup, beaucoup plus que ce que nous faisions historiquement. Nous allons également ouvrir ici une présence de l'Agence française de développement. Nous allons aussi réengager du financement direct d'infrastructures dont vous avez besoin. La France prendra en charge la reconstruction de l'hôpital de Melsisi, détruit par un cyclone. Vous le comprenez, vous l'avez saisi, cet investissement solidaire, ce changement de philosophie, nous l'appliquons ici, en Océanie, et nous le portons directement avec vous. 

Le troisième principe de ce réengagement, c'est le climat. Le climat est un pilier de la stratégie indopacifique, et en particulier océanienne, parce que la vulnérabilité climatique est ici. Ça fait partie de ces 4 P que j'évoquais et de ce nouveau pacte. Mais de manière très concrète, nous allons, là aussi, investir à vos côtés. Investir dans des moyens de recherche, investir dans des moyens d'action. C'est au cœur de notre stratégie indopacifique, et c'est exactement ce que nous avons décidé de faire en Nouvelle-Calédonie. C'est aussi ce que j'irai faire en Papouasie-Nouvelle-Guinée pour préserver la biodiversité. Demain, je serai aux côtés de notre ami le Premier ministre James MARAPE pour lancer, de manière inédite, un grand programme d'investissement pour préserver la forêt, en Papouasie-Nouvelle-Guinée. 

Ce que nous voulons faire ensemble, c'est ici vous aider à préserver votre espace, à vous protéger des changements climatiques et à mieux les prévoir. D'abord, par notre présence militaire pour protéger l'espace maritime. Ensuite, par notre action commune sur le plan climatique. Nous avons ensemble défendu une meilleure protection de la Haute-Mer avec l'accord BBNJ. Ensemble, nous sommes engagés par un dialogue sur lequel nous allons avancer aujourd'hui et des actions très concrètes. 

Prendre une action pour mettre en place de nouvelles aires protégées, avancer contre la pollution plastique et je sais à quel point le Vanuatu en particulier est en première ligne sur ce combat. Ce que nous voulons ensemble, c'est un traité juridiquement contraignant qui nous permette de mettre fin à la pollution plastique en 2040. Nous nous battrons pour l'obtenir. Et nous nous battrons ensemble là où la France accueillera en 2025 le Sommet des Nations unies sur les Océans que nous coorganisons avec le Costa Rica. Cet agenda international pour les océans, on va donc le faire avancer ensemble, grâce à notre agenda. Nous allons prendre ensemble des décisions historiques pour protéger les espaces naturels encore préservés de l'exploitation, à commencer, et je vous en remercie, par les grands fonds marins. La France s'est engagée pour l'interdiction de l'exploitation de ces fonds, et je sais, là aussi, que je peux vous trouver à nos côtés sur ce sujet. 

Sur tous ces points, de la réforme de l'architecture financière internationale, de la biodiversité en haute mer, des grands fonds marins, de la lutte contre le plastique, tout ça va constituer ce que nous lançons ensemble avec le Premier ministre, qui est un appel à la communauté internationale, dit « l'appel d'Ifira ». Cet appel d'Ifira est un engagement pris ensemble pour porter la force de ce pilier climatique qui est au cœur de notre stratégie océanienne et indopacifique. 

Au-delà de ça, nous allons continuer à intensifier notre coopération scientifique à travers l'IFREMER, l'IRD, le CIRAD, qui existe déjà et que nous allons consolider ; et à travers les initiatives engageant d'ailleurs ces acteurs de recherche et que finance aussi l'Agence française de développement ; qui, avec plusieurs autres pays de la région, et je veux citer entre autres aussi la Nouvelle-Zélande, l'Australie, vous-même et plusieurs autres, nous permettent de construire des actions de recherche très concrètes pour mieux comprendre les évolutions maritimes, pour mieux prévoir les évolutions du trait de côte et pour aider davantage à protéger celui-ci des évolutions à venir. 

J'avais l'occasion de le dire, et c'est d'ailleurs au cœur de plusieurs de ces initiatives régionales, c'est une manière aussi de tresser les savoirs qui existent dans les peuples autochtones, leur connaissance de la nature, leur réponse pour protéger celle-ci et la biodiversité, et la science que nous apportons grâce à nos organismes et à nos coopérations scientifiques. Cette coopération climatique est, à mes yeux, ce troisième pilier stratégique de cette alliance que nous voulons mener. 

Et puis, le quatrième pilier, c'est celui de l'intensification des échanges très concrets régionaux. Il passe par notre réactivité, je le disais, en rappelant le déploiement très rapide que nous avons su mener au lendemain du cyclone, des cyclones qui ont touché votre pays. C'est ce que nous voulons renforcer à travers les systèmes d'alerte précoce. De manière très concrète, cette coopération régionale renforcée, nous allons la déployer sur plusieurs axes. 

D'abord, la sécurité civile. Nous allons prévoir des avances de stocks d'urgence avec de nouveaux entrepôts en déployant un réseau de la Croix-Rouge française, car chaque seconde compte. Comme je l'ai annoncé, nos forces armées de Nouvelle-Calédonie vont accroître un renouvellement significatif qui va vous toucher, mais nous allons accroître aussi une présence avancée en termes de sécurité civile pour former, équiper et vous permettre de réagir en temps et en heure ici même. 

La deuxième chose, c'est que nous voulons avancer et nous soutenons le gouvernement de Nouvelle-Calédonie dans un accord de commerce qui permettra de renforcer les liens commerciaux et l'intégration de la région. 

Et puis, la troisième chose, c'est que nous voulons renforcer les échanges humains, culturels, universitaires et scientifiques, qui sont aussi les garanties d'une pleine souveraineté. Ce sont les étudiants, les chercheurs, les scientifiques, les entrepreneurs qui contribuent à donner à une Nation non seulement un sens de la fierté, mais aussi à faire fonctionner les institutions de l'État sans lesquelles il ne saurait y avoir de prospérité et d'épanouissement. Nous avons ainsi contribué à la construction de l'université du Vanuatu, qui doit être une première étape d'un projet encore plus ambitieux. 

Ce que nous voulons soutenir désormais est, en quelque sorte, un programme Erasmus du Pacifique, à vocation à s'étendre sur l'ensemble de l'Indopacifique. Les étudiants de la région doivent pouvoir enrichir leur parcours universitaire avec une expérience à l'étranger et être en mesure de saisir toutes les opportunités que cet espace commun offre. C'est pourquoi la France veut bâtir, en lien avec vous et avec tous les gouvernements qui se joindront à cette initiative, dans un premier temps, un programme océanien de circulation des étudiants. Ce programme aura vocation à permettre des échanges et des années d'échanges entre les étudiants de la région et associera en particulier les universités qui sont les nôtres en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, celles du Vanuatu et celles de tous les États de la région qui voudront rejoindre cette initiative. Je pense qu'elle est essentielle et qu'elle nous permettra d'avancer. 

Je terminerai, Monsieur le Premier ministre, en vous disant aussi que, dans le cadre de ces échanges, il y a la force de la francophonie. Vous m'avez fait l'amitié tout à l'heure de m'accueillir en français, et je sais que vous avez été assidus ces derniers temps, en particulier à notre Alliance française, et ça me touche beaucoup. Je veux vous en remercier. Votre cousin, le Grand chef qui m'a accueilli avec un message coutumier, l'a fait dans un français bouleversant, lui dont le père accueillait le général de Gaulle il y a 57 ans. Ce lien n'est pas qu'un lien du passé, c'est un lien d'avenir. Et je veux avoir ce moment où je parle des échanges régionaux pour vous dire la force de cette présence est qu'on soit là tous ensemble sous cette forme. La France, elle est une, indivisible et plurielle. 

Et vous savez, cette France qui peut vous paraître lointaine, à plusieurs milliers de kilomètres d'ici, elle s'est construite sur deux choses : l'État français, qui a soumis, non pas des tribus, mais des ducs, d'autres pouvoirs qui étaient concurrents à celui du roi. L'État français, par sa présence militaire, puis fiscale, et la langue. Et c'est une ordonnance de François 1er qui a vraiment consolidé l'unité de la France à travers la langue française, par l'ordonnance de Villers-Cotterêts. Cette langue, à travers les conquêtes, la colonisation et donc des pages sombres, tristes, à travers aussi des partenariats ; c'est une langue de tous les continents. Le soleil ne se couche jamais sur la langue française. Et des centaines de millions de locuteurs existent à travers le monde. 

Cette langue est une chance y compris pour vous, une chance dans la région pour commercer, pour étudier, pour écrire. Je parle devant aussi un auteur, cher Président, et son éditeur. Mais une langue qui vous permet aussi, avec l'Asie du Sud-Est, avec l'Afrique, avec une partie de l'Amérique latine, d'échanger. La francophonie est une chance. Et le Vanuatu est une chance pour la francophonie, vous qui êtes dans cette région, le seul État indépendant francophone. Je veux ici que nous renforcions cette avancée de la francophonie, qui est une francophonie ouverte. 

La francophonie n'appartient pas à la France. Elle appartient à celles et ceux qui écrivent, qui créent dans cette langue, qui inventent des mots qui parfois nous reviennent. Aujourd'hui, son épicentre, d'ailleurs, je le dis souvent, est, d'un point de vue démographique, sans doute dans le bassin du fleuve Congo. Et des mots inventés là-bas reviennent sur les rives de la Seine. Et des monts inventés ici vont circuler et revenir. C'est une force. 

Et je veux que nous continuions d'avancer sur ce chemin, qui est un chemin de création, de coopération, et qui est un chemin qui nous fait revisiter la relation bilatérale d'une manière très différente, non pas en ressassant un passé qui, en quelque sorte, nous ferait souffrir, mais en assumant que c'est une chance. Grâce à la francophonie, dans cet espace océanique, vous avez des territoires français qui ont une culture, une identité qui sont là, Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, je n'oublie pas Wallis-et-Futuna, qui sont une force, qui veulent coopérer avec vous, et beaucoup d'autres locuteurs français qui sont prêts à avancer et à agir. Je vous attends donc à Villers-Cotterêts, en 2024, où la France organise le Sommet de la francophonie qui nous permettra, là aussi, d'avancer sur nos cultures. 

Voilà, Monsieur le Premier ministre, chers amis, ce que je voulais ici vous dire. Donner un peu de contenu à ce qu'est cette ambition indopacifique de la France dont vous avez entendu parler, mais surtout cette ambition océanienne que nous avons ensemble et que nous portons ensemble, avec la diversité de ce qu'est la France, avec la richesse de ses territoires et le respect pour les uns et les autres. Nous allons continuer tous ensemble à avancer. 

C'est la raison pour laquelle nous allons aussi, je le dis devant le président BROTHERSON, ouvrir une ambassade aux Samoa, la première en Polynésie. Et donc, vous l'avez compris, c'est un réengagement de la France en Mélanésie, ce sera un engagement, un réengagement en Micronésie, mais aussi en Polynésie. Cette première ambassade aux Samoa est absolument clé. Ce poste à Apia nous permettra également d'être en contact direct avec le Programme régional océanien de l'environnement, une organisation au cœur des enjeux dont nous venons de parler et qui concrétise, au-delà de ce que j'évoquais, les engagements très concrets qui sont les nôtres. 

Voilà, Monsieur le Premier ministre, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais vous dire. Je suis heureux d'être parmi vous aujourd'hui à Port Vila, heureux d'être ici au Vanuatu, 57 ans après le général de Gaulle. Heureux de venir ici reconnaître un passé douloureux, mais ouvrir une page d'avenir ambitieuse, forte, volontariste, de le faire avec eux. Une France qui s'assume dans sa diversité, mais qui est unie et dans sa pleine souveraineté, et qui veut avec vous relever les défis d'aujourd'hui et de demain, de la géopolitique, du climat, de la culture, de la science, de la création, de l'éducation, avec respect, ambition et générosité. 

Vive notre coopération !
Vive le Vanuatu !
Vive la France !
Vive notre amitié !

Le Président Emmanuel Macron a ensuite tenu à s'adresser à la communauté française. Il a commencé son discours en exprimant sa gratitude envers celles et ceux qui font vivre la relation entre le Vanuatu et la France depuis la visite du général de Gaulle, il y a 57 ans

Lors de son discours, le Chef de l'État a également annoncé que cette visite marquait un réengagement profond de la France au Vanuatu et dans la région à l'image des décisions prises dans le cadre de la stratégie française en Indopacifique : réengagement militaire, déploiement d'actions diplomatiques, investissements solidaires.

Revoir le discours : 

Festival des Arts mélanésiens

Enfin, le Président de la République s'est rendu à la 7e édition du Festival des Arts mélanésiens (Mac’Fest) qui rassemble des artistes de Papouasie-Nouvelle-Guinée, des îles Salomon, de Fidji, du Vanuatu et de la Nouvelle-Calédonie. Il a exprimé sa joie de célébrer la force, la vitalité de la Mélanésie et sa capacité d'échange et de partage.

Réécouter la prise de parole du Président Emmanuel Macron : 

Le Président Emmanuel Macron s'est rendu au Vanuatu ce jeudi. 

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