Mardi 13 juin, le Président de la République s’est rendu sur le site du laboratoire Aguettant, en Ardèche.

À l’occasion de ce déplacement, le Président Emmanuel Macron a présenté sa stratégie pour accélérer la reconquête sanitaire engagée depuis 2020.
 


Il a notamment fait plusieurs annonces fortes afin d'accélerer la relocalisation sur le territoire français de nos capacités de production de médicaments essentiels :

  • La stabilisation d'une liste unique de 320 médicaments essentiels pour traiter tous les Français afin de sécuriser les chaînes d’approvisionnement des molécules,
  • La relocalisation, dès les prochaines semaines, de 25 médicaments grâce à 8 projets de relocalisations et un investissement de plus de 160 millions d'euros via France 2030,
  • Le déploiement d'une enveloppe de 50 millions d'euros pour soutenir de futurs projets de relocalisation et renforcer notre compétitivité,
  • La présentation d'une nouvelle feuille de route du Gouvernement pour renforcer la prévention, le bon usage des médicaments et mieux anticiper la gestion des épidémies et la saison hivernale,
  • Le renforcement de la transparence pour permettre à tout le système de soin de travailler en bonne articulation grâce aux données existantes,
  • Le renforcement de nos capacités de production au niveau européen, notamment avec la mise en œuvre du PIIEC Santé.

Revoir le discours du Président : 

13 juin 2023 - Seul le prononcé fait foi

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DISCOURS DU PRÉSIDENT EMMANUEL MACRON DEPUIS L’USINE AGUETTANT EN ARDÈCHE.

Messieurs les ministres, 
Monsieur le préfet, 
Mesdames et Messieurs les parlementaires, 
Monsieur le président du Conseil départemental, 
Monsieur le maire, 
Mesdames et Messieurs les élus, 
Monsieur le président du groupe Aguettant, 
Monsieur le directeur, 
Mesdames et Messieurs, en vos grades et qualités, 
Mesdames et Messieurs. 

Merci beaucoup d'abord de nous accueillir dans ce site, ici dans votre commune, Monsieur le maire ; sur ce site de production au cœur d'une entreprise familiale centenaire dans laquelle on investit massivement ces dernières années, ce dont nous nous félicitons et nous continuerons de vous accompagner comme nous l'avons fait ces dernières années. Je voulais ici vous le dire avec beaucoup de force. 

En effet, les années que nous venons de traverser et je veux ici replacer ce que nous venons de vivre ensemble et merci encore pour cette visite ; les choix qui ont été pris, ce que notre pays, ce que notre Nation, ce que nos Nations ont vécu avec la crise Covid, c'est que nous avons fait l'expérience de la dépendance, tous, collectivement. On a pris collectivement conscience de cette dépendance industrielle qui n'est jamais bonne en général et qui est encore moins compréhensible et acceptable par nos compatriotes quand elle touche la santé et les médicaments. Cette dépendance, on le sait, est particulièrement marquée vis-à-vis des importations extra européennes : 60 à 80 % des API sont produits en Asie et 40 % des médicaments commercialisés dans l'Union européenne sont importés. C'est ça la réalité des chiffres. 

Alors, dès 2020, nous avons décidé de réagir en Europe et tout particulièrement en France : vous en êtes la parfaite illustration avec France Relance puis France 2030. Toute la filière, notamment les grands projets industriels et ceux de votre laboratoire, ont été accompagnés et ont permis de relocaliser déjà, de développer des chaînes de production résolument. C'est le développement de sept produits, l'ajout d'une ligne de seringues préremplies sur le site de Champagne et d'une ligne de fabrication d'ampoules sur le site de Gerland et bientôt, l'ajout d'une ligne de production à haute cadence permettant un quadruplement des capacités de l'entreprise pour la production des médicaments en flacon et le développement de nouveaux médicaments d'urgence et de réanimation prêts à l'emploi. 

Vous avez ouvert un nouveau site à Gerland, créé de nouvelles lignes de production ici à Champagne et aujourd'hui, en plus de servir le marché français, vous exportez dans une centaine de pays. Vous me citiez des chiffres, des développements des trois dernières années et des années à venir qui sont extrêmement impressionnants à cet égard. En plus, je veux ici redire que vous avez participé, aux côtés des ministres au sauvetage de l'entreprise Carelide avec l'entreprise Delpharm et cette reprise permettra de pérenniser la production française de poches de perfusion et de paracétamol avec le soutien financier de l'Etat, mais encore fallait-il avoir des acteurs industriels pour prendre ce risque. 

Tout ça pour dire que nous sommes ici dans une entreprise qui illustre la pertinence de ces dispositifs d'aide, le réveil collectif du besoin de recréer de l'indépendance industrielle dans le domaine du médicament et des traitements, des sauvetages d'entreprises du secteur et qui est un modèle pour nos ETI, industriels, que nous voulons continuer de développer. 

En effet, tout le défi, et nous l'avons rappelé ces dernières semaines, c'est d'abord de gagner la bataille. Au fond, les trois batailles qui, pour moi, se rejoignent et sont essentielles : réindustrialiser, regagner en souveraineté et décarboner. Elles se rejoignent et on a eu là une illustration parfaite, vous l'avez d'ailleurs très bien décrite. Pourquoi pendant des années, on a laissé de la production dans votre secteur se délocaliser ? Parce qu'il n'y avait pas assez de rendement en France, parce qu'il y avait eu des politiques qui n'étaient pas toujours cohérentes et parce qu'on a laissé certaines parties de notre industrie qui étaient plus polluantes, qui étaient moins adaptées aux choix collectifs, qui parfois étaient moins rentables aller se faire ailleurs. 

Là, on décide de retrouver de la souveraineté industrielle, en particulier en matière pharmaceutique. Ce faisant, on recrée des emplois industriels : vous êtes déjà passé de 90 à 140 salariés ici et vous allez continuer de vous développer. On fait de la décarbonation parce que le conditionnement en seringue qu'on a vu tout à l'heure permet d'économiser énormément c’est-à-dire que ce sont des conditionnements plus respectueux de l'environnement. Ça réduit la chaîne logistique, ça permet d'éviter le gaspillage et c'est à cette condition qu'on redevient justement rentable et qu’on regagne en souveraineté industrielle sur le médicament. 

Souveraineté, réindustrialisation, bataille pour le climat et décarbonation. Ce triptyque, c'est celui que nous poursuivons dans tous les secteurs, avec des choix macroéconomiques et sectoriels que nous avons fait ces dernières années. Alors que notre pays avait détruit, pendant les 15 premières années de ce siècle, 1 million d'emplois dans le domaine industriel ; depuis 2017, on a recréé 1 700 000 emplois. Et on a dans l'industrie stricto sensu déjà recréé au moins 80 000 emplois. Là où nous avions, entre 2008 et 2016, à cause du choc de la crise, perdu 600 usines dont 60 dans votre région, notamment dans le secteur de la santé, il faut bien le dire, nous sommes passés du premier au cinquième rang européen. On a pu rattraper le retard quasiment pour moitié. On en a déjà rattrapé, on en a recréé plus de 300 en net. 

Donc, la réindustrialisation, ce n'est pas un concept. Elle est à l'œuvre parce qu'on a fait des réformes, parce qu'on a fait des choix collectifs, parce qu'on a décidé d'investir et qu'on a montré qu'il n'y a pas de fatalité. Simplement, on ne recrée pas la même industrie qu'hier. On fait des choix, on décide de créer une industrie à plus haute valeur ajoutée, plus décarbonée et c'est à ce prix, si je puis dire, avec cette clarté stratégique, qu'on peut réussir à atteindre nos objectifs. Ce qui fait que le chômage a reculé, qu'on n’a jamais eu autant d'apprentis, jamais eu un chômage aussi bas pour les jeunes en même temps qu'une telle participation au marché du travail et que nous sommes, pour la quatrième année consécutive, la première destination des investissements étrangers. 

Ce paysage macroéconomique, il est tout particulièrement vrai dans le secteur pharmaceutique. Je le disais, ce domaine, celui des médicaments, c'est peut-être l'un des plus spectaculaires en matière de souveraineté parce que c'est l'un des secteurs pour lequel la perte de souveraineté est la plus intolérable. Déléguer à d'autres le soin de produire les médicaments essentiels dans un monde qui se fragmente, c'est une impasse. On l’a vécu en cas de crise sanitaire, on pourrait être amené à le revivre et c'est pourquoi il nous faut ici redoubler d'efforts. 

Redoubler d'efforts et c'est ce que nous avons fait, c'est d'abord innover dans les écosystèmes. C'est le sens des investissements dans la recherche et l'innovation que nous avons décidés avec la loi de programmation pour la recherche qui a été passée dans le premier quinquennat, avec France 2030 et plus de 50 milliards d’investissement et avec la dizaine de nouveaux IHU et bioclusters dans toute la France que j'ai annoncés il y a quelques semaines à l'Institut Curie. Grâce à cela, nous allons pouvoir développer en France de nouvelles thérapies, allant des thérapies ARN messagers aux anticancéreux, et pour les médicaments les plus innovants, c'est tout le sens des mesures d'accès direct aussi qui sont au cœur de la stratégie innovation santé que nous avons préparée grâce à vous tous. Avoir une stratégie d'innovation forte, y mettre les moyens, simplifier, accélérer nos dispositifs, et puis garder ce qui est une force française, qui est de conserver un accès pour tous aux médicaments, parce que ce modèle nous y tenons, et donc les médicaments classiques, historiques, mais aussi les médicaments les plus récents, parfois en cours de développement, nous voulons qu'il y ait cet accès pour tous. 

Et puis à côté donc de cette innovation dans les écosystèmes en matière de médicaments, on a décidé de relocaliser des médicaments critiques, relocaliser la production de certains médicaments les plus stratégiques. C'est pour cela que nous avons, dès 2018 — et encore plus avec la crise Covid — lancé des actions massives. C'est aussi pour cela que je me suis engagé fortement sur ce sujet lors de la dernière campagne présidentielle. 

Avec France Relance, nous avons massivement renforcé nos chaînes d'approvisionnement. Ce sont ainsi plus de 100 projets portant sur des médicaments et des vaccins et concourant au renforcement de la chaîne de valeur de médicaments qui ont été soutenus, allant des tests de diagnostic in vitro à la chaîne de valeur des vaccins pour permettre à la France d'assurer le remplissage de 660 millions de doses supplémentaires par an. 

Avec là encore de vrais résultats, et je veux remercier tous les industriels du secteur qui ont participé, la relocalisation de la production du principe actif du paracétamol en France par séquence, la production de masques ou encore de médicaments à partir de plasma sanguin à Arras, IPSEN qui investit 40 millions d'euros sur le site de Signes dans le Var pour relocaliser la production d'anticancéreux, Pierre FABRE qui relocalise toute la chaîne de production depuis le principe actif jusqu'au packaging Braftovi-Mektovi, Sanofi qui fait le choix de la France pour y implanter de nouvelles capacités et savoir-faire à Neuville, Marcy ou Sisteron, et beaucoup d'autres. Cette dynamique est lancée et donc cette politique d'innovation, de relocalisation fonctionne et elle fait venir des investisseurs étrangers du secteur pharmaceutique. C'est ce qu'a très bien montré encore Choose France il y a quelques semaines, mais ils ne viennent que parce qu'ils voient des acteurs français et historiques, des nouveaux acteurs se développer et porter des projets partout sur le territoire. C'est ce qui a convaincu l'américain Pfizer d'investir 500 millions d'euros supplémentaires en R&D et production par an. C'est l'Italien Chiesi à Chaussée-Saint-Victor pour produire la future génération de dispositifs inhalés à plus faible empreinte carbone, le Danois Novo Nordisk qui est à Chartes, le Britannique GSK, AstraZeneca il y a encore quelques années et j'en passe. Tout cela renforce le soutien de nos historiques de la pharmacie, ceux du G5 Pharma et leurs 53 usines qui représentent 20 000 collaborateurs et 1 milliard d'euros d'investissements industriels chaque année. Et ce sont également toutes les ETI, dont Aguettant, bien sûr, CDMO et d'autres du secteur, que nous avons découvert parfois pendant la crise du Covid et qui nous aident à produire ces vaccins, Delpharm, Fareva et tant d'autres. Elle permet aussi de consolider la dynamique de start-up de la biotech et de la medtech qui se développe, DNA Script, Lifen, Osivax, Trifrog, ImCheck. Vous le savez, je ne suis pas de ceux qui opposent les start-ups aux ETI ou aux grands groupes. C'est un continuum et nous avons besoin justement de renforcer, d'accélérer les innovations parce que les uns les autres se nourrissent. 

Nous avons donc réussi cette phase de rattrapage, parfois d'ailleurs de prise d'avance dans certains segments. Maintenant, il nous faut aller plus loin. Et c'est ce que je suis venu vous dire aujourd'hui. D'abord, en termes d'innovation, en accélérant, c'est tout le sens des IHU et des bioclusters en particulier qui vont conduire à un investissement public-privé inédit, qui sont une phase d'accélération massive sur tout le territoire. J’ai donné les détails il y a quelques semaines, mais je compte vraiment sur tous les industriels du secteur pour y investir massivement parce que nous avons, je crois, toutes les grandes verticales d'avenir qui y sont représentées : avec l'Agence Innovation Santé en développant aussi l'accompagnement des start-up innovantes, en simplifiant les essais cliniques, en massifiant l'achat innovant de technologies. Et donc, au-delà des investissements on doit continuer d'améliorer notre écosystème, aller beaucoup plus vite sur les autorisations, sur les phases précliniques, les phases cliniques et les phases de développement, et permettre d'avoir un écosystème beaucoup plus coopératif entre les innovateurs, le développement industriel et les régulateurs. J'ai à cet égard passé des commandes très claires avec un horizon de 6 mois. 
Ensuite, il faut continuer de développer des médicaments innovants en France pour atteindre l'objectif que nous nous sommes fixés de 20 biomédicaments en France. Nous en avons déjà 5 aujourd'hui et une vingtaine en essais cliniques. Et donc, on peut tout à fait atteindre ce résultat, mais il faut continuer d'avancer, d'encore accélérer.
 
Ensuite, c'est la grande question des relocalisations. Je le disais, la dynamique est lancée dans une phase défensive. On a parfois commencé à prendre de l'avance, mais maintenant, on doit systématiser les choses. Alors nous allons d'abord stabiliser une liste unique de médicaments essentiels pour traiter nos concitoyens, qu'on évalue selon les risques de tension et qu'on établisse un système de surveillance de ces produits et des mesures de gestion du risque et que l'ANSM puisse prendre des sanctions si les mesures réglementaires ne sont pas respectées. Cette liste sera évolutive et sera détaillée cet après-midi par le ministre. Elle compte 450 médicaments. Elle n'est pas donc figée, mais c'est une liste qui est déjà très importante parce qu'elle va concentrer nos efforts. Le ministre va donc la détailler. C'est une première étape importante visant à l'accomplissement de notre objectif de sécurisation des chaînes d'approvisionnement de ces molécules au niveau français-européen. Et au fond, pour ces 450 médicaments déjà identifiés, on se dit on n'a pas le droit d'avoir de faiblesse. Et donc, ce qu'on a parfois vécu pendant la crise Covid et parfois ces derniers mois sur certains de ces médicaments, on ne doit pas le reproduire. Et donc dans les mois et les années qui viennent, on doit absolument sécuriser sur ces 450 médicaments nos chaînes, soit en relocalisant totalement, soit en diversifiant et en continuant d'innover. 

Ensuite, sur une partie - c'est le cœur du cœur des réacteurs - des produits sur lesquels on identifie un besoin de renforcer nos sources d'approvisionnement. Et là on doit absolument continuer de relocaliser la matière première ou le produit fini, parfois les deux, pour sécuriser l'approvisionnement en stock du territoire. Et si je puis dire, au sein de ces 450, il y a une liste cœur. Quand la diversification ne suffit pas, même quand doublonner notre chaîne d'approvisionnement ne suffit pas : il faut relocaliser. C’est pourquoi nous avons décidé là d’accélérer, et dans les semaines avenir, je vous annonce que sur la cinquantaine de premier médicament essentiel pour lesquels notre dépendance aux importations extra européenne est avérée - donc les médicaments à relocaliser - la moitié, c'est-à -dire 25 de ces médicaments, verront leur production relocalisée ou augmenter significativement sur le territoire national. J'avais pris un engagement de 50, la moitié d'entre eux dans les prochaines semaines. Nous allons finaliser les plans, les annonces et les investissements pour totalement relocaliser la chaîne. 8 nouveaux projets de relocalisation avec chacun plusieurs molécules sont soutenus par l'Etat via France 2030 et vont être lancés, représentant un investissement total de plus de 160 millions d'euros. Evidemment, il vous concerne au premier chef. C'est ce que vous avez déjà commencé sur les lignes et il va être systématisé. L'intégralité de la chaîne de valeur du midazolam, qui est essentiel pour nos produits d'anesthésie réanimation sera ainsi relocalisée, des intrants aux produits finis, ce qui vous touche tout particulièrement. Le principe actif, un curare utilisé en soins intensifs, qui a été en forte tension pendant la crise, sera également complètement relocalisé. La production du produit fini de ce médicament ayant déjà été relocalisée dans le cadre de France Relance, on va complètement relocaliser les principes actifs. On renforce également les capacités de production française du principe actif et du produit fini de la morphine et dans un contexte de tension importante sur l'amoxicilline pédiatrique, l'hiver passé, l'État accompagne le renforcement des capacités du site français qui ont produit à Mayenne, chez GSK. Nous relocalisé aussi la production de 6 anticancéreux. Vous le voyez, les décisions qui vont être annoncées dans les prochains jours et prochaines semaines, nous permettent de relocaliser, souvent du principe actif, mais au-delà, la production de 25 médicaments qui sont au cœur au sein de cette liste de 450. 

L'intégralité des industriels qui sont soutenus dans le cadre de ce plan prennent des engagements conséquents en matière de sécurité d'approvisionnement pour les produits dont la production est ainsi relocalisée et renforcée, ce qui nous permet aussi de pouvoir tenir ses engagements à l'égard de nos hôpitaux, de nos professionnels de santé et de nos compatriotes. Et ces projets, de manière très concrète, nous permettent de renforcer notre sécurité sanitaire, d'anticiper, de limiter les tensions et risques d'approvisionnement et ils manifestent aussi une nouvelle donne que nous avons lancée dès 2018, partenarial entre l'Etat et l'industrie pharmaceutique. Et je veux vraiment ici remercier tous les industriels qui y sont impliqués : GSK, Séquence, EuroAPI, Interior, SkyePharma, Benta Lyon, Matt Pharma, Aguettant qui s'engagent avec nous dans cette nouvelle dynamique au-delà des industriels déjà précédemment cités. Et pour pérenniser ce partenariat nouveau, un guichet dédié à la relocalisation des médicaments essentiels sera également lancé dans les tout prochains jours. Il permettra de soutenir les projets d'extension de capacité ou de relocalisation pour aller beaucoup plus vite et de manière beaucoup plus simple. Il financera la mise au point de procédés de production innovants et décarbonés pour tous ces médicaments, ce qui permet aussi de renforcer notre compétitivité. Et une première enveloppe de 50 millions d'euros permettra de soutenir les premiers projets au-delà de ceux que j'ai déjà annoncés. Cela va nous permettre, avec ce guichet unique, de systématiser l'amorçage avec ces 25 médicaments que je viens d'évoquer. Concrètement, cela veut dire que nous souhaitons pouvoir continuer d'avancer plus vite et plus fort, mais aussi payer le juste prix de certains médicaments lorsque c'est la condition indispensable pour garantir une production française. Je sais que des travaux sont en train d'être terminés sur ce point et je le dis ici, le médicament n’est pas la variable d'ajustement de nos budgets de santé. Il faut être cohérent. 

On veut du sérieux pour nos compatriotes et donc il faut du contrôle mais on veut aussi donner de la visibilité et avoir une politique industrielle. Pour le faire, il faut pouvoir payer pour l'innovation, payer pour relocaliser et aussi avoir tous un juste prix qui permet, dans la durée, en donnant de la visibilité, d'avoir justement le tissu industriel qui doit redevenir le nôtre. C'est le coût à payer pour redevenir indépendant. Je le dis parce que c'est la cohérence de notre politique. Il en va de même pour la pharmacie comme pour notre alimentation. Quand j'entends les débats que nous pouvons avoir en ce moment, quand on fait croire aux gens que plus rien n'a de prix et que plus rien n'a de coût, qu’il n'y a plus de gens qui produisent chez nous parce qu'on décide à ce moment-là simplement de casser le tissu industriel … Non, il faut être cohérent et donc il faut avoir une politique de sérieux, de long terme, d'investissement, d'accompagnement politique, de l'offre et de la demande, là aussi les deux en même temps. Le prix, nous continuerons à le payer avec clarté. 

Enfin, nous devons également porter cette ambition de relocalisation et de renforcement des capacités de production au niveau européen. C'est ce que nous avons lancé dès la crise. La France étant membre coordinateur du PIIEC santé, projet européen dont l'un des axes vise à innover pour rendre plus compétitive et plus verte la production de médicaments sur les sites productifs européens. Je pense par exemple au projet porté dans ce cadre par EuroAPI, qui prévoit d'augmenter les capacités de production de plusieurs principes actifs sur lesquels nous sommes très dépendants, comme je le disais tout à l'heure, d'importations asiatiques par des procédés qui sont innovants et décarbonés. Je pense aussi au paquet pharmaceutique proposé récemment par la Commission européenne de nous aider à renforcer notre résilience commune, comme nous l'avons fait avec l'instrument HERA. Et là aussi, je le dis très clairement, il faut que nous, Européens, soyons très cohérents. Nous devons d'abord être cohérents en matière de propriété intellectuelle. Oui, il faut être exigeant en cas de crise quand il y a des choix de fermeture de certains marchés comme on a pu le vivre pendant la crise Covid. Mais on ne peut pas fragiliser l'attractivité de l'Europe en menaçant le cadre et la stabilité de la propriété intellectuelle et en la rendant moins attractive que les États-Unis ou d'autres. Nous devons donc être compétitifs, donner un cadre stable et lisible à tous les industriels européens et non européens qui veulent développer chez nous. 

On doit aussi définir et soutenir, en Européens, une ambition et des objectifs chiffrés pour la production sur notre sol des médicaments essentiels pour conjuguer les efforts des États membres afin de renforcer la compétitivité de nos entreprises du médicament et réduire les tensions d'approvisionnement. Puis, je souhaite soutenir l'initiative prise par la Belgique d'un Critical Medecines Act permettant justement d'identifier les éléments critiques du secteur, d'y investir et d'avoir une politique d'aide pertinente, comme nous l'avons fait sur les matières critiques européennes. 

Sur ces matières critiques, on a décidé, sur des métaux rares, d'avoir une politique de développement de notre souveraineté, de reconquérir des parts, il faut le faire sur les segments qui sont clés en termes justement de pharmacie. Nous devons continuer, vous l’avez compris, de faire front pour accélérer au niveau français et européen. 

Enfin, et je terminerai sur ce point, il nous faudra continuer de faire front sur la question des pénuries. Alors évidemment, tout ce que je viens de dire vise à ne plus avoir dans la durée de pénuries de médicaments comme on a pu le vivre. C’est un sujet qui est très complexe, qui est multifactoriel, qui ne peut pas être que franco-français. La réponse structurelle, c’est celle que je viens d’apporter, c’est de repenser nos chaînes de production, de recréer de la résilience et de relocaliser certaines parties, d’innover davantage chez nous pour plus produire et faire de la recherche chez nous. Mais on sait qu’on aura de toutes façons encore des situations d’urgence dans les prochains mois et les prochaines années donc il faut y parer en faisant le bilan de l’hiver que nous venons de passer où, concernant le paracétamol, l'amoxicilline, nous avons agi très tôt grâce à un système d’alerte et de surveillance et un bon dialogue. Nous savons malgré tout que la situation est difficile alors il faut aller plus loin. 

D’abord en renforçant encore plus qu’on n’a commencé à le faire la prévention : le meilleur moyen de ne pas dépendre de certains produits, c’est d’avoir une bonne politique de prévention. On va continuer de le développer, on ne lâchera rien. Il ne faut pas lâcher notre prévention de base, c’est la prévention dès l’école, ce sont les diagnostics réguliers, ce sont les gestes du quotidien qu’on a appris durant la pandémie de Covid et qu’on a un peu relâchés mais tout ce qui permet justement d’avoir une politique de prévention très simple, qui n’a aucun coût pour notre sécurité sociale, c’est une question de civisme et d’éducation collective. Mais c’est ce qui permet de prévenir des pics épidémiques et de réduire notre consommation de médicaments. Je le dis, ça peut paraître un truisme, mais c’est essentiel parce que ça fait moins de malades et ça fait moins de coûts pour la sécurité sociale. 

Ensuite, c’est évidemment la politique de vaccination qu’on va continuer de développer. Je pense évidemment au Covid, à la grippe, à la bronchiolite chez les nourrissons et donc on va continuer d’avancer avec tous les acteurs du secteur. Sur ce dernier point, on a même décidé, sous réserve de la validation de l’efficacité de médicaments par la Haute autorité de santé, de faire des précommandes. C’est une politique de prévention, on va continuer d’avancer sur la vaccination parce qu’elle permet d’éviter la consommation de médicaments. 

Ensuite, lorsque nous sommes malades, il faut une utilisation plus raisonnable des médicaments. Là aussi, on l’a vu l’hiver dernier, ces produits sont des biens précieux et donc nous devons avoir une politique là aussi responsable. Dans 1 cas sur 2, nous savons que, par exemple, les antibiotiques prescrits en ville sont utilisés à tort. Il faut continuer d’avoir une politique de sérieux sur ce point. Il s’agit d’un enjeu sanitaire autant qu’économique et capacitaire ; capacitaire parce que quand il est prescrit et utilisé à tort, il prive le bon usage, s’il y a de la rareté ; économique parce que ça veut dire qu’on rembourse à tort des antibiotiques qui sont mal utilisés ; et sanitaire parce que cela développe de l’antibiorésistance qui est une question majeure pour les années à venir. Je le dis là avec beaucoup de gravité, c'est un sujet dont nous nous saisirons. La recherche a déjà commencé, mais nous continuerons d'y investir parce que dans à peu près tous les pays développés, vous verrez que les grandes pandémies que nous aurons et les grandes difficultés sanitaires seront très souvent liées aux antibiorésistances et aux mécanismes de résistance et de mutations que nous avons développés à cause d'un mauvais usage des médicaments. La France n'est pas exemplaire sur ce point et donc on doit continuer le travail et j'attendrai des mesures ambitieuses dans le cadre de la feuille de route du ministre de la Santé et de la Prévention sur ce point, pour qu'on puisse déployer dès l'hiver prochain des politiques très rigoureuses. 

Le dernier point que je voulais faire concerne un plan de gestion des épidémies hivernales pour s'assurer de ne pas manquer de médicaments et donc regarder les stocks disponibles dans toutes les spécialités. Là aussi, nous devons être capables de payer le juste prix pour les médicaments essentiels, qui sont clés en matière pédiatrique en particulier, et négocier des approvisionnements supplémentaires pour le territoire national en fonction des plans qui seront définis. Pour les cas les plus critiques, un Plan blanc du médicament activable en cas de crise majeure sera développé, comme on sait le faire pour nos structures. Il faut le faire de la même manière pour les médicaments, pour éviter le pire. Vous le voyez, c'est toute une politique de gestion, de prévention, d'anticipation et de gestion de crise en termes de médicaments que nous avons développée. Parce que malgré tout ce qu'on est en train de faire et qu'on accélère en termes de relocalisation, on sait qu'on aura des difficultés dans les mois et les années qui viennent, on ne peut en tout cas pas totalement l'exclure donc il faut s’y préparer. 

Pour permettre à tout le système de travailler en bonne articulation, nous allons aussi œuvrer à une meilleure information de tous les acteurs de la chaîne — les patients, les médecins, les pharmaciens, les grossistes — et à une meilleure répartition des livraisons en utilisant les données existantes et des actions de renforcement de la transparence pour privilégier la prescription de médicaments qui ne sont pas en tension et permettre là-dessus très vite d'avoir une information de tous et de bien réorienter les choses ; travailler avec les pharmaciens pour anticiper les tensions ;  mieux informer les patients et avoir justement une politique très coopérative et très partenariale ; mieux partager les données sur l'ensemble de la chaîne logistique pour optimiser la production et la distribution des médicaments avec les industriels, les grossistes et les pharmaciens. Ce changement nécessite, vous l'avez compris, une prise de conscience collective, une mobilisation de tous, notamment des professionnels de santé que je veux ici saluer et remercier pour tous leurs efforts, mais avec lesquels nous allons continuer d'œuvrer sur chacun de ces points. Je crois que cet effort à la fois de meilleure prévention, d'une meilleure utilisation, d'une meilleure organisation est absolument essentiel, et je compte sur tous pour construire et lancer les évolutions nécessaires dans les mois et les années qui viennent. 

Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais aujourd'hui détailler devant vous. Vous le voyez, cette réindustrialisation est en marche, et en particulier dans le secteur pharmaceutique. Ces relocalisations dont on a tant parlé montrent que nous avons inversé le sens de l'histoire tous ensemble ces dernières années. Là où, pendant des décennies, on pensait que les délocalisations étaient en quelque sorte pas simplement une fatalité mais le destin industriel français, nous montrons que partout, et partout sur le territoire français, Monsieur le maire vous pouvez en témoigner, nous relocalisons parfois des choses que nous avions arrêtées parce que nous investissons, nous réformons, parce que nous faisons des choix collectifs, publics et privés, pertinents pour retrouver de la souveraineté, réindustrialiser et décarboner notre économie. C'est ce qui nous permettra d'avoir une santé plus forte, une industrie plus forte et, je le crois très profondément, un pays plus fort. Je vous remercie.

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