Fait partie du dossier : Visite d'État en Chine.

Du 5 au 8 avril 2023, le Président de la République était en déplacement en Chine. Il a passé la deuxième journée de sa visite d'État à Pékin.
 

Déclaration conjointe avec le Président Xi Jinping

À la suite d'une séance de travail, le Président de la République populaire de Chine, Xi Jinping, et le Président de la République se sont exprimés. Le Président Emmanuel Macron est revenu sur plusieurs points :

  • La paix et la stabilité dans le monde et notamment en Ukraine ; 

  • Les grands enjeux internationaux dont le financement des pays vulnérables, la biodiversité ou encore la sécurité alimentaire ;
  • La reprise des échanges humains et culturels entre la Chine et la France ;
  • Une feuille de route bilatérale au service d'une plus grande réciprocité dans la relation.


En amont de cette prise de parole s'est tenue la cérémonie de signature de différents contrats commerciaux et accords relatifs à la transition énergétique ou encore à la coopération culturelle et scientifique entre nos deux pays.
 

Revoir la déclaration conjointe : 

6 avril 2023 - Seul le prononcé fait foi

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DECLARATION CONJOINTE DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE ET DE XI JIPING, PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE.

Merci beaucoup Monsieur le Président, 
Mesdames, Messieurs les ministres, 
Mesdames, Messieurs les ambassadeurs, 
Mesdames, Messieurs les journalistes, 

Président, merci d’abord pour votre accueil, un peu plus de trois années après ma dernière visite autour de laquelle nous étions retrouvés à Shanghai. Trois années durant lesquelles nous avons continué à échanger malgré la pandémie, de manière très régulière, mais enfin, rien ne vaut les contacts humains avec les temps longs qu'on peut passer. Je vous remercie d'ailleurs du temps que vous nous accordez aujourd'hui à Pékin, demain à Canton, pour passer du temps ensemble et de l'importante visite et échange en trilatéral que nous aurons dans un instant avec la Présidente de la Commission européenne VON DER LEYEN, faisant suite d'ailleurs à un format que nous avions inaugurés ensemble lors de votre visite d'Etat en France il y a quelques années, où le Président JUNCKER s'était joint à nous avec à l'époque aussi, la Chancelière MERKEL. 

Lors de mon premier déplacement en 2018 à Xi'an, j'étais revenu sur la construction progressive de notre relation en partant de nos imaginaires communs sur les routes de la soie pour tracer littéralement de nouvelles pistes de coopération hors des sentiers battus. Il nous fallait alors travailler à une méthode pour parvenir à de nouveaux équilibres. Je dois dire que les temps que nous venons de vivre ont précipité les choses, mais ils ont plutôt conforté, je crois, les convictions stratégiques qui étaient à la base de ce dont nous avons alors discuté. Et c'est de cela dont nous sommes venus parler d'abord et je commencerai avec ce par quoi vous avez terminé au fond. 

Je pense que la Chine et la France, en tant que membres permanents du Conseil de sécurité, puissances dotées, compte tenu de leur histoire, de leur amour de l'indépendance et de leur attachement profond à celle-ci, ont à œuvrer ensemble pour essayer de bâtir, en tout cas préserver, un ordre international capable de répondre aux défis du temps. Et c'est d'abord essayer de garantir la stabilité et la paix partout où elles sont menacées, mais également d'avoir la juste ambition qui permet d'embrasser les défis contemporains. 
Commençons à parler de paix et de stabilité : nous aurons l'occasion de revenir sur beaucoup de sujets dans nos discussions ce soir et demain, sur la situation du Proche et Moyen-Orient où le rapprochement d’ailleurs entre l'Arabie saoudite et l'Iran est à saluer. Je vous félicite pour cette avancée tout à fait importante. Nous-même œuvrons d'ailleurs aux côtés du Liban, si cher à la stabilité et aux avancées dans la région, et nous aurons l'occasion de revenir sur la situation en Corée du Nord ou en Iran. 

Mais évidemment, parler de paix, de sécurité et de stabilité aujourd'hui, c'est parler de la guerre lancée par la Russie en Ukraine. Et sur ce sujet, vous venez d'avoir des mots importants et je veux ici, au fond, reprendre le fil de notre échange. En effet, cette guerre, d'abord, met fin à des décennies de paix sur le continent européen, mais c'est notre guerre à tous et vous l'avez très bien rappelé. 

D'abord parce qu'un pays membre permanent, lui aussi du Conseil de sécurité, a décidé de violer la Charte. Et nous ne pouvons accepter cette situation et c'est pourquoi notre action diplomatique rappellera à la Russie à ses devoirs. Violer l’intégrité territoriale et la souveraineté d’un pays, ne pas franchir les frontières internationalement reconnues et vouloir faire admettre un état de fait n’est pas conforme au droit international et à la Charte des Nations unies que nous défendons ô combien. 

La deuxième chose, vous venez de rappeler avec beaucoup de force : le sérieux, l’esprit de responsabilité qu’imposent des questions nucléaires, et la volonté que la France partage, qu’évidemment le nucléaire soit exclu totalement de ce conflit, qu’il y ait le respect de l’ensemble des traités internationaux en la matière, et qu’en aucun cas, il ne puisse y avoir de déploiement d'armes nucléaires en dehors du territoire des États dotés, en particulier en Europe. Et à cet égard, chacun doit être rappelé à ses devoirs, en particulier la Russie qui a annoncé il y a quelques jours vouloir déployer en Biélorussie de telles armes, ce qui est non conforme aux engagements pris à votre égard, à notre égard et au droit international. 

Troisième élément que vous venez de rappeler, sur le plan humanitaire. Nos deux pays sont déterminés à faire respecter le droit international humanitaire, en particulier quand il touche les enfants déplacés aujourd’hui de force et lorsqu'il nous faut lutter ensemble contre l'impunité. On a là les bases, on le voit bien, de ce que nous devons défendre, et de ce qui impose une reprise de discussion au plus vite pour bâtir une paix durable. 

D'abord, c'est une paix qui ne peut se faire sans qu'il y ait le respect du peuple ukrainien, qui est le peuple agressé, sans qu'il n'y ait donc un geste fait par la Russie et cette architecture européenne de sécurité que vous appelez de vos vœux. Et je peux me retrouver dans une telle formule parce que je pense que l'Europe a besoin en effet d'une organisation stable de sécurité dans l'avenir. Elle n'est pas possible si des pays en Europe sont occupés. C'est aujourd'hui le cas de l'Ukraine qui, n'étant pas membre de l'Union européenne mais ayant cette perspective, est un pays européen. Et donc, on ne peut pas avoir une Europe qui vit en sécurité, en stabilité tant qu'on aura un pays sur notre continent qui sera occupé par une puissance voisine. 

Donc, la conclusion logique, si je puis dire, des différentes pièces que vous avez mises sur la table, des principes, je m'y retrouve. Mais c'est qu'il nous faudra, dans un avenir que j'espère le plus proche possible, réengager une discussion exigeante avec tous et en particulier avec la Russie, pour qu'elle respecte ces principes que vous avez posés et que vous défendez et que défend la France et sa diplomatie. Nous ne voulons en effet pas simplement la fin du conflit, mais le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale ukrainienne, seule condition d'une paix durable et nous voulons à la fois qu'il n'y ait nulle escalade à court terme, mais que nous nous donnions les moyens de cette stabilité dans la durée. 

Ensuite, parlant des grands enjeux internationaux, je le disais, nous avons à cœur d'avoir une ambition commune sur beaucoup d'entre eux. Nous serons présents au troisième Forum sur les nouvelles routes de la soie, vous nous ferez l'amitié d'être représenté à haut niveau, non seulement au Sommet que la France coorganisera avec le Costa Rica pour les océans, le Sommet des Nations unies en 2025, mais également, et je vous en remercie, au Sommet de juin sur le nouveau pacte financier mondial. 

Nous avons montré d'ailleurs que notre engagement conjoint produisait des effets. En 2019, nous avons signé ensemble des déclarations importantes sur la biodiversité qui ont permis ensuite d'obtenir des résultats à la COP 15 à Montréal, puis sur la mer en mars dernier pour les accords dits BBNJ. Notre volonté, c'est de continuer de nous engager en commun et d'obtenir pour les océans la préservation de la biodiversité, la lutte contre la pollution et contre la pêche illicite et beaucoup d'autres pratiques, des accords en vue de Nice. Et cette feuille de route, si je puis dire, Kunming-Nice, est au cœur de cet axe que nous souhaitons bâtir. Et nous nous coordonnerons étroitement en vue de la COP28 également, prévue aux Emirats arabes unis, qui est ô combien importante. 

C’est la même chose que nous voulons pour la sécurité alimentaire, un agenda commun, une ambition commune, et pour ce nouveau pacte financier mondial où je compte beaucoup sur le rôle que la Chine aura à jouer, à la fois vis-à-vis des pays les plus endettés, mais également dans la réforme des institutions financières internationales et pour la construction de nouvelles réponses pour les pays les plus pauvres et les pays en développement. Parce que nous devons les aider à faire face à la fois aux inégalités dont ils sont victimes, mais également aux conséquences du dérèglement climatique qu’ils ont déjà à vivre. Et donc en juin, nous apporterons ensemble, avec plusieurs autres amis, ces réponses, je l’espère, et surtout avec les pays concernés. 

Enfin, et au-delà des questions sino-européennes sur lesquelles nous reviendrons avec la Présidente VON DER LEYEN comme je l’évoquais, il y a la feuille de route bilatérale. Vous l’avez évoqué, ce partenariat stratégique que nous voulons, et il est au fond très illustratif, en effet, de cette vision française, et je crois maintenant pouvoir le dire, européenne. Ça fait cinq ans que vous m'entendez défendre la souveraineté européenne, une autonomie stratégique européenne, au service d’ailleurs d'un projet commun, mais aussi parce qu'elle est jumelle de l'indépendance française. Et je crois que nous y sommes et que l'Europe est en train de se doter d'une vraie stratégie en la matière. Je pense que c'est d'ailleurs l'intérêt de nos amis d'œuvrer en ce sens. 

Et notre feuille de route bilatérale, je crois, a une totale pertinence à cet égard. Nous avons donc décidé la reprise de nos dialogues de haut niveau qui se réuniront le plus rapidement possible, vous en avez rappelé les trois formats. Mais nous avons aussi signé beaucoup d'accords aujourd'hui, nous l'avons vu, et lancé des travaux, dans le domaine de la transition énergétique en particulier, avec de l'expertise partagée et beaucoup d'innovations ; dans le domaine du nucléaire civil, avec la préparation d'une étude complète sur la contribution de ce secteur à la décarbonation de l'économie ; dans le secteur des transports, avec le travail commun sur les carburants d'aviation durable, la fourniture de méthanol aux porte-conteneurs ; la contribution des entreprises françaises à la construction de métros en Chine ; la construction d'éoliennes offshore. Et je ne serais pas complet sans mentionner aussi l'action de l'Agence française de développement qui se focalise en Chine sur la lutte contre le changement climatique, en s'appuyant sur l'expertise de nos entreprises. 

L'ensemble de cette approche repose, avant tout, sur une plus grande réciprocité, en vue de parvenir à un nouvel équilibre, y compris sur le plan commercial. Et nous avons d'ailleurs beaucoup fait ces dernières années en la matière sur le plan agricole et agroalimentaire, et nous allons encore plus loin. Je suis venu avec le ministre de l'Agriculture et de la souveraineté alimentaire, le président du cluster maritime de La Réunion, pour témoigner justement de l'importance de ces secteurs dans notre France, qu'elle soit métropolitaine, comme ultramarine. Et nous avons en effet beaucoup d’avancées sur tous ces sujets, qu'il s'agisse du bœuf, des vins et spiritueux en passant donc par l'aquaculture et plusieurs autres, au-delà de ce que nous avons déjà su faire sur le porc. Je suis aussi ravi d'annoncer que les consommateurs chinois pourront avoir accès aux produits d'une quinzaine de nouvelles entreprises. 

Nous allons également lancer de nouveaux chantiers dans la biotech pour continuer d'innover dans le sens d'une agriculture durable, avec toujours la préoccupation de la sécurité alimentaire. Et nous avons progressé dans le sens d'un rééquilibrage de la relation dans les secteurs de l'aéronautique, de la santé, des cosmétiques, de la finance. Nous aurons l'occasion, tout à l'heure, de dire quelques mots devant notre Conseil des entreprises franco-chinoises, lancé en 2018, qui, je crois, est là aussi une avancée importante. 

Ce dialogue, vous l'avez rappelé, Président, est permanent, mais nous allons l’intensifier. Il s’intensifie par la reprise de nos échanges, humains et culturels. Sans revenir sur cette relance que j’ai évoquée hier en lançant justement le Festival Croisements, je tiens à souligner la perspective du 60ème anniversaire de nos relations bilatérales, le lancement de l’année franco-chinoise du tourisme culturel l’année prochaine, en 2024, ce qui sera une occasion de valoriser notre patrimoine, nos métiers d'arts et l'ensemble de nos secteurs culturels, et je salue ici la présence de plusieurs représentants de ces institutions culturelles, et de nos cinémas, notre musique, de nos musées, de nos théâtres, de notre littérature à laquelle je sais, vous êtes tellement attachés. Nous échangeons, et nous avons continué pendant la pandémie, des livres, et nous continuerons d'avancer sur cette coopération. 

Je me félicite de la réouverture récente, mais donc nous voulons retrouver au moins le niveau d'échanges aériens d'avant la pandémie, faciliter évidemment les transits, les visas, mais développer plus encore ces échanges, cette connaissance réciproque, ces traductions, ces créations communes qui sont si importantes pour nos deux pays. 

Évidemment, nous savons la différence de nos modèles et les désaccords qu'on peut avoir. Nous l'avons évoqué, j’y reviendrai. On l’a évoqué à chaque fois, la question de la situation des droits de l'homme demeure un sujet qui est un sujet d'importance pour la France, d'exigence respectueuse. Mais ce n'est pas parce que nous avons des différences qu'on ne peut pas les évoquer d'abord, les partager de manière très franche, mais le faire en étant respectueux, en considérant, pas en quelque sorte, que l'un aurait des leçons à donner à l'autre. Et d'ailleurs, j'ai pu m'apercevoir qu'il en va de la Chine comme de la France, et généralement on arrive à obtenir des résultats, lorsqu'on est respectueux, mieux que quand on donne des leçons. Nous avons sans doute à cet égard le même tempérament et la même conscience profonde. Mais, nous savons nos différences et nous les abordons avec respect, conviction et amitié. 

Voilà, je ne serai pas plus long parce que vous avez couvert beaucoup d'autres sujets et je ne veux pas ici prolonger les choses. Mais des grands enjeux internationaux, à la question de la guerre, en passant par l'autonomie stratégique européenne et notre relation bilatérale, vous le voyez, l'agenda de cette visite d'Etat est nourri. Mais c'est surtout la nécessité, en quelque sorte, de continuer à discuter, d'éviter tout escalade dans le monde que nous connaissons et d'être lucides sur le fait que l’intérêt de nos peuples est de bâtir cette paix et cette stabilité respectueuse, mais d'avoir le bon niveau d'ambition pour les défis qui sont les nôtres. 

C'est pour cela que je vous remercie à nouveau du temps que vous nous consacrez pour cette visite d'Etat, aujourd'hui et demain. Parce que c'est en levant parfois les petits malentendus qu'on évite les désaccords de demain. Les temps sont inquiétants et le tragique est revenu dans notre histoire. Je pense que notre devoir, c'est de ne céder à aucune facilité, et donc de prendre nos responsabilités face aux grands conflits d'aujourd'hui, et de savoir à chaque fois construire une paix juste et d'éviter toute escalade. Je sais que vous avez la même conviction, c'est en tout cas cette voie que veut porter à la France. 

Merci Monsieur le Président. 

Cinquième réunion du Conseil d'entreprises franco-chinois

Le Président de la République a ensuite présidé la clôture du Conseil d'entreprises franco-chinois à Pékin aux côtés du Président de la République populaire de Chine Xi Jinping.

Il a notamment souhaité partager un message d'ambition au service de la paix et des enjeux climatiques, un message de volonté afin de poursuivre les partenariats engagés et de les approfondir et un message de franchise, de prévisibilité et de respect de l'innovation dans un contexte international difficile.

Revoir la clôture du Conseil d'entreprises franco-chinois :

6 avril 2023 - Seul le prononcé fait foi

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Intervention du Président de la République lors du Conseil entreprises franco-chinois.

Merci beaucoup, Monsieur le ministre. 
Monsieur le président, 
Mesdames et Messieurs les ministres, 
Messieurs les ambassadeurs, 
Mesdames et Messieurs les chefs d’entreprise et entrepreneurs, 

Je suis très heureux également de vous retrouver physiquement aujourd’hui. Et je me souviens, je crois que c’était dans cette même salle en 2018, de la réunion qui se tenait. C’est en effet la 5ème réunion mais pendant trois ans il y a eu cette interruption des réunions physiques. La dernière fois que nous nous étions retrouvés, c’était à Shanghai en novembre 2019 avec un rendez-vous ô combien important sur le plan économique. 

Mais aussi vrai que la mise en place de ce Conseil avait été un élément structurant de la relation bilatérale sur le plan économique, comme vous l'avez rappelé et comme le ministre vient de le redire, cette réunion d'aujourd'hui ne doit pas être vue comme la reprise d'un processus qui deviendrait routinier. C'est une véritable relance dans des temps ô combien incertains et avec des perspectives qu'il nous faut regarder lucidement, mais avec l'esprit de responsabilité et l'ambition. Nous relançons des projets communs, nous voulons relancer les relations interpersonnelles, nous voulons relancer et nous relançons physiquement les relations institutionnelles. Mais au fond, nos chefs d'entreprise font plus qu'accompagner. Ils illustrent, démultiplient cette ambition que nous portons. 

Alors le premier message que je voudrais ici partager avec vous, et vous l'avez évoqué Monsieur le président à l'instant, c'est justement un message d'ambition car notre responsabilité à tous dépasse en quelque sorte la seule relation bilatérale. Le ministre vient de le rappeler en évoquant les secteurs de coopération, et vous le savez toutes et tous ici mieux que quiconque, nous avons des défis qui sont mondiaux. Nos diplomaties d'ailleurs se concertent et avancent, et qu'il s'agisse de la biodiversité, du changement climatique ou de la sécurité alimentaire, nous multiplions les initiatives pour essayer d'avoir et même tâcher d'avoir un agenda commun. Et en matière de biodiversité, nous avons encore réussi ces derniers mois, ensemble, à faire avancer les choses. Le changement climatique, la préservation de la biodiversité, la sécurité alimentaire, le financement soutenable des économies en développement, la santé mondiale, la paix en Ukraine et dans le monde, ce sont autant d'impératifs, en effet, qui fondent ma conviction profonde selon laquelle il nous faut renforcer la coordination et les échanges pour parvenir à pas simplement un diagnostic commun, mais des solutions communes. Et à ce titre, nombre de vos entreprises sont engagées dans ces secteurs et traduisent des solutions concrètes communes au service de cette vision et de notre volonté de servir un agenda de paix, de stabilité, de coopération pour une ambition accrue de notre ordre international. 

Donc beaucoup des sujets qui ont été signés dans le transport, dans l'hydrogène et les nouvelles formes à la fois source d'énergie et de manière de transporter, de véhiculer l'énergie, ce qui est signé dans le renouvellement des eaux ou la gestion des villes durables, le nucléaire civil, etc. etc., mais également en matière de finances et de finances durables sont au service de cet agenda. Et je pense que les ouvertures réciproques, les coopérations que nous signons à l'occasion de ce déplacement, sont au service de cet agenda. 

Mon deuxième message, c'est notre volonté très claire de poursuivre les partenariats engagés et de les approfondir. Nous sommes très conscients que nous avons encore beaucoup à faire. Et au fond, la période ne nous a pas aidés et la pandémie a été un moment de re-fermeture des économies et parfois de renationalisation des équipes dirigeantes et de tentations de repli. Donc au moment où nous sortons de l'épidémie, il est très important d'être très vigilant sur la nature des relances et de ne céder à aucune, au fond, fatalité. Il nous faut, dans tous les domaines, véritablement relancer les choses et poursuivre les partenariats et les approfondir. Cela vaut sans doute d’abord des échanges humains. Je me félicite des réouvertures en matière de transport et de visas, Mais je pense qu’il est tout à fait nécessaire, et vos entreprises portent aussi cet agenda, de retrouver le plus vite possible, et le plus tôt sera le mieux, les niveaux d’intégration d’échange d’avant pandémie, et d’essayer même de les dépasser. 

Nous en sommes loin. Nous avons certes rouvert les lignes aériennes, elles n'ont pas retrouvé le niveau d'avant-crise et d'avant-pandémie. Les visas repartent, mais pas encore suffisamment. Et au niveau des équipes dirigeantes, il est aussi très important de réouvrir les échanges et la présence de part et d'autre de Français ici en Chine, de Chinois en France, parce que c'est comme ça que se construit une intimité stratégique dans la durée et nos partenariats. Donc je pense qu'il est très important qu'on y veille parce qu'on a tous en ligne de mire 2024, dont vous en avez rappelé l'importance. Les 60 ans de nos relations diplomatiques contemporaines ; cette année du tourisme culturel franco-chinois et les Jeux olympiques et paralympiques en France. Et donc, c'est en quelque sorte l'acmé, enfin, il faut le préparer et donc réamorcer beaucoup de pompes. 

Au-delà de cela, nous voulons aussi redynamiser la relation économique dans à peu près tous les secteurs, parce que je pense que c'est là aussi au cœur de cet agenda, celui de la diversification des sources d'approvisionnement, de constitution de chaînes de valeur résilientes, qui suppose de maintenir justement un canal ouvert sur le plan politique, un agenda partagé, mais également de relancer avec force tous ces partenariats. Nous avons su le faire en matière d'agroalimentaire ces dernières années, avec beaucoup d'ouverture et de succès ; il faut aller plus loin encore. Mais dans le luxe, les cosmétiques, la finance, la santé évidemment, dans les sujets d'énergie, qu'il s'agisse du nucléaire civil jusqu’à l'hydrogène, qu'il s'agisse des technologies de batteries et de tout ce qui les accompagne, qu'il s'agisse de l'aéronautique avec là encore, des annonces importantes aujourd'hui ou de l'automobile et des équipementiers du secteur, nous avons beaucoup à relancer et à faire avec. 

Avec là aussi, et je le dis devant vous toutes et tous, une connaissance des uns et des autres et de ce que nous sommes. Et je crois que rien n'est plus solide que les amitiés éprouvées par le temps et la constance stratégique qui est la nôtre. Il est évident aussi qu'on doit identifier de nouveaux champs de coopération dans lesquels il y a de l'expertise, fabrications additives, nanomatériaux, biologie synthétique, systèmes autonomes, composants, industrie photovoltaïque, etc, sur lesquels nous souhaitons avancer, là aussi sans tabou. 

Et ce sera mon troisième et dernier message : tout cela suppose de la franchise, de la prévisibilité, un respect de l'innovation dans un contexte très difficile, beaucoup plus difficile qu'il y a cinq ans, quand nous étions tous ensemble. Plus difficiles, pourquoi ? Parce que nous avons été éprouvés par la pandémie. Il est plus difficile parce que nous sommes bousculés par le désordre international. La guerre en Ukraine lancée par la Russie et ses conséquences directes et indirectes. Il est plus difficile parce qu'on sent monter une conflictualité entre les États-Unis d'Amérique et la Chine, et celle-ci n'est pas bonne pour le doux commerce et la bonne intégration de toutes les chaînes de production et en quelque sorte la vie normale des affaires. 

Et on ne peut pas faire comme si ça n'existait pas. La question, c'est comment on ne tombe pas dans le piège ou dans les pièges ? Il y a un premier piège qui est celui de la prophétie autoréalisatrice qui est de dire : ça va devenir, et donc on fait tout en quelque sorte en le dénonçant pour que ça advienne. C'est l'escalade verbale. Ce sont des comportements qui renationalisent ou rerégionalisent et c'est finalement une logique de bloc à bloc. Je pense que ce serait une funeste erreur. Le monde a besoin d'ouverture, de paix et de stabilité. Et donc la France et l’Union européenne feront tout pour éviter toute escalade, pour construire une paix et une stabilité durable en Europe, c'est-à-dire respectueuse de la Charte des Nations Unies et aux conditions évidemment du peuple ukrainien, mais plus largement, nous ferons tout pour qu'il n'y ait pas une montée des tensions. 

Le deuxième élément, et vous noterez aussi la constance avec laquelle nous l’abordons, c'est qu'au fond, nous avons tous redécouvert que les affaires appartenaient aussi à la géopolitique, et qu'on ne peut pas faire comme si ça n'avait aucune conséquence. Et qu'il y a des domaines qui ont très peu de conséquences en géopolitique, et il y en a qui en ont une. C'est comme ça. Et quand on parle de certaines chaînes de valeur, quand on parle de télécommunications, évidemment, de systèmes qui peuvent être duaux, quand on parle de ce qui bouscule notre système politique, qu'il s'agisse des réseaux sociaux ou de l'intelligence artificielle, on ne peut pas faire comme si c'était la même chose que vendre des produits de consommation courante, même si la sécurité alimentaire est un sujet ô combien important dont nous avons toujours relevé les standards. Et donc, plutôt que de se le cacher, il faut le partager. 

Donc, ce que nous avons décidé de faire ensemble avec le Président, c'est dans le cadre de notre dialogue stratégique et de notre dialogue économique et financier, de pouvoir partager une approche commune. Et au fond, j'ai envie de vous dire, nous avons la même approche de ces sujets sur un point, même si nous avons des tas de différences, nous nous respectons sur nos différences. On n'a pas la même histoire, on n’a pas la même civilisation, mais nous avons le même désir de nous comprendre. 

Mais il y a une chose, je le sais très bien : aucun dirigeant, ni aucun entrepreneur chinois ne respecterait des dirigeants qui expliqueraient que dans leur pays, tout est ouvert et n'a pas de valeur. Parce que pour vous, quand il s'agit de la sécurité de votre pays, de la sécurité nationale, des intérêts souverains, de ce qui en va de la stabilité, vous dites « là, pas touche ». Et vous n'ouvrez d'ailleurs pas à des étrangers, qu'il s'agisse de Français ou de tout autre étranger. Vous dites « ça, on doit le maîtriser, cette part de la chaîne de valeur, ce secteur, cet élément ». 

Les Européens doivent faire pareil. Et je sais que vous le comprendrez et que vous le savez. Ils doivent faire pareil parce que nous ne sommes pas qu'un marché, nous sommes une puissance géopolitique et que je pense que c'est l'intérêt de la Chine qu'il y ait une autonomie stratégique européenne, c'est-à-dire une Europe qui se pense comme puissance, qui défende ses industriels et qui sur certains secteurs, disent : « à cet endroit-là, on doit pouvoir se protéger, on veut faire du commerce avec vous, on veut s'entendre, on veut qu'il y ait des échanges, mais là, c'est stratégique dans le sens où nous devons maîtriser telle partie de la chaîne ». Et donc, nous allons devoir construire un ordre où il ne faut pas, vous l'avez très bien dit, Président, décorréler la totalité de nos économies, ce serait une folie et il ne faut pas découpler nos économies, mais où il va nous falloir regarder scrupuleusement et le partager dans un dialogue stratégique sincère. 

Il faudra sans doute dupliquer des parts de notre chaîne de valeur et accepter que dans certains secteurs, il faille de la souveraineté, au moins européenne, parfois nationale. C'est absolument fondamental et vous êtes en train de faire la même chose. Et au fond, la réciprocité, elle commence là, dans un partage de l'analyse stratégique. Donc, la feuille de route que je veux bâtir avec vous dans l'avenir et qui est très importante pour vous tous, c'est d'avoir cette franchise qui ne doit jamais donner lieu à des attaques ou à des joutes verbales ou à des attaques, ou de l'imprévisibilité sur des entreprises de part et d'autre. Ça, c'est le pire des comportements, c'est celui que nous ne voulons ni vous, ni moi. Mais nous devons bâtir une feuille de route commune qui est de dire : « on veut plus d'ouverture, on veut plus d'échanges, on veut consolider, relancer avec force en sortie de pandémie. Avec ces échanges, on veut bâtir de nouveaux secteurs, mais on doit le faire dans cette nouvelle géopolitique et compte tenu des enjeux, en partageant une feuille de route respectueuse, sincère et stratégique ». 

C'est sur la base de cette feuille de route stratégique et avec de la prévisibilité qui sera ensuite partagée avec nos entrepreneurs et tous les grands groupes que vous êtes là, que d'abord nous pourrons éviter la séparation de nos économies et ne tomber dans aucune facilité ou fatalité, et que nous pourrons nous engager résolument en transparence de part et d'autre sur certains secteurs et bâtir des stratégies compatibles en acceptant des limites dans d'autres. C'est cette franchise et cette lucidité, en refusant le discours du pire et la montée des tensions, qui est notre responsabilité à tous, les dirigeants que nous sommes, les entrepreneurs que vous êtes. 

Nous devons rester des économies ouvertes, nous devons continuer les échanges, nous devons continuer à accompagner l'innovation parce qu'elle sera au service des solutions que nous voulons apporter pour nos pays et pour la planète, aux défis mondiaux. Mais nous devons le faire avec beaucoup d'exigence, de lucidité et de franchise entre nous. Précisément pour le faire dans la durée et ne pas tomber dans les risques du moment. 

Voilà les quelques mots que je souhaitais apporter en cette conclusion de vos journées de travaux. Et en vous remerciant, Président, pour votre engagement. Nous serons demain à Canton qui est aussi une très grande place économique de votre pays, mais je tiens à vous remercier vraiment de votre engagement du temps et de l'énergie que vous mettez au service de cette feuille de route commune. Je crois très profondément à l'amitié entre la Chine et la France et je crois très profondément à la coopération entre nos entreprises, nos entrepreneurs, à la relance de celle-ci, mais aussi à la construction d'une phase nouvelle au service de notre vision de l'avenir et au service de nos peuples. Je vous remercie. 

Entretien trilatéral avec la Présidente de la Commission européenne

En début de soirée, le Président de la République a enfin participé à un entretien trilatéral avec le Président de la République populaire de Chine Xi Jinping et la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. 

Le Chef de l'État a notamment rappelé l'importance de coordination, d'intensification des échanges et de lucidité dans les discussions autour de trois points principaux : 

  • Le respect du droit international dans la guerre lancée par la Russie en Ukraine ;
  • La capacité de relever les grands défis internationaux ;
  • Les sujets économiques et commerciaux.

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