Michel Hidalgo, l’ancien sélectionneur de l’équipe de France de football, s’en est allé, non sans avoir légué au football français un héritage immense, lui qui a tant contribué à faire de la France un grand pays du ballon rond.
C’est sur le bitume des rues de Mondeville dans le Calvados que ce fils d’un ouvrier métallurgiste fit ses premières gammes de passes et de tirs. Celui qui allait devenir un prodigieux sélectionneur se tailla d’abord une belle carrière de joueur, au Havre dans un premier temps, puis dans l’équipe de Reims aux grandes heures de Raymond Kopa, et enfin à Monaco, où il participa à l’émergence du club des rouges et blancs.
Doué sur la pelouse, c’est toutefois sur les bancs qu’il brillera le plus – révélant toute la mesure de son talent en relevant à bout de bras une équipe à bout de souffle. Il faut bien mesurer le défi en forme de gageure qui se présentait à lui lorsqu’il fut propulsé à la tête de l’équipe de France en 1975. C’est une équipe sans fondements ni repères, boudée par le grand public, qui n’a plus joué de tournois internationaux depuis près de huit ans dont il prend alors les rennes avec l’ambition de l’emmener en Argentine pour la Coupe du Monde de 1978.
Mais l’attelage qu’il va guider d’une main sûre et tendre est un vivier de talents bruts. En lui inculquant une philosophie de jeu marquée par le panache et l’attaque, toute de créativité et d’audace, il va devenir peu à peu le père spirituel d’une génération dorée, celle de Platini, Rocheteau, Lacombe et Six, qui ouvrit alors un lignage qui n’en finit pas d’engendrer des talents et des génies. A peine deux ans après sa nomination, Michel Hidalgo parvient ainsi à arracher le précieux ticket des Bleus pour le futur mondial sud-américain : il a redressé le cap, réinsufflé l’espoir.
Quatre ans plus tard, lors de la Coupe du Monde 1982, son équipe écrit les premières lignes de sa légende. La France livre des matchs magnifiques, qui s’articulent autour du fameux « carré magique » Platini - Giresse -Tigana - Genghini, géniale invention tactique de Michel Hidalgo qui associe quatre joueurs à vocation offensive au milieu du terrain ; l’une des équations victorieuses de ces années de conquête. L’équipe se hisse jusqu’en demi-finale et dispute un match mythique face à l’Allemagne de l’Ouest. C’était la fameuse nuit de Séville 82. Au terme d’une rencontre à la fois sublime et cruelle, la France est éliminée aux tirs au but par la RFA. Mais il est des défaites pleines de panache et de promesses et celle-ci portait en elle les germes de futurs triomphes, l’Euro 1984 bien sûr, et plus tard les moissons merveilleuses de 1998, 2000 et 2018.
Vaincus magnifiques, les joueurs d’Hidalgo sont enfin placés sur l’orbite des meilleures nations du football. Ils sont ceux dont on attend le cœur au bord des yeux des leçons de style. Car Michel Hidalgo a fait de la beauté des gestes et du jeu la signature des hommes en bleu.
1984, donc. Le jour de gloire est arrivé. La France accueille l’Euro. Il faut désormais faire la preuve de son talent, ne pas décevoir les attentes, confirmer tous les espoirs. Emmenés par un Platini au sommet de son art, les Bleus écrivent à la force de leurs crampons une épopée flamboyante avec en point d'orgue un nouveau match d’anthologie en demi-finale face au Portugal – une rencontre haletante, remportée dans un Stade Vélodrome survolté où les Français éblouissent le monde par leur style et leur audace. La France gagnera le tournoi à l’issue d’une finale étouffante face à l’Espagne que l'on imagine avoir été singulièrement émouvante pour Michel Hidalgo, lui le fils d’un immigré espagnol.
La France remportait enfin la première grande compétition internationale de son histoire. Michel Hidalgo fut celui qui sut sortir les Bleus de l’ornière pour leur frayer les chemins escarpés de la victoire et qui a offert aux spectateurs des récitals mémorables en façonnant un jeu ouvert, offensif et virevoltant. Car Michel Hidalgo aimait le spectacle, le foot qui embrase les stades et les cœurs. Avec lui, les matchs prenaient des allures de festivals où les coups de pied arrêtés, les coups francs subtilement brossés, les tirs enroulés, les remontées véloces faisaient le bonheur des supporteurs. Il était l’apôtre d’un football « romantique », virtuose et impétueux, d’un style qui n’a depuis plus quitté le football, décrochant les titres tout en accrochant les cœurs.
Le Président de la République est attristé de la disparition de cet apôtre du beau jeu qui a écrit en lettres d’or quelques-unes des plus belles pages du football français, en le lançant à la conquête de sa grandeur et de son destin. Il adresse à tous les joueurs qu’il a accompagnés au sommet et à tous les supporters qu’il a fait rêver ses sincères condoléances.
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