Le Président Emmanuel Macron a participé à la table ronde sur l’avenir de la compétitivité européenne organisée au Collège de France, ce mercredi.

Quelques jours après le Conseil européen informel de Budapest, au cours duquel les chefs d’Etat et de gouvernement ont longuement échangé sur les conclusions du rapport Draghi et adopté la Déclaration de Budapest sur le nouveau pacte pour la compétitivité européenne, cette table ronde a permis de revenir sur la situation économique dans laquelle se trouve l’Europe structurellement (déficit d’investissements et de compétitivité, abondance de normes, faible utilisation de l’épargne…) et conjoncturellement, sur fond de tensions géopolitiques et commerciales.

Dans ce contexte, le Président de la République a réaffirmé son soutien aux constats et directions mis en avant par le rapport Draghi, dans le prolongement du discours de la Sorbonne d’avril 2024. Cet échange a également permis de mettre en avant plusieurs propositions du rapport, comme la simplification du marché intérieur, la politique de la concurrence, la politique industrielle et d’innovation ainsi que l’union des marchés de capitaux

Revoir la table ronde :

13 novembre 2024 - Seul le prononcé fait foi

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Clôture de la table ronde sur l’avenir de la compétitivité européenne.

Philippe AGHION 

L’élection de D. TRUMP peut agir comme un stimulant et accélérer la mise en œuvre du rapport DRAGHI mais certains expriment la crainte que D. TRUMP complique les choses en divisant les européens, qu’en pensez-vous ? 

Emmanuel MACRON

Merci beaucoup. Merci, Philippe. Et merci pour l'accueil fait au Collège de France et merci à Mario DRAGHI de prendre le temps de venir après avoir fait ce rapport dans lequel je crois pouvoir dire qu'on se retrouve pleinement. Et au fond, ce qui est décrit dans ce rapport, ce que je crois véritablement, et ce que vous avez montré dans le premier temps de cet échange, c'est qu'on a un modèle de croissance qui, depuis maintenant près de 30 ans, crée moins de richesse par tête que les États-Unis d'Amérique. Et les chiffres sont là et le montrent, et c'est un problème, parce qu'en plus, nous avons un modèle social beaucoup plus généreux et que nous sommes un continent qui vieillit, bon. Et donc, si on en reste là, on a un décrochage qui a commencé et qui va s'accroître. Il y a plusieurs éléments qui justifient cela, mais de manière très claire, il y a eu plus d'innovations faites sur le continent américain, enfin, aux États-Unis d'Amérique, et cette innovation s'est diffusée beaucoup plus rapidement dans le reste de l'économie que chez nous. C'est quand même le grand élément explicatif de tout cela. Et quand on regarde, je crois que ces dernières années, on a plutôt pris des décisions dans les bonnes directions, mais sans doute avons-nous fait un peu trop tard, en tout cas, on ne le fait pas assez vite et encore assez à la bonne échelle. 

Mais si on regarde l'Europe, pour le dire de manière très simple, on sous-investit, public et privé, et surtout, en matière privée sur les éléments de recherche qui sont différenciants. On surrégule ; on a plutôt accru cette surrégulation par rapport aux Américains. On protège trop peu, et c'est ce qu'on essaie de pousser depuis 7 ans avec cet agenda d'autonomie stratégique. Mais au fond, on s'est toujours comportés comme si notre marché était un élément de régulation, mais on ne le protège pas. Les Américains et les Chinois protègent leur marché. Et, dernier point, on a beaucoup sacrifié notre demande intérieure. C'est un débat qui est peut-être moins présent dans notre conversation européenne, mais on a, en fait, fait des arbitrages de politiques macroéconomiques de manière plus générale qui ont favorisé des modèles tirés par l'export, là où les Américains ont beaucoup plus protégé leur marché intérieur et sa composante de demande. 

Ce qui fait que nous, quand l'export s'enraye, c'est encore plus dur. Est-ce que l'élection de Donald TRUMP vient corriger un de ces points ? Est-ce qu'on peut penser que, de manière naturelle, les États-Unis d'Amérique vont reconverger vers nous sur ces différents points qui expliquent ce différentiel ? Tout le contraire. Ils vont les accroître, puisqu'il y a plutôt les points de direction, ce qu'on connaît de ce qu'il a déjà fait, ce qu'il a dit en campagne et l'idéologie qui sous-tend son action, c'est plutôt qu'ils vont continuer à investir massivement, Et les chiffres sont là pour le montrer d'ailleurs : la place des capitalisations boursières américaines, la volonté du Gouvernement, la politique pro-innovation. Deuxièmement, il ne va pas surréguler. En tout cas, ce n'est pas prévu au programme. Et c'est plutôt une administration qui va déréguler, elle a commencé, les annonces d'ailleurs des dernières heures semblent indiquer que c'est ça, dans un agenda d'ailleurs totalement désinhibé de connexion entre la dérégulation et le business, d'ailleurs avec des règles de gouvernance qui ne seraient pas possibles chez nous, pour le dire pudiquement. Troisièmement, est-ce qu'ils vont moins protéger ? Non. Et ils vont même rentrer, et ça c'est tout ce qu'il faut voir, dans une tension tarifaire qui sera supérieure. 

Maintenant, je ne dramatise pas cela, c'est bipartisan cette approche. Et je rappelle que ces dernières années, l'administration BIDEN avait suspendu les tarifs que nous avions eus, mais elle ne les avait pas annulés. Et que si on prend l'Inflation Reduction Act, c'est sans doute un des paquets les plus protectionnistes qu'on ait connus ces dernières décennies pour les cleantechs, et qui était y compris très agressif à l'égard des chaînes de valeur européennes. Et donc on a une administration qui va continuer de protéger très fort le marché, au risque d'ailleurs de démanteler les chaînes de valeur entre les Européens et les Américains. Et l'un des points qu'évoquait Mario en creux, qui est pour moi très important, c'est de savoir aussi comment on va être pris dans la guerre commerciale avec la Chine. Parce que l'une des choses, ça peut être : tarif pour tout le monde. L'autre, ça peut être de forcer les Européens, au fond, à se séparer plus vite des Chinois. Et à dire, nous, on met des tarifs très forts sur la Chine, mais si vous, vous êtes plus complaisants, on vous mettra les tarifs. Et c'est à ce moment-là qu'il y aura un risque de division chez les Européens selon les intérêts sectoriels et des différents pays. Les uns étant très exposés au marché chinois, disant : ça me fait un peu peur de sortir trop vite de ce marché, les autres qui seront plus dépendants au marché américain céderont plus vite à la pression que le gouvernement fédéral américain pourra mettre. Mais on rentre dans un univers très clairement de guerre de tarifs. Et moi, je l'ai déjà dit à plusieurs reprises, mais à mes yeux, depuis l'Inflation Reduction Act, je considère que les deux grandes économies ont décidé de ne plus respecter les règles de l'Organisation mondiale du commerce. C'est un état de fait donc il ne faut pas qu'on soit naïfs. 

Donc, dans ce contexte-là, pour moi, l'élection américaine ne vient pas changer le constat en profondeur qui est fait par le rapport DRAGHI, que je partage, que j'évoquais à la Sorbonne il y a quelques mois, qui est au cœur de ce qu'on a poussé ces dernières années avec Thierry, la commission sortante et les ministres qui sont là et qui ont porté cet agenda. Simplement, c'est un moment d'accélération, et je pense que plus on attend, plus, en fait, on aura des dilemmes impossibles à solutionner, parce que l'écart continue de se creuser. Et donc, nous n'avons d'autre choix que d'être encore plus unis, mais que de mettre en œuvre de la manière la plus rapide possible des grands choix sur le marché unique, sur les financements, sur quelques politiques industrielles et d'innovation, et sur une politique commerciale comme on a commencé de le faire, comme la Commission a commencé de le faire avec les véhicules électriques.

Philippe AGHION 

Est-ce qu’on ne devrait pas également impliquer le Royaume-Uni qui ne fait pas partie de l’Union européenne mais dont on sent bien une volonté de se rapprocher de nous ? Ou devons-nous rester au niveau de l’Union européenne ? 

Emmanuel MACRON

On veut toujours aller plus vite, et on doit aller beaucoup plus vite, le risque étant de sous-estimer la valeur de l'unité. D'abord, ce qui fait la force de notre Europe, c’est son marché unique. Et le marché unique, ce n'est pas qu'une alliance de consommateurs, ça doit devenir maintenant le cœur d'une politique industrielle. Et si on ne le valorise pas comme ça, il y a peu de chances qu'on réussisse. Et c'est ce qu'on a commencé à faire ces dernières années. Donc moi, je ne vois pas de fatalité. Simplement, si on se divise, on perd cet avantage-là. Et le risque, si dans les 2 ans qui viennent, on n'a pas des résultats concrets, c'est que certains pays soient tentés par des aventures singulières, en effet, avec les États-Unis d'Amérique. Donc, je pense que la préférence doit aller à l'action collective parce que c'est ça qui permet d'avoir une action efficace. 

D'abord parce que qu'est-ce qu'il faut faire ? Il faut protéger notre marché, je le disais. Ce n'est pas du protectionnisme, mais quand on a des économies comme la Chine qui, depuis 10 ans, sur-subventionne certains segments de son économie et arrive à un niveau, dans beaucoup de segments de surcapacité, elle déverse sur notre continent ses surcapacités. Si on ne protège pas notre marché, pas pour faire des distorsions par rapport à l'OMC, mais simplement pour restaurer des règles de juste concurrence, on n'a aucune chance d'avoir une politique industrielle. Et si on n'est pas unis, on n'a aucune chance de résister à une politique tarifaire injuste qui viendrait des États-Unis. Donc, la politique commerciale défensive, elle se fait au niveau du marché unique. Ça, c'est le premier point. 

En défensif, c'est très important. Et on commence à l'assumer avec cette fameuse question des véhicules électriques chinois. Mais ce n'est que le début. Parce que la vraie question, si on prend les véhicules électriques, c'est le contenu européen. Ce n'est pas simplement le véhicule lui-même. Et là, on va rentrer dans une phase où, très rapidement, il faut qu'on définisse quel est le contenu européen, comment on le mesure, comment on le protège. Sinon, très vite, d'ici six mois, nos constructeurs iront sourcer des équipementiers chinois et auront contourné les règles qu'on aura mises nous-mêmes. Ça, c'est une vraie politique qui est d'ailleurs très comparable à ce que les États-Unis d'Amérique font avec l'ALENA et définissent un contenu régional et, entre guillemets, ils le protègent. Donc, il faut qu'on ait des règles homogènes avec les autres et elles seront effectives si elles se font au niveau du marché unique, c'est-à-dire des 27. Parce que là, si on le fait à quelques-uns, ça ne marche pas, puisqu'on fonctionne sur ces services à 27. 

Le deuxième élément, c'est le marché unique lui-même. C'est qu'une des explications très bien décrites dans le rapport de Mario, de notre insuffisante compétitivité, c'est qu'on n'a pas été au bout de ce marché unique et qu'au fond, on n'en fait pas un vrai marché domestique qui permet à une entreprise qui se crée en Europe d'avoir tout de suite un marché domestique de 430 millions de consommateurs et de ne pas avoir à gérer 27 règles. Et donc, on doit rentrer dans un agenda qui est en même temps un agenda de simplification, qui est de dire comment on intègre mieux les grands secteurs sur lesquels on a décidé de jouer ensemble. Et puis, comment on ne rentre pas dans la logique du marché unique sur des secteurs qu'on avait tenus à l'écart jusque-là. Je pense à deux grands secteurs, que sont l'énergie et les télécommunications. Et d'ailleurs, c'est sans doute l'une des explications de nos dysfonctionnements et manque de compétitivité actuelles, parce qu'on avait tenu l'énergie à part du marché unique, ce qui fait qu'on a des modèles très nationaux et on a des interconnexions très déficientes, ce qui est une des raisons du fait qu'on paye aujourd'hui l'énergie trop chère, en tout cas qu'on a un marché qui a largement dysfonctionné. Et quand on regarde, on a aujourd'hui un marché de télécommunication qui n'est pas vraiment intégré au niveau européen, du coup qui a une capacité à investir bien moins grande qu'aux États-Unis d'Amérique. 

Et quand vous regardez l'innovation des 30 dernières années, elle a d'abord été impulsée par les grands Telcos, parce que simplement, il y avait autant de Telcos aux États-Unis d'Amérique qu'il y en a en France. Donc, il y a quelque chose qui ne marchait pas. Donc ça, le marché unique, c'est un point qui est important parce qu'il redonne de la capacité à investir. Dans ce contexte-là, l'un des points qu'on doit faire à 27 et qui, s'il ne marche pas, peut se faire à quelques-uns, c'est le secteur financier. Et l'union des marchés de capitaux est un point clé. On y reviendra sans doute dans la discussion et je pense que c'est un des points sur lesquels on peut avancer très vite. Et si à horizon de 18 mois, on n'a pas des résultats à 27, on peut dire qu'à ce moment-là, on fait ce qu'on appelle une « coopération renforcée » parce que ça, on ne peut pas retarder. Il y a une aberration européenne sur ce sujet. On est le continent qui épargne le plus et on est le continent qui investit... Enfin, si je prends les 3 plaques : Chine, États-Unis, nous, on a le plus d'épargne et on est ceux qui investissons le moins dans l'innovation, le risque, plus largement le capital. Ça, c'est une aberration qui est liée au fait qu'on n'a pas un vrai marché de capitaux intégré et surtout qu'on a des règles aujourd'hui qui sont devenues inadaptées pour ce faire. 

Après, il y a toute la politique industrielle. On peut aller très vite et d'innovation. On l'a fait ces dernières années avec les fameux Projets d'Intérêts Communautaires, les PIEC, sur lesquels, sur l'hydrogène, sur les batteries, on a eu des vrais projets européens, sur les semi-conducteurs, pour n'en citer que quelques-uns, on a décidé des grands projets européens, on met de l'argent et on y va. Et ça, je crois que maintenant, sur le quantique, sur les cleantechs, sur l'intelligence artificielle, sur les grands projets de défense, c'est cette approche qu'il faut avoir. Alors après, les Britanniques, dans cette affaire, tout ce qui touche au marché unique, j'ai envie de dire, par nature, on ne peut pas le leur donner. Sinon, soyez le bienvenu au club. Mais il faut faire très attention à ne pas donner des droits de passager clandestin, parce que sinon, le coup de la sortie de l'Union européenne n'existe plus, et on va se retrouver avec des Brexits en série. Donc, il faut de la cohérence. En matière de recherche, par contre, on peut avoir des politiques plus intégrées, il faut simplement des éléments de réciprocité clairs. Mais là aussi, je pense qu'il faut aller beaucoup plus fort et beaucoup plus loin. Donc voilà, en hiérarchisant les choses, je pense quand même qu'il y a une grande incitation à être unis, et donc il y a un agenda à scander avec la Commission européenne, mais ça suppose d'avoir un Conseil qui donne des orientations, des calendriers beaucoup plus stricts. 

Et deux choses, Mario parlait de la majorité qualifiée. Moi, je suis aussi un grand promoteur. En vrai, sur tous ces sujets, on est déjà la majorité qualifiée. Le vrai problème, c'est que nous avons un biais qui existe depuis des années, c'est celui du retour géographique. Parce que dès qu'il y a la majorité qualifiée et qui existe, tous les pays, et parfois les plus grands, l'ont montré ces dernières années, ils ramènent les choses au Conseil européen, au niveau des chefs d'État et de gouvernement, pour revenir de fait à l'unanimité. Donc, nous avons, par notre gouvernance, tué nous-mêmes l'esprit des traités. Ce qui ne fonctionne pas sur les grands projets de recherche, d'innovation et les choix industriels que vous avez évoqués, qu'on continue d'évoquer avec Mario, c'est qu'il n'y aura pas 27 champions et qu'il n'y aura pas, sur les grands choix qu'on fera, un retour géographique dans chaque pays, je dirais même à hauteur de la quote-part qu'on met. Et le vrai malentendu est là. Et donc, nous devons aussi accepter d'avoir une approche au fond du meilleur athlète, pour faire une mauvaise traduction d'une formule anglo-saxonne, ou en tout cas d'assumer qu'on dit qu'on veut un ou deux champions en européen, par exemple dans le quantique ou dans l'IA, par exemple sur la question du cyber. Il y a une agence européenne qui sélectionne peut-être 10 projets de manière indépendante avec les meilleurs experts académiques, etc., et on assume qu'on aura peut-être un taux d'attrition important et qu'il y aura un champion qui survivra, qui sera un très grand champion européen. Et il sera peut-être en Pologne, et ce ne sera pas grave pour la France et pour l'Allemagne. Mais cette approche-là, aujourd'hui, n'existe pas. Parce qu'aujourd'hui, dès que nous mettons de l'argent dans un, y compris dans un projet dit fédéral ou européen, nous regardons notre retour géographique. Et donc, dans la compétition internationale, nous tuons notre compétitivité. C'est toute la difficulté qu'on a eue avec Ariane, pour comparer Ariane avec SpaceX. On avait beaucoup d'avance. Simplement, nous, on fait des fusées, mais c'est pareil pour les missiles, etc., en faisant passer les composantes 6 à 10 fois les frontières pour être sûrs qu'il y a tant d'heures de travail en Allemagne, tant en Espagne, tant en France, tant en Italie, etc. quand de l'autre côté, vous avez quelqu'un qui vous dit, je disrupte tous les modèles de production, et là où il fallait des très grandes usines à 4 endroits différents, je le fais dans un garage comme on ne sait même pas produire des voitures. Donc, il faut réussir à adapter notre gouvernance et nos choix politiques profonds à cette réalité. 

Philippe AGHION

Je reviens sur les marchés de capitaux, le rapport indique qu’en moyenne les pays de l’Union européenne n’arrivent pas à transformer l’épargne en investissement innovant. Le rapport mentionne le modèle suédois, peut-on s’en inspirer ? Le rapport propose aussi d’assouplir la titrisation des prêts bancaires, n’allons-nous pas générer de l’instabilité financière ? 

Emmanuel MACRON

Non, juste en deux mots sur le marché de capitaux, Mario l'a redit, et pour que ce soit bien clair pour tout le monde, notre modèle de financement de l'économie de l'Europe continentale, c'est l'exact inverse de celui des économies anglo-saxonnes ; c'est-à-dire 70 % environ, en effet, du financement de notre économie va à travers des institutions, les banques et les assurances, 30 % seulement à travers les marchés de capitaux. Et donc on était très dépendants de ces intermédiaires qui étaient les banques et les assurances quand, par des produits ou directement, ils allaient sur les marchés de capitaux.  

À l'inverse, les anglo-saxons sont des acteurs directs de marché parce qu'il y a les fonds de pension, entre autres, qui permettent d'avoir, justement, ces capitaux qui vont directement sur des opérateurs de marchés de capitaux. Et donc 70 % de leur économie passe par là. La crise financière a une conséquence simple. On en est sortis avec des régulations pour réduire le risque. Le double paradoxe de cette régulation, c'est qu'elle a plus touché les opérateurs que les acteurs des marchés de capitaux. Donc cette régulation a été surtout une régulation des banques et des assurances, les fameux Basel et Solvency, et qu'en fait, elle a surtout été appliquée par les Européens, mais pas par les autres. Et donc, nous sortons de cette crise avec Solvency II et Basel III, qui surrégulent, enfin, en tout cas, qui a régulé et qui a mis plus de risque systémique, mais qui a mis beaucoup de contraintes à nos banquiers et à nos assureurs, et qui a fait qu'on les a fait sortir de l'économie de fonds propres. Et donc, tout notre épargne, qui est, par structure, chez nous, dans des produits d'assurance-vie, dans des produits bancaires, dans des produits assurantiels, elle est ensuite allouée par le bilan de ses intermédiaires de marché, non plus du tout sur des produits qui existaient avant, de financement de Private Equity, de marché, etc., qui permettaient d'aller dans l'innovation, d'aller dans nos entreprises et autres. On l'a complètement chassée de ça. Elle va massivement vers des produits qui sont plutôt les obligations, c'est-à-dire elle achète notre dette, et devinez quoi, la dette américaine. Et donc le paradoxe, c'est que l'épargne européenne, bien plus abondante que l'épargne américaine, est utilisée à essentiellement financer de l'endettement européen et américain, et comme c'est beaucoup moins rentable, les chiffres d'enrichissement des ménages donnés par Mario le montrent, et bien, elle est divertie vers des acteurs de marché américains parce qu'ils sont plus profitables. 

Donc, stupidité au carré de notre affaire. C'est-à-dire que notre épargne, on l'utilise mal, on la laisse partir vers d'autres, et en plus, elle ne finance pas ce qui est bon pour nous. Parce qu'il y a eu une forme aussi, il faut bien le dire, il y a un doute culturel, il y a une moins grande sympathie à l'égard de ce qu'on appelle là, nous joliment, marché de capitaux, mais qui est la bourse, qui est les marchés, etc. Et si demain, dans le débat public, Mario a fait l'éloge du modèle suédois, j'y souscris. Enfin, si je vous dis, formidable le modèle suédois, qu'on trouve tout sympathique, qu'il y a des fonds de pension, c'est super, on va le faire en France. Même moi, je suis prudent, donc ce n'est pas ce que je dis. Mais tout ça pour dire que c'est un des facteurs explicatifs, et on le paye sur le long terme. 

Donc qu'est-ce qu'il nous faut faire ? D'abord, il faut peut-être réadapter les choses. Et donc, la titrisation, c'est un peu croquignole, c'est shadokien comme affaire. C'est comme on a empêché les acteurs eux-mêmes d'investir leur bilan dedans, on leur crée des grands tuyaux, c'est comme dans les shadoks, des grands tuyaux qui vont contourner la chose pour pouvoir revenir en fonds propres. Donc ça, c'est le tuyau shadokien de la titrisation. C'est-à-dire, on dit, comme vous n'avez plus le droit d'aller en fonds propres directs, on va créer des mécanismes qui vous permettront quand même d'aller emmener cette épargne vers les fonds propres avec direct. Donc ça, on peut le faire à 27. Il y a des premières consultations qui ont été faites. C'est une bonne chose. Ensuite, il faut qu'on simplifie, qu'il faut qu'on ait des opérateurs de marché, et on a là-dessus cette force en Europe, on a des grands opérateurs, il faut les développer, il faut aller vers l'opérateur le plus unique possible pour simplifier les choses et avoir une plateforme de titrisation aussi commune. Et ensuite, moi, je pense qu'il faut, dans la synchronisation qu'on doit faire avec les Américains, synchroniser aussi nos régulations. On a une double synchronisation à faire si on veut être compétitif par rapport aux Américains. C'est qu'on doit essayer de pousser les réglementations qui vont trop vite dans certains domaines et essayer de se remettre un peu à la même échelle. Mais il faut regarder s'ils décident et confirment qu'ils n'appliqueront pas les règles prudentielles sur leurs opérateurs, de se dire : on se donne un peu de temps, un peu de flexibilité pour qu'en tout cas, nous, on puisse réinvestir sur des fonds propres. Donc ça, c'est les points prioritaires. C'est pour ça qu'en effet, la titrisation est si importante, c'est qu'elle permet d'allouer cette partie. Et ensuite, il y a l'idée d'aller vers un système de supervision unique et tout ce qui compose un marché unique des capitaux, c'est-à-dire permettre de bâtir des opérateurs de marché, d'un marché des capitaux unique en Europe, ce qui va permettre de prendre justement cette épargne et de l'investir de manière productive dans le risque européen, dans l'innovation européenne, dans les startups, dans les entreprises de taille intermédiaire, et de financer cette croissance. Parce que pourquoi on a besoin de ça ? Quand on prend deux pas de recul, on a beaucoup moins financé. C'est notre système privé qui finance beaucoup moins les fonds propres en comparaison avec ce que font les Américains. Mais le rapport Draghi, pardon de le dire comme ça, Mario, devant toi, mais qui est conforme à cet égard avec tous les rapports, dit : « on a un besoin de financement d'environ 800 milliards d'euros par an. » Et on peut se dire : c'est moitié privé, moitié public. Ce n'est pas complètement aberrant de le faire. Et au fond, ces métriques sont atteignables si, justement, on sait mobiliser notre épargne et qu'on sait l'investir en fonds propres, parce qu'on a largement de quoi faire 400 à 500 milliards d'euros par an d'investissement en fonds propres dans notre économie, que ce soit l'innovation ou la croissance de nos startups. 

Philippe AGHION

Quand vous avez parlé du marché unique, vous avez montré son importance, car l’une des raisons qui milite pour le marché unique c’est que ça augmente les rentes à l’innovation mais il y a une autre raison c’est que ça permet la concurrence, qui stimule l’innovation. Dans le rapport vous soulignez les multiples réglementations locales qui entravent la réalisation d’un marché unique concurrentiel, le rapport prône un renforcement de la politique de la concurrence en Europe mais en même temps une politique d’industrialisation par l’innovation. Comment réconcilier politique de concurrence et politique industrielle ? 

Emmanuel MACRON

Je souscris à ce que Mario vient de dire pleinement, mais au fond, quel est notre objectif ? On veut créer le maximum de richesses pour le travailleur, l'investisseur et le consommateur. Cet équilibre que cherche en permanence à atteindre une bonne politique de concurrence qui s'articule avec une politique d'innovation et de politique industrielle. Mais en plus, on a deux termes qu'on veut rajouter de contraintes à notre équation. On veut décarboner cette économie, ce qui est critique et qu'il faut ajouter et prendre en compte. Et on veut préserver notre souveraineté, notre autonomie stratégique européenne. On veut réduire nos dépendances, il faut l'intégrer si on veut regarder nos politiques de concurrences autres. Ce qui fait qu'on sait depuis plusieurs années maintenant que notre politique de concurrence, qui est, je crois, un élément solide du fonctionnement de notre Europe, elle doit mieux intégrer l'évolution des marchés pertinents et des grands compétiteurs. Et donc, les évolutions technologiques changent parfois les marchés pertinents. 

Quand on regarde tel ou tel marché qui est bousculé par une innovation d'usage ou une innovation industrielle profonde, il y a peut-être des compétiteurs qui apparaissent et qui sont en situation très monopolistique dans d'autres géographies. Si on regarde un marché pertinent sur la base de vieilles technologies, on va se tromper. En tout cas, on va sanctionner inutilement un acteur industriel européen. Et quand on voit la capacité, en effet, qu'ont les acteurs chinois ou américains à devenir gros, on peut, dans la compétition internationale, mettre des freins parfois par nos politiques de concurrence à la constitution de grands acteurs européens. 

Donc ça, c'est le premier point sur lequel on voit bien qu'il faut ajuster les choses. Mais cette politique, elle n'est compatible que si on va beaucoup plus vite sur l'intégration du marché unique. Je ne vais pas répéter ce que je disais tout à l'heure, Mario l'a dit, c'est-à-dire qu'à chaque fois qu'en fait, notre marché unique, c'est une régulation commune, mais en plus des 27 régulations existantes, on est très peu efficace. Et on n'a pas un vrai marché unique domestique et on n'a pas la capacité à aller à la bonne vitesse. Et donc vraiment, c'est un agenda au fond de simplification et d'homogénéisation. Mais ça revient à la même chose que ce que je disais tout à l'heure en prenant l'exemple de l'innovation. Ça veut dire retrouver l'essence même du projet européen. C'est qu'on ne va peut-être pas tout gagner à chaque étape, mais le gain collectif qu'on tirera d'une telle politique est bon pour chacun d'entre nous. Et à l'échelle aujourd'hui de la compétition planétaire, c'est clé. Et donc en effet, ça c'est un élément clé, le marché unique plus intégré, la simplification, c'est la base, si je puis dire, d'une bonne politique industrielle qui préserve notre capacité à être concurrent en plus d'une bonne définition du marché pertinent. En plus de ça, j'ajouterai qu'il faut en effet avoir une politique sur quelques secteurs où on assume d'avoir une politique d'innovation et une politique industrielle. Ce qu'on a fait sur les semi-conducteurs, l'hydrogène, les batteries, il faut qu'on le fasse vraisemblablement sur le quantique, sur les clean tech, sur santé et défense. Santé, on l'avait un peu fait post-Covid. Mais sur ces volets-là, on sait qu'il faut de l'investissement commun, l'équivalent de nos PIIEC. 

Mais simplement, il faut faire beaucoup, vite, avec les procédures de gouvernance que j'évoquais tout à l'heure, pour avoir une politique d'innovation efficace et qui permette, sur les secteurs clés, d'avoir des projets qui sont les plus disruptifs, qui avancent, en lien d'ailleurs avec des écosystèmes d'innovation, comme ça a été dit par Mario. Et puis le dernier point, si on veut une politique efficace en la matière, il faut qu'on soit beaucoup plus dans nos régulations, dans la capacité à donner des horizons, des incitations au marché, mais en étant sur la neutralité technologique. Et je voudrais insister sur ce point parce que je pense que c'est un des vrais dysfonctionnements européens, en particulier, qu'on a eus, toujours avec les meilleures volontés du monde, ces dernières années. On a fait 3 ou 4 régulations sur l'hydrogène ces dernières années. Formidable. On s'est dit, on va y aller à fond. On a fait des PIIEC hydrogène qui ont marché. On a dit, on va faire des grands projets, on va développer nos propres électrolyseurs chez nous, on va développer des projets d'innovation de rupture sur les différentes techniques. Et puis on a fait des tas de directives pour définir. Et comme le sous-jacent, c'est votre modèle énergétique, ces directives ont été négociées sur la fragmentation du marché énergétique des différentes nations. Et donc on a créé un marché de l'hydrogène qui n'existait pas européen. Mais on a dit : on n'a pas le droit de produire tant de pourcentages d'hydrogène venant du nucléaire à telle heure du jour ou de la nuit, tant venant de… Et donc, on a nativement construit un marché de l'hydrogène totalement fragmenté et biaisé parce qu'on a été prescriptif sur le plan de la technologie. Et moi, je me fiche de savoir que l'électron qui m'aide à faire l'électrolyse pour produire de l'hydrogène vert soit un électron qui est fait à base d'éoliens offshore au Danemark, de solaire en Espagne ou de nucléaire en France. Ce que je veux, c'est que ce soit de l'hydrogène européenne compétitive décarbonée. 

Et bien, ce n’est pas comme ça qu'on procède. Et ça, c'est une vraie bêtise. Parce que si on procédait comme ça, on est très compétitifs par rapport aux Américains ou aux Chinois parce que personne n'a notre capacité à aller aussi vite. Et donc on doit être beaucoup plus sur de la neutralité technologique. Je pourrais prendre l'exemple de la voiture avec à peu près la même démonstration. Et donc on doit être sur des politiques industrielles qui font de l'aide sectorielle, qui donnent des signaux de marché beaucoup plus clairs, mais qui sont sur de la neutralité technologique beaucoup plus assumée.

Philippe AGHION

Sur la recherche, Antonin BERGEAUD qui est ici a écrit un papier sur le rôle des LabEx pour stimuler l’innovation en France, son étude montre que leur impact a été très important. Est-ce qu’il n’y a pas une bonne leçon à tirer, en s’inspirant des LabEx pour une politique de recherche et d’innovation qui stimule l’innovation de rupture ? 

Emmanuel MACRON

Je pense que ça fait le lien avec ce qu'on se disait au début, c'est-à-dire que plus vite, on arrivera à raccrocher le décalage avec les États-Unis d'Amérique, plus vite, on aura un modèle aussi d'innovation et de recherche qui pourra être compétitif, parce qu'on paye aujourd'hui dans le différentiel ce qu'on a perdu il y a 20 ans. Et en vérité, je vais revenir après à la recherche fondamentale et la recherche de rupture, mais la difficulté qu'on a, Mario a redonné les chiffres, quand on regarde le financement de recherche Europe-États-Unis, le gros différentiel, il est sur la partie privée, parce qu'on a une spécialisation sectorielle qui s'est déformée. Et que, aujourd'hui, le grand driver du financement de l'innovation et de la recherche privée en Europe, c'est l'automobile, comme le rapport le montre bien, parce qu'on a ce cœur industriel qui est resté. Et nous, nous parlons d'un pays qui a plutôt plus désindustrialisé que les voisins et qui, donc, a encore plus de biais sectoriels et, du coup, a moins de R&D privé. Mais là où, côté américain, ce sont en effet les industries technologiques, parce qu'elles ont pris le train, justement, de la transformation technologique, qu'elles avaient des telcos qui ont investi dans les innovations de rupture, qu'elles ont pris ensuite le train de l'Internet, de ces plateformes numériques qui investissent beaucoup plus. 

Et donc si aujourd'hui, on ne prend pas le train de l'innovation, on ne sait pas créer des acteurs de taille intermédiaire et des champions dans les nouvelles technologies, on va continuer à déformer en quelque sorte notre tissu productif et à avoir en moyenne des industriels qui innovent moins ou qui innoveront sur des secteurs qui sont moins en rupture. Je dis ça pour dire qu'il y a un effet de génération, si je puis dire, qui fait que, s'il y a besoin été de le démontrer, on doit aller très vite, très fort, et peut-être qu'en la matière, pour continuer les anglicismes, le leapfrogging est possible. Et donc, si on va très vite aujourd'hui sur de l'IA, sur des clean techs, sur des industries de rupture, on peut essayer de retrouver justement ce retard. Donc, nous, on a ce problème privé. Après, côté public, il y a eu de très bonnes initiatives, et merci de les citer ici, et moi, je crois beaucoup aussi à cette approche par l'évaluation académique. Mais qu'est-ce qui fonctionne ? C'est quand on décide, vous l'avez dit, d'avoir des jurys indépendants qui concentrent les moyens, qui suivent les résultats et qui évaluent et de conserver ça, et de savoir fermer les dispositifs qui, eux, ne produisent pas les résultats. Bon, nous, on a un modèle sur lequel on a fait ces dernières années, je parle de la France, on a réinvesti, mais c'est, je dirai, un rattrapage, parce qu'on avait sous-investi sur le plan de la recherche publique, et je pense qu'il faut continuer ce travail. Pour moi, on n'est pas au bout et je le dis ici parce qu'on parle beaucoup depuis tout à l'heure d'innovation, de recherche technologique, tout ça n'est possible que si la nation investit dans la recherche fondamentale. Et celle-ci n'est évidemment pas toujours finalisée, elle n'est pas toujours sur des points de rupture. Moi, je pense qu'il faut aussi se dire qu'on sait le contexte de finances publiques qui existe partout en Europe, que nous avons chez nous, mais l'investissement dans la recherche fondamentale, c'est une des bases absolument indispensables pour pouvoir avoir le reste et le faire avec des règles académiques d'indépendance. Je le dis aussi parce que si on se compare aux États-Unis d'Amérique, c'est un point sur lequel le modèle français et européen sont sans doute à envier. Mais continuer à avoir une recherche académique qui est financée, une recherche fondamentale qui est dûment financée, continuer, nous, à investir, et on doit le faire, préserver les règles de l'indépendance de cette recherche académique, ce n'est, je le crois, un élément, pas simplement de santé économique, mais démocratique. Et à un moment donné, les deux se tiennent. Donc ça, c'est un jalon. 

Ensuite, il faut en effet avoir des programmes dûment évalués sur la recherche de ruptures. Et donc là, les LabEx, il y a différentes initiatives qui ont été prises ces dernières décennies. Et en effet, depuis 2007-2008, les IHU, ce qui a été fait avec les générations successives, mais ça ne vient pas se substituer à l'autre en concurrence. Et nos universités, avec nos organismes de recherche, souvent aidés par ces programmes, ont su créer ces dernières années des vrais clusters d'enseignement et de recherche et je lis volontairement les deux, qui sont, je crois, vraiment un levier de notre compétitivité et qu'il faut continuer à encourager. Et puis sur cette base, on doit avoir, en effet, la capacité à donner les bons signaux et à inciter à la recherche finalisée, technologique, par ce lien public-privé. Là-dessus, au niveau européen, Mario l'a dit, je pense que pour passer à une étape d'après, c'est ce que propose le rapport par rapport à l'ERC, c'est d'avoir, au niveau européen, une gouvernance pleinement indépendante, des moyens beaucoup plus massifs et d'avoir la capacité à assumer des projets à l'échelle européenne sur des règles qui sont strictement scientifiques et, comme je l'ai dit tout à l'heure, sans regarder le retour géographique, mais en regardant simplement l'excellence des projets qui sont proposés et en acceptant ensuite une évaluation dans la durée. C'est à ce prix qu'on pourra avoir véritablement aussi des projets très innovants, de la recherche de rupture qui soit financée à l'échelle européenne.

Et je voulais remercier tout particulièrement Mario DRAGHI pour au moins trois raisons. La première c'est d'avoir accepté de prendre les responsabilités qui ont été les siennes dans un moment délicat de la vie politique et économique de l'Italie et d'avoir été un formidable compagnon de route pour la France. La deuxième, c'est d'avoir accepté de faire ce rapport quand la présidente VON DER LEYEN lui a demandé. La troisième, c'est d'être maintenant au fond pleinement engagé dans sa mise en œuvre, puisqu'il était avec nous à Budapest il y a quelques jours et il nous fait l'amitié de venir ici au Collège de France. Et donc vraiment, Mario, un immense merci pour tout cela et cette contribution. Et moi, je vais peut-être finir sur une note quand même optimiste, parce que je voudrais qu'on ait tous conscience, le rapport le dit aussi, il faut agir vite, mais on a les talents en Europe. On les forme, ils sont là. On a de l'épargne, on a donc du capital. On a de l'énergie décarbonée qu'on produit de plus en plus, mais entre le renouvelable et le nucléaire, on a cet élément, il est clé. Et on a un modèle social et démocratique qui est là, qui tient et qui est beaucoup plus exigeant que dans la plupart des régions du monde. Si on sait prendre au bon moment, c'est-à-dire maintenant, sans tarder, les bonnes décisions avec la gravité, la rapidité, l'engagement collectif et qu'on sait le faire à 27, nous avons normalement tous les ingrédients sur la table. Donc il y a toutes les raisons d'être raisonnablement optimistes si nous sommes lucides, volontaires et déterminés, ce que, je crois, nous sommes l'un et l'autre. 

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