Il y a soixante-dix ans, le 7 mai 1954, s’achevait la bataille de Diên Biên Phu. La défaite française annonçait la fin d’une guerre qui avait déchiré pendant neuf ans des territoires qui appartiennent aujourd’hui au Laos, au Viêt Nam et au Cambodge, et qui constituaient alors l’Indochine.
À l’Union française s’opposait le Việt Minh, organisation politique indépendantiste et paramilitaire créée en 1941 par le Parti communiste vietnamien.
Le conflit, qui commença en 1946 par une lutte de décolonisation sous la forme d’une guérilla, se fit de plus en plus frontal à compter de 1950, au fur et à mesure que les capacités du Viêt Minh se renforçaient.
Le nom de Diên Biên Phu se grava dans les mémoires comme le point d’orgue sanglant du conflit. Dans cette vallée où le corps expéditionnaire français d'Extrême-Orient avait constitué un camp retranché aéroterrestre commença en mars 1954 une bataille d’une intensité et d’une durée meurtrière.
Sous une pluie discontinue, les Français, se trouvèrent assiégés, enfermés dans leurs propres retranchements, dans une nasse boueuse où aucun avion ne pouvait plus décoller ni atterrir, empêchant d’évacuer les blessés, où toute relève devenait impossible, et où manquaient vivres, munitions et médicaments.
Quand tomba la dernière position française, au terme de 56 jours de combat, près de trois mille Français avaient perdu la vie. Les survivants furent emmenés dans des camps de prisonnier du Viêt Minh. Les marches de la mort, la malnutrition, les sévices, les maladies des camps et les exécutions sommaires continuèrent de les décimer ; si bien que le 21 juillet 1954, quand les accords de Genève mirent fin à la guerre d’Indochine en reconnaissant le gouvernement démocratique du Vietnam, seul un quart des douze mille soldats français faits prisonniers à Diên Biên Phu purent retrouver leurs familles. La France s’incline devant leurs souffrances, et celles de tous leurs proches qui continuèrent de porter ce traumatisme.
Elle salue le courage dont firent preuve ces combattants de la Nation, pris dans la tourmente d’un conflit lointain, qui ne rencontrait souvent dans l’opinion publique que de l’ignorance, de l’indifférence et de l’opposition, mais qui restèrent fidèles, au prix de leur vie parfois, à leurs camarades et à la mission que leur avait assignée la République. « Pour l’honneur et les copains », alors même qu’ils savaient la bataille perdue, plus de quatre mille militaires français se portèrent volontaires pour renforcer la garnison française de Diên Biên Phu assiégée, au prix d’un parachutage dans des conditions extrêmes, y compris ceux d’entre eux qui n’avaient jamais sauté auparavant.
Au milieu des hommes en armes, médecins et infirmiers militaires se distinguèrent par leur dévouement. La seule femme parmi eux, Geneviève de Galard, devint le visage de cette génération qui fit du sacrifice son devoir et de l’héroïsme son quotidien.
Le rapatriement du corps de six de ses camarades, le 11 avril dernier, avec le soutien du gouvernement vietnamien, témoigne d’une avancée commune sur ce chemin de mémoire, et
des liens apaisés que nos deux peuples sont parvenus à nouer, en regardant en face cette histoire blessée qui nous avait opposés et qui désormais doit nous rapprocher.