1. En tant que pays maritimes et pays méga-divers, la France et la Chine réaffirment leur responsabilité particulière et leur ambition commune en faveur de la protection des écosystèmes marins et côtiers. La Chine a avec succès présidé la COP15 biodiversité en adoptant le cadre de Kunming-Montréal, qui fixe notamment l’objectif de faire en sorte que, d’ici à 2030, au moins 30% des zones terrestres et des eaux intérieures, ainsi que des zones marines et côtières, soient dûment conservées et gérées grâce à la mise en place d’aires protégées écologiquement représentatives, bien reliées et équitablement gérées et à d’autres mesures efficaces de conservation par zone. Il fixe aussi l’objectif que, d’ici à 2030, au moins 30% des zones d’écosystèmes terrestres, d’eaux intérieures et d’écosystèmes marins et côtiers dégradés fassent l’objet de mesures de restauration.

2. La France entend poursuivre le chemin tracé lors de la COP15 en organisant, notamment, avec le Costa Rica, la prochaine Conférence des Nations unies sur l’Océan (UNOC), en juin 2025, qui se déroulera à Nice. Face à l’urgence absolue que connaissent les océans, l’UNOC sera un sommet d’action fondé sur des engagements concrets et sur une feuille de route consolidée pour l’action en faveur des océans. Les cibles du cadre de Kunming-Montréal et celles de l’Objectif de Développement durable 14 se répondent et se renforcent mutuellement : prise en compte de la pollution, protection et restauration des écosystèmes marins et côtiers, réglementation de la pêche, lutte contre l’acidification des océans, promotion du développement durable.

3. Afin de renforcer leur ambition commune en matière de conservation et de protection de la biodiversité et des océans, les deux pays ont adopté la Déclaration conjointe suivante. 

4. La France et la Chine comptent agir en conformité avec les conventions internationales que les deux pays ont ratifiées, notamment la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques et l’Accord de Paris, la Convention sur la diversité biologique, ou encore la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires. Elles apportent leur soutien à la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable (2021-2030).

5. Les deux pays reconnaissent l’importance de l’Accord BBNJ sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité biologique marine dans les zones ne relevant pas de la juridiction nationale, comme l’un des piliers d’une gouvernance internationale des océans inclusive et holistique. Les deux pays s’engagent à contribuer à l’entrée en vigueur dès que possible de l’accord et à encourager tous les pays à faire de même.

I. Conservation, protection et restauration de la biodiversité marine et côtière, et promotion du multilatéralisme environnemental

6. La France et la Chine renouvellent leur engagement, pris à Montréal, en décembre 2022, de faire en sorte que, d’ici à 2030, au moins 30% des zones terrestres et des eaux intérieures, ainsi que des zones marines et côtières, soient dûment conservées et gérées grâce à la mise en place d’aires protégées écologiquement représentatives, bien reliées et équitablement gérées et à d’autres mesures efficaces de conservation par zone. La France et la Chine renouvellent également leur engagement, pris à Montréal, de restaurer 30% des écosystèmes marins dégradés d’ici à 2030. Elles reconnaissent et favorisent la création d’aires marines protégées et autres mesures efficaces de conservation par zones (Other effective area-based conservation measures, OECMs) comme des moyens importants pour la mise en oeuvre de ces objectifs. De plus, les deux pays s’engagent à mettre en oeuvre la décision de la COP15 sur le mécanisme multilatéral établi pour le partage des avantages découlant de l’utilisation d’information de séquençage numérique sur les ressources génétiques et à suivre de près le processus participatif et inclusif sur cette question.

7. Conscients qu’il ne reste que six ans pour mettre en oeuvre les objectifs du cadre de Kunming-Montréal, les deux pays ont publié la mise à jour de leur stratégie et plan d’action national de biodiversité, afin de les aligner avec les objectifs et les cibles du cadre Kunming-Montréal. Ils mettront en avant, lors de la Conférence des Nations unies sur l’Océan en 2025, les aspects marins de leurs stratégies et plans d’action nationaux et les actions spécifiques entreprises.

8. La France et la Chine entendent renforcer la coopération entre leurs institutions nationales en charge de la conservation, la protection et la restauration de la biodiversité marine et côtière. Les deux pays entendent partager, dans le cadre du Dialogue sur le Droit de la Mer et les Affaires polaires, les connaissances et les meilleures pratiques, en particulier celles relatives à la gouvernance fondée sur la science, la connectivité et aux modes de gestion des aires marines protégées et OECMs, dans la perspective de la mise en oeuvre de l’accord BBNJ en lien avec le cadre de Kunming-Montréal. Il permettra d’assurer le suivi et la mise en oeuvre de la présente Déclaration conjointe.

9. Dans le cadre de la mise en oeuvre de l’accord BBNJ, la France et la Chine s’engagent à développer les coopérations bilatérales et multilatérales pour la mise en place d’aires marines protégées et autres outils de gestion par zone, conformément aux dispositions de l’accord. Elles s’engagent à oeuvrer activement, au sein des organisations dont elles sont membres, afin de promouvoir les objectifs de l’accord BBNJ et de renforcer la coordination entre les différentes enceintes. Les deux pays réaffirment leur consensus sur les dispositions de l'accord BBNJ, y compris l'article 18. Ils s’engagent, sur cette base, à promouvoir l'entrée en vigueur et la mise en oeuvre de l’accord. Ils s’engagent également, conformément aux dispositions de l’accord, à contribuer au développement et à la mise en oeuvre d’une solution multilatérale efficace pour le partage des avantages tirés des ressources génétiques.

10. Les deux pays reconnaissent l’importance de l’océan dans son rôle de stockage et de séquestration de carbone, et collaboreront pour le financement de la restauration d’écosystèmes marins et côtiers, en incluant les zones humides, qui jouent un rôle fondamental dans la lutte contre le changement climatique.

11. Les deux pays demeurent engagés dans les travaux de l’Autorité internationale des fonds marins et veillent à ce que, avant toute activité d'exploitation minière des grands fonds marins, des études d’impact sur l'environnement marin aient été réalisées, les risques soient compris, les technologies et les pratiques opérationnelles soient conformes aux dispositions pertinentes, et à ce que des règles, réglementations et procédures appropriées soient mises en place par l'Autorité internationale des fonds marins, conformément aux meilleures connaissances scientifiques disponibles, à l'approche écosystémique et à l’approche de précaution. Ils encouragent le développement de l’exploration scientifique dans le cadre de l’Autorité internationale des fonds marins et l’accroissement de la coopération en ce sens.

II. Lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée

12. La France et la Chine s’engagent à lutter contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, et à porter cette approche dans les organisations internationales pertinentes. Elles s’engagent ainsi à promouvoir le renforcement des mesures de contrôle et de surveillance au sein des Organisations Régionales de Gestion des Pêches (ORGP) auxquelles elles sont parties contractantes.

13. Les deux pays soutiennent les efforts réalisés en la matière au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Ils s’engagent à mettre en oeuvre l’accord de l’OMC, sur les subventions à la pêche. La Chine étudie activement l’adhésion à l’accord relatif aux mesures du ressort de l’état du port (PSMA) visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée.

14. De même, la France et la Chine sont conscientes du caractère transversal de la lutte contre la pêche INN et participeront activement aux travaux de l’OMI et de l’OIT afin de mieux garantir la sécurité des navires de pêche.

15. Les deux pays exploreront, en amont de l’UNOC, les perspectives de coopération dans la lutte contre la pêche INN. La Chine envisage activement sa future participation aux événements sur la pêche en marge de l’UNOC.

III. Lutte contre les pollutions

16. Les deux pays s’engagent à prévenir et à réduire les facteurs de pollution, qu’elle soit chimique, plastique, ou de tout type, et les risques associés pour la biodiversité. Les deux pays apporteront une attention particulière à réduire l’impact de ces pollutions sur la biodiversité marine et côtière.

17. La France et la Chine travailleront à mettre fin à la pollution plastique sur la base d’une approche intégrée. Pour cela, elles s’engagent à promouvoir activement la réduction en amont de la production et de l’utilisation des plastiques, à interdire, ou à réduire la production et la consommation de certains plastiques à usage unique, à mettre en oeuvre l’approche « réduire, réutiliser, recycler », et à développer les infrastructures à cet effet.

18. Les deux pays reconnaissent l’importance de la résolution UNEP/EA.5/Res.14 mandatant des négociations pour un instrument international juridiquement contraignant visant à mettre fin à la pollution plastique, estimant encourageants les progrès obtenus lors de CIN-1 à Punta del Este en Uruguay, de CIN-2 à Paris en France, de CIN-3 à Nairobi, et de CIN-4 à Ottawa au Canada, et soutenant
les efforts en vue de la conclusion, lors de CIN-5 à Busan en Corée du Sud, d’un accord ambitieux et réaliste. Les progrès de ces négociations seront mis en avant lors de la Conférence des Nations unies sur l’Océan, en 2025.

19. Les deux pays reconnaissent l’importance de la résolution UNEP/EA.5/Res.8 mandatant un Groupe de travail spécial à composition non limitée d’examiner la création d’un groupe d’experts sur l’interface science-politiques au service de la gestion rationnelle des produits chimiques et des déchets et de la prévention de la pollution. Ils se félicitent des résultats de la première réunion de ce groupe de travail qui s’est tenue fin janvier 2023, soutiennent l’accomplissement de la mission du Groupe de travail spécial à composition non limitée d’ici fin 2024 et souhaitent la constitution le plus rapidement possible d’un panel science-politique indépendant, au périmètre large et incluant la pollution, les produits chimiques et les déchets.

20. Les deux pays s’engagent à promouvoir la mise en oeuvre du Cadre mondial sur les produits chimiques, adopté à Bonn, en Allemagne, lors de la Cinquième Conférence internationale sur la gestion des produits chimiques (ICCM-5).

IV. Financement de la mise en oeuvre de l’objectif de développement durable n°14

21. La France et la Chine reconnaissent les écarts résiduels de financement dans le cadre de la mise en oeuvre de l’objectif de développement durable n°14, et de protection de la biodiversité et réitèrent leur engagement à le mettre pleinement en oeuvre dès à présent et à renforcer le niveau d’ambition collective d’ici à 2025.

22. Conformément à la décision pertinente de la Convention sur la Diversité Biologique (CDB), les deux pays s’engagent à promouvoir l’augmentation substantielle des financements dédiés à la protection de la biodiversité issue de toutes les sources, dont les ressources internationales, nationales, publiques y privées, y compris en augmentant les financements internationaux dédiés à la protection de la biodiversité provenant des pays développés et des pays qui remplissent volontairement les engagements des pays développés Parties, en faveur des pays en développement, en particulier des pays les moins avancés et des Petits Etats insulaires en développement, ainsi que des pays à économie à transition pour les porter à au moins 20 milliards de dollars par an d’ici à 2025, et à au moins 30 milliards de dollars par an d’ici à 2030 et en mobilisant l’ensemble des sources de financement dont les banques multilatérales de développement et les secteurs privés. Elles consacreront une partie de ces fonds plus spécifiquement à la protection de la biodiversité marine et côtière. Les deux pays saluent la contribution active du Fonds Kunming pour la biodiversité au financement de la biodiversité. La Chine salue l’engagement de la France et de l’Union européenne
à doubler leurs financements internationaux en faveur de la biodiversité. Les deux pays soutiendront l’opérationnalisation du Fonds-cadre mondial pour la biodiversité instauré au sein du Fonds pour l’environnement mondial. Elles accorderont une attention particulière, également, à la mise en oeuvre des composantes de la cible 15 du cadre de Kunming-Montréal, relatives au rapportage, par les grandes entreprises transnationales, les entreprises transnationales et les institutions financières, de leurs impacts, dépendances et risques en matière de biodiversité.

23. Les deux pays partageront leurs vues en amont de la Conférence des Nations Unies sur l’Océan en 2025, relatives au financement de la mise en oeuvre de l’ODD n°14. Pour répondre au déficit de financement, elles prépareront une annonce financière conjointe, avec une attention particulière portée à la situation des Petits Etats Insulaires en Développement, conformément à la cible 14.7 de l’ODD 14.

V. Développement des connaissances scientifiques liées aux océans

24. La France et la Chine apportent leur soutien à la Décennie des Nations unies pour les sciences océaniques au service du développement durable (2021-2030). Convaincues que la recherche en sciences océaniques et technologies de la mer est indispensable pour la conservation et la protection de la biodiversité marine et côtière, elles renforceront leur coopération scientifique ainsi que leurs échanges d’étudiants et de chercheurs.

25. Les deux pays accorderont une attention particulière à l’étude des effets cumulatifs des menaces anthropiques pesant sur l’environnement marin, comme l’acidification des océans, ou les pollutions. Cette collaboration s’étendra également au domaine des sciences humaines et sociales, comme la sociologie, l’histoire, le droit, l’économie, la géographie et l’urbanisme.

26. Les deux pays soutiendront la création, durant le processus de consultation pour la Conférence des Nations Unies sur l’Océan, d'un Panel international pour la viabilité des océans (IPOS) qui pourrait se développer en partenariat avec le World Ocean Assessment (WOA) des Nations Unies, et dans le cadre de la Décennie des océans de la Commission océanographique intergouvernementale - UNESCO.

27. L'objectif à court terme de l'IPOS est de créer une plateforme internationale qui travaillera à la première synthèse des connaissances et recommandations existantes sur l'océan à la lumière des objectifs de développement durable. Il s'agit de développer des outils pour modéliser le comportement de l'océan du futur et de proposer des recommandations qui seront débattues avec une pluralité d'acteurs.

28. En ce qui concerne les pôles, les deux pays reconnaissent la nécessité d’une coopération scientifique internationale ambitieuse. Ils reconnaissent également le besoin de poursuivre les efforts engagés dans les organisations du système du Traité sur l’Antarctique (Réunion Consultative du Traité sur l’Antarctique (RCTA) et de la Commission pour la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR), notamment en matière de protection de l’environnement et de conservation des ressources ainsi que de la biodiversité.

VI. Verdissement du transport maritime

29. Le transport maritime étant responsable de près de 2,89% des émissions mondiales d’origine anthropique, tout en représentant plus de 80 % en valeur du transport des biens globaux, la France et la Chine souhaitent collaborer sur le gain d’efficacité énergétique et la transition énergétique des navires et des ports.

30. La France et la Chine travaillent ensemble à la mise en oeuvre de la Stratégie 2023 adoptée par l’Organisation maritime internationale (OMI) sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre provenant des navires. Les deux pays estiment que des efforts conjoints devraient être déployés dans le cadre de l’OMI à travers des politiques coordonnées à l’échelle mondiale et conformément aux principes pertinents de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques et de l’Accord de Paris, et étudieront les mesures techniques et de marché pour faire avancer la réduction des gaz à effet de serre et améliorer la compétitivité des carburants alternatifs durables.

31. La France et la Chine considèrent que le raccordement des navires à l’électricité à quai est l’une des solutions-clés pour réduire l’impact environnemental des escales et encourageront les investissements
dans les infrastructures de branchement, et plus largement elles encourageront la transition des énergies fossiles traditionnelles vers de nouveaux combustibles et technologies bas carbone ou décarbonés.

32. La Chine note que la France a rejoint la déclaration de Clydebank afin d’établir des corridors verts, c’est-à-dire des routes maritimes décarbonées entre deux ports ou plus, nécessitant de développer des sources d’énergie, des infrastructures et des navires zéro émissions.

VII. Coopération relative à l’économie bleue

33. Conscientes que les océans et les côtes sont au fondement d’une grande partie de l’économie mondiale, et que la valeur tirée de l’économie bleue devrait atteindre 3 000 Mds USD en 2030, la France et la Chine soulignent la nécessité de maintenir des activités économiques durables respectueuses de l’environnement, en lien avec les océans et les côtes. A ce titre, la France et la Chine entendent coopérer notamment sur le tourisme côtier durable.

34. Les deux pays encouragent les acteurs de leurs secteurs financiers respectifs à développer les coopérations dans le champ de la finance bleue.

35. Les deux pays échangent sur la production d’énergies marines renouvelables à travers le dialogue énergie, notamment sur l’éolien en mer, l’énergie marémotrice, l’énergie houlomotrice et l’éolien flottant qui font l’objet de développements rapides dans nos deux pays.

36. La production d’algues ayant le potentiel de contribuer à l’augmentation de 10 % des ressources alimentaires mondiales, et des secteurs des engrais, des médicaments, des cosmétiques, tout en étant un puits de carbone majeur, la Chine et la France vont promouvoir les échanges entre les deux pays sur les secteurs de l’aquaculture et de l’algoculture.

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