
Le Président Emmanuel Macron était à Nice le mardi 10 juin dans le cadre de la troisième édition de la Conférence des Nations unies sur l’Océan.
Il a participé au sixième Sommet France-Pacifique, aux côtés de 19 délégations des États et territoires insulaires.
Les participants ont échangé sur les différents enjeux qui touchent la région et notamment la crise climatique qui impacte les océans et menace la soutenabilité des îles et de leurs populations.
Revoir la prise de parole du Président :
10 juin 2025 - Seul le prononcé fait foi
Discours du Président de la République en ouverture du sixième Sommet Pacifique-France en marge du Sommet de l’UNOC à Nice.
Mesdames, Messieurs les chefs d'État et de gouvernement, Monsieur le secrétaire général, Monsieur le directeur général, Messieurs les Présidents de la Polynésie française et du gouvernement de Nouvelle-Calédonie, Monsieur le président de l'Assemblée territoriale de Wallis et Futuna, Mesdames et Messieurs les chefs coutumiers, Mesdames et Messieurs les ministres, mesdames et messieurs, en vos grades et qualités.
Je suis très heureux de vous retrouver et de pouvoir tenir avec vous ce sixième Sommet Pacifique France, 4 ans après notre dernier échange, au moment même où l'épidémie de Covid nous touchait tous et où, malheureusement, nous avions dû tenir cette réunion derrière des écrans. Je voulais très sincèrement vous remercier du long voyage que vous avez fait pour être jusqu'ici avec nous. Je sais que celui-ci prend plusieurs jours, et vous avoir présent à cette conférence des Nations Unies de Nice et pouvoir tenir ce sommet en parallèle est un grand privilège, mais c'est aussi pour moi l'occasion d'exprimer notre gratitude. Vous avoir tous ici, c'est aussi la possibilité d'exprimer les voix de millions de vos compatriotes qui ont à vivre, de manière très directe, déjà les conséquences du dérèglement climatique, de la montée des eaux, de l'acidification de nos océans, des troubles qui changent la vie et menacent la soutenabilité de vos îles et de vos populations.
La France est présente dans le Pacifique par les trois territoires de Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, et Wallis et Futuna, dont je tiens à saluer la participation dans les instances régionales, et plus que jamais attaché à ce dialogue avec tous les membres du Forum des îles pacifiques. Je remercie la présence du secrétaire général à mes côtés. C'est un dialogue qui est fondé sur le respect mutuel et l'écoute, sauf parfois quand nous nous retrouvons sur les terrains de rugby, même s'il y a toujours le respect mutuel, mais j'ai pu noter qu'il pouvait y avoir moins d'écoute, mais un engagement résolu. Je ne reviendrai pas en détail sur les principaux défis auxquels fait face le Pacifique aujourd'hui. Ils nous sont tous familiers, mais qu'il s'agisse du réchauffement climatique, des catastrophes naturelles, de la biodiversité, des conséquences de l'isolement parfois, des atteintes à la souveraineté et à la sécurité, entraînées par la pêche illégale, des trafics, et notamment le fléau des stupéfiants, nous sommes confrontés à tous ces périls, et au fond, c'est ceux qui sont identifiés dans la stratégie qui a été posée par le forum, 2050 Strategy for the Blue Pacific Continent avec des priorités très claires, cette stratégie est la vôtre, elle est aussi la nôtre.
C'est dans cet esprit que j'avais effectué la première visite d'un président français dans les États du Pacifique insulaire en juillet 2023, au Vanuatu et en Papouasie-Nouvelle-Guinée, après un déplacement en Nouvelle-Calédonie. Je vous remercie encore pour l'accueil qui m'avait été offert. Je veux maintenir cette dynamique rappelée au Shangri-La Dialogue. Je voudrais juste dire quelques mots sur ce que nous avons fait et comment nous voyons la suite. En effet, en 2023, je m'étais engagé d'abord à renforcer considérablement l'engagement de la France en matière d'investissement solidaire et durable, via l'Agence Française de Développement. 200 millions d'euros en 4 ans. Nous allons maintenir cette trajectoire ambitieuse. Comme vous, je veux du concret, à savoir des infrastructures résilientes, des réseaux de santé publique robustes et un accès à l'eau potable, qui sont les priorités sur lesquelles nous intervenons. Cette même démarche s'applique en lien avec nos partenaires, avec la préservation de l'environnement, avec ce qu'on a appelé le country package, la plateforme pays pour les forêts, ce que nous avons mis en place en Papouasie-Nouvelle-Guinée, cher James, qui mobilise d'ores et déjà 100 millions d'euros.
Cher James Marape, tu sais pouvoir compter sur notre soutien en la matière. L'Initiative Kiwa en faveur de la résilience des écosystèmes et des populations, l'initiative Climate Risks and Early Warning Systems, CREWS, lancée il y a une décennie pour améliorer les capacités de prévention des risques des catastrophes naturelles et qui contribuent chaque jour à sauver des vies. C'est sur ces plateformes et ces initiatives que nous continuerons d'engager des financements à vos côtés. Nos projets de long terme se doublent aussi d'une action de réponse aux situations d'urgence, construction de stocks humanitaires dans chacun de vos États, soutien aux Croix-Rouge dans les États du Pacifique, mécanisme Franz, mis en œuvre avec nos partenaires australiens et néo-zélandais. En plus de 30 ans, nous avons conduit dans ce cadre une quarantaine d'opérations, dont la dernière en décembre 2024, en réponse au séisme au Vanuatu, qui a dévasté Port-Vila. Nous avons par ailleurs avancé sur le renforcement des capacités des États de la région à assurer leur sécurité et leur souveraineté. L'Académie du Pacifique, dont j'avais annoncé la création, a déjà permis de former plus de 200 officiers dans vos forces armées, en charge de sécurité ou de protection civile, et nos forces de défense et de sécurité, positionnées en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, patrouillent dans les zones économiques exclusives des États du Pacifique en coordination avec l'Agence des pêches du Forum.
Nous continuerons ces coopérations pour toutes celles et ceux qui le souhaitent. Nous pouvons désormais embarquer des officiers de vos États à bord de nos navires, ce qui est un mécanisme aussi que nous mettrons en place afin de faire respecter les zones de pêche et lutter contre les trafics illicites. Nous avions également largement partagé la priorité de protection des océans, et je veux saluer à cet égard le rôle moteur de la Polynésie française sur le sujet, avec l'annonce du passage de son aire marine gérée de 5,5 millions de kilomètres carrés à une aire marine protégée au niveau international, qui est une contribution décisive à notre objectif 30-30. Les annonces faites par la Polynésie sont très fortes. La Nouvelle-Calédonie est aussi engagée dans des discussions portant sur la création d'une réserve océanique commune avec le Vanuatu et les îles Salomon. Aujourd'hui, la France a protégé plus de 30 % de son domaine maritime, ce qui représente 7 millions de kilomètres carrés. Comme je l'avais annoncé aussi en 2023, la France a renforcé sa présence diplomatique dans la région avec l'ouverture en février 2025 d'une nouvelle ambassade au Samoa. Et je vous remercie, Madame la Première ministre, chère Fiamē Naomi Mata'afa, pour votre appui.
Enfin, je m'étais engagé il y a deux ans à développer des liens entre nos sociétés. C'est l'objectif que nous avons maintenu, avec un effort financier important en faveur du Fonds Pacifique. Nous avons aussi lancé un programme Campus mobile pacifique qui a déjà permis de financer des projets pour la mobilité des étudiants et des chercheurs dans la région. Vous voyez, la France tient ses engagements pour être à la hauteur des objectifs de la stratégie 2050, mais nous souhaitons aller plus loin.
D'abord, continuer de nous mobiliser dans les instances internationales pour porter de hautes ambitions sur le climat et sur l'environnement. Vous pouvez compter sur le soutien de la France pour maintenir cette ambition et promouvoir la justice climatique. Je le disais, votre présence ici est très forte, très importante, avec des engagements qui auront des conséquences directes pour toute la région. Nous voulons continuer de porter cet effort à Bélem, pour arriver après la COP 30, à la COP 31 en Australie et dans les États du Pacifique, qui sera un rendez-vous très important et un moment dans lequel nous pourrons continuer de porter ces agendas. En tout cas, la France mettra sa diplomatie en lien très étroit avec nos intérêts communs dans le Pacifique.
Je souhaite également évoquer la décarbonation du transport maritime, qui est un des sujets qui nous lie et qui se situe à la croisée de deux enjeux majeurs : la connectivité, qui est vitale pour la région, et la lutte contre le changement climatique et le dérèglement. Là encore, les États du Pacifique ont tiré l'ambition vers le haut dans le cadre des négociations à l'Organisation maritime internationale, je les ai évoquées hier, et ces avancées ont été structurantes et nous mettrons en œuvre celles-ci à vos côtés. Je veux dire aussi le soutien de la France pour avancer sur ses priorités et poursuivre, justement, cette connectivité maritime décarbonée, ce qui passe aussi par la réhabilitation, le verdissement des infrastructures portuaires, comme nous le faisons aux côtés, là aussi, de Papouasie-Nouvelle-Guinée, à Rabaul en particulier.
Il est tout aussi urgent qu'entre en vigueur l'accord BBNJ sur la haute mer, qui, là aussi, est vital pour le Pacifique. Je vous remercie pour votre mobilisation très large pour les ratifications. Nous l'avons annoncé hier avec le secrétaire général des Nations Unies, Guterres. Nous avons pu officialiser l'entrée en vigueur au 1er janvier prochain de la BBNJ, car nous avons déjà 55 ratifications fermes et déposées auprès de l'ONU.
Nous en avons une quinzaine qui sont programmées et qui seront donc déposées avant la GNU, et une quinzaine d'autres qui sont engagées et qui devraient être faites avant la fin de l'année. Tout ce qui peut être fait pour accélérer et déposer formellement aux Nations unies avant l'Assemblée générale, c'est ce qui nous permettra d'entrer en vigueur au 1er janvier, et derrière, ce qui nous permettra de déployer des opérations communes, y compris hors des zones économiques exclusives, pour lutter contre la pêche illicite et toutes ces activités de prédation.
Je souhaite aussi que nous continuions de mobiliser des ressources financières pour promouvoir le développement durable et la lutte contre le changement climatique, C'est l'ambition que j'ai portée il y a déjà 3 ans avec le pacte pour la prospérité des peuples et la planète, le 4P. Je vous remercie d'avoir rejoint ce club. Pour tous ceux qui ne l'ont pas encore fait, je vous y invite. 73 États ont rejoint cette action commune qu'est le 4P, qui nous permet ensemble de nous mobiliser pour améliorer le fonctionnement de la Banque mondiale, du Fonds Monétaire International, réformer la gouvernance, mais aussi mobiliser dans le cadre de Finance in Common, beaucoup plus de financements multilatéraux et de banques régionales au service de nos priorités.
Très concrètement, je souhaite que la France s'engage en appui de la Pacific Resilience Facility, qui est le premier outil pour le Pacifique développé et opéré par la région. Nous reconnaissons la centralité du FIP et c'est pourquoi j'annonce que la France contribuera à hauteur de 2 millions d'euros à ce mécanisme dans sa phase de capitalisation. Je vous remercie pour cette mobilisation. Je sais que c'est une attente forte de la région. Nous souhaitons aussi mener une action volontariste de connectivité aérienne en encourageant l'ouverture de lignes nouvelles. J'appelle de mes vœux la concrétisation prochaine du projet d'ouverture d'une ligne qui desservira les Fidji au départ de la Polynésie française, en passant par les îles Cook, les Tonga et les Samoa. De même, les câbles sous-marins de communication qui permettent d'accéder à Internet, aux nouvelles technologies dans leur ensemble, sont primordiaux pour assurer les liens entre les États insulaires du Pacifique et leurs partenaires. Là aussi, nous continuerons d'accompagner par des financements ces projets en étant collectivement vigilants à ce que ces projets de connectivité ne soient pas soumis à la tension sino-américaine, mais qu'ils construisent vraiment un espace, si je puis dire, autonome, au sein du Pacifique, dans lequel nous pouvons opérer de manière souveraine.
Nous souhaitons aussi continuer de favoriser le lien entre nos sociétés. Vous savez que je suis attaché à cette dimension dans une région dont la force est la diversité culturelle. Le projet régional de fonds de soutien audiovisuel océanien que nous lançons cette année revêt à cet égard une importance particulière et il mobilisera des financements pour la culture et l'audiovisuel dans toute la région.
Le sport est aussi un puissant vecteur de rapprochement. J'évoquais tout à l'heure en plaisantant le rugby, mais la Coupe du monde de rugby en 2023, que la France a eu l'honneur d'accueillir, puis les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, ont permis à beaucoup d'équipes et d'athlètes de la région de s'illustrer. Nous souhaitons poursuivre cela, et nous nous mobiliserons ainsi pour les Jeux du Pacifique, qui se tiendront du 24 juillet au 8 août 2027 en Polynésie française et évidemment aux côtés de chacune et chacun pour les coopérations qui s'impliquent.
Enfin, je souhaite que nous poursuivions aussi les coopérations dans les années qui viennent sur le plan stratégique et militaire, en continuant de faire monter d'un cran l'académie que j'évoquais et en poursuivant les exercices conjoints militaires, qu'ils soient aériens ou maritimes, parce que ces exercices permettent justement de marquer la souveraineté, l'autonomie de notre région pacifique et la crédibilité commune pour protéger nos zones, lutter contre la pêche illicite, mais aussi apprendre à nos armées, nos marines, nos aviations à travailler ensemble.
Un tout dernier mot sur la Nouvelle-Calédonie pour dire que je sais combien vous avez pu être préoccupés par les événements qui ont déstabilisé la Nouvelle-Calédonie il y a un an. Je veux ici vous dire, et je le dis en présence du président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie, que je remercie pour son engagement, et on a ici beaucoup été aidé de parlementaires, et la présidente aussi de l'Assemblée. L'État français, d'abord, a respecté ses engagements pris il y a des décennies en organisant ces dernières années trois référendums avec des observateurs des Nations Unies qui ont été validés et constatés. Trois référendums qui étaient prévus par les processus que nous avions pensés dans les années 80 et 90. Ceux-ci ont permis une expression de maintien dans la République française. Mais il y a un an, une violence s'est déchaînée qui a eu plusieurs déclencheurs, je n’étendrai pas ici, mais que nous avons pris très au sérieux. L'État français s'est fixé pour priorité la reconstruction du territoire avec la mobilisation à ce jour de plus de 3 milliards d'euros. Et nous n'avons ménagé avec le Gouvernement, en particulier le ministre d'État, je le remercie, aucun effort pour le retour du dialogue entre toutes les parties.
Un très gros travail a été fait ces derniers mois en lien avec tous les élus et nous tiendrons dans les prochaines semaines un sommet à Paris pour pouvoir rassembler toutes les parties prenantes et réussir à projeter, au fond, à avoir un projet nouveau. Je le dis avec beaucoup d'humilité, c'est toute la difficulté de ces processus, d'abord, qui prévoient des référendums où on dit oui ou non. Je dois dire que ni la culture pacifique, ni la culture océanienne ou mélanésienne ne sont totalement faites pour les référendums, en vérité. Ce sont des cultures de concertation où, je dirais, la circularité est plus adaptée au caractère tranché du oui ou non. Mais nous avons hérité de ce processus. On ne refera pas les mêmes erreurs pour la suite. Ensuite, chacun a été mis un peu face au vide qui était l'absence d'un projet nouveau après ces trois référendums. Donc, c'est ça que nous sommes en train de bâtir avec beaucoup d'humilité, tous ensemble. D’abord, je veux dire ici que nous sommes toujours preneurs de conseils. On est tout à fait prêts à avoir vos recommandations. On souhaite aussi qu'il y ait une grande transparence et beaucoup d'explications qui vous soient données quand il y a des inquiétudes dans la région. Donc, je vous dis, la disponibilité de mon gouvernement est la mienne. Mais on essaie de tenir ce dialogue dans le respect du pluralisme des opinions, des principes de démocratie.
Vraiment, je le dis avec beaucoup d'humilité, on va tout faire pour réussir. Je suis confiant, on va le faire dans le respect de toutes et toutes, et pour toutes les Calédoniennes, les Calédoniens, et aussi pour la paix dans la région. Je veux ici vous redire notre engagement. C'est aussi le sens de l'accueil à Nouméa, de la mission d'information de haut niveau du Forum des îles du Pacifique, qui a donné lieu à des échanges très productifs. Je veux ici remercier en particulier les leaders de la Troïka qui ont eu à piloter ce travail.
Avant de vous passer la parole, je voudrais souligner à quel point la France est attachée à l'unité, à la stabilité de la région, au cœur de notre action, et vous redire ici combien je suis sensible au fait que vous soyez présent dans ce vieux palais, d'avant même la présence française ici, pour vous dire que tous nos territoires sont marqués d'ailleurs par les aléas de l'Histoire. Mais ici, vous voyez, c'était des rois sardes, qui étaient présents, puis la République française est venue, et à partir de la fin du XIXe siècle, c'est devenu l'endroit où, progressivement, l'État fut représenté. Mais vous avoir tous ici est pour nous un immense privilège, et je veux vous redire l'engagement de la France à vos côtés dans la région.
Merci pour votre attention.
A l'issue du Sommet, le chef de l'État a eu une série d'entretiens bilatéraux avec des dirigeants de plusieurs pays avant de se rendre sur le plateau de l'émission « Urgence océan : un sommet pour tout changer », organisée par France Télévisions.
Interview du Président Emmanuel Macron sur France 2.
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