Le Président Emmanuel Macron était à Nice le lundi 9 juin dans le cadre de la troisième édition de la Conférence des Nations unies sur l’Océan. 

Il a ouvert la session plénière de la Conférence aux côtés du Président de la République du Costa Rica, Rodrigo Chaves Robles et du Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres

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9 juin 2025 - Seul le prononcé fait foi

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Discours d’ouverture de la Conférence des Nations unies sur l’Océan à Nice.

Merci Monsieur le secrétaire général des Nations unies,
Monsieur le président de la République du Costa Rica, cher ami,
Altesse,
Mesdames et Messieurs les chefs d'État et de gouvernement,
Mesdames et Messieurs les dirigeants d'organisations internationales,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les élus,
Monsieur le maire de Nice,
Monsieur le président de région, merci de l'accueil qui nous est fait,
Mesdames et messieurs en vos grades et qualités.

Le nom de Nice vient de « victoire », « Niké » en grec. Et dans ce port fondé par des marins phocéens au bord de la Méditerranée, c'est aujourd'hui une victoire que nous célébrons en quelque sorte, une victoire pour nos océans. D'abord victoire que nous soyons tous là, réunis pour cette troisième conférence des Nations unies sur l'océan à Nice que nous coorganisons avec le Costa Rica, prenant le relais de nos amis portugais. Victoire sur l'inertie et l'indifférence aussi, sur la dégradation de notre environnement, sur la tendance au désengagement international. Mais victoire fragile, car elle requiert des actions rapides et elle ne suppose aucun recul. Et cette mobilisation, oui, par elle-même, est une victoire parce que nous connaissons les enjeux qui sont les nôtres. Et je veux ici les rappeler très brièvement.

En 2024, le seuil des +1,5 degré par rapport aux températures préindustrielles a été dépassé. Les écosystèmes sont menacés, les récifs coralliens blanchissent à une vitesse jamais observée jusqu'alors, le vivier de poisson n'a jamais été aussi faible, les ouragans et les cyclones sont plus intenses et tant de nos territoires, je pense à Mayotte ou à La Réunion, ont payé un lourd tribut en 2024. Et si la Terre se réchauffe, l'océan, quant à lui, est en ébullition. Nos scientifiques nous disent des faits que nous n'aurions pu imaginer, des canicules au sein même de nos océans. Et comme la mer monte, en plus du feu, c'est la submersion qui nous guette.

C'est pourquoi cette mobilisation est une nécessité. Aujourd'hui, à Nice, nous avons plus de 120 pays, plus de 50 chefs d'État et de gouvernement, plus de 30 chefs d'Organisation internationale qui ont fait le déplacement, et ça vient d'être évoqué, 100 000 personnes qui participeront à cette conférence, avec des milliers d'événements partout organisés. C'est inédit pour nos océans. C'était essentiel, car l'océan nous relie tous au sein d'un seul et même écosystème qui lie aussi climat et biodiversité. Les émissions de gaz à effet de serre ici touchent les calottes glaciaires aux pôles, qui, en fondant, provoquent en retour une hausse du niveau des mers qui touchent alors les 3 milliards d'êtres humains vivant sur toutes les zones côtières de la planète. Les plastiques jetés à terre se retrouvent au gré des courants, au milieu du Pacifique et au fond des canyons de la Méditerranée, et polluent toute notre chaîne alimentaire. Et les premières victimes sont les États côtiers, les États insulaires et toutes les petites îles. Nous avons tant de nos amis qui sont ici présents et qui dirigent ces États ou ces collectivités. C'est aussi le continent africain présent ici en masse qui voit déjà son trait de côte reculer alors même que nos mers sont source d'activités économiques, d'alimentation durable, et ne l'oublions pas, elles sont notre premier allié contre le changement climatique. Car nos océans capturent un quart du carbone que nous émettons et capturent une bonne partie de la chaleur que nous libérons. C'est un grand régulateur des climats. Notre mobilisation est donc indispensable. Et elle l'est avec la perspective, dans quelques mois, de la COP30 de Belém, Monsieur le Président, cher Lula, au cœur de cet autre fabuleux puits de carbone qu’est la forêt amazonienne.

L'océan, berceau de l'humanité, berceau de notre civilisation au bord de cette Méditerranée chérie, c'est aussi le cœur de notre combat climatique, celui pour l'eau, l'alimentation, l'environnement, le climat, la biodiversité. Et ces combats sont inséparables et c'est celui que nous menons. C'est pourquoi cette conférence, à mes yeux, a un premier objectif, et grâce à votre mobilisation, tous et toutes, nous l'avons atteint, c'est de rappeler la nécessité d'engager la communauté internationale dans toutes ses composantes. Pour réussir la bataille pour les océans, il nous faut redonner de la force au multilatéralisme, derrière le secrétaire général des Nations unies, et bien considérer que la seule manière de répondre à ce défi, c'est de mobiliser tous les acteurs, les chefs d'État et de gouvernement qui vont ici parler, mais également les scientifiques qui se sont mobilisés, et je veux les en remercier. Il n'y aura pas de bataille pour nos océans si elle n'est pas d'abord fondée sur une science libre, ouverte, partenariale. Le climat comme la biodiversité, ce n'est pas une question d'opinion, c'est une question de faits scientifiquement établis.

C'est pourquoi il nous faut défendre nos chercheurs, leur permettre d'avancer, de chercher de manière libre et d'établir ce qui est le cœur de notre action. Et l'UNOC 3 sera l'occasion d'adopter de nouveaux outils, de nouvelles initiatives à l'appui du plan d'action de Nice. Mais c'est ce qui permettra aussi de transformer en organisation internationale, justement, Mercator Océan dont nous avions célébré la première ébauche en 2022 et qui élaborera un jumeau numérique de l'océan, c'est-à-dire une plateforme en ligne donnant accès à une représentation virtuelle de l'océan basée sur les dernières connaissances scientifiques de pointe. L'IPOS, interface entre scientifique et politique, permettra aux États de recevoir l'appui technique nécessaire pour mettre en place des politiques publiques adaptées aux contextes locaux. Le baromètre Starfish, tous les 8 juin chaque année, nous fournira l'état de santé de l'océan. L'Alliance Space4Ocean renforcera la collaboration internationale en connectant le secteur spatial aux communautés océanographiques et mettra les données spatiales au service de la protection océanique. Et pour aller plus loin dans l'exploration, la surveillance, l'analyse, nous lancerons aussi une nouvelle mission océanique spatiale nommée Corsair. Et puis, avec tous les acteurs mondiaux de la recherche océanographique et spatiale, publics comme privés, avec la détermination de l'Union européenne, nous allons lancer la plus grande des missions d'exploration globale de l'océan dès 2026, la mission Neptune. Et plutôt que de se précipiter sur Mars, faisons déjà en sorte de connaître notre ultime frontière et notre meilleur ami, l'océan. Ce sera ça, Neptune.

Mobiliser la science donc, et nous baser sur celle-ci, mobiliser tous les acteurs locaux, et de manière inédite, 300 élus, maires et gouverneurs des 5 continents ont créé, sous l'impulsion de Christian Estrosi que je remercie, la première coalition des villes et régions pour lutter contre les effets du changement climatique et de l'élévation du niveau des mers. Cette coalition d'acteurs locaux, co-présidée avec la maire de la Nouvelle-Orléans, avec laquelle vous avez présenté vos travaux, c'est aussi la mobilisation de tous les acteurs locaux à travers le monde, de toutes celles et ceux qui sont touchés au premier plan par les effets déjà du changement, mais ceux aussi qui permettent de construire sur le terrain les solutions pour éviter, réduire, compenser, adapter sur le terrain les mauvais comportements, les émissions et permettre de répondre à nos défis. C'est aussi la mobilisation de la communauté économique, et je remercie Monaco pour l'organisation du Blue Economy & Finance Forum qui a permis de mettre 200 initiatives en place, des facilités financières avec une pluralité d'acteurs et qui va nous permettre de mobiliser, justement, le monde économique et la finance. Et c'est également la mobilisation de la jeunesse, de nos organisations non gouvernementales qui, à l'occasion de ce sommet et de cette Conférence des Nations unies, nous ont soumis leurs propositions, se sont mobilisés, mais surtout veulent agir au quotidien à nos côtés.

La première réponse, c'est donc le multilatéralisme, la mobilisation de tous et de tous les acteurs. Le deuxième élément, c'est la protection de la majeure partie de nos océans et de la planète. Imaginez, jusqu'à il y a deux ans à peine, la moitié de la planète, les deux tiers de nos océans, vivaient sans véritables règles internationales. Pendant plus d'une décennie, nous nous sommes battus et la Communauté internationale était bloquée pour pouvoir obtenir sur la haute mer enfin une régulation. C'est ce qui a été signé il y a quelques mois avec le traité qui, en anglais, se dit Biodiversity Beyond National Jurisdiction, BBNJ donc, qui régule la haute mer. Ce traité a été signé. Nous nous sommes fortement mobilisés. Et je peux vous dire à cet instant qu'à la cinquantaine de ratifications déjà déposées, ici même ces dernières heures, 15 pays se sont formellement engagés à les rejoindre, ce qui fait que l'accord politique est obtenu, qui nous permet de dire que ce traité sur la haute mer sera bien mis en œuvre. C'est donc gagné. Il aura fallu 12 ans en 1982 pour faire de même avec la Convention du droit de la mer. En deux ans, par cette mobilisation collective, nous aurons réussi à faire appliquer enfin ce traité qui simplement donne des règles, va permettre de lutter efficacement contre la pêche illégale, va permettre de protéger nos océans dans les deux tiers du globe, dans les deux tiers, pardon, de ces océans et la moitié de la planète.

La troisième bataille, c'est la protection des grands fonds marins. Nous sommes 33 États à avoir créé une coalition pour promouvoir un moratoire sur l'exploitation des grands fonds marins. Et je le dis ici à tous, c'est une nécessité. Et pourquoi ? Je ne suis pas du tout contre l'activité économique, bien au contraire. Mais je pense que c'est une folie de lancer de l'action économique prédatrice qui va bousculer des grands fonds marins, qui bouscule la biodiversité, qui la détruit, qui libère des puits de carbone irrécupérables, quand nous n'y connaissons rien ! C'est de l'obscurantisme que de faire de l'exploitation avant d'avoir commencé l'exploration. Et donc, le moratoire sur l'exploitation des grands fonds marins est une nécessité internationale.

Lançons des grandes missions d'exploration, connaissons, mettons la science en avant, mais n'exploitons pas ces grands fonds marins ! Protégeons nos écosystèmes parce que nous ne savons pas ce qui peut s'en suivre, parce que vous avez là des réserves de carbone essentielles, parce que vous avez là des espèces que personne ne connaît encore. Ce combat est vital pour nous tous. Et je le dis ici avec force, les abysses ne sont pas à vendre, pas plus que le Groenland n’est à prendre, pas plus que l’Antarctique ou la haute mer ne sont à vendre, pas plus que les licences de pêche des pays en développement ne sont à donner, pas plus que les données scientifiques ou la sécurité des populations littorales ne sont à sacrifier. Nous parlons d'un bien commun. Nous parlons d'une œuvre qui nous engage tous, alors allons-y.

L'autre combat, c'est la protection de 30 % de nos terres et de nos mers. C'est le combat que nous avons livré, qui a été fixé dans le cadre global lors de Kunming, Montréal pour 2030. Cet objectif, nous l'avons porté ensemble avec Rodrigo dès janvier 2021, par la coalition de la haute ambition pour la nature et les peuples. Il réunit aujourd'hui plus de 120 membres et il s'est imposé lors de cette COP à Kunming, Montréal. À ce jour, juste avant cette conférence, nous étions à 8 % des mers protégées, selon les derniers décomptes. Cette semaine va permettre, et j'attends les annonces tout au long des prises de parole, d'augmenter ces aires marines protégées à travers la planète, mais on ne peut pas rester à ces 8 % ; objectif 30 % en 2030. La France, deuxième zone économique exclusive du monde, y prendra toute sa part. Plus de 30 % de notre zone économique exclusive est d'ores et déjà protégée. Nous en sommes fiers, mais nous allons plus loin. La Polynésie française vient de réaliser une première grande annonce : plus de 4 millions de kilomètres carrés nouveaux sont désormais protégés, dont 900 000 kilomètres carrés en protection forte. Et nous allons faire plus dans le dialogue et la concertation en travaillant à renforcer des actions de protection avec certains de nos grands voisins dans nos territoires d'Outre-mer.

Mais parce que certains scientifiques nous disent aussi que c'est encore insuffisant, nous allons renforcer significativement le niveau de protection d'une partie de ces aires. À travers un plan pour la protection des fonds marins, et la carte sera donnée lors de cette conférence très précisément, nous allons désormais classer les écosystèmes les plus sensibles, comme les posidonies, les canyons, en protection forte. Les activités humaines seront donc davantage encadrées et certaines interdites. Les techniques de pêche, comme le chalut de fond, mais aussi toutes les activités minières, seront, dans ces zones qui ont été cartographiées sur une base scientifique, concertées avec nos pêcheurs, ces zones seront données, ce qui nous permettra de faire plus que doubler le niveau de notre protection forte dans notre zone économique exclusive.

Voilà, Mesdames et Messieurs, les quelques convictions que je voulais partager avec vous. Tout ça, ce sont des combats que nous continuerons à mener. Nous devons aussi continuer de nous mobiliser sur la question du plastique ; 8 millions de tonnes de plastique sont déversées chaque année en mer. Les discussions sont essentielles. Nous aurons ici une déclaration mondiale, une mobilisation qui permettra, je l'espère, de mobiliser tous et toutes pour la prochaine réunion et nous essaierons de nous mobiliser au sein, tout particulièrement, de la Méditerranée. Mais la bataille pour limiter le plastique, combattre le plastique sur terre et en mer est essentielle. Nous allons, lors de cette conférence aussi, accélérer la décarbonation du transport maritime. Des initiatives essentielles ont été prises pour le ralentir, pour favoriser le transport à voile, pour favoriser de nouveaux carburants. Et je veux saluer l'accord historique de l'Organisation maritime internationale, obtenu il y a quelques mois, qui est une véritable révolution et qui va permettre de transformer le transport maritime international.

Au-delà de celui-ci, nous continuerons le combat pour électrifier nos ports, qui est un combat essentiel, car c'est 10 % à 20 % de nos émissions. Et puis, nous devons continuer la lutte contre la pêche illégale. Un poisson sur 5 consommés dans le monde provient d'une pêche illicite qui est un pillage, une piraterie qui abîme notre biodiversité. Et là-dessus, je veux saluer la mobilisation de l'Organisation mondiale du commerce qui a obtenu des accords essentiels. Il faut les ratifier pour lutter contre les subventions à la pêche illicite et à la FAO pour renforcer les contrôles. Ensemble, la FAO et l'OMC ont mis en place un cadre que nous devons tous soutenir et ratifier. C'est le seul moyen de créer de la transparence, de lutter contre les subventions illicites à cette pêche, et donc, d'éradiquer la pêche illégale partout sur la planète. Ceci est essentiel, pourquoi ? Abderrahmane Sissako l'a dit tout à l'heure. Parce que cette pêche se fait dans les États les plus pauvres ! Elle se fait dans les mers des États qui n'ont pas les moyens de les protéger. Et donc, c'est un double pillage. C'est un pillage sur notre biodiversité, mais c'est un pillage des ressources halieutiques de ceux qui n'ont pas les moyens de se défendre. Et donc, c'est encore une fois une injustice au carré.

Voilà, mes chers amis, ce que je voulais vous dire en ouverture de cette conférence. Je le dis, et pardonnez-moi avec passion, parce que ce combat pour les océans est au fond, au cœur de tous les combats que nous menons depuis des années pour notre biodiversité, contre le réchauffement climatique et les dérèglements et ce qui s'ensuit, et pour améliorer notre environnement et la santé, de nous-mêmes et de la planète. Et donc, sur chacun de ces axes, nous devons nous battre. Et je compte sur vous.

Je commençais mon propos en disant que Nice, c'était la victoire. C'est la victoire d'être là et mobilisés. Mais c'est surtout aujourd'hui, vous l'avez compris, le combat. Je compte sur chacune et chacun d'entre vous pendant ces 5 jours pour que notre humanité progresse, pour avoir le plan d'action pour les océans le plus ambitieux possible à Nice, pour qu'ensemble, avec mon ami président du Costa Rica, nous ayons les meilleurs résultats possibles et que nous arrivions sur chacun de ces axes à faire avancer ensemble notre planète.

Je vous remercie pour votre attention et votre mobilisation. Et maintenant, j'ai le plaisir et le bonheur d'inviter son excellence Monsieur le Président Chavez à faire son discours.

Le chef de l'État a ensuite eu des entretiens bilatéraux avec des représentants de plusieurs pays. 

En début d'après-midi, il a assisté à la présentation du Pacte européen pour les Océans en présence de la Présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

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Introduction du Président de la République à l’occasion de la présentation du Pacte européen pour les océans;

Emmanuel MACRON

Monsieur le Président,

Madame la Présidente de la Commission,

Mesdames et Messieurs les chefs d'État et de gouvernement,

Mesdames, Messieurs les ministres, Ambassadeurs,

Monsieur le Maire de Nice, merci encore pour l'accueil,

Chers amis,

Je me réjouis en effet que ce sommet, j'ai déjà dit beaucoup de choses ce matin, donc je vais tâcher de ne pas les répéter, permette cette étape qu'est le Pacte européen pour l'océan. Merci, Madame la Présidente de la Commission, d'avoir amené ces éléments de fond et aussi les premiers financements que vous avez exposés avec ce milliard d'euros. Et vous avez raison aussi de dire que nous aurons maintenant le travail dans le cadre des perspectives financières à conduire tous ensemble pour être cohérents avec ces engagements. Mais je crois que l'Europe, comme elle a su le faire sur la réduction des émissions, a une capacité véritablement de prescription lorsqu'il s'agit de nos océans, parce que l'Union européenne est la première puissance maritime mondiale.

Je rappelais ce matin que la France était en effet la deuxième zone économique exclusive et que si les États-Unis d'Amérique sont la première, l'Europe, elle, rassemblée toute entière avec tous ses États membres, elle dispose du premier domaine maritime mondial de 25 millions de kilomètres carrés. Et donc ce Pacte européen a quelque chose en effet de très prescripteur pour pouvoir avancer et, je dirais, changer véritablement le destin de nos océans et mettre en pratique tout ce qui a été dit ce matin, ce qui a été demandé par nos scientifiques, nos ONG, notre jeunesse, tout ce sur quoi nous voulons nous engager. Alors, je vais juste dire pour moi quelques éléments clés.

Le premier, j'y revenais ce matin, c'est la science. Vous avez annoncé 300 millions d'euros dans le cadre de Choose Europe for Science sur les sujets maritimes, mais je pense qu'il est absolument essentiel, et le président Costa vient de le rappeler à l'instant, il est absolument essentiel de poursuivre cette ambition. Et en effet, notre Europe a beaucoup à faire en termes de financement de la recherche. D'abord parce qu'il y a un désengagement américain sur ces sujets, la NOAA, les systèmes d'observation, les grandes missions. Et donc, c'est à nous, Européens, de regarder partout où les éléments sont stratégiques et de nous engager. Et donc, c'est d'abord nous engager pour permettre à des chercheuses et des chercheurs qui, aujourd'hui, voient leurs laboratoires, leurs chaires de recherche menacées, de les accueillir en Europe dans des écosystèmes de recherche où ils vont pouvoir poursuivre leurs travaux. Donc la première chose, ce sont les personnes.

La deuxième, c'est nous assurer que dans tous les programmes, les séries longues de recherche qui sont menacées par le désengagement américain, nous, Européens, on arrive à sécuriser, eh bien, la possibilité de maintenir ces données de manière ouverte et déconsolidée. Ça, c'est ce que j'appellerais les infrastructures de recherche. On a deux éléments clés, les bases de données et les infrastructures d'observation et donc ce sont toutes les missions d'observation et le lien qu'il y a entre la recherche sur les océans et le spatial. À cet égard, le Président vient d'y faire allusion et vous en avez parlé, Madame la Présidente, Cette mission Neptune est un élément clé et le pacte doit nous permettre de poursuivre, en effet, ces programmes qui vont nous permettre d'avancer sur l'innovation et l'exploration océanographique et sous-marine.

La mission Neptune va nous permettre, en quelque sorte, de mettre un chapeau à beaucoup de contributions nationales qui existent d'ores et déjà aujourd'hui. On était hier avec nos amis de l'Ifremer. Mais beaucoup de pays ont leurs propres organismes de recherche marine et ont fait tous des choses qui sont très utiles. La mission Neptune va nous permettre de consolider tout cela et de pouvoir en particulier avancer sur les explorations des fonds marins et de la colonne d'eau. Parce qu'il y a évidemment l'exploration des fonds marins, mais il ne faut pas aller que sur les fonds, il faut regarder et pouvoir analyser toute la colonne d'eau et pouvoir aussi consolider l'observation de nos océans dans la durée avec, là aussi, des moyens qu'on va donner sur le plan satellitaire et de l'observation. Et donc, nous le faisons également avec le CERN, si je puis dire, si je puis prendre cette comparaison. Et je pense que ça a beaucoup de synergie avec ce que nous voulons aussi faire en matière de spatial au niveau européen. La mission Neptune, vous l'avez donc compris, c'est pour nous, en quelque sorte, ce chapeau d'une ambition de recherche sur les grands programmes. Et donc on a ce triptyque qui va maintenant fonctionner avec la matière, le spatial et les océans, et avec là aussi beaucoup de synergie entre ces trois grandes volontés.

L'autre point que le pacte va permettre de faire avancer, c'est là aussi la nouvelle organisation intergouvernementale internationale pour les prévisions océaniques, le Centre international Mercator pour l'océan. Elle sera hébergée en France, mais je veux ici saluer ceux qui ont beaucoup fait pour pousser cette idée, cher Pascal, et vous êtes quelques-uns dans cette salle. En effet, quand on nous présentait il y a 5 ans, c'était donc presque hier, l'idée d'avoir un jumeau numérique des océans, beaucoup nous disaient que ce serait impossible, mais avec le jumeau numérique de l'océan, c'est le meilleur moyen de combattre la pêche illégale, de lutter contre la hausse du niveau des mers, d'aider, là aussi, tous les acteurs de la mer à être plus écologiques et plus performants parce qu'on visualise en temps réel les impacts et qu'on peut donc changer les comportements. Et donc, en se nourrissant de la science, très clairement, Mercator va permettre d'avancer, et en le construisant comme organisation intergouvernementale internationale, nous lui donnons une visibilité et une force beaucoup plus importantes. Donc ça, pour moi, c'est le premier point. Je pourrais citer Starfish, que j'évoquais également ce matin, et beaucoup d'autres initiatives. Nous avons ce volet recherche, jumeau numérique de l'océan avec Mercator, qui est un pilier absolument fondamental de ce que nous, Européens, nous devons continuer de faire avancer, c'est-à-dire une science libre, ouverte, une aide à la décision et une capacité à comprendre nos océans et à avancer.

Le deuxième élément, c'est évidemment la réduction des émissions de CO2 et la protection de nos océans. Et là, l'engagement de l'Union européenne dans la ratification de BBNG, merci, Président, des mots que vous venez d'avoir, dans la préservation de 30 % de nos aires marines, de nos mers, en en faisant des aires marines protégées, c'est un élément de profond changement, car, comme je le disais, notre Europe représente le premier espace maritime. Et je veux remercier tous les collègues qui se sont engagés justement cette avancée, tous les collègues qui ont décidé de porter cette ambition, parce que c'est le meilleur moyen d'arriver à notre engagement collectif de 30 % en 2030. Et la ministre a pu présenter la carte aussi que la France a voulu porter à votre connaissance. Nous avons maintenant dépassé les 30 %, mais surtout, nous avons fait plus que doubler la très forte protection qui passe de 4 % à plus de 10 % dans notre zone économique exclusive. Mais l'Europe doit véritablement continuer ce combat de la préservation et continuer aussi l'accompagnement de tous les acteurs. Donc, je voulais insister sur quelques points qui sont au cœur des politiques européennes et que vous avez évoquées dans votre discours et l'un et l'autre.

D'abord, on doit continuer d'accompagner le transporteur maritime et les grandes infrastructures maritimes en Europe pour se décarboner. Les acteurs du transport maritime européen ont engagé eux-mêmes des réformes très profondes. Il y a ici des pays qui sont très importants sur ce sujet, je salue Kyriákos qui est là à nos côtés. Mais ils ont commencé à faire une révolution en décarbonant leur flotte. Et je veux saluer vraiment nos grands transporteurs qui ont pris des décisions fortes. Nous les accompagnons et nous devons continuer de les accompagner pour favoriser la composante vélique dans ces transports, ce qu'on a fait par exemple avec Canopée. Auparavant nous transportions les composantes d'un autre champion européen, qui est Arianespace, eh bien, d'un bout à l'autre de l'océan, on le transportait avec des bateaux qui étaient très polluants. Avec Canopée, on a réduit de 30 % les émissions de CO2 parce qu'on a mis une composante voile et qu'on a allégé le bateau. Toutes ces innovations, c'est de la réduction de CO2. Et donc, notre Europe doit s'engager à travers le pacte pour favoriser, justement, la transformation de nos modes de transport, plus d'hydrogène, plus de transport vélique, un allègement des bateaux et réussir à avoir, là aussi, une réduction de nos émissions de CO2.

Ensuite, c'est la transformation de nos ports. Ce que nous sommes en train de faire et qu'accompagne l'Europe, et il faut continuer, c'est l'électrification des ports et de toutes les pratiques. 20 % de ce qui est émis par nos flottes est émis dans nos ports. Et c'est exactement ce sur quoi on travaille et qui est très cohérent avec ce qu'on mène, d'ailleurs, avec Pedro et Luis, qui va avec la promotion de l'hydrogène vert dans les ports de la Méditerranée et du flanc océanique, et qui permet véritablement de réduire cela. Et tout ce qui est fait par les pays, en particulier de la péninsule ibérique, en matière de production d'hydrogène vert, c'est un élément de transformation pour aller vers des carburants, justement, substituables et beaucoup moins polluants, là aussi, pour notre marine, c'est absolument clé. Et puis, derrière, c'est aussi le renouvellement de notre flotte. Si nous voulons avoir des activités de pêche qui polluent moins, il faut avoir une flotte qu'on renouvelle beaucoup plus fortement. Et Madame la Présidente sait combien elle est attendue à cet égard par tous les pêcheurs européens, et en particulier les pêcheurs ultramarins de France qui souhaitent renouveler leur flotte beaucoup plus rapidement pour avoir des bateaux, justement, qui sont beaucoup moins émetteurs, qui sont aux normes environnementales que nous proposons et qui leur permettent d'avoir une pêche dans les meilleures conditions et qui se conforment aux obligations que nous leur donnons. Et donc cet accompagnement, là aussi, de nos pêcheurs, pour aider à moderniser leur flotte, pour justement, leur permettre de traduire nos décisions en actes, est absolument clé. Et ce Pacte va nous permettre d'aller en ce sens.

Je veux redire ici la cohérence que nous devons avoir pour gérer nos stocks comme il se doit et accompagner nos pêcheurs dans le renouvellement de leur flotte. Grâce à l'Europe, nos stocks de poissons sont parmi les mieux gérés au monde. Désormais, grâce à l'Europe, nous devons proposer à nos jeunes pêcheurs un projet de vie qui allie leur passion de l'océan à la protection du climat et de la biodiversité. C'est ce sujet clé du renouvellement des flottes sur lesquelles nous avons besoin de vous. Et en retour, nous devons les aider, investir avec eux, parce que ce sont les premiers remparts de la pêche illégale. Partout où on a de la pêche, dans des bonnes conditions, dans des bonnes règles, on n'a pas de pêche illégale, on n'a pas de prédation. Et donc, c'est aussi le fer de lance de notre résilience et de notre capacité à agir.

Pour tenir ces équilibres, et donc, il y a la science, il y a la transformation de nos comportements, notre transport maritime, nos ports, nos pêcheurs, et puis, il y a la capacité prescriptive que l'Europe peut avoir. Quand l'Union européenne s'engage, on est 27 plus la Commission, eh bien, on a la possibilité de changer les choses. Et en particulier, ça doit être un élément clé de ce Pacte d'océan que vous avez présenté, Madame la Présidente, et qui doit impulser toutes nos négociations commerciales, notre géopolitique. C'est la lutte contre la pêche illégale, non traçable, non documentée, et donc, cette pêche INN, qui est une piraterie moderne, c'est véritablement un sujet que nous portons ensemble. Et d'ailleurs, la Commission est très exigeante à juste titre à cet égard. Et à chaque fois, d'ailleurs, qu'on dit à un pays : « vous avez de la pêche INN », ça nous aide beaucoup pour faire changer les pratiques. Mais c'est le seul moyen d'embarquer nos pêcheurs partout en Europe pour transformer les leurs.

Comment convaincre un pêcheur chypriote, croate, espagnol ou français de changer ses pratiques si, en même temps, on a des accords commerciaux qui font rentrer de la pêche INN ou qui ne la tracent plus ou mal ? L’Irlande a exactement le même problème que nous. Et donc, notre capacité à faire imposer partout dans le monde, par ce pouvoir de négociation dans nos accords, accords commerciaux, la prise en compte de la pêche illégale et de la pêche INN, c'est clé. Et c'est pour ça que l'Europe peut être l'élément transformant pour que ce qui a été décidé à la FAO, à l'Organisation mondiale du commerce, et qui est absolument fondamentale, soit vraiment appliqué par tous nos partenaires et que nous excluons ainsi de nos partenariats ceux qui ne se conforment pas à cela. Et donc ça, c'est aussi un élément clé sur lequel je voulais insister, c'est que l'Europe, par sa taille, par sa force, peut avoir une capacité prescriptrice et peut vraiment faire changer les comportements si elle impose, eh bien, cette meilleure traçabilité et qu'elle permet, justement, de faire respecter ces règles. Voilà les quelques mots que je voulais avoir.

Le dernier, c'est pour vous dire que tout ce dont on parle, a au fond une synergie complète avec les sujets de défense et de sécurité. Parce que si on veut préserver 30 % avec nos aires marines protégées, si on veut lutter contre la pêche INN, si on veut défendre notre science, nous devons protéger nos zones économiques exclusives. Et donc, nous devons être intraitables quand la souveraineté territoriale de certains de nos partenaires est menacée. Je pense ici à nos amis grecs ou chypriotes. Nous devons protéger nos eaux territoriales et ces airs maritimes partout. Et donc, l'effort de sécurité et de défense qui est fait par tous les Européens, accompagné par la Commission, doit intégrer la composante océanique dans sa dimension. Aucun des engagements que nous sommes en train de tenir ne sera crédible si nous ne sommes pas capables de le faire vérifier. Et donc, nous devons, partout sur nos eaux, avec nos marines, faire vérifier les engagements que nous sommes en train de prendre. Et nous devons être aussi des partenaires crédibles quand des pays du monde entier viennent nous demander de les aider contre les pêcheurs illégaux, les prédateurs qui viennent dans leurs eaux. Combien de pays m'ont demandé notre aide pour venir lutter contre de la piraterie ? C'est aussi le rôle de l'Europe. Et donc, nous avons tous aussi cette nécessité de prendre en compte cet enjeu océanique dans nos efforts de défense pour pouvoir continuer d'avancer.

Voilà, mesdames et messieurs, ce que je souhaitais dire en ce début d'après-midi, en remerciant infiniment, Madame la Présidente de la Commission et Monsieur le président du Conseil, pas simplement de leur présence, mais de leurs mots, de la première impulsion que vous avez donnée, qui est inédite, d'avoir un tel pacte européen pour l'océan. Et maintenant, Madame la Présidente, je veux que vous sachiez qu'on sera à vos côtés lors des prochaines perspectives financières pour aussi, nous, prendre les décisions qui permettront d'être pleinement cohérents et de donner les moyens de financement pour que les ambitions scientifiques, opérationnelles, d'accompagnement de nos pêcheurs, de notre transport et de protection de ces zones, que nous vous donnions les moyens de tout cela.

En tout cas, nous croyons dans une Europe de la paix et de la prospérité, et ce Pacte européen pour les océans y contribue ô combien. Merci à toutes et tous.

Le Président de la République a ensuite conclu le panel « L’Afrique pour l’Océan » présidé par la Présidente de la Fondation Mohammed VI pour la protection de l'environnement, S.A.R. Lalla Hasnaa.

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Discours d’ouverture du panel « l’Afrique pour l’Océan » à la Conférence des Nations unies sur l’océan.

Emmanuel MACRON

Votre Altesse royale, Princesse Lalla Hasnaa,

Mesdames et Messieurs les chefs d'État et de gouvernement,

Chers amis,

Monsieur le Secrétaire général des Nations unies, cher António Guterres,

Mesdames et Messieurs, les représentants d'organisations internationales, d'organisations régionales, d'institutions financières,

Mesdames, Messieurs les ministres, ambassadeurs, chers amis,

Je suis très heureux que Sa Majesté, le Roi Mohammed VI, représenté par Son Altesse royale, Lalla Hasnaa, organise ce sommet dédié à l'Afrique pour l'océan. Je tiens également à remercier le Royaume du Maroc de nous avoir associés à cette initiative sur des enjeux essentiels pour le continent africain et pour nous tous. Et merci, Votre Altesse royale, des mots que vous venez d'avoir au nom de Sa Majesté le Roi, qui, je crois, sont tout à la fois forts et clairs sur la stratégie à conduire. Et je dois dire que nous la partageons.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Ce matin, les discours, en ouverture de cette conférence le montraient, le rappelaient : le réchauffement climatique a accru la température moyenne des eaux sur le continent africain de 0,6 degré depuis 1982, d'ores et déjà. L'érosion côtière menace déjà plus de 56 % des zones côtières d'Afrique de l'Ouest qui sont les plus exposés du continent. La pollution plastique continue de faire des ravages, plus de 11 millions de tonnes chaque année dans le monde, dont une part croissante vient asphyxier les rivages africains. C'est pourquoi il est urgent d'agir et protéger nos océans et, en effet, protéger tout à la fois notre climat, notre biodiversité et notre propre santé.

Là aussi, l'Afrique a un rôle unique à jouer. 70 % des populations africaines vivent dans des pays côtiers. L'océan, c'est la pêche artisanale au Sénégal, le tourisme balnéaire à Maurice, au Mozambique, c'est la biodiversité unique du canal du Mozambique, la sécurité alimentaire, les emplois, les identités. Et qui mieux que vous pour porter des solutions et inventer une économie bleue résiliente ?

Je pense à tout ce qui a déjà été entrepris par beaucoup de pays autour de cette table. L'initiative de surveillance satellite des pêches lancée par les Seychelles, la Côte d'Ivoire qui interdit les sacs plastiques, la stratégie bleue du Gabon qui a fait de ce pays un leader africain en matière de préservation marine, protégeant plus de 26 % de ses eaux territoriales. Je pense au Kenya qui a accueilli la première conférence mondiale sur l'économie bleue en 2018, posant les bases d'un dialogue Sud-Sud ambitieux. Je pense au Sénégal, au Cap-Vert, à la Mauritanie, au Mozambique, à Madagascar, au Bénin, à tant d'autres encore qui développent des politiques de lutte contre la pêche illégale, de protection des mangroves, de promotion d'une pêche artisanale durable qui ont été très avant-gardistes. Et je pense bien sûr au Maroc, dont les efforts constants dans la gouvernance océanique, dans la lutte contre la pollution plastique et pour la coopération régionale font figure de référence sur le continent.

En effet, et vous venez de l'évoquer, Votre Altesse royale, l'initiative atlantique de Sa Majesté le Roi du Maroc, pour un accès à l'océan des pays africains enclavés, témoigne de cette vision. Il y a 20 ans, Sa Majesté lançait le projet de Tanger Med, qui est aujourd'hui le port le plus important de la Méditerranée. L'année prochaine, les travaux du port de Dakhla inaugureront une nouvelle ère pour l'océan Atlantique et cette volonté de faire accéder tout le continent à cet océan et à cette ouverture. C'est pourquoi ce n'est pas un hasard si ce sommet se tient sous la double bannière du Maroc et de la France, deux nations qui partagent une rive, un dialogue millénaire, une histoire commune et l'envie d'un cap commun et d'un monde mieux amarré à l'essentiel. Nous sommes là et nous serons là pour apprendre de vous, pour vous appuyer quand vous nous y invitez, car l'océan est une histoire partagée.

Et pour reprendre ce que vous venez d'évoquer, Votre Majesté, la France, comme l'Europe, souhaitent être des partenaires de confiance de cette économie bleue que vous avez appelée de vos vœux. Oui, il faut continuer de développer des infrastructures durables partout sur le continent africain, ports, structures fluviales, qui, électrifiés ou fonctionnant à l'hydrogène vert, permettront de décarboner ce qui représente 20 % de la pollution du transport maritime, c'est-à-dire le moment où nos bateaux sont à quai. Renouvellement des flottes, qu'il s'agisse des flottes de transport, de pêche ou d'activité de tourisme. Pour tous ces sujets, nous souhaitons être à vos côtés pour pouvoir accompagner ces transitions. Et les 4 dernières années, les projets de l'Agence française de développement pour l'océan en Afrique s'élèvent ainsi à 1,128 milliard d'euros, et ont permis une augmentation forte, accompagnant plusieurs projets de modernisation des économies allant en ce sens. L'économie bleue, ce sont aussi les interconnexions électriques, vous en avez rappelé l'importance, et nous souhaitons être partenaires et accompagner ces mouvements.

Le deuxième élément, c'est la protection adaptée. Protection avec les 30 % d’aires marines protégées à horizon 2030, mais la possibilité d'accompagner ces mécanismes, c'est-à-dire de les penser avec des scientifiques, de les rendre compatibles avec une pêche durable et des activités qui sont aussi bénéfiques pour les économies locales et qui viennent lutter et protéger vos eaux territoriales de la prédation de puissances étrangères non coopératives et la forte protection pour permettre de régénérer une partie de ces zones. Là-dessus aussi, nous souhaitons vous accompagner par l'expertise, les financements. C'est ce que nous avons commencé à faire, par exemple, avec la Mauritanie, pour préserver la biodiversité marine, aux côtés de Madagascar, pour des aires marines protégées, ou encore avec le Maroc, au service de la pêche durable. Cette protection adaptée est clé et elle a, pour contrepartie, la lutte sans relâche contre la pêche illégale ou la pêche dite INN, qui est un fléau pour le continent africain. Je donnais les chiffres internationaux ce matin. Un poisson sur 5 qui est consommé provient de la pêche dite INN.

Mais soyons clairs, c'est beaucoup plus dans les eaux des pays les plus modestes. Et combien de pays africains présents autour de cette table ont leurs côtes littéralement pillées par, il faut bien le dire, des bateaux de pêche qui n'ont plus rien de bateau, mais qui sont des véritables usines sur mer, qui, de manière industrielle, pillent les fonds marins et la colonne pélagique, transforment sur les bateaux et congèlent ces poissons pour ensuite les livrer parfois directement sur les marchés finaux. Cette pêche INN est un fléau pour le continent africain parce qu'elle pille votre biodiversité, elle empêche de vivre vos pêcheurs, elle est attentatoire à votre souveraineté, et elle est contraire à tout le projet qui nous lie aujourd'hui. C'est pourquoi, nous souhaitons, là aussi, former, accompagner sur ce volet.

Dans l'Océan Indien, l'Académie de l'Océan Indien forme, sous l'égide de la COI, des experts pour renforcer les centres nationaux qui luttent contre la pêche illégale. Dans le cadre du programme ECOFISH, financé par l'Union européenne, plus de 60 opérations communes regroupant de nombreux États de la zone ont été conduites, patrouillant justement dans les zones privilégiées par la pêche INN. Et nous avons multiplié les initiatives en ce sens pour aussi permettre les partenariats entre notre Marine et les vôtres partout où c'est souhaité.

Enfin, Votre Altesse royale, vous l'avez évoqué, c'est une intégration Sud-Sud et une gouvernance adaptée qui s'imposent pour gérer la question des océans. Il y a évidemment la nécessaire intégration régionale dont vous venez de poser parfaitement les termes et les enjeux. Et je veux ici simplement vous dire la disponibilité de la France et de l'Union européenne pour accompagner ce chemin de manière respectueuse, partenariale. La Présidente de la Commission européenne et le Président du Conseil ont tout à l'heure présenté le Pacte océan de l'Europe avec des ambitions nouvelles, une volonté nouvelle. La France a traduit aussi sa stratégie. Nous sommes disponibles pour être ces partenaires de confiance qui, aux côtés de l'Union africaine, des organisations régionales et de tous les pays présents, pourront aider à mieux protéger, à mieux accompagner ces transitions et à protéger nos océans dans vos eaux territoriales et au large de celles-ci. La volonté de la France et de l'Europe est d'être des partenaires de confiance tournées vers l'avenir, respectueux aussi de cette volonté qui est la vôtre, c'est-à-dire de pleinement récupérer la souveraineté, de protéger vos eaux et de permettre un développement harmonieux d'activités économiques indispensables.

Ce combat est au cœur de ce en quoi nous croyons et dans le cadre duquel nous sommes alliés, beaucoup d'entre nous autour de cette table, qui est ce pacte pour la prospérité des peuples et la planète, le 4P, qui conduit justement à associer tout à la fois l'investissement dans la lutte contre les inégalités et pour le climat et la biodiversité. Ce que nous sommes en train de nous dire pour nos océans, c'est exactement ce combat. Et je veux simplement vous dire notre volonté d'être à vos côtés pour cette coopération.

Voilà, Mesdames et Messieurs, chers collègues, Votre Altesse royale, ce que je souhaitais simplement ajouter, en vous remerciant à nouveau pour l'organisation de ce sommet Afrique pour l'océan et en vous remerciant de votre présence, de présider cette réunion et de l'engagement personnel de Sa Majesté le Roi Mohamed VI. Merci à tous.

Après avoir participé au Sommet sur la Méditerranée, le chef de l'État a donné une conférence de presse. 

Revoir la conférence de presse : 

9 juin 2025 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence des Nations unies sur l'Océan à Nice : deuxième journée.

 

Emmanuel MACRON

Mesdames, Messieurs, les ambassadrices et ambassadeurs,

Mesdames, Messieurs.

Je voulais vous rendre compte après cette première journée officielle et après plusieurs journées de mobilisation, puisqu'il y a eu, comme vous le savez, ces derniers jours à la fois un sommet, une conférence scientifique et aussi une mobilisation, une coalition des collectivités territoriales à travers le monde et beaucoup de coalitions d'acteurs dont nous avons rendu compte hier en fin d'après-midi. Aujourd'hui se tenait l'ouverture formelle de ce sommet des Nations unies sur les océans, dont la France et le Costa Rica ont la présidence et que Nice a accueilli. Je suis très heureux de vous parler depuis Nice à l'issue de cette première journée. Cette conférence de Nice est, à nos yeux, un moment extrêmement important et d'ores et déjà, et il faut le dire comme tel et le revendiquer comme tel, un succès, par son organisation même, par ce qu'elle représente au moment même où nous le faisons. C'est-à-dire alors que les vents mauvais se sont remis à souffler pour écarter toutes les questions climatiques, environnementales ou de biodiversité de l'agenda international, jamais la Communauté internationale n'avait mobilisé autant de chefs d'État et de gouvernement, autant de pays pour nos océans. En effet, grâce au travail qui a été accompli, cette mobilisation a été possible, et nous l'avions lancée dès 2022 à Brest avec le One Ocean Summit, puis à l’UNOC 2 à Lisbonne.

Donc la mobilisation de plus de 60 chefs d'État et de gouvernement, de plus de 120 ministres, plus de 1 000 événements organisés par la société civile, c'est en soi déjà une avancée, et c'est en soi déjà quelque chose d'inédit pour nos océans. Et avec le président Chaves du Costa Rica, le président Lula, qui était là aussi, les chefs d'État présents, ont confirmé que la diplomatie environnementale était toujours là et que rien n'arrêterait cette mobilisation. Et je veux avant toute chose remercier celles et ceux qui l'ont rendu possible. Monsieur le ministre, vous-même et l'ensemble des équipes du Quai d'Orsay, le représentant personnel en charge des océans et de la négociation climatique, ambassadeur des pôles, Madame la directrice et toute la direction des Nations unies, l'ensemble des équipes qui sont à vos côtés, merci infiniment pour cette mobilisation est ce qui a été fait avec mes équipes, celle du ministre, et remercier, évidemment, les Nations unies pour leur étroite coopération avec nous et le Costa Rica. Le moment qui a été permis par cette mobilisation, c'est celui d'une avancée qui est désormais irréversible pour nos océans.

Je voudrais insister sur quelques avancées de ce sommet qui sont d'ores et déjà consolidées.

La première, la plus importante, c'est le fameux traité sur la protection en haute mer, c'est-à-dire dans la mer au-delà des zones économiques exclusives, et donc des mers qui sont, si je puis dire, administrées par chacun des États. C'est un enjeu essentiel parce qu'on parle là de deux tiers des océans. Et donc il faut se représenter que lorsqu'on s'est rassemblés à Lisbonne, à l'UNOC en 2022, il n'y avait aucun cadre agréé pour deux tiers des océans. Et donc tout ce dont on parlait ne valait que pour ce qui était dans nos zones économiques exclusives, le reste, c'était le Far West. Depuis l'UNOC 2 à Lisbonne, par notre mobilisation, d'abord, nous avons finalisé une négociation qui était bloquée depuis des décennies, ce fameux traité BBNJ. Et une fois signé, pour qu'il rentre en vigueur, il fallait qu'il soit ratifié par au moins 60 pays. Ce qui n'est pas chose aisée parce que je vous rappelle que le dernier grand traité international sur le droit de la mer, la Convention de 1982, il avait fallu 12 ans pour avoir les ratifications. C'est-à-dire que ce traité qui avait été signé en 1982 n'était entré en vigueur qu'en 1994. Il y a un an, il y avait 8 ratifications.

Donc, nous avons travaillé d'arrache-pied ces derniers mois, et c'est pourquoi nous avons, il y a quelques instants, annoncé qu'en effet, au 1er janvier prochain, ce traité pourrait entrer en vigueur et qu'enfin, nous allions avoir un cadre international pour réguler, administrer la haute mer et qu'enfin, nous pourrions protéger, lutter contre la pêche illicite dans 65 % de nos océans qui, jusque-là, étaient une zone de non-droit. Nous avons d'ores et déjà 55 ratifications effectuées et déposées, une quinzaine qui sont en cours avec déjà une date sûre, une quinzaine qui sont en cours et qui se feront d'ici la fin de l'année, ce qui fait qu'il n'y a plus de doute. Et c'est pourquoi nous l'avons officialisé avec le secrétaire général et plusieurs de mes collègues.

Il n'y a plus de doute pour dire que d'ici à l'Assemblée générale des Nations unies, plus de 60 ratifications seront dûment votées et dûment déposées auprès des Nations unies, ce qui fait que ce traité pourra entrer en vigueur au 1er janvier de l'année prochaine. Vous avez eu, d'ailleurs en exclusivité, ce matin, l'annonce par le Brésil de sa ratification avant la fin de l'année, qui fait partie de ces États qui sont dans cette zone que je viens d'évoquer. La deuxième grande réalisation, c'est la création de nouvelles aires marines protégées. Là aussi, je le rappelle, c'est une mobilisation de la France et du Costa Rica, parce qu'on fait maintenant dans nos débats publics comme si tout ça était une évidence. 2021, nous lançons une coalition avec le président Chaves du Costa Rica. Et on dit : on va se battre pour mobiliser les pays avec une série d'engagements, dont l'engagement de protéger 30 % de nos aires marines et nos aires terrestres. Nous sommes partis à deux, on a mobilisé. On est maintenant majoritaire, si je puis dire, parce qu'on doit être autour de 80. Et surtout, c'est rentré parce que ça a été adopté par les conférences de Kunming-Montréal. Et donc, maintenant, c'est dans la mise en œuvre. Mais c'est là aussi une avancée collective avec le Costa Rica qu'on a concrétisé ces dernières années et qui est une vraie avancée de ces 3 dernières années.

Avant Nice, nous étions à 8 % d'aires marines protégées dans les zones économiques exclusives de tous les États du monde. Nous arriverons à environ 12 % après cette conférence, ce qui veut dire qu'on aura augmenté de 50 % les aires marines protégées par des annonces que nous avons faites. La France, à travers la Polynésie française, 4,5 millions de kilomètres carrés, ce qui fait que rien qu'avec ça, on passe de 4 % à 5,2 %. La France est la deuxième puissance maritime du monde. L'annonce qu'a faite la Polynésie française en termes de protection, c'est à l'échelle de la planète,+1,2 point. Et donc c'est, de manière très claire, le plus grand pas en avant qui a été fait sur les aires marines protégées. Le Brésil va passer de 26 % à 30 %, la Grèce a également annoncé des aires marines protégées nouvelles. Et nous sommes en train de préparer, avec plusieurs partenaires internationaux, mais je veux le faire avec grand respect, l'annonce de nouvelles aires marines protégées dans les prochaines semaines. Et je salue en particulier la déclaration très forte qu'a eu le président malgache à ce sujet.

La troisième réalisation très concrète, c'est la remobilisation collective pour les fonds marins. Là aussi, il y a deux ans à peine, et il y avait une forme d'avancée fatale. On allait exploiter les grands fonds marins. Et nous sommes sortis, la France est le premier pays, le premier grand pays maritime à être sorti pour dire : nous, nous avons décidé un moratoire. Et donc on décide de faire des missions d'exploration, mais pas d'exploitation de ces grands fonds marins. Et ça n'est pas un petit enjeu là non plus, parce que c'est un trésor de biodiversité, je l'ai rappelé ce matin, évidemment inconnu, donc il faut le comprendre. On sait que ce sont des puits de carbone et vraisemblablement des puits de carbone irrécupérables extrêmement importants. Et c'est la science, c'est la médecine qui ont d'abord à travailler, je dis la médecine parce qu'il y a aussi dans ces espèces, on le sait, des trésors qui permettent à la recherche biologique, et en particulier génomique, d'avancer beaucoup plus vite. Mais donc on doit préserver ces grands fonds marins, on doit les protéger pour permettre d'abord à la science d'aller comprendre. Et donc le moratoire est quelque chose de très important. Je veux juste redonner l'enjeu en prenant une comparaison. La surface de la Lune, c'est 37 millions de kilomètres carrés. La surface des grands fonds marins, c'est 320 millions de kilomètres carrés. Vous imaginez ? Et deux fois plus à plus de 1 000 m de profondeur. Donc ce qui veut dire qu'on parle véritablement d'une planète à elle seule. Et donc ces grands fonds marins, ça vaut la peine de les protéger.

Ce moratoire, nous l'avons donc décidé à quelques-uns, nous avons pu mobiliser encore davantage à l'occasion de cette conférence, et ce sont 36 États qui nous ont aujourd'hui rejoints, portant cette coalition encore plus loin, et c'est ce qui nous a permis d'ailleurs d'arrêter des projets par cette pression collective chez certains de nos amis.

La quatrième réalisation, si je puis m'exprimer ainsi, c'est la science. En tout cas, nous avons réaffirmé collectivement notre attachement à la science comme base de nos décisions. Avec le lancement, entre autres, de la mission Neptune. Comme vous le savez, il n'y a que 5 ou 6 pays au monde qui sont capables d'envoyer des sous-marins habités à plus de 5 000, voire 6 000 mètres de fond, ce qui est une prouesse aussi dure que d'envoyer une fusée dans l'espace. Et avec Neptune, nous allons consolider justement cela, créer plus de synergies et rassembler tous les grands pays de recherche maritime et océanographique, dont la France avec l'Ifremer, mais aussi le CNRS, des coopérations avec l'Inserm et beaucoup de nos universités. Neptune va nous permettre de lancer une grande mission d'exploration pour étudier les fonds, ce qui est cohérent avec la décision précédente, et financer aussi une recherche sur l'ensemble des écosystèmes marins, avec en particulier des recherches que nous voulons lancer, avec des missions d'exploration sur ces fonds, mais aussi sur toute la colonne d'eau au-dessus d'eux. Alors que d'autres arrêtent de financer la recherche, nous ne lâchons rien, nous accélérons.

J'ai accueilli hier, sur, justement, le bateau de l’IFREMER que nous avons pris, le Thalassa, trois premiers scientifiques qui travaillaient aux États-Unis sur l'océan et qui ont décidé de revenir en France et en Europe. Et donc, nous étions avec des chercheurs américains qui, il y a quelques semaines, étaient dans les équipes de la NOAA, étaient à Columbia et travaillaient pour le gouvernement américain. Ils étaient avec nous sur le Thalassa pour nous expliquer leurs recherches et ils vont maintenant venir travailler en France et en Europe. Et donc, de manière très concrète, nous avons remobilisé des financements pour accueillir plus de chercheurs, défendre les bases de données et en produire en mode ouvert et confirmer des missions d'exploration telles que je viens de les rappeler. Bien sûr, pour connaître l'océan, nous devons continuer d'observer l'espace avec une mission scientifique nouvelle et ambitieuse de collecte de données, Corsair, pour Common Oceanographic Research Study And Insight Resource. Et cette mission Corsair, nous voulons justement la consolider. Et Corsair deviendra bien plus ce faisant qu'un projet spatial, mais un acte fort, un engagement concret pour protéger nos océans, parce que c'est ce qui va nous permettre de consolider, justement, ces missions d'observation satellitaires, entre autres, pour mieux comprendre le mouvement des océans et avancer. Je pourrais parler aussi de Space4Ocean et le soutien de la communauté scientifique, avec, justement, là aussi, une remobilisation de toute la communauté internationale pour financer, justement, ces avancées. Je pourrais aussi citer Mercator International, qui devient une organisation internationale et qui va permettre, par ce jumeau numérique des océans, d'avoir un suivi en temps réel de toutes les modifications. C'est-à-dire, dès qu'il y a une montée des eaux, l'impact de tel ou tel transport maritime, de telle ou telle catastrophe qui se passe, elle sera vue en temps réel et ce sera un formidable instrument de prise de décision. Et demain, d'ailleurs, on sera aux côtés des équipes pour consolider cela. La France est fière de pouvoir accueillir cette organisation. Mais c'est une avancée majeure, là aussi, en matière de sciences. Starfish nous a été présenté hier. Maintenant, on aura aussi cet indicateur composite de l'état de santé de nos océans qui, chaque 8 juin, sera partagé. Je pourrais décliner encore beaucoup de choses, mais c'est une mobilisation financière. Ce sont aussi, vous le voyez, des grandes opérations, c'est aussi une aide à la décision qui est prise à travers ce sommet.

La cinquième réussite, c'est la poursuite de l'accord pour la décarbonation du transport maritime. Et en effet, grâce à la mobilisation collective et au chemin vers Nice et, là aussi, je remercie toutes les équipes, l'Organisation maritime mondiale a décidé il y a quelques semaines un accord, là aussi, inédit pour la décarbonation du transport maritime, qui consolide les initiatives qui avaient été prises, d'ailleurs portées par le cluster maritime français, de ralentissement des transporteurs, de décarbonation des flottes et d'électrification et de décarbonation des ports. La sixième avancée majeure, c'est la création d'une coalition de villes et régions côtières, je l'ai mentionnée rapidement tout à l'heure, car nos populations littorales ne doivent pas être les grandes sacrifiées. Nous devons faire, en effet, avec eux, les mobiliser autour des cinq crises (eau, alimentation, santé, climat, biodiversité) parfaitement modélisées par le Nexus de l'IPBES. Eh bien, c'est autour de ce Nexus qu'on mobilise l'ensemble, justement, des collectivités territoriales, parce que c'est au niveau local que les décisions sont prises et que les comportements sont modifiés pour pouvoir éviter les mauvaises décisions, qu'elles soient polluantes ou qu'elles attentent à la biodiversité, pour pouvoir les compenser, les réduire, mais aussi adapter le territoire lorsque, malheureusement, les effets sont déjà là.

Enfin, je veux aussi ici souligner l'importance du travail fait par la FAO et l'Organisation mondiale du commerce pour lutter contre la pêche illicite et toutes les pêches non documentées, la fameuse pêche INN, ces fameux un poisson sur cinq consommés qui, on le sait, sont une prédation terrible contre certains États, contre la biodiversité. Et donc ces accords que la France a signés, que l'Europe endosse, nous devons maintenant continuer de mobiliser la Communauté internationale pour venir soutenir le travail de l'OMC et de la FAO. Ce sommet a été également l'occasion de poursuivre, c'était vraiment les sept avancées sur lesquelles je voulais insister.

Ensuite, on poursuit la mobilisation sur d'autres sujets, en particulier le plastique et la lutte contre le plastique, la ministre de la Transition écologique réunira ses homologues, car là aussi, il nous faut un traité mondial. Et on le sait, il a échoué il y a quelques mois en Corée du Sud, il nous faut remobiliser pour les prochains mois. La France a pris des décisions fortes en la matière, vous le savez, ces dernières années, pour elle-même. Nous mobilisons l'ensemble des Européens, mais il nous faut convaincre, si je puis dire, quelques États qui restent récalcitrants, et ce sommet est aussi l'occasion de le faire, en mobilisant aussi toutes les solutions alternatives, la science, l'économie circulaire, pour aller en ce sens.

Ce sommet est également l'occasion de mobilisation régionale. J'ai tenu aujourd'hui une conférence ad hoc sur la Méditerranée avec collègues et artisans des grands projets méditerranéens de toutes les rives de notre mer chérie, qui est derrière moi. Nous avons pu tenir, co-présidé avec le Royaume du Maroc, une conférence importante sur l'Afrique et les océans. Et demain se tiendra un Forum des îles que j'irai conclure, mais qui sera tenu tout au long de la journée et j'aurai l'occasion de réunir les îles du Pacifique lors d'un sommet demain matin. Parce que, je tiens à le dire, ce sommet rassemble 92 % des mers et océans de la planète. Et je veux vraiment dire ma reconnaissance à l'égard de tous mes collègues du continent africain, du continent américain et du Pacifique, qui ont parfois fait de longues journées d'avion et parfois d'avions et de bateaux, et qui sont présents ici pour être mobilisés, parce que certains d'entre eux seront, dans les décennies à venir, directement sacrifiés par l'absence de décision ou déjà nos erreurs passées.

Enfin, je veux ici dire que la France a pris pour elle-même des engagements pour nos propres aires marines protégées. Comme vous le savez, nous sommes déjà largement au-dessus des 30 %. Nous étions avant cette conférence à 30 %. Les décisions prises par la Polynésie nous mettent très largement au-delà de ce chiffre, et donc nous faisons partie des pays qui sont les plus protecteurs en aires marines protégées. Nous sommes désormais aussi en protection forte à 14 %, l'objectif est de 10 %. Nous étions avant ce sommet, nous, Français, pour l'ensemble de nos eaux territoriales à 4 % de protection forte. Nous sommes passés à 14 % de protection forte, ceci en grande partie grâce à nos territoires ultramarins qui font d'ailleurs, et il faut bien le dire, l'écrasante majorité de notre zone économique exclusive. Quand on dit que la France est la deuxième puissance maritime mondiale, c'est parce que la France a la chance d'avoir en son sein, par exemple, la Polynésie française, qui, à elle seule, est grande comme le continent européen. Mais nous avons continué aussi l'effort de protection forte. Je sais qu'il était attendu pour nos eaux directement métropolitaines. La protection forte était de 0,1 % avant l'UNOC et elle passera à 4 %, avec en particulier 500 aires marines protégées dans les prochaines années qui seront ainsi validées ; une concertation qui a été menée par la ministre avec des scientifiques, les organisations non gouvernementales, les collectivités territoriales et nos pêcheurs. Mais donc la France aujourd'hui, pour ses zones économiques exclusives, respecte ses engagements internationaux. Nous sommes au-delà des 30 % de protection et au-delà des 10 % de protection forte. Sur le plastique, nous continuons le combat lancé en 2019 par la loi dite AGEC avec de nouvelles mesures, que nous mettons en œuvre progressivement. L'exemple d'ailleurs de Nice, ville qui vise l'horizon zéro plastique et qui a mis en place une consigne efficace, en est une parfaite illustration. Nous mettons aussi en échec les pirates qui pillent nos mers avec la pêche INN.

Les résultats sont là et notre marine agit pour protéger la planète en 2024. Je veux le dire ici parce que l'action de l'État en mer fait partie de la crédibilité de notre engagement. Nous avons renforcé celle-ci et les moyens. 400 actions de pollution ont été détectées, 322 navires de pêche suspects ont été déroutés pour contrôle, 851 tonnes de poissons illégales ont été saisies et 1 074 kilomètres de filets, ce qui est la distance en quelque sorte qu'il y a entre Nice et Lille. C'étaient des filets qui pêchaient de manière irrégulière dans nos côtes. La France peut le faire parce qu'elle a une action de l'État en mer organisée. Je remercie celles et ceux qui la mettent en œuvre. Elle peut le faire parce qu'elle s'est dotée de ses moyens. C'est là aussi que nous devons remobiliser la communauté internationale pour que chacun puisse le faire.

Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais présenter à l'issue de cette première journée. Je vais maintenant répondre à vos questions.

Journaliste

Je voulais vous parler de Deep-Sea Mining. Donc 37 pays, dont la France, appliqueront le moratoire. À quoi ça sert quand un pays, nommément les États-Unis, refuse de l'appliquer ? Ça, c'est la première partie de ma question. Et puis sur les aires marines protégées, donc ça va intéresser plutôt la partie française, vous dites qu'on monte le niveau d'engagement. Pour les 4 % d'aires marines protégées en protection forte sur les hexagones, beaucoup d'ONG regrettent que ce soit des zones qui étaient déjà interdites au chalut profond. Est-ce que vous pouvez nous répondre aussi là-dessus ? Merci.

Emmanuel MACRON

Alors, sur votre première question, j'ai envie de dire, si on raisonnait comme ça, on n'aurait jamais rien fait. Parce que je vous rassure, jamais les États-Unis d'Amérique n'ont été en pointe sur ce sujet. Maintenant, ils ne nous empêchent pas de faire. Et d'ailleurs, elles sont représentées à un niveau de travail dans cette conférence. Mais en vérité, si j'avais raisonné comme vous venez de le dire, on n'aurait jamais lancé la coalition pour la protection, on ne parlerait même pas 30 % parce qu'on ne serait jamais mis avec le Nicaragua pour y aller, et on n'aurait même pas commencé à travailler sur BBNJ. Donc tout ce que je viens de vous dire a été possible parce que nous nous sommes mobilisés avec des pays qui sont de bonne volonté comme nous, on avance. Et après, on sécrète du droit qui s'oppose aussi aux États-Unis d'Amérique, ce qui sera le cas quand il rentrera en vigueur du traité dit BBNJ sur la haute mer, c'est-à-dire que si un acteur américain, chinois, ou quelle que soit sa nationalité, va faire des bêtises en haute mer qui ne sont pas conformes à ce traité, la communauté internationale pourra le sanctionner. Donc ça sert beaucoup. Et donc cette coalition, on n’est encore en effet que 37. Enfin, on était un il y a deux ans. Donc on va continuer. Mais moi, je note qu'il y a déjà des pays qui étaient en train d'autoriser, qui ne sont pas dans notre coalition, qui, face à la pression, ont dit bon, on va arrêter. Et donc, on va continuer. Je ne veux stigmatiser personne, mais il y a des projets qu'on a pu stopper comme ça. Et donc, c'est une bonne chose. Donc, il ne faut pas lâcher ce combat.

Et là, je compte sur les scientifiques, les ONG pour avancer. C'est clé. Ensuite, sur nos aires marines à très forte protection, je veux d'abord dire une chose qui est importante. C'est ce que j'évoquais tout à l'heure en donnant les chiffres et en étant précis. On est à 14 % de protection forte. La France, c'est toute la France. Je ne veux pas de double compte. C'est trop facile de me dire qu'on compte en métropolitain. Non. La France, elle gère toutes ses eaux, elle les protège toutes entières. Elle investit dans une marine pour protéger la deuxième zone économique exclusive du monde.

Donc sur cette zone économique exclusive, elle fait plus que 30 % de protection et elle fera 14 % de protection forte. Donc on est au rendez-vous de nos obligations. Ensuite, il y a un débat plus particulier sur le chalutage de fonds, qui est tout à fait juste. Les scientifiques l'ont établi. Des reportages, des films très poignants, encore récents, ont montré les impacts de ce chalutage de fonds. Mais moi, je veux simplement ici replacer les choses dans leur contexte. Nous, nous avons 13 000 pêcheurs. L'écrasante majorité de cette pêche est une pêche qui est d'ailleurs artisanale, avec des petits bateaux, et pour les autres, ce sont des bateaux qui n'ont pas du tout la taille de ceux qu'on voit dans nos reportages. C'est-à-dire que quand je prends la pêche française et sa flottille, on a une activité qui couvre toutes les tailles de bateaux, mais on a 70 % de nos bateaux qui sont en dessous des 12 mètres. Et ensuite, les autres, c'est entre 12 mètres et 25 mètres. On a un grand bateau qui fait de la transformation, L'Émeraude, je crois, si je ne me trompe pas en le citant. C'est le seul grand bateau de la flottille française qui vraiment fait de la découpe et de la transformation. Mais on n'a pas une flottille industrielle et qui... Et nous, on respecte parfaitement les règles de la pêche. Donc c'est ça, la pêche française. Je dis juste pour rappeler, recontextualiser.

Quand on parle de la Méditerranée, la France, elle a 40 chaluts qui du chalutage de fond. L'Italie en a 400, l'Espagne en a 600. Donc juste parce qu'on adore se flageller nous-mêmes, on est plutôt des bons élèves. On est même des vrais bons élèves. Et moi, depuis 8 ans, j'ai une méthode assez simple, c'est que je ne fais jamais rien contre les pêcheurs. Parce que d'abord, ce sont les… ils ont intérêt à la biodiversité. Avant qu'on n'ait tous ces débats, nos pêcheurs, territoires métropolitains comme ultramarins, ils ont créé des zones de conservation parce qu'ils savaient que pêcher trop, c'était mettre en danger leur instrument de travail. Les aires marines protégées, elles ont été inventées en Polynésie française avec des aires éducatives bien avant toutes nos règles et ce que pouvait dire l'UICN. Là, elles se mettent en conformité avec ces règles. Et donc, je suis dans le respect, et la ministre a fait une concertation très longue sur ces aires, donc ils sont très sensibles, parce que c'est des zones de pêche importantes. Je vous confirme que le chalutage de fonds et le raclage, dans la carte qui est sortie, seront bien interdits. Ce que nous reprochent certains, c'est qu'il puisse y avoir du chalut pélagique, c'est-à-dire qu'on puisse encore pêcher. Mais c'est des pêches qui ne mettent pas en danger la posidonie, le fond ou les espèces qui sont les plus dangereuses et qui suivent une autre logique.

Voilà, je fais bien le distinguo. Mais je vous confirme que les techniques de chalutage de fonds et de raclage, dans la cartographie qui a été concertée par la ministre, sur ces zones dont la carte sort, qui vont donc concerner 4 % du territoire, de nos eaux donc métropolitaines, on aura bien une protection forte qui empêchera justement ces pratiques. Mais vraiment, ça a été concerté, zone de pêche par zone de pêche, et donc la carte normalement a été sortie, m'a dit la ministre ce matin, et donc on peut répondre à chacune des questions qu'il y a sur chacune de ces zones.

Journaliste

Le reproche, c’est que ces zones (inaudible) chalutage de fonds est déjà…

Emmanuel MACRON

Non, justement, c'est tout le reproche qui nous était fait. Le reproche qui nous était fait sur ces zones qui étaient déjà en aires marines protégées, c'est qu'il n'y avait pas de protection forte et que le chalutage de fond se faisait. Donc, je vous confirme bien, sinon il n'y aurait pas eu de négociation avec les pêcheurs si je vous vendais une carte qui existait déjà. Comptez sur moi, si ça avait été le cas, je l'aurais déjà mis. Je ne fais pas non plus de décompte en ma défaveur. Donc si ça avait déjà été le cas, je vous l'aurais déjà dit.

Journaliste

Désolée, mais ma question est très proche de la dernière. La France a été critiquée de ne pas aller aussi loin que d'autres pays pour interdire ces chalutages dans des zones protégées et 4 % dans des zones métropolitaines ne répondent pas aux critiques. Ils sont toujours mécontents. Est-ce que vous pouvez me dire comment la France compte arriver aux 10 % de protection forte pour ce type de chalutage ? Et comment pensez-vous arriver à 30 % de protection dans des zones métropolitaines ?

Emmanuel MACRON

Alors, d’abord, moi, je refuse la distinction. La France, elle a une zone économique exclusive, toute entière, et donc nous faisons bien plus de 30 % et on fait bien 14 % de protection forte. Et ça, pardon, mais c'est trop facile, sinon… Je refuse d'être une chauve-souris. Vous voyez, selon l'heure du jour ou de la nuit, on dirait c'est un oiseau ou c'est une souris. Non. Nous, on a une zone économique exclusive, elle est immense, on la couvre, on prend des règles, et donc on est à 14 %. J'accepte de rentrer, parce qu'on est encore plus exigeant, on veut aller plus loin sur la partie européenne, stricto sensu, c'est-à-dire ce qu'on appelle métropolitaine, mais enfin, nous, on est déjà à nos engagements internationaux. Et d'ailleurs, strictement parlant, si vous regardez nos obligations à l'égard des Nations unies et de tout ce que nous avons mis en place, nous répondons à ces obligations. Et donc le débat qu'on a sur les zones métropolitaines est un débat qui est déjà un débat, si je puis dire, du mieux. Mais j'ai envie de dire, comme on passe de 8 à 12 en protection et que nous, on est déjà à 30, les amis, rejoignez-nous ! Parce qu'en protection, aires marines protégées, nous, on est au-dessus de 30, maintenant. Si je prends les zones économiques exclusives du monde entier, on était à 8 avant cette conférence et on passe à 12.

Donc la France fait partie des meilleurs élèves. Il n'y a pas de meilleurs élèves que nous, en Europe, aujourd'hui, compte tenu de notre zone. Ce n'est pas vrai. Donc ce débat, je ne suis pas d'accord avec. Ensuite, je note que, d'ailleurs, les ONG ont une déclaration extrêmement mesurée. Elles voudraient qu'on aille plus loin. C'est normal, c'est leur travail, et moi, je les respecte. Elles sont plus exigeantes. Mais elles reconnaissent que nous interdisons dans ces 4 % le fait qu'on aille racler au fond de la mer. Elles le reconnaissent. Ce qu'elles voudraient, c'est qu'on interdise toute forme de pêche dans la colonne d'eau dans ces 4 %.

Elles veulent qu'on aille plus loin. Ça, on va continuer de le concerter avec les pêcheurs. Mais vous comprenez, moi, je ne peux pas... Et d'ailleurs, les Britanniques qui ont sorti un très beau communiqué de presse, bon, ont beaucoup moins d'enjeux parce que leurs pêcheurs vont pêcher généralement chez les voisins, mais surtout, ils annoncent qu'ils vont concerter. Ils n'annoncent pas qu'ils ont décidé. Nous, on a concerté.

Ce que je vous annonce, ce sont des décisions avec une carte qui a été prise. Mais moi, je veux le faire avec les pêcheurs. J'ai reçu des scientifiques pour préparer ce sommet il y a quelques mois. Et en particulier, il y a des scientifiques qui montraient l'impact des sciences humaines. Ils m'ont expliqué le cas de Paimpol, en Bretagne. On a complètement réussi à enlever les pêches qui étaient les plus dangereuses pour les espèces. Et c'est vraiment un exemple vertueux. Ça a pris des années, mais en fait, on a proposé des alternatives à nos pêcheurs. Et donc, tout ce qu'on est en train de faire in vivo dans nos débats, qu'est-ce que c'est ? C'est mobiliser la communauté internationale sur la base de la science. Emmener tout le monde pour se doter de règles collectives. Et puis ensuite, emmener tous les acteurs économiques, et donc là, en l'espèce, les pêcheurs, pour les aider à changer. Mais il ne faut pas du jour au lendemain les mettre face à des interdictions sans concerter. C'est comme ça qu'on perd tout le monde. Et c'est en faisant des choses comme ça qu'on se retrouve ensuite, des années après, à avoir des pays qui tournent complètement le dos à l'écologie, parce que vous avez construit des gens qui sont devenus réfractaires à l'écologie.

Moi, je suis convaincu du chemin qu'on mène. C'est-à-dire qu'on repose sur la science, on engage la communauté internationale, on fait les choses pour nous-mêmes, mais on est respectueux et on emmène tout le monde. Nos pêcheurs, on est en train de leur demander des sacrés efforts. Simplement, nous, à côté, on doit les accompagner. Et donc là, ils ont fait un très gros effort. Donc sur ces 4 %, en zone métropolitaine, la France, elle fait du mieux-disant, parce qu'elle est déjà à 14 %, je vous le répète, de protection forte dans toutes ces zones économiques exclusives. Mais je vous dis bien que ce sera un vrai changement pour ces zones. Pour nos pêcheurs, ce sera une vraie contrainte. On va les accompagner et puis, ce faisant, on va aussi les accompagner pour aller s'équiper avec des bateaux et une flottille qui correspond aux pratiques de pêche qu'on promeut. C'est pourquoi on a créé un fonds avec CMA-CGM, le fonds de décarbonation, qui aide à renouveler cette flotte pour qu'elle respecte nos règles. Et c'est aussi pour ça qu'on a besoin que la Commission européenne aille plus vite. Je l'ai redit ce matin, et je le sais, la présidente Ursula Von Der Leyen mobilisée, pour aider ces pêcheurs à avoir des bateaux qui leur permettent de faire leur travail et qui sont conformes aux règles dont on veut se doter. Et puis on va continuer la concertation pour s'améliorer. Les ONG parlent aussi de certaines pêches sensibles, les alevins d'anguilles. C'est très sensible parce que dans certains bassins de pêche, pour des pêcheurs, ça représente beaucoup. On va lancer la concertation là-dessus aussi.

Voilà. Donc, on va continuer, je vous rassure, on ne s'arrêtera pas là. On le fera comme toujours en transparence, c'est-à-dire on vous dit exactement ce qu'on fait, on donne les cartes et on concerte et on continue d'avancer, mais on accompagne en proposant des solutions à nos pêcheurs.

Journaliste

Une flottille d'humanitaires et de parlementaires a été interceptée par Israël la nuit dernière à proximité de Gaza. D'abord, avez-vous des nouvelles des 6 Français qui étaient à bord, dont une députée européenne ? Est-ce que leur arrestation est, selon vous, illégale ou abusive ? Et allez-vous parler au Premier ministre israélien pour lui demander le rapatriement immédiat de ces ressortissants français ? Je vous remercie.

Emmanuel MACRON

Merci beaucoup. Évidemment, tout ça a été suivi avec beaucoup de vigilance par le Quai d'Orsay. Et je dirais deux choses très simples. D'abord, la France est vigilante et aux côtés de tous ses ressortissants lorsqu'ils sont en danger. Et donc, nous avons évidemment passé tous les messages pour que la protection soit assurée à l'égard de nos ressortissants, que la protection consulaire à laquelle ils ont droit soit assurée, et qu'au plus vite, dès qu'ils auront eux-mêmes signé les autorisations, ils puissent retrouver le sol français. Et les liens entre nos ministères des Affaires étrangères sont constants.

Ensuite et surtout, la France appelle à un cessez-le-feu au plus vite et à la levée du blocus humanitaire. Le scandale, l'inacceptable qui se joue à Gaza, c'est cela. Et c'est ce qui, depuis début mars, est une honte. Une honte ! Et donc, j'ai encore eu et le président des États-Unis d'Amérique et l'émir du Qatar, qui jouent un rôle extrêmement important dans la négociation sur ce sujet, d'abord en les remerciant pour cet engagement et en disant que maintenant, il fallait qu'on obtienne enfin ce cessez-le-feu, la libération des otages et une réouverture des routes humanitaires. C'est indispensable. Et que les Nations unies puissent faire, avec leurs agences, avec les organisations non gouvernementales accréditées, en parfaite transparence, leur travail. On parle d'enfants, on parle de personnes aujourd'hui dans une situation très grave, on parle de personnes âgées qui sont en train de mourir chaque jour à cause de ce blocus et à cause du fait que le cessez-le-feu n'est pas signé.

Journaliste

Hasard du calendrier, il y a un an, jour pour jour, presque à la minute près même, vous annonciez, à la surprise générale, la dissolution de l'Assemblée nationale. Aujourd'hui, objectivement, un an plus tard, la situation politique pourrait être qualifiée de bloquée. Certains, même la plupart de vos alliés, reconnaissent ce blocage et dénoncent même une forme d'immobilisme pour certains. Alors, première question toute simple : est-ce que vous assumez toujours cette décision ? Est-ce que vous vous en sentez responsable, de cette situation que je viens de décrire ? Et puis, deuxième question qui va avec, est-ce que, comme vous l'avez déjà affirmé en privé à plusieurs députés du Bloc central, vous êtes prêt aujourd'hui publiquement à vous engager à ce qu'il n'y ait pas de nouvelle dissolution d'ici la fin de votre second mandat ?

Emmanuel MACRON

Alors d'abord, si je me remets un an en arrière, si je relisais alors tous les papiers que vous aviez publiés entre 2022 et 2024, vous m'aviez à peu près tous dit que la dissolution était inéluctable et que la motion de censure arrivait. Donc, je ne dirais pas que c'était totalement la surprise générale parce que, vraiment, vous l'aviez tous prédite et tous écrite. Donc voilà, vous l'aviez vraiment tous écrite, tous prédite, parce que tout le monde connaissait la situation qui était celle d'une majorité relative avec des formations politiques autour qui ne voulaient pas faire avancer le pays. Mais beaucoup de choses qui ont été faites pendant ces deux ans et qui étaient très importantes pour le pays.

Ensuite, moi, je l'ai dit, évidemment que j'assume la décision que j'ai prise. Je l'ai prise il y a un an. Est-ce que je pense qu'elle a été comprise ? Et est-ce que je pense qu'elle a permis de clarifier les choses ? Non. Après, ce sont les Français qui ont voté, ce n'est pas le président de la République. Donc les Français ont fait un choix en conscience, c'est le leur, c'est ça la démocratie. Et des formations politiques qui se sont présentées devant eux ont pris leur responsabilité, elles composent le Parlement. Que n'ai-je entendu pendant les 7 ans qui précédaient ? « J'avais tous les pouvoirs. » « Je prenais toutes les décisions. » Maintenant, le pouvoir est au Parlement. Mais vous savez quoi ? C'est aux formations politiques qui, au Parlement, sont là de travailler ensemble pour faire avancer le pays et au Gouvernement de faire avancer le pays. Ce serait un peu facile de reprocher au président de la République et le vote des Français et l'immobilisme des formations politiques dont certaines ont été expliquées que le Président avait trop de pouvoir et qu'il fallait faire ceci ou cela. C'est ça, une démocratie. Et donc, dans toutes les démocraties autour de nous, les formations politiques qui n'ont pas de majorité apprennent à travailler ensemble pour bâtir de l'action. Bah, c'est ça, ce qu'on doit faire.

Et moi, je vous rassure, je continue d'agir. Dans mes prérogatives et là où je suis, et vous le voyez aujourd'hui, je ne lâche aucun combat et je n'en lâcherai aucun. Et je pense qu'aujourd'hui, on voit que la solution pour le pays, ce n’est en tout cas pas de détricoter les choses, ni de détricoter l'écologie, ni de détricoter l'économie, parce que la France, jusqu'à maintenant, depuis 2017, elle a créé plus de 2 200 000 emplois, elle a quand même baissé son chômage de deux points, et elle l'a fait en multipliant par 4 ces baisses d'émissions de CO2. Il n'y a pas un autre pays européen qui a un tel résultat sur ces deux sujets. Donc, on a montré qu'il y avait un « en même temps » possible. On a avancé sur tous les sujets, on a agi. Et le Gouvernement, il continue à agir.

Et donc le Gouvernement doit continuer d'avancer, de proposer des réformes. Et les formations politiques, qui sont en situation de dégager une majorité, à l'Assemblée nationale, doivent montrer qu'elles savent travailler ensemble, mais comme le font nos voisins, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique, et comme le font aussi tous nos autres voisins qui ont des coalitions, même si elles sont différentes dans leur géographie. C'est ça, la démocratie. C'est ça, une démocratie, dans des moments où les pays sont divisés. Et donc j'ai confiance, j'espère. Mais en tout cas, moi, je n'arrêterai pas d'agir, et je pense que ça rend chacun lucide sur le fait que les « y a qu’à, faut qu’on » ne veulent pas de politique. Voilà.

Journaliste

La deuxième question ?

Emmanuel MACRON

Mais alors, sur la deuxième question, mon souhait, c'est qu'il n'y ait pas d'autres dissolutions. Mais mon habitude n'est pas de me priver d'un pouvoir constitutionnel, parce que si des formations politiques décidaient d'avoir une approche totalement irresponsable et bloquer le pays, peut-être me retrouverais-je dans une situation... Je dois utiliser la Constitution, donc je n'ai pas l'habitude de dire que je n'utiliserai pas la Constitution. Vous savez, je suis un esprit très simple. Mais mon souhait, c'est de ne pas le faire. Mon souhait, c'est que ce Parlement, qui correspond d'ailleurs à l'état du pays et de ses sensibilités, trouve le chemin d'une action utile pour le pays, aux côtés du Gouvernement.

Mais on a tant à faire. Je veux dire, il faut consolider ce qui a été fait ces dernières années, mais il faut continuer d'avancer sur une écologie à la française qui permet de créer des emplois. Il faut continuer les réformes économiques dans un moment, on le voit bien, de grand dérèglement du monde. Il faut continuer notre ambition européenne. On va avoir à investir encore davantage dans notre défense et notre sécurité. On doit continuer à lutter, comme le Gouvernement d'ailleurs le fait, ce qui montre qu'il y a quand même beaucoup de choses qui ont été faites cette dernière année. On a su avancer sur le narcotrafic. On a su avancer sur des combats qui sont importants pour la sécurité de nos compatriotes parce qu'on avait aussi pris préalablement des décisions pour réarmer nos dispositifs et rééquiper l'État. Donc, on va continuer à avancer. Simplement, il faut le faire avec une stratégie claire. Le pays qui est le nôtre a encore des défis immenses.

On doit répondre à la poursuite du travail économique. Il faut continuer d'être un pays attractif qui crée des emplois. Nous devons continuer la bataille écologique. Nous devons gagner la transition numérique qui est à l'œuvre, avec l'intelligence artificielle, et la France est en leadership. Et en février dernier, post-dissolution, on a annoncé 109 milliards d'investissements et on a su prendre des avancées. Et nous devons continuer d'être un pays qui renforce son unité par des services publics plus forts, plus modernes, plus efficaces. C'est des réformes que le Gouvernement va porter et que le Premier ministre va annoncer. Par aussi une armée qu'on va continuer de renforcer. Deux LPM se déploient. Et par une justice des forces de sécurité intérieure qu'on va continuer à mobiliser sur les priorités parce qu'on veut un pays où on vit tranquille et uni. Voilà, les axes sont clairs.

Ces axes qui valent pour la Nation, on les déclinera au niveau européen avec un engagement fort. La France doit continuer, avec l'Allemagne et avec les autres pays d'Europe, à mener une ambition européenne forte, et nous n'avons pas cessé, y compris ces derniers mois, de le faire. Et regardez, il y a quelques semaines, un chancelier nouvellement élu en Allemagne est venu à Paris, et nous avons ensemble proposé un reset franco-allemand. On avance. Il faut regarder les choses avec honnêteté et il faut les regarder avec le sens du service. De là où je suis, de là où est le Premier ministre et son Gouvernement, de là où sont les parlementaires, tous, on doit trouver le chemin des femmes et des hommes de bonne volonté qui, malgré leurs différences, compte tenu de l'époque dans laquelle nous sommes, des troubles géopolitiques et des grandes transitions que nous vivons, on doit construire les solutions les plus ambitieuses pour le pays. C'est la seule chose qui vaille. Le reste ne compte pas.

Animatrice

Merci beaucoup, Monsieur le Président. Nous arrivons au terme de cette conférence de presse.

Emmanuel MACRON

Merci beaucoup. Merci à tous.

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