Fait partie du dossier : Déplacement en Océanie.

Le Président de la République s'est rendu en Papouasie-Nouvelle-Guinée ce vendredi, qui de par sa position géographique, sa superficie et la richesse de ses écosystèmes naturels exceptionnellement préservés, demeure un acteur central dans la région Indo-Pacifique. 

Lors de son déplacement, le Président Emmanuel Macron s'est rendu dans la forêt papouasienne aux côtés du Premier ministre James Marape avec qui il a pu échanger sur la préservation des forêts et la lutte pour le climat et la biodiversité. 

28 juillet 2023 - Seul le prononcé fait foi

Télécharger le .pdf

CONFÉRENCE DE PRESSE CONJOINTE DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE ET LE PREMIER MINISTRE DE PAPOUASIE-NOUVELLE-GUINÉE.

Thank you, Mr. Prime Minister.  

Merci beaucoup pour votre accueil. Merci, Monsieur le Premier ministre. 

Cher James, 
Je suis très heureux avec la ministre des Affaires étrangères et la ministre déléguée qui s'est rendue elle-même ici et restera demain pour pousser un programme de coopération sur l'hôpital ; d'être à vos côtés, et je suis très honoré de pouvoir être accompagné dans cette visite bilatérale par le Président du gouvernement de la Polynésie française, le Président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et le Président du groupe d'amitié, notre sénateur. 

Monsieur le Premier ministre, cette visite correspond à deux grands objectifs de la France. Le premier, c'est une stratégie Indopacifique annoncée il y a six ans, dans laquelle s'inscrivent justement nos territoires ultramarins ; qui est de bâtir une voie, un chemin dans cette région qui permet d'avoir un espace Indopacifique libre, ouvert et en paix. Et c'est sur ce chemin que la France œuvre, avec deux grands engagements principaux : le climat et la sécurité stratégique et militaire. 

Le deuxième grand chantier, si je puis dire, qui prend tout son sens en venant chez vous, c'est celui que nous poursuivons de bâtir un nouveau consensus international qui réconcilie la lutte contre la pauvreté et la lutte contre le réchauffement climatique, ses conséquences et pour la biodiversité, qui est ce pacte de Paris pour les peuples et la planète que nous avons explicité il y a quelques semaines avec plusieurs autres collègues, et qui consiste à dire qu'il n'y a pas à choisir entre la lutte contre la pauvreté et le combat pour la planète ; que c'est un chemin que chaque Nation doit décider pour elle-même et qui suppose plus de mobilisation financière des pays les plus riches et plus d'engagement du secteur privé. Ces deux stratégies convergent parfaitement dans ce que nous avons aujourd'hui mis en place sur le plan bilatéral. 

C'est en effet la première fois qu'un Président de la République française se rend dans votre pays, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, depuis votre indépendance. Et nous avons ensemble bâti des éléments concrets qui illustrent cette double stratégie. D'abord, nous avons pris avec Monsieur le Premier ministre une série d'engagements pour préserver les forêts et aider la Papouasie-Nouvelle-Guinée à préserver ces forêts. Monsieur le Premier ministre, vous m'aviez fait l'amitié de venir avec moi à Libreville pour le One Forest Summit que nous avions tenu. Nous avons mis en place une nouvelle méthodologie. On l'illustre pleinement en développant justement une approche nationale. Et donc, l'engagement que nous avons pris d'abord, c'est de soutenir avec les chefs du plateau des Managalas — nous étions avec eux à l'instant et Monsieur le Gouverneur — une stratégie de conservation de la forêt primaire en construisant un nouveau modèle fondé sur la science et sur les besoins des populations locales. Et donc, ce programme spécifique à la province d'Oro, financé par l'Union Européenne, va ainsi être mis en œuvre par la France dans les mois à venir grâce à l'installation d'Expertise France ici et va couvrir plus de 360 kilomètres carrés de forêt. C'est un début. 

Au-delà de ce projet, nous allons mobiliser nos partenaires pour bâtir un paquet global dont j'ai présenté les grands axes à l'instant et ce matin ; à savoir protéger 30 % des terres et des mers et transformer des modes de gestion de nature et rémunérer ce capital naturel. Ce partenariat dont nous avions posé les bases à Libreville est désormais lancé. Il est la preuve que nous saurons mettre en œuvre l'engagement historique de la protection de la nature pris dans le cadre de l'accord de Kunming sur la biodiversité. Ce contrat de pays pour la nature et la forêt, c'est ce que nous allons finaliser d'ici la fin de l'année avec Monsieur le Premier Ministre. La France sera à vos côtés pour mettre en place les travaux techniques et l'accorder. L'Union européenne met les premiers financements. Nous mobilisons des financements privés. D'ores et déjà, on a des premiers engagements de Conservation International, Bezos Foundation et de plusieurs autres. Nous allons chercher d'autres financements internationaux pour finaliser cette approche pays. 

Au-delà de la question des forêts, nous avons échangé avec Monsieur le Premier ministre sur le pacte de Paris sur la paix et les grands axes internationaux. Je pense pouvoir dire qu'il y a une vraie convergence de vue entre nos deux pays sur les objectifs au cœur de cette relation bilatérale. C'est pourquoi nous avons aussi signé aujourd'hui plusieurs projets qui vont en ce sens : de permettre le développement de la Papouasie de Nouvelle-Guinée et d'avoir une approche qui est cohérente avec la transition écologique que vous avez choisie. 

C'est pourquoi nous avons décidé d'investir de manière solidaire dans le verdissement des infrastructures papouasiennes. L'Agence française de développement participera aux côtés de la Banque européenne d'Investissement, de l'Union européenne et de l'Australie à la rénovation du port de Rabaul au nord-est du pays. C'est un projet clé dans un pays au carrefour de l'Asie et du Pacifique. Le secteur privé sera aussi pleinement mobilisé et travaillons avec TotalEnergies, votre pays, pour que le projet qui est porté par cette entreprise puisse correspondre pleinement à cet objectif. D’abord, l'extraction de gaz ici prévue sera destinée à accompagner la sortie du charbon des pays asiatiques et donc la transition énergétique régionale, ce qui est cohérent avec notre stratégie. Mais tout le travail qui est fait par votre pays, l'entreprise et avec aussi notre accompagnement est justement de ne mener en aucun cas une dégradation des réserves de biodiversité du pays et de prendre des mesures de compensation par reforestation, programme de mangroves et plusieurs autres points que nous avons détaillés ensemble. 

Ce partenariat bilatéral, surtout ce volet de verdissement de votre économie, prend toute sa cohérence aussi avec l'approche régionale puisque grâce à la Nouvelle-Calédonie, faisant de la France une Nation du Pacifique et de la Mélanésie, nous avons pris plusieurs projets dont nous avons signé le texte cadre tout à l'heure, qui va permettre justement le développement des énergies renouvelables en associant des acteurs de Papouasie-Nouvelle-Guinée et de Nouvelle-Calédonie et d'améliorer votre capacité à développer le renouvelable et à l'intégrer pleinement à votre réseau. 

Enfin, le dernier point sur lequel je souhaitais m'exprimer, ce sont les sujets de défense et de sécurité qui sont au cœur de cette stratégie Indopacifique. Sur les questions de défense, nous avons désormais un socle solide avec l'accord relatif à la coopération en matière de défense et au statut des forces qui a été signé à la fin de l'année dernière. Nous sommes convenus sur cette base d'identifier de nouvelles pistes de coopération avec, pour prochaine échéance, le South Pacific Defence Ministerial Meeting, SPDMM, que la France accueillera en décembre prochain et qui se tiendra à Nouméa. Notre ministre des Armées y sera présent. Il rassemblera l'ensemble des ministres de la Défense du Pacifique Sud et permettra ainsi d'illustrer pleinement notre mobilisation, notre volonté de nouer des nouveaux partenariats, d'avoir d'autres exercices comme celui que nous venons de conduire associant des pays de la région. Ceci est cohérent avec l'investissement que nous avons décidé de faire sur nos forces armées en Nouvelle-Calédonie et que j'ai pu annoncer à Nouméa il y a deux jours. 

Cher James, Monsieur le Premier ministre, je serais incomplet si j'oubliais de mentionner une activité désormais universelle qui nous rapproche, le sport et particulièrement le rugby. I want to conclude my speech -and thank you for allowing me to speak in French for my press-. But our country will welcome the Rugby World Cup. It will start on the 8th of September, so I invited you. I do hope you will enjoy it. I know that you prefer to play it at 13 than at 15. Nevertheless, you are a very good player. Some play and were used to play in our championship, some sometimes were hijacked by other national teams. But I invite you and I will be very happy to have you in Paris for the Rugby World Cup, which will start in a few weeks’ time. 

Thank you very much, Mister Prime minister, for this invitation, our wonderful discussion and our work this morning, and thank you for the vibrant exchange we had together and with your people. Thank you. 

Journaliste
Hi. President MACRON, in 2022, TotalEnergies reported 36.2 billion euros in profits. How much of the profit of TotalEnergies’ project in Papua New Guinea will be put into conservation and renewable energies in the country?

Emmanuel MACRON
Look, I'm not the CEO or chairman of TotalEnergies. What I can tell you is that, first, this is the beginning of this project. And the relevance of this project for the strategy of the country or the region is the following: number one, gas is better than coal. I'm very blunt. Because a big problem we have for climate change in the region is coal plants. If you manage to help countries in the region to get rid of coal and to start going to gas in order to go to renewables and nuclear, because both of them are defended by the experts as low carbon or zero carbon emission strategy, this is the right way to proceed. I'm not here to lecture people, neither company nor country, to say “you should not make gas projects because this is bad.” I'm not lecturing people. I'm trying to help people to reconcile development and climate change. 

So Total is investing in this country, which is good, because they are creating jobs. I'm unable to give their figures, this is a figure, perhaps Mr. Prime Minister has much better knowledge than me. But I think this project is smart in a broader and regional strategy in order to replace coal by gas. Second, and this is where we are extremely careful, and we follow with a lot of exchange with both Total and the government. What we ask is to compensate in terms of emission and natural impact of project. This is why Total committed to invest on reforestation and mangrove programs. And they exchanged even with the Prime Minister recently. So, we are very careful on that, but now this is a project between private company and your government. So perhaps Mr. Prime Minister, you can give more figures than myself. 

[…]

Journaliste
I have questions for you both. Mr. Prime Minister, there's much talk about your country being at the center of many rival geopolitical interests. So, to put it bluntly, who would you say is the most powerful power in the region today between China and the U.S., and France of course? 

Monsieur le président, vous avez exposé hier votre stratégie pour la région, en opposition à ce que vous avez appelé « de nouveaux impérialismes ». Mais même s’ils augmentent, les montants que vous avez évoqués sont sans commune mesure avec ceux qui sont dévoilés par la Chine, les Etats-Unis ou encore l’Australie. Et donc même avec l’Europe, la France a-t-elle les moyens de ses ambitions dans la région ? 

Et si je peux me permettre, puisque le sujet vous a occupé pendant une partie de votre tournée, le Niger : que pensez-vous pouvoir encore faire qui permettrait de mettre en échec la tentative de coup d’Etat qui semble en passe de réussir ? Et les militaires français peuvent-ils rester si c’est pour collaborer avec un régime putschiste ou, le cas échéant, devront-ils partir ? Merci. 

[…]

Emmanuel MACRON
Je souscris à ce que vient de dire totalement Monsieur le premier ministre. L'objectif de notre stratégie Indopacifique n’est pas de rentrer en compétition, ni avec la Chine ni avec les États-Unis d'Amérique. Parce qu'on peut avoir des ambitions tout en restant lucides ; et nous le sommes. Mais quelle est la base de cette stratégie ? D'abord, c'est de réinventer le rôle et la projection de nos territoires ultramarins du Pacifique. Nous le faisons pour nous-mêmes. La France, à travers la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Wallis-et-Futuna, la Réunion, Mayotte, les Terres australes et antarctiques françaises existent dans l'Indopacifique. Nous avons un million et demi de compatriotes qui vivent dans cette région. Nous avons des milliers de soldats qui sont déployés tout au long de l'année, 8 000. Et nous menons de plus en plus d'opérations. Donc, nous sommes là. 

Simplement, depuis des décennies, on sommait ces territoires de regarder vers Paris. Là, ce qu'on dit, c'est que c'est une chance formidable pour nous Français. Nous sommes dans cette région et on regarde cette région. Pourquoi ? Parce qu'elle a 40 % du PIB mondial et il suffit de regarder autour lato sensu quand on prend l'Indopacifique, je dézoome par rapport à l'Océanie, vous avez juste l'Inde, la Chine, l'Indonésie, la part australe du continent africain, l'Australie. C'est intéressant de regarder le monde comme ça. Nous nous décentrons, mais en nous décentrant, nous recentrons nos territoires comme une chance et on se projette dans cette stratégie. Premier point, on le fait pour nous-mêmes. 

Deuxième sujet, je crois que c'est la vocation de la France de se dire de ne pas rentrer dans un jeu de puissance, mais de dire : ce qu'on porte peut exister par la stratégie qui vient d'évoquer Monsieur le Premier ministre, la coexistence. Notre stratégie indopacifique, c'est d'offrir des partenariats totalement équitables avec des pays de la région, en égaux, à qui on dit :  nous avons peut-être, nous avec les Européens  ; parce que la France a annoncé sa stratégie indopacifique en 2018, puis on a travaillé en Européens et on a porté cette stratégie en 2020. Et on dit : nous, on défend les droits de l'homme, la dignité humaine, le respect de la Charte des Nations unies et les règles internationales. Donc, on est pour un espace indopacifique, libre, ouvert, où la liberté de la souveraineté de chacun est respectée et où la coexistence entre tous ces pays, avec cette diversité de trésors, peut coexister. 

Et donc, qu'est-ce qu'on offre ? Des partenariats géopolitiques, militaires, mais qui sont non agressifs, qui permettent de faire respecter ces eaux territoriales contre la pêche illégale ou contre des incursions. Son espace aérien, c'est exactement ce qu'on vient de faire avec l'exercice PEGASE. Et vous êtes une région où il y a beaucoup de vulnérabilité climatique. On peut aider à faire émerger des solutions, comme on vient de le dire à l'instant, de transition énergétique, de développement d'énergies renouvelables, de construction d'un modèle qui est aussi respectueux de l'histoire de cet espace. Et en particulier, dans l'espace océanien, ça a, je crois, eu beaucoup de force. 

Voilà la stratégie de la France. Notre objectif n'est pas du tout de rivaliser avec la Chine ou avec les États-Unis d'Amérique, qui ont d'ailleurs des stratégies chacune différentes dans la région, et je ne les mets pas avec un signet égal, mais notre but est vraiment de faire respecter ces principes et de permettre aux pays de la région de réussir, parce que je pense que c'est aussi bon pour nous, et je le disais tout à l'heure, de ne pas avoir un conflit qui émerge dans la région où nous avons des habitants, des territoires qui veulent réussir, mais de créer un modèle de développement équilibré et d'avenir. 

Sur le Niger, puisque vous m'avez interrogé, j'ai eu l'occasion, en effet, ces derniers jours, d'échanger à plusieurs reprises avec le Président BAZOUM. J'ai également échangé avec plusieurs dirigeants de la région, dont le Président TALON et le Président TINUBU. D'abord, je veux dire ici avec beaucoup de clarté que la France condamne absolument avec la plus grande fermeté ce coup d'État militaire contre un dirigeant démocratiquement élu, courageux, et qui fait pour son pays les réformes et les investissements dont il a besoin et que nous accompagnons comme nous avons accompagné son prédécesseur depuis le début. 

Ce coup d'État est parfaitement illégitime et profondément dangereux pour les Nigériens, pour le Niger et pour toute la région. C'est pourquoi nous appelons à la libération du Président BAZOUM, à la restauration de l'ordre constitutionnel et nous soutenons les organisations régionales, en particulier la Cédéao, dans les décisions qu'elle aura à prendre ou de médiation ou de condamnation et de sanction à l'égard des putschistes s'ils venaient à progresser et finaliser leurs projets. Nous sommes aux côtés des dirigeants régionaux pour, là aussi, défendre la démocratie, l'expression libre des peuples et lutter contre toute manipulation. Pour le reste et les scénarios à venir, j'appliquerai le précepte MARAPE, c'est-à-dire que je ne répondrai pas à des questions hypothétiques.

À consulter également

Voir tous les articles et dossiers