Jean-Paul Costa, ancien président de la Cour européenne des droits de l’homme nous a quittés le 27 avril. Par sa virtuosité et son autorité, il avait incarné tout au long de sa brillante carrière l’humanisme européen et les idéaux de la République, dont il déduisait son engagement de serviteur de l’Etat et de praticien du droit.

Né en 1941 à Tunis, où il étudia au lycée Carnot, avant de traverser la Méditerranée pour rejoindre le lycée Henri IV à Paris, Jean-Paul Costa mena de front des études de littérature, de sciences politiques et de droit, qu’il paracheva en intégrant l’ENA en 1964.  Il avait ainsi forgé par les humanités son idéal humaniste. Ses prédispositions de juriste comme son engagement à changer, par le droit, la vie, le conduisirent au Conseil d’Etat, puis au ministère de l’Education nationale à partir de 1981, en tant que directeur de cabinet d’Alain Savary. Il fut, aux côtés du ministre de l’Education nationale de François Mitterrand, l’un des artisans de la création des zones d’éducation prioritaires (ZEP).

En 1984, tiraillé entre les mondes du droit et de l’éducation, il fit le choix de la synthèse, en ralliant les chaires universitaires : à Orléans d’abord, puis à la Sorbonne ensuite, où il enseigna les libertés publiques, s’immergeant dans ce monde de l’enseignement qu’il ne quitta jamais totalement, invité sa carrière durant dans les universités du monde entier.

En 1998, ces mêmes qualités de juriste et de praticien du droit public qui l’avaient appelé, trois années auparavant, à la présidence de la Commission d’accès aux documents administratifs, lui offrirent une nouvelle mission. Le 1er novembre, il prêta serment devant la Cour européenne des droits de l’homme, rejoignant le collège de la juridiction, au moment où le protocole n°11, entré en vigueur en 1998, allait affirmer la permanence et l’unicité de la CEDH, et amplifier massivement l’exercice du recours individuel.  Jean-Paul Costa gravit chaque échelon de la juridiction, jusqu’à la présider à compter de l’année 2007 pour deux mandats consécutifs. Frappé par une limite d’âge, il quitta son mandat en 2011. 

À Strasbourg, il agit tout à la fois en juge impartial et engagé, et en homme d’action, initiateur de transformations décisives au service du rayonnement et de l’efficacité d’une institution qu’il qualifiait de « rempart contre la raison d’Etat ».  Préoccupé par les questions d’accès au droit et d’engorgement de la Cour, il investit tous ses talents de meneur d’hommes, de juriste et de diplomate dans l’organisation de la Conférence d’Interlaken, en 2010, qui permit aux Etats de réaffirmer formellement leur attachement à la Cour tout en ouvrant la voie aux réformes indispensables à un meilleur fonctionnement. 

Auteur prolifique de littérature de référence, Jean-Paul Costa demeura toujours un infatigable praticien, au service d’un combat pour préserver l’esprit des Lumières. En 2011, son élection à la tête de l’Institut international des droits de l’homme, où il s’investit durant près d’une décennie, fit de lui le second français, après René Cassin, à occuper cette fonction. 

Le Président de la République souhaite saluer le parcours d’un serviteur de la France, des idéaux européens, et des droits de l’homme, qu’il défendit sa vie durant, de décisions politiques en décisions juridictionnelles. Il adresse ses condoléances sincères à son épouse et à ses proches.

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