Régulation numérique : bilan de notre action
Les technologies numériques constituent un formidable atout pour le progrès humain, que ce soit pour le partage de l’information, la diffusion du savoir, la coopération internationale, l’accès à l’éducation et à la culture. Elles constituent des leviers majeurs de résilience de nos sociétés face aux crises, comme nous avons pu le constater dans le contexte de la crise sanitaire, où les nouvelles technologies ont permis de développer des outils de suivi du virus et d’accélérer la découverte d’un vaccin. Le numérique est aussi central pour répondre au besoin impérieux de solutions nouvelles aux nouveaux défis environnementaux et sociaux.
Toutefois, en l’absence de garanties et de cadres de régulation appropriés, ces progrès peuvent être entravés par des mésusages du numérique lorsque celui-ci se retrouve vecteur d’expression de la haine en ligne, de manipulation de l’information, d’atteintes à la vie privée ou encore à la souveraineté des États. Il peut également être le terrain d’atteintes au bien-être des mineurs lorsqu’ils sont exposés au cyberharcèlement, à des contenus inappropriés ou dangereux, ou lorsque leur santé mentale est menacée.
Dans ce domaine, l’approche du Président de la République a toujours été d’accompagner le progrès et l’innovation par un encadrement intelligent et responsable, visant ce que l’on peut appeler un « ordre public numérique ». Pour que les règles qui existent dans l’espace public du monde réel soient aussi respectées dans l’espace en ligne.
Pour ce faire, le Président a été à l’origine de plusieurs initiatives structurantes en France, au niveau européen, et sur la scène internationale pour protéger les citoyens, engager les acteurs et promouvoir les nouvelles technologies comme facteurs de progrès.
Protéger les citoyens
Mettre fin au cyberharcèlement
Un collégien sur quatre et presqu’un lycéen sur cinq en France se dit avoir été victime d’harcèlement en ligne, sous forme d’insultes, de rumeurs, d’usurpations d’identité ou de diffusion de films humiliants. Et parmi eux, les filles sont surreprésentées.
D’importantes mesures ont été prises sous le mandat du Président Emmanuel Macron, à l’image de l’interdiction de l’usage du téléphone portable dans l’enceinte des collèges, de la mise en place dans les académies du dispositif de référents anti-harcèlement, de l’entrée en vigueur de la loi sur l’école de la confiance qui consacre le droit à une scolarité sans harcèlement.
Il faut y ajouter la montée en puissance du prix « Non au harcèlement » récompensant des projets d’élèves, la spécialisation d’un parquet sur les affaires de cyberharcèlement et de haine en ligne et la création du délit de « cyberharcèlement en meute », nouvelle forme de harcèlement spécifique aux réseaux sociaux.
L’Etat a également signé en novembre 2021 une convention de partenariat avec l’association e-Enfance afin d’organiser des modules de sensibilisation au cyber-harcèlement et aux cyber-violences auprès des parents, des professionnels et des plus jeunes. L’association e-Enfance gère en outre le numéro 3018 qui permet gratuitement et de manière anonyme aux victimes de cyber-violences et à leurs parents d’accéder à une équipe de psychologues, juristes et spécialistes du numérique.
Protéger les enfants et adolescents en ligne
Outre le cyberharcèlement, nos enfants sont confrontés à d’autres risques en ligne, liés notamment à l’exposition à des contenus inappropriés ou dangereux (violence, haine, pornographie), aux actes criminels organisés en ligne (pédopornographie, prostitution), ainsi qu’à des situations nouvelles du fait d’usages numériques les exposant publiquement (enfants influenceurs).
Ces risques avaient été identifiés par le Président de la République lors de son discours à l’UNESCO le 20 novembre 2019, à l’occasion de la Journée mondiale de l’enfance. Des mesures concrètes avaient alors été prises et ont été par la suite portées dans la loi, notamment pour responsabiliser et sanctionner les sites internet permettant aux mineurs d’accéder à des contenus pornographiques.
Le Président de la République poursuit son action. Le 11 novembre 2021, à l’occasion du Forum de Paris sur la Paix, il lançait conjointement avec l’UNICEF un Appel à l’action pour la protection de l’enfance dans le monde numérique aux Etats, plateformes numériques, associations et organisations non-gouvernementales concernées. Cet appel a abouti à l’adoption le 17 mars 2022 à New York d’une déclaration politique.
Reconnaissant à la fois les opportunités du numérique pour les enfants et les menaces auxquelles ils sont exposés en ligne, les signataires de l’Appel s’engagent à promouvoir l’alphabétisation numérique afin de favoriser l’accès aux technologies aux enfants tout en garantissant leur protection dans cet environnement. Les signataires de l’Appel s’engagent également à prendre les mesures nécessaires pour prévenir toute exposition à des abus en ligne, et pour permettre aux enfants d’employer les outils numériques en toute sécurité.
Le 2 mars 2022 est votée à la quasi-unanimité par les deux assemblées la loi « Studer » venant renforcer les obligations en matière de contrôle parental. Elle impose aux fabricants de terminaux l’obligation de préinstaller un dispositif de contrôle parental sur les terminaux et de proposer son activation à l’utilisateur dès la première mise en service de l’appareil.
En outre, sous Présidence française du Conseil de l’UE au premier semestre 2022, la Commission européenne a proposé une législation relative à la prévention et la lutte contre les abus sexuels sur mineurs (règlement dit « CSA » pour child sexual abuse). Ce nouveau règlement viserait notamment à renforcer les obligations des entreprises offrant des services d’information en ligne, en termes d’évaluation des risques, d’atténuation de ces risques (via des mécanismes de modération et de contrôle interne), de signalement, de détection, de retrait, de blocage et d’identification des mineurs.
Lutter contre les contenus terroristes et extrémistes violents en ligne
Réguler le cyberespace, c’est aussi lutter contre le terrorisme et les extrémismes violents. L’Appel de Christchurch, lancé par la France et la Nouvelle-Zélande en 2019, regroupe aujourd’hui une cinquantaine d’Etats, des organisations internationales et certains des principaux fournisseurs de services numériques (Twitter, Amazon, Facebook, Google, Microsoft, DailyMotion, etc.). L’Appel a permis des progrès considérables en démontrant la faisabilité du retrait immédiat par les plateformes des contenus concernés et en renforçant les protocoles de crise pour prévenir le risque de leur propagation massive. Aujourd’hui les travaux continuent sur les protocoles de crise partagés, la coordination des cadres juridiques, et la conduite de projets de recherche sur la transparence algorithmique. L’Appel s’étend en outre à de nouveaux acteurs, comme les entreprises du jeu-vidéo, du métaverse, de stockage de données, ou encore de messagerie privée.
Sur l’impulsion de la France, l’Union européenne est à l’avant-garde de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent en ligne. Les plateformes numériques ont désormais l’obligation de retirer tout contenu terroriste dans l’heure suivant le signalement.
Ces initiatives font la différence. En 2019, la vidéo de l’attentat de Christchurch en Nouvelle-Zélande reste en ligne 48h. Celle de l’assassinat de Samuel Paty, le 16 octobre 2020, est immédiatement retirée.
Par ailleurs, la méthode probante utilisée dans le cadre de l’Appel, consistant à réunir tous les acteurs pour développer des solutions techniques, offre par ailleurs un exemple à suivre face aux autres enjeux de régulation des contenus en ligne, à commencer par la protection des enfants.
Assurer le respect de nos valeurs démocratiques dans les espaces d’expression en ligne
Le développement d’Internet a permis de créer de nouvelles formes positives de sociabilité, d’expression et de communication, principalement au travers des entreprises privées, qui n’avaient jusque-là que peu d’obligations en termes de fonctionnement et de modération des contenus mis en ligne par les utilisateurs. Appelé de ses vœux par la France, le Digital Services Act a été adopté au niveau européen, obligeant notamment les plateformes à modérer les contenus de leurs utilisateurs en cohérence avec nos principes démocratiques, à analyser les risques que leurs services font courir aux libertés fondamentales et à rendre compte des moyens mis en œuvre et des résultats qu’elles obtiennent. Nous œuvrerons en France à une mise en œuvre exemplaire des principes et dispositions prévus au niveau européen.
Engager l'ensemble des acteurs
Avec l’Appel de Paris, engager les acteurs pour un internet sûr, pacifique et accessible à tous
L’Appel de Paris pour la confiance et la sécurité dans le cyberespace, lancé par le Président de la République lors du premier Forum de Paris sur la Paix en novembre 2018, établit un code de conduite pour un cyberespace sûr et au bénéfice de tous.
Soutenu par plus de 1 200 acteurs sur tous les continents (Etats, autorités publiques et collectivités locales, acteurs privés, organisations de la société civile), ce code de conduite affirme l’application du droit international et des droits de l’Homme en ligne, et rejette toute cyber-activité malveillante. Ses membres se sont engagés à respecter 9 principes clefs, incluant notamment la défense des processus électoraux, la non-prolifération des logiciels malveillants et la protection des individus et infrastructures.
La Tech for Good, un mouvement de fond avec les entreprises pour un impact positif de la Tech
Le Président de la République a aussi souhaité accompagner la responsabilisation des grandes organisations du numérique, notamment les géants du web. Au sein du collectif Tech for Good, elles s’engagent pour une Tech à impact positif, dans le cadre de cinq groupes de travail, qui portent respectivement sur l’éducation, le futur du travail, l’inclusion économique, l’environnement, ainsi que la parité et la diversité.
Ce collectif s’est réuni à l’Élysée en 2018 et 2019. Avec plus de 80 PDG, il a adopté, en novembre 2020, l’Appel Tech for Good, qui rappelle les principes et les valeurs au cœur de son action, et renouvelé des engagements pris sur la durée.
Réguler les marchés numériques et adapter la fiscalité aux grandes entreprises du numérique
Alors que quelques entreprises du numérique ont un poids économique systémique, des abus ou des pratiques anti-concurrentielles ont émergé. L’Union européenne a su réagir pour limiter cette concentration du pouvoir via une concurrence saine au bénéfice du consommateur, de l’innovation, et de la souveraineté des Etats. Le Digital Markets Act, adopté lors de la Présidence française du Conseil de l’UE au premier semestre 2022, interdit ainsi les pratiques commerciales les plus nuisibles.
En outre, avec l’accord sur la fiscalité des multinationales défendu par la France et désormais soutenu par plus de 130 pays, les grandes entreprises du numérique seront contraintes à une juste et équitable contribution aux finances publiques des Etats où elles dégagent leur bénéfice.
Promouvoir les technologies comme facteurs de progrès
Encourager la liberté d’expression et l’accès à une information fiable
Lancé conjointement par la France et Reporters sans frontières en 2019 lors du Sommet du G7 à Biarritz et regroupant aujourd’hui 47 Etats, le Partenariat pour l’information et la démocratie vise à promouvoir l’exercice de la liberté d’opinion et d’expression, ainsi que l'accès à une information libre, plurielle et fiable. Pour ce faire, le Partenariat a publié des recommandations sur deux enjeux clefs : la lutte contre les infodémies et la soutenabilité économique du journalisme à l’ère du numérique.
Plusieurs chantiers concrets ont de même été lancés, à l’image de l’Observatoire international sur l’information et la démocratie, qui, sur le modèle du GIEC pour le climat, sera chargé d’évaluer les évolutions de l’espace informationnel mondial et de publier un rapport à échéance régulière pour les Etats membres du Partenariat et la société civile.
Le Président de la République a par ailleurs souhaité l’organisation en France d’Etats généraux de l’information, dont le but sera d’assurer à nos concitoyens une information fiable, libre, pluraliste, indépendante.
Développer l’intelligence artificielle sans risque pour les individus
L’intelligence artificielle est vectrice de progrès face aux grands défis qui se présentent à nous, notamment en matière sanitaire et environnementale. Mais elle peut aussi comporter des risques lorsqu’elle contribue à la surveillance de masse, aux discriminations, à la désinformation, à la cybercriminalité.
Aussi pour un développement et une utilisation responsable de l’intelligence artificielle, qui sert le bien commun tout en préservant nos valeurs démocratiques et les droits de l’Homme, le Président de la République a lancé avec le Canada un Partenariat Mondial pour l’Intelligence Artificielle. Fonctionnant sur le modèle du GIEC pour le climat, le partenariat consiste à produire de l’expertise scientifique et des recommandations à destination des gouvernements.
Après l’impulsion donnée en 2019 lors du sommet du G7 à Biarritz, ce partenariat couvre aujourd’hui 40 % de la population mondiale dans 24 Etats aux avant-postes de la réflexion éthique sur cette technologie, et continuera de s’élargir. La France en a occupé la présidence tournante durant l’exercice 2021-2022.
Le Président de la République a en outre souhaité que la France soit à la pointe de l’innovation en matière d’intelligence artificielle éthique et responsable. Aussi, le plan d’investissement France 2030 contribue à attirer et former les talents dans ce domaine, à placer notre recherche à la pointe de l’innovation en IA et à accompagner la transformation du potentiel scientifique en potentiel économique et industriel.
Au plan européen, le projet de règlement IA publié par la Commission européenne le 21 avril 2021, et actuellement en cours de négociations au Conseil de l’Union européenne, vise notamment à classifier les systèmes d’IA selon leur degré de risque ainsi qu’à soumettre les systèmes les plus risqués à des règles depuis la phase de conception jusqu’à l’utilisation, afin de garantir la mise sur le marché de produits éthiques, sûrs et transparents.
Promouvoir les ressources numériques au service du bien commun
Le Président de la République s’est également engagé pour l’accès de tous aux solutions numériques, afin de stimuler l’innovation et lutter contre les fractures numériques aux échelles nationale et internationale.
Il est ainsi l’un des principaux promoteurs des communs numériques, comme les logiciels libres (open source), les jeux de données ouverts (open data) et, plus généralement, le gouvernement ouvert.
Le 10 novembre 2021, le Gouvernement a annoncé son plan d’action en matière de logiciels libres et de communs numériques, pour en faire des accélérateurs de la transformation numérique du service public. Il a ensuite publié le plan d’action 2021-2023 de la France pour une action publique toujours plus ouvertes et transparente.