Le Président de la République Emmanuel Macron est intervenu par message vidéo lors de la 75ème Assemblée mondiale de la Santé.

Il a évoqué à cette occasion les conséquences sanitaires de l’agression russe en Ukraine, sur les populations, les établissements, et les personnels de santé qui sont pris pour cible.

Il a également abordé l’importance de préserver la solidarité internationale sur l’ensemble des autres crises et notamment pour continuer une lutte efficace contre le COVID-19, et ce alors que la France aura mis à disposition de ses partenaires 120 millions de doses de vaccin d’ici fin juin 2022, et vient d’annoncer un soutien financier additionnel de 100 millions d’euros au mécanisme Act-A. L’Union européenne a quant à elle exporté la moitié de sa production de vaccin, et partagé 365 millions de doses prises sur ses propres stocks.

Le Président a rappelé l’importance de renforcer les systèmes de santé partout dans le monde, pour être en mesure de déployer efficacement toutes les campagnes de vaccination, combattre l’ensemble des défis sanitaires qui perdurent, et préparer les crises de demain, avec un rôle clé pour l’Académie de l’OMS à Lyon.

Enfin, il a réaffirmé son attachement au multilatéralisme pour faire face aux enjeux communs, et a salué le rôle crucial de l’Organisation mondiale de la santé et du futur traité international sur les pandémies à cet égard.

Retrouvez le message du Président :

22 mai 2022 - Seul le prononcé fait foi

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MESSAGE DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE À L'OCCASION DE LA 75ÈME ASSEMBLEE MONDIALE DE LA SANTE.

Madame la Présidente de l’Assemblée mondiale de la Santé, 
Monsieur le Secrétaire général des Nations Unies,
Monsieur le Directeur général,
Mesdames et Messieurs les Chefs d’État et de gouvernement,
Chers collègues,

C’est un honneur de pouvoir à nouveau m’exprimer devant vous. Nous avons traversé ensemble la plus grande épreuve sanitaire depuis un siècle. Or, celle-ci n’est pas encore achevée que nous devons déjà faire face à une autre crise : un conflit armé qui remet en cause les fondements-mêmes du multilatéralisme auquel nous sommes attachés. Attachement dont nous témoignons, chers amis, par ce rassemblement à l’Assemblée mondiale de la santé, une fois encore.

Je souhaite ici réaffirmer la pleine solidarité de la France et de l’Union européenne avec l’Ukraine. Nous condamnons avec la plus grande fermeté l’agression militaire commise par la Russie, avec la complicité coupable de la Biélorussie. Les conséquences de cette guerre sont dévastatrices, sur le plan sanitaire, sur les populations, sur les établissements et sur les personnels de santé, qui sont pris pour cible. Je tiens ici à remercier l’Organisation mondiale de la santé, pour son action déterminante afin de préserver, sur le terrain et malgré les difficultés immenses, le droit à la santé des populations en Ukraine. L’Assemblée mondiale de la santé se saisira de cette question cette semaine et j’appelle tous les États membres à soutenir la résolution présentée par l’Ukraine.

Pourtant cette crise, cette guerre que nous vivons aujourd’hui en Ukraine, ne nous fait pas oublier que de nombreuses autres urgences, sur le reste de la planète, doivent continuer de nous mobiliser. La pandémie au premier chef. 

Vous connaissez l’engagement de la France et de ses partenaires européens face à la pandémie. Nous avons été à l’origine du lancement d’ACT-A. La France a été le premier pays à donner des vaccins via le mécanisme d’allocation équitable de COVAX, et aura mis à disposition 120 millions de doses auprès de ses partenaires d'ici fin juin, comme je m'y étais engagé. L’Europe a été le plus grand pourvoyeur de vaccins du monde, en exportant la moitié de sa production et en livrant, à ce jour, 365 millions de nos propres stocks, vers tous les continents, à 90 % à travers le mécanisme COVAX. L’Equipe Europe a choisi aussi d’investir pour le futur. Nous avons mobilisé plus d’un milliard d’euros pour déployer des capacités de production de vaccins sur tous les continents, et travaillé étroitement avec l’OMS pour créer des centres de transfert de technologie en Afrique et sur tous les continents. J’étais dès le mois de mai 2021 au Rwanda, en Afrique du Sud sur ce sujet, et puis en contact avec beaucoup d’homologues, dont le Sénégal, sur le continent. Enfin, l’Union européenne a porté une position constructive devant l’Organisation mondiale du commerce pour faciliter les transferts de licences en temps de pandémie, afin que les brevets ne puissent plus faire obstacle à l’accès équitable aux produits de réponse aux pandémies. Nous devons maintenant nous assurer que ce modèle soit ancré dans la durée et cela signifie modifier la manière dont les grands acheteurs de produits de santé s’approvisionnent, que ce soient Gavi ou le Fonds mondial, car acheter local pour maintenir une capacité de production sur tous les continents est dans notre intérêt à tous. Et je sais combien, en particulier, le Président sud-africain y tient.

Aussi, puisque nous évoquons notre démarche en faveur d’un accès plus équitable aux produits de santé, permettez-moi un aparté pour souligner la valeur d'Unitaid. Cette organisation est en première ligne sur le combat de la production locale. C’est notamment Unitaid qui a permis les accords de licence avec Pfizer et Merck sur leurs traitements Covid, via le Medecines Patent Pool. Unitaid a aujourd’hui 15 ans, et merci donc pour votre soutien pour continuer à remplir ce rôle unique.

Notre mobilisation collective a permis un recul de la pandémie mais le combat n’est pas terminé. Nous ne sommes pas à l’abri de résurgences et de nouveaux variants. Le taux de vaccination dans certains pays reste très inquiétant et ne pourra pas nous protéger collectivement si une nouvelle vague repart. Nous devons donc maintenir nos efforts, notamment à travers l’appui aux campagnes de vaccination sur le terrain. J’appelle ainsi tous les gouvernements à continuer à porter cette ambition, sur tous les continents. Comme nous l’avons annoncé la semaine dernière, la France mobilise des moyens supplémentaires pour ACT-A, à hauteur de 100 millions d’euros, qui pourront servir dès cette année à la vaccination Covid.

De manière plus générale, la difficulté à déployer les campagnes de vaccination est un des révélateurs des fragilités de nos systèmes de santé. Il est temps de nous engager et d’investir davantage dans les systèmes de soins, systèmes de soin primaires en particulier car c’est là que résidera la meilleure préparation aux prochaines pandémies. Je ne suis pas convaincu que cet engagement requière un instrument dédié. Il s’agit plutôt de repenser la manière dont nous travaillons en santé mondiale et les moyens que nous accordons aux gouvernements pour se saisir de ces sujets, à travers les programmes multilatéraux et nos aides bilatérales pour rebâtir des systèmes beaucoup plus forts, et des systèmes à la fois en termes de prévention et de soins, beaucoup plus résistants aux crises. Nous avons déjà beaucoup d’organisations et de grandes institutions financières investies sur la scène de la santé mondiale, dont certaines sont en phase de reconstitution, comme le Fonds mondial pour la lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. La priorité pour moi est de soutenir fortement ces organisations, en intégrant au cœur de leurs mandats cette priorité que doit être le renforcement du système de santé local.

Néanmoins, s’il y a un axe en particulier sur lequel il est essentiel que nous concentrions nos forces, il s’agit du renforcement des compétences des personnels de santé – car rien ne sert d’avoir des infrastructures ou des vaccins si l’on n’a pas le personnel pour accueillir les patients et les soigner. Vous connaissez mon engagement aux côtés du directeur général de l’OMS pour mettre sur pied une Académie, qui ouvrira ses portes à Lyon en 2024. L’Académie sera la référence mondiale en matière de formation aux enjeux de santé globale. Elle formera, grâce à des technologies numériques innovantes, de très nombreux apprenants à travers le monde, notamment en provenance des pays les plus fragiles. Avec ce projet majeur, l’OMS apportera une réponse très concrète pour la formation à la préparation et à la riposte aux pandémies. C’est pourquoi je vous invite tous à soutenir cette initiative.

Maintenant, que ce soit pour la gestion des crises sanitaires ou pour le renforcement continu des systèmes de santé, je vous appelle, chers collègues, à soutenir sans relâche l’OMS. L’OMS elle est la seule institution légitime pour garantir la sécurité sanitaire universelle, et nous permettre collectivement d’avoir une réponse coordonnée, unie et solidaire. C’est ce qu’a fait la France, en doublant ses contributions à l’organisation pendant la crise.
Je salue en particulier le rôle joué par le Directeur général de l’OMS, cher Tedros. La France a présenté sa candidature à un second mandat et lui accorde sa confiance pour qu’il poursuive la transformation de l’OMS dans les prochaines années. 

Ces derniers mois et années ont vu se développer une conversation passionnante, qui nous a permis de faire réfléchir les décideurs du monde entier à la gouvernance de la santé mondiale et à la préparation aux pandémies. De nombreuses propositions sont sur la table, qui convergent notamment sur l’importance de renforcer l’OMS dans son rôle de coordination scientifique et d’instance normative, dans une approche « Une Seule Santé », et sur la nécessité de lui donner davantage de moyens pour agir. Des moyens financiers, avec des contributions plus importantes. Des moyens sous forme d’accès aux données, car les États membres de l’OMS ont la responsabilité de mettre en œuvre ses directives mais aussi de lui transmettre toutes les informations nécessaires pour les éclairer. Des moyens pour s’assurer de la bonne préparation sanitaire universelle, ce qui nécessitera un mécanisme de revue par les pairs. 

Enfin, comme toute organisation internationale, l’OMS doit garantir l’implication active de ses États membres, notamment en temps de crise. C’est pourquoi la France soutient la mise en place d’une Commission permanente du Conseil exécutif de l’OMS sur les urgences sanitaires, et appelle à un positionnement ambitieux de ce dernier, pour nous permettre d’être collectivement prêts quand une urgence se présente. 
Pour permettre à l’ensemble de ces réformes d’être ancrées dans le droit, pour l’avenir, je suis favorable à l’adoption, sous l’égide de l’OMS, d’un accord international juridiquement contraignant. Celui-ci devra être accompagné par la révision du Règlement sanitaire international, afin d’adapter celui-ci aux évolutions des risques sanitaires et nous assurer de sa mise en œuvre. 

Je compte sur l’ensemble des Etats membres de l’OMS et sur la capacité d’entraînement de son directeur général pour mener à bien l’ensemble de ces chantiers. C’est la condition pour avoir une science libre, ouverte, indépendante de toute pression politique, des mécanismes efficaces de prévention des crises et de réaction rapide face aux crises, des mécanismes d’organisation collective lorsque les crises sont là. Cela vaut pour la pandémie actuelle, mais cela vaut pour tous les défis auxquels nous aurons à faire face : pandémies nouvelles, interactions entre les déstabilisations de la biodiversité et de la santé humaine. C’est notre responsabilité, non pas d’attaquer l’organisation, mais de la parachever, de la renforcer, de la rendre plus indépendante et forte afin de bâtir ensemble un monde plus sûr, pour nos enfants et pour les générations futures.

Je vous remercie.


 

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