Il fut le premier James Bond et il est toujours le plus emblématique. L’acteur Sean Connery s'est éteint hier, à l’âge de 90 ans, après six décennies de cinéma passées en haut de l’affiche.
Lui qui arborait son kilt comme un blason, le rappelait souvent : il était né en Ecosse, dans les faubourgs pauvres d’Edimbourg. Fils d’un ouvrier et d’une femme de ménage, contraint dès ses 8 ans d’aider ses parents à nourrir la maisonnée, il fut livreur de lait le matin et commis boucher l’après-midi. Quittant l’école très tôt, il s’engagea dans la marine, sans y trouver sa voie, et s’essaya ensuite à mille métiers, des plus simples aux plus insolites : maçon, modèle pour des peintres, vendeur de voitures, maître-nageur ou vernisseur de cercueils. Ces immersions dans des domaines si variés furent pour lui la meilleure des écoles d’art dramatique : elles élargissaient la palette dans laquelle le futur acteur allait puiser les couleurs de son jeu.
Sa carrure athlétique, forgée par le culturisme et le football, fut bientôt remarquée et lui valut ses premiers rôles à la télévision, au théâtre et au cinéma. Sa belle voix grave, ses sourcils expressifs, son allure virile faisaient mouche et attirèrent l’attention d’un producteur qui voulait adapter au cinéma les aventures d’un espion nommé James Bond, écrites par Ian Fleming. Parmi les 600 candidats au rôle, Sean Connery fut l’élu.
C’est ainsi qu’en 1962, il donna sa première incarnation à l’agent 007, au service de sa Majesté. Que, le premier, il dégaina son pistolet et tira face caméra dans le plus célèbre des génériques de cinéma. Et que, le premier aussi, il lança la plus célèbre des répliques de films (« Mon nom est Bond. James Bond »).
Un mythe naissait auquel il donna les traits de son visage et les contours de sa silhouette pendant 20 ans, en 7 films, de Dr. No à Jamais plus jamais. Ce mythe, c’est celui d’un idéal masculin, d’un homme chic et vif, séducteur en diable, taiseux mais jamais à court de réparties, qui affrontait les méchants les plus vils, qui embrassait les femmes les plus belles, qui parcourait les contrées les plus lointaines, et qui restait d’une élégance parfaite en toutes circonstances, même dans le feu de l’action. Sean Connery devint l’homme que tous les hommes rêvaient de devenir, l’homme que toutes les femmes rêvaient de conquérir.
Si ce rôle fit sa gloire, il craignait néanmoins qu’il ne lui collât à la peau et chercha à s’en défaire en endossant des personnages et en pénétrant des univers très différents, chez le maître du suspense Alfred Hitchcock (Pas de printemps pour Marnie), dans le monde sombre et désenchanté de Sidney Lumet (de La Colline des Hommes perdus à The Offence), dans les intrépides aventures de Steven Spielberg (Indiana Jones), dans l’Italie du XIVe siècle (Au nom de la rose) ou dans le Chicago des années 30 (Les Incorruptibles).
Il traversait les genres et les époques mais jamais il ne se départait de son accent écossais et de son flegme : il était chaque fois lui-même et pourtant chaque fois crédible et juste dans ses rôles. Toujours reconnaissable et toujours autre, par cette alchimie dont seules les plus grandes icônes du cinéma ont le secret.
Le Président de la République et son épouse saluent un acteur suprêmement charismatique qui a fait rêver les Français d’aventures et d’élégance. Ils adressent à sa famille, ses proches ainsi qu’à ses compatriotes leurs condoléances attristées.