Fait partie du dossier : L'économie, atout français.

Les cours en ligne, le téletravail, la télémédecine, ou encore les réunions de famille et entre amis par écrans interposés, toutes ces innovations du numérique ont contribué à la résilience de la Nation alors que nous étions confinés.

Dans cette nouvelle phase de relance, le numérique continuera de jouer un rôle déterminant. L’enjeu est clair : bâtir ensemble la souveraineté numérique de la France.

Lundi 14 septembre, le Président Emmanuel Macron a reçu à l’Élysée les startups tech françaises. Il a rappelé le soutien sans précédent apporté au secteur : 7 milliards d’euros d’investissements pour accompagner la transition numérique de la France.

(Ré)écoutez son discours : 

14 septembre 2020 - Seul le prononcé fait foi

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DISCOURS DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE AUX ACTEURS DE LA FRENCH TECH

Madame, monsieur le ministre, mesdames, messieurs les parlementaires, madame la présidente de la CNIL, mesdames, messieurs les directeurs généraux, chers amis, je ne vais pas vous faire un grand discours. J’essaie de réagir à ce qui s’est dit et d’abord vous remercier parce qu’on est en train de démontrer qu’on peut continuer à faire des événements de mobilisation des réunions en période Covid, donc il faut une certaine discipline, celle qu’on est en train d’avoir collectivement. Cela réduit un peu la convivialité ce qui fait que le cocktail qui était prévu à l’issue de la réunion ne se tiendra pas par prudence mais cela montre aussi qu’on peut continuer à avancer, se voir et faire avancer les sujets auxquels nous tenons. Je voulais vraiment remercier pour commencer d’abord, les 3 témoignages et les 3 succès, il faut bien le dire, qui se sont exprimés là, mais aussi tout l'écosystème et, l’ensemble des différents responsables des communautés French Tech que j’ai vu avant.

 

Vraiment merci à toute la communauté et à la French Tech, le secrétaire d’État au numérique, à Tech in France, à France Digitale, Syntec Numérique, à Bpifrance, Station F, l'ensemble des fonds de l'écosystème et tous ces acteurs. Je ne suis pas exhaustif mais en quelques années, s'est structurée comme ça une espèce de carte du tendre, de la mobilisation, de l'engagement pour faire de la France une place qui crée, développe et est en train de transformer le monde. Et ça, ça a une énorme valeur. Et c'est votre capacité à faire toujours un peu plus que simplement votre job, mais aussi [à le faire] avec l'ensemble des administrations qui sont présentes et que je remercie de continuer à pousser, à innover, qui permet, je crois pouvoir le dire, d'avoir les résultats qui sont les nôtres.

 

Alors les résultats, ils sont là et au fond, pour essayer de voir comment on se projette dans cette relance, il faut essayer de regarder où on en est aujourd'hui, comment on a tenu dans la période Covid et comment on peut essayer de faire mieux demain.

 

Les résultats, on en a. Sur beaucoup d'items et celui des licornes vient d'être évoqué. Je partage totalement ce qu’a dit Alexandre, ce n'est pas l'objectif final, c'est un objectif intermédiaire pour vous mobiliser. Quand on part de zéro, et tout le monde nous disait en Europe « vous n’êtes pas fichu d'avoir des licornes, en France non plus », c'était un bon objectif.

Est-ce que ça doit être l'objectif sur lequel on s'arrête ? Surtout pas ! Donc, l'objectif de 25 à atteindre demeure. On a su en créer 13. Il faut continuer à avancer.

 

Malgré tout, ça montre quoi ? Qu'on reste le pays d'Europe continentale qui crée le plus de start-up, mais que nous sommes maintenant devenus un pays d'Europe continentale qui sait les développer et les faire grandir en termes de valorisation. Et ça, ça n'était pas acquis il y a 5 ans. Donc, il faut savoir d'où on vient et où on est arrivé et ce qu'il ne faut s'arrêter là. Surtout pas. Il faut continuer là-dessus. Mais en termes de fonds levés, ce qui est aussi un bon indicateur, on était à 2,6 milliards d'euros en 2017, on est passé à 5 milliards en 2019, avec des tickets d'ailleurs de toujours de plus en plus gros. 2,7 milliards d'euros sur le premier semestre 2020. Donc, malgré les difficultés, alors même que les marchés voisins britanniques et allemands souffraient un petit peu de leurs difficultés au premier semestre de l'année, on a plutôt consolidé nos résultats. Donc, sur ce volet-là, qui était je dirais notre faiblesse historique, surtout par rapport aux Britanniques, on est en train de commencer à rattraper notre retard. On a même rattrapé une partie et on arrive à lever de plus en plus avec des tickets de plus en plus conséquents. Et ça, c'est ce que vous avez su collectivement, justement consolider. Comment ?

 

D'abord parce qu'il y a eu plusieurs initiatives, et différentes mobilisations. D'abord Bpifrance et les fonds historiques de l'écosystème français dont je reconnais les visages amis et que je salue. On a su, derrière, développer avec les fonds Tibi et sur les 6 milliards d'euros d'investissement annoncés, on a 24 fonds non cotés qui sont aujourd'hui labellisés, dont 9 dans la santé. On a 9 fonds cotés qui se sont mis en place. Là aussi, Bpifrance, les business angels, les fonds historiques se mobilisent, les institutionnels étant mobilisés pour permettre d'aller plus loin. On a su mobiliser les acteurs internationaux avec des initiatives comme Choose France ou le Scale Up Tour. Et donc, on a réussi véritablement avant crise et on a maintenu pendant la crise un écosystème qui permet les levées, qui consolide le financement de l'écosystème français. Et donc, on a gardé notre capacité à innover et on s'est renforcé sur ce volet-là.

 

A cela s'ajoute notre capacité à créer des sorties et là aussi, tout ce qui a été fait pour valoriser justement les parcours, reconnaître les start-ups du Next 40 au French Tech 120. On a commencé à enclencher des sorties sur le marché et pas simplement MNF qui est aussi important pour beaucoup et là-dessus, on sait qu'on a encore beaucoup de défis à relever.

 

Deuxième point sur lequel je voulais insister, on l'évoquait tout à l'heure avec certains, on crée des emplois et c'est vrai que c'est là où la comparaison avec l'économie traditionnelle, parfois, est cruelle. Quand on parle de licornes, on parle de valorisation. Mais après, quand on regarde le nombre de salariés, on n'est pas face à des grands groupes. Mais je pense, c'est très important de le dire, de le marteler. Fred [Mazzella] le disait tout à l'heure dans la petite réunion qu'on avait avant [avec les présidents des Capitales et es Communautés French Tech]. Il faut aller beaucoup plus loin. Là, l'écosystème français est créateur d'emplois de plus en plus. Et plus on arrive justement à continuer à innover, à continuer à financer la croissance, à attaquer le marché français, le marché européen et le marché mondial, plus on crée des emplois sur notre territoire aussi. Et le numérique, qui a très longtemps été vu comme un secteur qui détruisait de l'emploi dans les secteurs traditionnels surtout pour ce qui est, ce qui relève de nos acteurs, est un écosystème qui crée de plus en plus ces emplois et qui les crée sur tout le sol national.

Vous l'avez très bien dit, hexagone comme outre-mer, avec aussi une répartition qui est de plus en plus équilibrée et un modèle qui est de plus en plus large sur le territoire.

 

Ensuite, on arrive à maintenir et même on renforce nos performances en termes d'innovation. Pour moi, c'est un élément important. Quand je regarde les classements innovation qui sont sortis récemment, la France passe à la douzième place en faisant un bond en avant très important. Le classement de Shanghai nous a vu progresser très fortement parce qu'on a réussi à réorganiser nos acteurs, essentiellement publics, à donner justement de l'échelle, de la visibilité mondiale et des meilleures performances à nos grands acteurs, organismes, universités et logiques de campus, ce qui est très important pour vous. Cela a été donné dans les facteurs de réussite et ça, c'est vraiment une consolidation de nos forces traditionnelles [et c’est] quelque chose que l'on a su réorganiser ces dernières années, sur lequel on doit aller beaucoup plus fort. Et c'est d'ailleurs le but de la loi [de programmation pour la] recherche qui va arriver au Parlement, qui est à la fois un investissement historique en financements mais aussi une réorganisation des parcours et une réorganisation de notre système sur le terrain, pour être beaucoup plus efficace et attractif, parce que vous êtes sur des secteurs de talents, ça, c'est quelque chose qu'on a su également consolider.

 

Et puis on a su, je crois, ces dernières années, construire un écosystème de partenariats public/privé. C’est le deuxième élément que vous avez cité tout à l'heure dans les facteurs de succès. Je crois que la présence d'ailleurs de plusieurs acteurs de cet écosystème le montre et je les en remercie. Un écosystème de régulation efficace la CNIL, l’ACPR et plusieurs autres.

 

Mais je pense que c'est très important d'avoir aussi cette pénétration, ce dialogue entre un écosystème d'innovation qui, historiquement, était comme étranger aux régulateurs et là avoir l'autorité administrative indépendante en charge des libertés, qui travaille de manière partenariale. Et on a su le faire sur beaucoup de sujets. Je ne suis pas exhaustif sur l'ensemble des régulateurs mais, sur les régulateurs sectoriels comme les grands acteurs nationaux, on a créé un écosystème de régulation nationale beaucoup plus fort en même temps qu'on a su avancer sur un écosystème européen avec, par exemple, la réglementation européenne qu'on a su bâtir sur les données.

 

Ensuite, on a mis en place un écosystème public. Vous l'avez très bien dit de travail aussi avec nos administrations. J'avais eu l'occasion de dire une des fois précédentes, l’Urssaf est votre ami et voilà ! Ce qui s'est développé avec l'ensemble des administrations est très important aussi, à la fois parce que c'est ce qui permet parfois de réussir à gagner en efficacité, mais aussi nous, pour nos administrations, à transformer les modèles. On l'a vu pendant la crise du Covid, ça a été très bien illustré et on continue à le voir chaque jour et je crois que c’est une force, on est au début mais ça c’est quelque chose qu’on a commencé à craquer et puis on a un écosystème de cybersécurité qui est aussi très fort. Le travail de l'ANSSI, notre agence nationale est très important. Je crois que c'est une force. On a gagné en vélocité, on a gagné en réactivité, on est reconnu, le travail de l’ANSSI l’est pour tous les acteurs, petits ou grands, quand ils sont attaqués. Et le sujet cyber va devenir un sujet croissant pour vous tous et toutes. On sait qu'il n'y a pas de communautés durables, il n'y a pas de création de valeur durable, il n'y a pas de soutenabilité si on n'arrive pas à continuer ce mouvement. Je ne suis pas exhaustif dans ce que je dis là. Mais tout ça, c'est le travail collectif qui nous a permis, sur chacun des items, la capacité à innover, la capacité à attirer des talents et à consolider la capacité à financer, à avoir cet écosystème, à profondément transformer les choses. Tout cela a fertilisé les réformes qu'on a menées en début de quinquennat sur le plan essentiellement fiscal :la flat tax, la transformation de l'ISF, le crédit impôt recherche, mais aussi les visas French Tech et autres, pour attirer le capital et le talent sur les modèles d'attractivité qu'on connaît.

 

Cet ensemble qui produit des résultats que vous venez d'illustrer, que je viens de rappeler. Toute cette transformation, elle a tenu pendant la crise covid et elle a tenu pour plusieurs raisons. D'abord et avant tout : vous. J’ai souvent dit, l'entrepreneur, en règle générale dans le monde, mais c'est tout particulièrement vrai des entrepreneures et des entrepreneurs français, c'est une plante qui n'a pas besoin d'être arrosée, mais qui demande de la stabilité. Et je crois que le fait qu’on vous ait donné de la stabilité sur les sujets clés pendant beaucoup de temps vous a permis de montrer aussi votre résilience. Vous ne faites pas partie de catégories qui demandent des aides. Ça ne fait pas partie de votre ADN pour le coup. Mais vous vous êtes battus et vous avez été extraordinairement résilients. Il faut dire, à votre décharge, que le Covid aime le numérique. On a pu le constater. Il suffit de regarder les valorisations des grands groupes internet. C'est une très bonne période, comme le covid réduit la capacité à interagir physiquement. C’est très dur pour les métiers de convivialité ou tout ce qui est physique. C’est plutôt bon pour ce qui est numérisé. Il va falloir malgré tout réussir à résister dans l'après Covid. Mais vous avez tenu. Et puis vous avez tenu parce que vous avez très bien utilisé les dispositifs mis en place, je salue la mobilisation de Bpifrance et de ce que le ministre [Bruno Le Maire] a su établir. Les prêts garantis par l'État, les mécanismes de chômage partiel ont été très bien utilisés. Et c'était fait pour ça. Ils ont permis de résister. Et donc, je pense en plus, pour ajouter un point, ça a été dit tout à l'heure dans la réunion qu'on faisait avec les communautés, je pense que beaucoup de communautés French Tech dans cette période ont appris, peut-être pour la première fois pour certaines, à résister à des crises. Pour la première fois et ne pas être que dans des logiques de croissance, ce qui a aussi permis d'accélérer les apprentissages communs et la résilience parce que beaucoup d'entrepreneurs qui avaient eu à vivre des crises précédentes ont beaucoup appris à des jeunes entrepreneurs et entrepreneuses pour qui c'était la première crise exogène. Je pense que quand on sort vivant ou renforcé de ces moments-là c'est un facteur aussi d'accélération de l'apprentissage. On en est là et on peut être fier de ce qui a été fait, de la résistance.

 

Maintenant, comment on franchit ensemble les prochaines étapes ? Moi, je suis convaincu, comme Alexandre [Yazdi] d'ailleurs l'a dit, qu'il ne faut pas du tout s'arrêter là et penser que les objectifs qui étaient fixés hier valent toujours. Il faut aujourd'hui les réinventer et essayer collectivement d'aller beaucoup plus loin et beaucoup plus fort.

 

D'abord parce qu'on va s'en donner les moyens et ensuite parce que je pense que dans cette capacité qu'on a à se projeter, se réinventer dans ce monde, ce qu'on a appelé le monde d'après, mais qui va être au fond le monde de la vie avec le virus, sans doute pour des semestres, peut être des années et du monde d'après, je pense qu'on a les recettes pour inventer quelque chose où nous sommes collectivement plus forts.

 

La première chose, c'est que nous, on va être au rendez-vous. Le ministre de l'Économie et des Finances et le secrétaire d'État l'ont annoncé. On va être au rendez-vous de l'investissement, de l'engagement dans l'avenir à vos côtés. C'est ce fameux France relance. Et France relance, cela montre une chose, c'est qu'on est collectivement convaincu que si on veut réussir, non pas à revenir comme avant, mais à nous réinventer collectivement, c'est le moment parce qu'il y a une opportunité, je dirai philosophiquement, il y a même un besoin anthropologique et il y a une disponibilité des marchés pour investir. Non pas simplement sur la résistance à la crise, mais l'accélération des transitions qui étaient en cours. Et donc, France relance et ses fameux 100 milliards d'euros qui vont se déployer d'ailleurs dans beaucoup de secteurs où vous êtes des acteurs. Parce que le numérique n'est pas un secteur en soi. Tout ce qui est fait sur l'hydrogène, l'énergie, les transformations vont engager énormément d'acteurs que vous êtes dans la disruption des modèles traditionnels et vous êtes concernés par tous ces plans sectoriels.

 

Mais de manière plus spécifique il y a 7 milliards d'euros qui sont mis justement sur la transformation de notre écosystème de start up et du numérique français. 3,7 milliards pour soutenir les start-ups et accélérer l'investissement en capital. On sait qu'on en a besoin. Il va falloir le faire en défensif et en offensif. Beaucoup plus offensif, avec là aussi particulièrement Bpifrance et ses fonds, que ce soit des fonds directs ou des fonds de fonds. Mais on va investir justement pour démultiplier l'effort. C’est ce que le Secrétaire d'État a porté et cela permet d'accélérer justement le travail qui est fait et vous aidera à aller chercher aussi du capital ailleurs dans des partenariats industriels. Et pour moi, à quoi ça sert le capital qu'on met dans cette phase ? À grandir pour vous beaucoup plus vite mais [aussi] à aller chercher plus rapidement des partenaires industriels et pas simplement financiers à l'extérieur, qui peuvent vous aider à continuer d'augmenter le capital, mais qui, en même temps, vous donne des opportunités d'accès à d'autres marchés.

 

On va investir 300 millions d'euros dans la formation. On en a aussi besoin à tous les niveaux pour continuer à consolider ce qui fait. Beaucoup d'acteurs l'ont fait dans le privé, on continue à le développer dans le public, ce qu'on fait sur le CAPES, l'agrégation et les différentes filières. On a besoin de continuer à transformer, à apporter une offre de formation à tous les niveaux et donc on va investir pour accélérer les initiatives qui avaient été prises. On va aussi mettre 800 millions d'euros sur le numérique au quotidien et l'accès parce que là aussi, on en a besoin, j'y reviendrai en termes de l'inclusivité, pour permettre d'accélérer le travail à la fois de déploiement des infrastructures numériques sur le territoire et de formation de tous nos concitoyens à qui on demande de plus en plus d'accéder au numérique et qui, si on ne fait pas cet effort de formation, resteront en marge du modèle, ce qui n'est pas soutenable ni économiquement, ni socialement, ni démocratiquement.

 

Et puis, on va mettre en place un investissement de 2,3 milliards de transformation de l'État et des entreprises et, si je puis dire, l'accélération de ce qui est fait dans nos services publics pour se numériser beaucoup plus vite, pour transformer les pratiques, pour s'équiper, pour investir, là aussi pour former et de même sur nos PME et parfois nos ETI parce qu’on sait qu'une des faiblesses françaises et qui demeure quand même un peu malgré tout le bilan très positif que j'ai dressé, c'est qu'on a une structure de PME, parfois de TPE de type historique, qui se sont moins digitalisés que beaucoup de voisins. Ce qui est une vulnérabilité pour elles et c'est lié au fait qu’il y a un élément culturel, il y a aussi des rigidités en termes de financement, mais ce qui est un, si je puis dire, un frein à leur développement et un frein aussi à nos performances. Et donc, dans ces 2,3 milliards, on investit aussi pour accélérer cette transformation. Donc nous, on va être au rendez-vous en même temps qu'il nous faut accélérer tout l'écosystème que j'évoquais tout à l'heure pour aller beaucoup plus vite sur le travail qui est fait avec les administrations, avec les régulateurs et le travail qui est fait dans certains secteurs qui sont clés. J'en cite quelques-uns sur lesquels on va là aussi investir fortement avec France Relance, quantique, l'intelligence artificielle, cybersécurité, parce que ce sont des secteurs où là, il y a besoin d'investissements publics forts, parce qu'on sait qu'ils sont très capitalistiques, parce qu'on sait qu’ils sont critiques et que si on veut un écosystème fort et souverain, on a besoin au niveau français et européen d'aller beaucoup plus fort en investissement. On sait qu'on a besoin d'investissements de rupture et qu'on ne peut pas demander au secteur privé seul de le porter. D'ailleurs, aucun écosystème dans le monde ne le finance que par le secteur privé, ni les Américains, ni les Chinois.

 

Et donc, on doit là aussi être beaucoup plus forts dans les investissements qu'on va porter sur ces verticaux. La stratégie qu'on va, si je puis dire, consolider dans les prochains mois, qui fait que, fort de cela et de tout ce qu'on a acquis, on peut rêver beaucoup plus haut et beaucoup plus fort parce qu'on investit, j'en suis persuadé, au bon endroit, sur un écosystème qui est prêt et dans le même temps, je l'évoquais tout à l'heure, on investit sur la recherche fondamentale et la recherche technologique à travers la loi qui va simplifier beaucoup de dispositifs, mais aussi de l'investissement public en amont. E donc, c'est un continuum qui est extrêmement cohérent. Ça c'est le premier pilier qui, dans l'après Covid nous dit : on, accélère tous et on prend la responsabilité avec l'écosystème. Le deuxième pilier, c'est de consolider sur au fond les forces historiques du modèle français. Et je crois qu'on est à un moment de bascule dans cette sortie du Covid où on a beaucoup parlé, on en parlait dès le mois de mars de l'après Covid. Ce temps d’après covid va durer. Il faut être tous lucides là-dessus. Pas la peine de se mentir. Et donc, en tout cas, ce monde qu'on est en train de réinventer, qui va être sans doute une sortie progressive parce que le virus va continuer de tourner. Mais on doit avoir encore plus de force pour penser ce monde d’après ou ce monde de transition. Je crois qu’on doit collectivement porter les forces françaises qu’on avait un peu oubliées ou qui jusqu’alors étaient vécues comme au fond des poids.

 

Je m’explique. Si on veut réussir compte tenu des transformations qui sont en cours, on a besoin d’avoir de la stabilité réglementaire et un écosystème bien régulé. C’est notre force. Et on a réussi ces dernières années à gagner en simplicité, à avoir justement de l’expérimentation, à rapprocher notre écosystème de régulation avec l’écosystème privé. Il faut qu’on accélère là-dessus, qu’on renforce.

 

 

Mais n’oublions pas une chose : le fait d’avoir un éco système régulé est une force inédite parce que tous les systèmes démocratiques vont réguler leur numérique, tôt ou tard. Nous nous avons commencé à le faire et on a plutôt de la maturité sur ce point. Ce qu’il faut continuer à faire c’est simplifier et accélérer parce que vous avez besoin de vitesse. Et donc nous on doit gagner en vitesse mais les infrastructures sont là. Et donc moi je pense que si on veut la réussir, c’est de plus en plus multiplier les procédures de rescrit, multiplier les procédures partenariales, réussir à innover en termes de régulation pour gagner en vitesse réglementaire collectivement, en simplicité. Mais c’est une force du modèle français si on sait passer ce cap.

 

L’autre chose c’est l’équipement. La France est un pays de réseaux, d’équipements, historiquement les routes, les canalisations d’eau et maintenant l’équipement numérique. Grâce au New Deal, on doit finaliser et c’est un des objectifs, un des KPI du secrétaire d’État dans les tout prochains mois, lui aussi on lui accélère ses objectifs donc 3G / 4G partout et un internet mobile haut débit. Mais on doit aller plus loin, plus fort. Je pense que là on va l'accélérer et évidemment on va passer à la 5G. Je veux être très clair : la France c’est le pays des Lumières, c’est le pays de l’innovation et beaucoup des défis que nous avons sur tous les secteurs se relèveront par l’innovation. Et donc on va expliquer, débattre, lever les doutes, tordre le cou à toutes les fausses idées. Mais oui, la France va prendre le tournant de la 5G parce que c'est le tournant de l'innovation. Et j'entends beaucoup de voix qui s'élèvent pour nous expliquer qu'il faudrait relever la complexité des problèmes contemporains en revenant à la lampe à huile, mais je ne crois pas au modèle Amish. Et je ne crois pas que le modèle Amish permette de régler les défis de l'écologie contemporaine. Et donc on va continuer à équiper, innover. Mais simplement l'innovation ne doit pas être que technologique, elle doit être aussi sociétale et sociale et il faut regarder les peurs en face des peurs. Il y a des peurs liées à ces innovations. Il faut les lever en disant la vérité, en trouvant les bons compromis et en expliquant, en mesurant par le débat citoyen éclairé.

 

Et puis on a pour moi trois éléments clés dans le modèle français aujourd'hui qu'il faut valoriser, accélérer si on veut réussir. C'est ce que j'appellerai éducation, santé, climat. L'éducation, on a un des meilleurs systèmes éducatifs au monde. Il avait des failles, on a toujours des faiblesses. On a beaucoup investi, on continue d'investir sur le modèle éducatif français pour relever ses performances. Mais on a une éducation publique de très grande qualité, de 3 ans jusqu'au sup’. C'est un élément d'attractivité. Vous êtes une économie de talents, le secteur a besoin d'attirer des talents. Il faut valoriser cet élément. Quelle autre économie au monde permet à des talents de former leurs enfants à l'école publique avec une école de qualité exceptionnelle tout au long de leur vie ? La France. Et on ne l'a pas assez dit, martelé, valorisé. Quand ils ont des salaires qui ne sont peut-être les doubles sur la côte ouest, ils ont un modèle qui est hyper sélectif sur une base monétaire pour leurs enfants. Et donc il faut actualiser le coût de cette éducation tout au long de la vie. Nous c’est zéro, c'est une force, c'est une force d'attractivité pour innover et c'est une force d'attractivité dans la durée.

 

Le deuxième élément, c'est la santé. On avait réinvesti 8 milliards d'euros dans notre système de santé, qui était déjà l'un des plus performants au monde, 8 milliards d'euros par an avec le fameux Ségur. C'était légitime et cela vient s'ajouter à une nouvelle modernisation de notre système et à nos forces historiques. Mais notre système de santé, lui aussi, non seulement est l'un des meilleurs en termes de recherche, d'accompagnement, mais il est juste et il est quasi gratuit avec un ticket modérateur qui est extraordinairement réduit. C'est un élément d'attractivité et il faut le valoriser. Dans un monde où on a vu la panique liée à l'épidémie, nous n'avons pas un système d'exclusion sanitaire. Et là-dessus je vous le dis parce que pendant des années et des années, on a eu le modèle social honteux et on a regardé le modèle social que par son coût. On a dit c'est un terrible facteur de non-compétitivité, non-attractivité. Faux. On a corrigé nos biais fiscaux mais maintenant il faut faire de notre modèle social historique un levier d'attractivité pour tous les talents du monde entier. Parce que ce modèle n'a pas d'équivalent et parce que notre attractivité et la consolidation de notre écosystème ne se fera pas par la dégradation de ce modèle. Il n'y a pas de voie démocratique dans ce sens. Vous ne convaincrez aucun Français d'aller financer les investissements de demain en dégradant le modèle éducatif et social. Simplement, il faut enfin en faire un élément d'attractivité des talents. Et c'est fondamental.

 

Le troisième point, c'est le climat. Nous avons engagé la transition climatique. Nous Français et nous Européens, nous croyons à l'accord de Paris. Nous savons tous les efforts que cela demande. On a entamé des transitions profondes sur la production d'électricité et d'énergie mais aussi sur la manière de se déplacer comme de vivre avec beaucoup de contraintes, avec parfois des secousses sociales qu'on a pu connaître dans le pays. Là on accélère les choses parce que 30 % du plan d'investissement seront sur cette transition. C'est une énorme force et il faut valoriser cette force française et européenne du climat. Parce que dans votre écosystème, tous les talents y croient et veulent y croire. Et parce que surtout ils rentrent dans un écosystème qui est durable, ce qui n'est pas le cas d'un écosystème chinois ou américain aujourd'hui.

 

Pour moi, ce triptyque est un triptyque qui quand on parle à l'intelligence des gens et donc de celle de ceux dont vous avez besoin — financeurs, acteurs, talents dans tous les secteurs — est un élément énorme d'attractivité, et en même temps quelque chose qui nous rendra plus forts parce que cela repose sur nos bases historiques.

 

Troisième élément qui me rend optimiste sur la relance, c'est le fait que ce moment de bascule est le moment où on peut accélérer la transformation en termes d’inclusivité. Ça a été dit tout à l'heure par plusieurs d'entre vous mais, on le voit bien, nos sociétés elles recherchent du sens. Elles se rendent bien compte qu'il n'y aurait pas un monde dans lequel on travaille dans une entreprise dont le seul objectif c'est de faire du profit et d'accumuler ; et qu’après on peut rentrer dans une société dont les objectifs seraient l'inclusivité sociale, l'égalité femmes-hommes, la paix dans tous les quartiers de la République et la lutte contre le réchauffement climatique. Ce modèle il ne marche plus. On a fêté hier les 50 ans du papier de FRIEDMAN, le modèle est mort, il ne marche plus. Et donc le modèle il faut le changer. Et il ne faut pas le changer par — c’est mon grand désaccord avec certains — des lois fiscales ou des règles dans un seul pays. Aussi vrai que le socialisme dans un seul pays ne marchait pas, l'inclusivité dans un seul pays ne marche pas. Il faut transformer les marchés mondiaux par l'inclusivité qu'on remet au cœur de l'entreprise. C'est la responsabilité sociale et environnementale du XXIème siècle, profondément transformée et accélérée. Et je crois très profondément que là-dessus notre écosystème a un temps d'avance. Et donc il faut le porter, investir et y aller à fond. C'est pour ça que la ministre est avec nous aujourd'hui, et je salue sa présence, et je pense que c'est un signal très fort. C'est que vous êtes les acteurs de cette transformation, en tout cas ceux qui vont permettre de la fertiliser. Et c'est ce qui fait aussi que les acteurs des French Tech européennes, nos French Tech mondiales à nous Français mais tous les écosystèmes tech européens ont, à mon avis, un temps d'avance. C’est que ces valeurs-là, aujourd'hui, elles ne sont pas portées ou sur le tard et par raccroc, par les géants du numérique américain, et encore moins par les géants du numérique chinois.

 

Mais l'égalité femmes-hommes, l'égalité des chances quelle que soit son origine, l'inclusion des pratiques sur tous les territoires, l'inclusion de notre jeunesse dans les opportunités qui leur sont offertes, elles sont au cœur et elles doivent rester au cœur du modèle qui est le nôtre, à la fois dans le développement de notre écosystème mais dans ce qu'il va réussir aussi à innover sur le reste de l'économie, dans sa capacité à bousculer le reste de l'économie. Et des initiatives Tech for good qu'on a menées pour essayer de tirer l'écosystème mondial là-dessus aux initiatives Tech for value que vous aviez lancées et qu'il faut continuer à développer, en passant par Les Déterminés et tout ce qui a pu être fait comme initiative par vous toutes et tous, on a besoin de continuer cela.

 

Mais surtout, si on veut se différencier et si on veut que la création de l'économie à venir et du modèle dans lequel nous croyons ne soit pas quelque chose d'anecdotique qui soit simplement un secteur pour bobos urbains de certains quartiers mais embarque le pays, qui est ce à quoi on croit très profondément, la démonstration doit maintenant être faite — ce qui est déjà une réalité sur le territoire — que ces créations, ces consolidations, cette transformation par le numérique touche la France toute entière, tous les niveaux de compétences, tous les territoires métropolitains et ultramarins et qu'elle est porteuse des valeurs auxquelles nous croyons. Et je pense que c'est un levier formidable d'accélération pour un monde plus inclusif, pour accélérer la transformation à laquelle on croit, mais aussi avoir un écosystème qui n'est pas seulement un écosystème qui crée de la valeur mais qui est porteur de sens.

 

Je trouve d’ailleurs que les exemplaires que vous avez donnés tout à l'heure l'ont montré : il y a à chaque fois quelque chose de très fort parce que vos salariés, comme d'ailleurs les fondateurs que vous êtes, vous êtes réunis par ça. Ce sont des communautés aussi de sens et d'engagement. Et je pense que cela correspond très profondément à ce qu'est le modèle économique et social du XXIème siècle. Nos concitoyens croient dans ce modèle-là beaucoup plus que dans celui où en quelque sorte le salarié aurait des objectifs qui ne sont plus les mêmes que celui du consommateur ou du citoyen. C'est fini. Les gens veulent retrouver un sens et un engagement unique. Et je pense qu’à travers l'écosystème numérique ce qu'on peut faire c'est un accélérateur de cela.

 

Et puis mon dernier point, c'est le modèle européen. Et ça rejoint ce que plusieurs d'entre vous ont dit. Je crois qu'on doit, en même temps que l'on accélère l'investissement français, qu'on doit mieux jouer sur nos forces historiques en les montrant et qu'on doit accélérer notre transition vers plus d'inclusivité, cette sortie de crise elle doit nous conduire à être plus européen. C'est ce qu'on a réussi à faire en juillet avec l'accord européen mais c'est vital pour vous. Ça a été très bien dit par Alexandre [Yazdi] à l’instant : votre marché bien souvent est national et le marché européen dans le numérique, c'est une addition de marchés domestiques. Alors on ne le fera pas du jour au lendemain, je vais être honnête. Même si on construit un marché unique du numérique, on a commencé à en mettre les briques, la vraie difficulté c'est que ce dont vous avez besoin n'est pas simplement un marché unique du numérique mais des marchés uniques dans tous les secteurs. Parce que vous n'êtes pas que numérique. Vous avez à chaque fois des verticaux qui vont chercher dans tous les secteurs. Mais cette consolidation on doit l'accélérer parce que c'est celle qui vous permet en effet d'avoir l'accès à la taille critique beaucoup plus vite, beaucoup plus fort. Et donc, oui, la bataille européenne est une bataille de l'accélération de ce modèle et de sa transformation. Donc nous on va continuer à s'employer d'ouvrir les marchés, au bon sens du terme, c'est-à-dire de lever les barrières qui sont des freins à la création d'opportunités pour nos entrepreneurs, de lever les mauvaises régulations et de bâtir au niveau européen les bonnes régulations.

 

Je crois dans un marché numérique européen qui est un marché qui lève les barrières, qui empêche des acteurs d'avoir un vrai marché européen tout de suite, mais qui en même temps construit les régulations dont les citoyens ont besoin pour protéger leur vie privée, pour protéger leurs données, pour protéger leur sécurité. Et donc en même temps qu'on parle de simplification, d'accélération, on parle aussi à chaque fois qu'on parle d'Europe de souveraineté. Et la vraie souveraineté se bâtit au niveau européen. Et si on veut que notre écosystème soit durable, il doit être souverain et on a plusieurs batailles à mener sur ce sujet. Mais on sait qu'on en a deux : une bataille technologique sur la 5G et sur beaucoup d'autres sujets aussi dans le soft où on ne doit dépendre d'aucune puissance non-européenne si on veut être souverain au niveau européen. On a aussi cette bataille sur le cloud parce qu'aujourd'hui on l’a perdue, soyons aussi clairs, et on doit la réouvrir. Parce que si nous voulons maîtriser durablement notre écosystème, si on veut vraiment être souverain au niveau européen, on doit rouvrir ce sujet. On ne réglera pas dans les deux mois ou dans les six mois. Mais pour moi, dans le moment qui s'ouvre, c'est évidemment là-dessus qu'on doit ouvrir notre ambition.

 

Donc voilà quelques perspectives que je voulais partager avec vous pour vous dire tout ce qu'on a su faire ensemble, qu'on a tenu, mais surtout pour moi ces quatre piliers sur lesquels on doit bâtir l'avenir. Notre plan de relance, notre capacité à consolider sur le modèle français historique et au fond, à le transformer sur ses forces historiques, notre capacité à bâtir véritablement l'inclusivité et l'entreprise du sens du 21ème siècle. Le mot de RSE ne doit pas rester une activité marginale, et c’est vous qui pouvez le mettre au cœur du système, et la capacité à bâtir une stratégie européenne. Voilà les 4 convictions pour l’avenir qui, je crois, nous permettront d’aller beaucoup plus vite et beaucoup plus fort. Et maintenant, je suis prêt à répondre à toutes vos questions ou échanger.

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