Annie Cordy nous a quittés aujourd’hui, mais ses hymnes à la joie continueront longtemps à nous trotter dans la tête et nous mettre le cœur en fête.

Elle était un peu devenue Française à force de faire, de scène en scène, le tour de l’hexagone, mais Annie Cordy venait de ce « plat pays » que chantait Jacques Brel et qui a offert à la langue de Molière tant d’artistes qui ont su l’ouvrager avec talent.

À Bruxelles, dès son plus jeune âge, la petite Léonie Cooreman, de son vrai nom, écoutait la TSF sur les genoux de sa maman. L'auditrice passionnée devint bientôt une chanteuse aguerrie, s'illustrant de radio-crochets en revues de cabaret. Remarquée par le directeur artistique du Lido qui l’engagea aussitôt comme meneuse de revues, elle débarqua à Paris en 1950 où, sans qu’elle ne le sache encore, allaient se nouer ses deux plus belles histoires d’amour : celle qui l’a liée à l’homme de sa vie, son imprésario et son mari, François-Henri Bruneau, et celle qu’elle a tissée avec son public.

Au Lido, Annie Cordy montra toutes les facettes de son talent et les feux de la rampe brûlaient pour cette jeune femme qui dansait, chantait, jouait la comédie et amusait la galerie d’un seul élan. Les opérettes, les comédies musicales et les 45 tours s’enchainaient et son nom s’accrochait souvent en lettres de feu sur le fronton de l’Olympia.

Retracer ses soixante-dix années de carrière, c’est égrener un chapelet de tubes, des bulles de bonne humeur et de bel humour : « Hello le soleil brille », « La Madame », « Nini la chance », « La bonne du curé », « Frida oum papa », « Tata yoyo », « Nini pompom », « Ça ira mieux demain », « Cho Ka ka O »…

Les écrans français ne résistèrent pas longtemps à l’entrain de cette jeune femme et lui firent une place aux côtés des légendes du septième art et des vedettes de la petite lucarne. Elle joua devant la caméra de Sacha Guitry dans Si Versailles m’était conté… et aux côtés de Bourvil et Louis de Funès dans Poisson d’avril. Sa gaieté naturelle, ce sourire qu’elle arborait comme un blason, ne l’ont pas empêchée d’endosser à la perfection des rôles de composition plus graves, comme dans Le Passager de la pluie de René Clément ou Le Chat avec Gabin et Signoret.

Mais ce sont ses chansons drôles et entrainantes, ses performances costumées et colorées, ce mélange de simplicité et de fantaisie qui lui avaient le plus sûrement gagné le cœur des Français. Pour beaucoup, elle était comme une amie, une camarade au long cours. Son énergie était contagieuse et roborative. Sa voix, sa joie, nous faisaient irrésistiblement taper dans les mains, battre la cadence. Remède indépassable à la grisaille des jours et des cœurs, certains réclamaient qu’elle soit remboursée par la sécurité sociale car elle savait faire lever des soleils intérieurs partout où elle passait, chez tous ceux qui l’écoutaient.

Les chansons d’Annie Cordy continueront à nous faire sourire et danser, mais nous perdons aujourd’hui une énergie irremplaçable. Car elle était la joie de vivre incarnée, l’esprit toujours à la fête, aux flonflons des bals et aux froufrous de la scène. Elle était notre « Tata Yoyo », notre « Nini la chance », qui nous persuadait « que la vie est belle quand on y croit comme elle ». Elle qui avait sans cesse le cœur à marée haute nous aura communiqué son bonheur jusqu’aux derniers moments de sa vie, en le prodiguant sur toutes les scènes où, il y a quelques années encore, elle continuait de rayonner avec une générosité intacte.

Le Président de la République et son épouse saluent le parcours de cette reine du music-hall et présentent leurs condoléances à ses proches comme à tous ceux qui fredonneront longtemps encore, avec beaucoup de plaisir et un brin de nostalgie, les joyeux refrains d’Annie Cordy.

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