Inauguration du Collège du Renseignement en Europe
On a construit l'Europe pour se protéger. Nous nous battions entre nous, ce temps est révolu. La menace a changé : nous subissons des attentats terroristes, nos élections sont influencées par des manipulations de puissances étrangères menacent notre propre liberté de choisir nos dirigeants...
Dès septembre 2017, Emmanuel Macron a voulu agir concrètement pour nous protéger de ces menaces. Une idée mise sur la table : la création d'un réseau européen de renseignement.
Beaucoup furent sceptiques.
Et pourtant, le 5 mars, des représentants des 30 pays européens issus de 66 services de renseignement étaient réunis autour d'Emmanuel Macron pour inaugurer le Collège de Renseignement en Europe.
Si on avait écouté ces doutes, on ne serait pas en capacité aujourd'hui d'anticiper les crises ensemble, de mieux les préparer et d'être capable d'intervenir ensemble, si nécessaire.
Si l'Europe s’affaiblit, ce n'est pas de ses divisions, mais de ceux qui n'essayent même plus de se battre. Et se battre pour l'Europe, c'est se battre pour les Européens pour protéger chacune et chacun de ce qui menace notre sécurité et notre liberté.
Tout le discours à (ré)écouter :
Retranscription du discours :
5 mars 2019 - Seul le prononcé fait foi
Discours devant le Collège du renseignement en Europe
Centre des Congrès (Paris), le mardi 5 mars 2019.
Mesdames messieurs les Ministres, monsieur le Commissaire européen, mesdames messieurs les Députés, les Sénateurs, les Parlementaires européens, mesdames messieurs les Ambassadeurs, monsieur le Procureur général, monsieur le Préfet de police de Paris, madame la Secrétaire générale de la Défense et de la Sécurité nationale, mesdames et messieurs les Coordinateurs, Directeurs généraux et Directeurs de service de renseignement, messieurs les préfets, mesdames et messieurs.
Je suis très heureux d’être avec vous cet après-midi pour ouvrir les travaux qui suivront et après plusieurs heures déjà de travaux communs et la séance inaugurale de ce collège du renseignement en Europe.
Il y a 18 mois, à la Sorbonne, j’ai appelé les Etats européens à construire ensemble une Europe de la sécurité et de la défense. Une Europe qui protège.
Et je partais alors d’un double constat, le premier : celui de l’inflation des menaces pesant sur notre continent, toujours plus fortes, toujours plus nombreuses, toujours plus imprévisibles et je sais combien, elles vous sont familières. Le second, celui d’une Europe qui, parce qu’elle s’était construite, au fond à l’abri des soubresauts du monde et du tragique de l’histoire et pour le réparer et parce qu’elle avait longtemps mis sa protection entre les mains des Etats-Unis et de l’OTAN, n’avait pas pris suffisamment en main l’enjeu de sa sécurité. Et de formuler au nom de la France des propositions concrètes pour organiser cette Europe de la sécurité et de la défense d’autant plus nécessaire que notre allié américain, justement, exprimait sa volonté d’opérer un repli stratégique, diraient certains, la certitude d’une juste quote-part payée par chacun, diraient d’autres.
18 mois plus tard, le constat d’inflation des menaces pesant sur l’Europe s’est hélas confirmé. Mieux que personne, vous les connaissez ; mieux que personne, vous savez notre continent attaqué. Attaqué par des puissances qui n'hésitent plus à faire acte d'ingérence dans la vie démocratique de nos nations, à utiliser leur position sur le marché européen pour se livrer à une guerre de la donnée. Attaqué par des menaces de plus en plus hybrides, ciblés par des cyberattaques toujours plus violentes visant nos administrations, nos entreprises. Quand ce n'est pas comme en septembre dernier à La Haye, le siège d'organisations internationales abritées sur notre territoire. Menacé par le terrorisme, la chute du califat territorial, dont nous nous réjouissons tous, ne signifie clairement pas la fin de Daech, ni la fin de cette menace. Plus profondément, c'est la grammaire même des relations internationales que l'Europe n'a jamais cessée de promouvoir, celle qui voulait qu'un pays tienne ses engagements pris dans les accords ou les traités signés, celle qui établissait qu'un Etat ne procède pas à une tentative d'assassinat en territoire étranger, qui semble aujourd'hui voler en éclats. Nombre de certitudes dans lesquelles nous vivions jusqu'alors, nombre de comportements, de bonnes relations dans lesquels nous nous étions installés sont profondément aujourd'hui remis en cause. Les menaces sont donc là présentes, pressantes, sans doute plus encore que nous n'avions pu l'imaginer. Mais pour la première fois, la réponse de l'Europe, elle aussi, se dessine.
A la Sorbonne, j'avais souligné que l'Europe devait se doter d'une capacité d'action autonome en complément, dans l'OTAN. En complément du Fonds européen de défense et de la coopération structurée permanente, alors en gestation, et qui depuis juin 2017 n'ont cessé de croître, de se structurer. J'avais mis sur la table l'idée d'une initiative européenne d'intervention avec un objectif : constituer une culture stratégique commune pour anticiper les crises pour les préparer et demain pour intervenir ensemble. J'entends encore ce qu'on m'a répliqué alors, « ça ne se fera jamais ». « Il y a 60 ans la Communauté européenne de défense a déjà échoué. Allez-y, proposez. Tout cela est irénique. » On s'habitue à cette musique, parfois même on la réentend.
Pourtant en juin dernier, 9 États dont le Royaume-Uni ont choisi de s'inscrire dans cette initiative. Ils ont déjà été rejoints par la Finlande. J'avais insisté ensuite sur la nécessité d'agir plus fortement dans le cyberespace selon deux axes. D'abord faire en sorte que les grandes plateformes de l'Internet retirent leurs contenus à caractère terroriste qui corrompent les esprits les plus fragiles et sont clairement le terreau de la violence. Ensuite, doter l'Europe d'une stratégie cyber globale pour prévenir, contrer et réagir aux attaques dont elle fait l'objet. Là encore, les résultats sont au rendez-vous puisque la législation européenne imposant le retrait des contenus à caractère terroriste est en voie d'adoption et que le Conseil européen a acté en automne dernier un plan cyber prévoyant la mise en place prochaine d'une agence européenne dotée de compétences étendues. Sur le sujet de la création d'un parquet européen, des avancées significatives ont également été obtenues puisqu'une vingtaine d'États membres soutiennent aujourd'hui cette initiative qui sera opérationnelle en novembre 2020. Et la France, je veux ici le dire clairement, ne lâchera rien de son combat pour que les compétences du futur procureur intègrent la lutte antiterroriste. Beaucoup de choses, y compris les plus impensables, ont été faites pour que l'Europe se transforme, s'adapte à l'évolution de ces menaces. Tout cela n'a pas stoppé évidemment l'évolution de ces dernières et leur progression. Mais notre réponse est là, monsieur le Commissaire, messieurs les Ministres, tout particulièrement, qui a commencé à apporter de manière concrète une réplique.
Mais construire l'Europe qui protège, c'était aussi, soulignais-je à la Sorbonne, nous donner les moyens de progresser sur ce qui est le socle de la sécurité de nos Etats et une des clés de leur souveraineté. Je veux parler bien sûr du renseignement. J'avais proposé alors que se constitue un réseau, il s'appelait alors “académie”, au sein duquel les services des différents États pourraient dialoguer et échanger ou au travers de séminaires, de formations pourraient se constituer une culture européenne du renseignement. Une nouvelle fois les doutes nombreux s'étaient exprimés : « ce sont des prérogatives régaliennes que les États n'accepteront jamais de partager. » Et finalement, vous êtes là aujourd'hui. Hauts cadres venus des 30 pays européens, issus de 66 services de renseignements intérieurs, extérieurs et militaires pour échanger sur des sujets aussi concrets que le lien entre renseignement et processus de décision, le continuum entre le renseignement intérieur et extérieur.
Je veux très sincèrement vous en remercier chaleureusement. Je veux remercier toutes celles et ceux qui ont rendu cet évènement possible : la coordination nationale du renseignement et de la lutte contre le terrorisme, les services de renseignement français et les ministres qui ont l'autorité sur ces services. Saluer tout particulièrement les représentants de l'Allemagne, de la Belgique, de l'Espagne, des Pays-Bas, du Royaume-Uni dont la présence en ce mois où doit advenir le Brexit constitue un symbole fort et qui ont accepté de prendre en charge la préparation et les animations des ateliers.
Je veux vous dire aussi qu'au-delà du sujet du renseignement, votre présence à tous dit quelque chose de profond, c'est que même dans un secteur marqué par le secret, par des cultures éminemment nationales très ancrées, le sentiment européen est là, vibrant, utile, jugé nécessaire. Beaucoup pensent que l'Europe se meurt de ceux qui veulent la diviser et la détruire. Je crois pour ma part qu'elle se meurt aussi de ceux qui en quelque sorte ont renoncé à entretenir ce désir d'Europe qui anime beaucoup d'entre nous. C'est pourquoi, la France sera toujours à l'initiative pour faire progresser, pour construire cette Europe concrète, ce dont vous êtes la démonstration parfaite aujourd'hui.
En matière de renseignements, de solides bases existent d'ores-et-déjà.
Les coopérations bilatérales entre États européens sont nombreuses, souvent anciennes et je dois le dire, sous votre contrôle collectif, toujours fructueuses.
Elles sont certes méconnues du grand public par définition et je m'en félicite, parfois même des décideurs eux-mêmes. Mais c'est précisément parce qu'elles fonctionnent à plein et qu'elles empêchent chaque mois, chaque semaine qu'un attentat, qu'une cyberattaque, une opération agressive d'espionnage ne se produisent. Ces coopérations bilatérales entre Etats, entre services qui se nouent pour se prémunir des menaces communes comme le terrorisme, le crime organisé et se trouvent en réaction à des événements souvent dramatiques sont éminemment précieuses. Les peuples européens ont pu le constater à chaque fois que le terrorisme a frappé sur notre sol ou lorsque récemment encore, il a fallu mutualiser les forces d'enquêtes pour élucider les conditions de l'empoisonnement de Sergueï et Ioulia SKRIPAL. En aucun cas, il ne s'agit, avec la création de ce collège, de les remettre en cause, bien au contraire. Ces coopérations constituent le socle à partir duquel il faut construire l'avenir.
Existe ensuite les enceintes intergouvernementales, le Club de Berne autour des questions intérieures et de la coopération judiciaire en 1971 ; le Club de TREVI sur le terrorisme et la radicalisation en 1960 ; le Club de Vienne autour de la circulation des personnes en 1979. Les États européens ont très tôt ressenti le besoin d'échanger pour mieux appréhender les grands enjeux contemporains. Ces clubs ont connu des fortunes diverses, pour rester pudique, mais tous en réunissant gouvernants, hauts fonctionnaires et opérationnels ont permis d'obtenir des résultats significatifs que ce soit en matière d'appréhension des menaces, de transferts de techniques ou d'échanges de savoir-faire. Et donc cette culture des clubs, des coopérations concrètes, constitue là aussi un actif précieux.
Enfin, il y a, monsieur le Commissaire, cher Julian KING, les instances européennes intégrées. C'est dans le domaine militaire, la division renseignement militaire de l'état-major de l'Union européenne, c'est dans le domaine du renseignement extérieur, l’IntCen, ce centre placé auprès de la Haute Représentante de l'Union pour les Affaires étrangères et la sécurité qui s'appuie sur des sources ouvertes, sur les représentations à l'étranger de l'Union européenne et sur des renseignements partagés par les services étatiques pour proposer des analyses stratégiques. Et puis c'est Europol, une organisation à l'origine intergouvernementale mais qui depuis 2010 est une agence communautaire et contribue aussi, dans le champ qui la concerne, à l'échange d'informations.
De ce panorama, on pourrait légitimement se dire qu'il est suffisamment riche, que les coopérations et les structures sont assez nombreuses pour ajouter un outil supplémentaire avec ce collège du renseignement en Europe. Je crois tout l'inverse.
Je crois précisément que les coopérations bilatérales, les clubs intergouvernementaux, les structures communautaires seront plus efficaces encore si nous constituons entre les différents services de renseignement, là aussi, une culture partagée. Si nous réussissons en matière de renseignement, comme nous sommes en train de le faire et de le promouvoir en matière militaire, à développer véritablement une communauté commune.
Car quelle est la situation aujourd'hui ?
Nous avons les structures sédimentées par l'histoire, mais nous n'avons pas les fondations. Nous avons les outils d'analyse de l'information mais ce qui fait défaut c'est la remontée et le partage de ladite information vers les décideurs. D'une part, parce qu'il arrive que nous ne nous fassions pas confiance entre États, entre services et c'est légitime car la culture de la discrétion fait partie de l'ADN des gens de renseignement. D'autre part, parce que bien souvent nos normes, nos catégories, nos bases de données sont différentes parce qu'au fond nous ne parlons pas la même langue. Et ce besoin de coordination, même informel, surtout d'abord informel, est éminemment utile. C'est pourquoi l'objectif de ce collège du renseignement en Europe est précisément de remédier à cette situation. C'est de tisser des liens entre nos Etats, nos services et les institutions européennes, c'est de nous doter enfin de ce que j'ai coutume d'appeler une grammaire commune. Cela ne signifie pas que le renseignement ne sera plus demain une prérogative régalienne, non. Cela ne signifie pas non plus que nous voulons tendre à l'uniformisation de nos pratiques, de nos organisations de nos savoir-faire. Je pense que ce serait peine perdue au mieux, contre-productif au pire. Au contraire, notre diversité constitue une chance pour affronter un monde incertain dont les menaces sont protéiformes. Mais nous devons façonner une compréhension réciproque et une confiance partagée car il en va de l'efficacité de nos services et donc de notre capacité à anticiper les crises le cas échéant à les maîtriser. Il en va tout simplement de la sécurité de nos peuples.
C'est pourquoi, je me réjouis que vous vous soyez collectivement saisis de ce projet de collège du renseignement en Europe.
C'est vous tous, en effet, dans votre diversité qui avez pensé, imaginé, organisé cette première session. C'est vous tous qui avez par exemple décidé de ne pas vous restreindre au seul domaine du terrorisme pour aborder tous les champs d'action du renseignement. C'est vous tous qui ferez le succès de ce collège parce que vous l'avez voulu. Vous me permettrez toutefois d'évoquer deux grands principes qui ne doivent jamais, je crois, vous quitter.
Le premier, c'est un principe de partage et d'ouverture, partage parce que l'ambition originelle c'est bien de permettre aux cadres des différents services de se rencontrer, d'échanger, de nouer des relations de proximité, de pouvoir échanger sur les expériences, l'analyse des risques, les objectifs communs tout en gardant évidemment la parfaite indépendance de planification. C'est comme cela que se forge une culture commune. Mais aussi ouverture à la société civile car la culture du secret ne doit jamais être une culture du repli et que les gens de renseignements se grandiront toujours au contact des universitaires, des chercheurs, des experts, de tous ceux qui de près ou de loin participent de ces « intelligence studies », encore trop embryonnaires en Europe. Et je dois pouvoir dire qu'en tant que consommateur moi-même de ces liens, là où je suis, je ne cesse de mesurer leur importance et leur complémentarité. Le premier collège de l'histoire, celui qu’avait précisément pensé Robert de SORBON ici à Paris au XIIIe siècle, c'était précisément cela un lieu où se croisaient les spécialistes de différents champs qui normalement ne se parlaient pas. Je pense que ce principe de partage et d'ouverture est bon pour cette culture commune mais aussi une meilleure compréhension de ces phénomènes internationaux, de ces nouvelles menaces qui sont en mutation complexe et où parfois le champ universitaire vient nourrir la pratique et où nos pratiques peuvent se nourrir mutuellement.
Le second principe, c'est un principe de rayonnement. Ce collège du renseignement en Europe ne doit pas se limiter à des échanges en chambre entre hauts cadres et grands spécialistes mais bien à irriguer l'ensemble de ces acteurs dans tous les États. Des sessions de sensibilisation pourront ainsi être déployées à destination des gens de renseignement, bien sûr, mais aussi des décideurs comme des simples citoyens. La culture européenne du renseignement doit nourrir la culture du renseignement en Europe. C'est indispensable. Et c'est indispensable aussi pour que cette sensibilité au renseignement, à la matière qui est la vôtre puisse être prise en compte par nos concitoyens, nos entreprises, l'ensemble des acteurs du champ social et les décideurs. Deux principes donc et puis un horizon.
Créer un parcours de formation européen intégré pour l'ensemble des professionnels du renseignement.
Bien sûr, cela ne se fera pas en un jour. Mais imaginez que demain des cadres issus des services nationaux puissent suivre des formations dans plusieurs universités européennes et pourquoi pas un jour être placés en immersion dans des services d'autres États. Si nous réussissons cela, si nous relevons ce défi alors nous aurons gagné notre pari. Je vois encore trop souvent entre nos services des divergences de pratiques, parfois même d'analyse, qui nous affaiblissent collectivement. Comment être efficace face à telle ou telle menace, claire ou hybride, aujourd'hui, si l'analyse entre grands pays européens n'est pas tout à fait la même, la pratique pas tout à fait la même ? Ces différences, nous ne les voyons pas toujours a fortiori quand ces échanges ne se font pas mais, elles sont toujours vues par nos ennemis, nos assaillants, ceux qui poussent la menace, l'influence ou le contre renseignement de leur côté. Et nous décidons implicitement de faire, ou de ces ennemis ou de ces interlocuteurs potentiellement hostiles, les véritables arbitres de nos propres divisions. C'est pourquoi, je considère que ce pari est essentiel. Rien n'est plus important que cet enjeu de souveraineté pour l'Europe et c'est bien de cela dont il s'agit ici.
Dans le monde tel qu'il va, la souveraineté d'une puissance, la capacité d'un peuple à prendre en main son destin et à se protéger dépend de plus en plus de la qualité de ses services de renseignement. Ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre, il est fini le temps du monde bipolaire où l'ennemi était clairement identifié. Elle est finie aussi la double illusion d'une fin de l'histoire et des dividendes de la paix. Aujourd'hui, la menace est partout et votre fonction est d'éveil, de vigie, de capteur de notre temps. Il vous faut donc tout à la fois identifier les menaces existantes et développer les outils qui permettent d'y faire face et en même temps savoir anticiper ce que l’on ne sait pas encore, cette part d'incertitude irréductible qui structure notre monde. Bien sûr cela suppose que chaque État consente sa part d'effort. Et vous savez que la France s'est engagée dans un renforcement sans précédent de ses capacités humaines et technologiques tant sur le plan intérieur que sur le plan extérieur. Mais face à l'imprévisibilité de l'époque, face à des ennemis qui se multiplient qui ne sont plus seulement des Etats mais des groupes privés, face à des révolutions technologiques qui s'enchaînent et s'accélèrent, nous n'avons d'autre choix que d'unir nos forces si nous ne voulons pas dépendre demain des informations glanées par les États-Unis, la Chine ou la Russie. Nous n'avons pas d'autre choix que d'additionner nos forces si nous voulons gagner notre autonomie stratégique et finalement notre véritable souveraineté. Et sur ce domaine encore, je crois très profondément à la conjugaison positive et d'avenir entre la souveraineté nationale et la souveraineté européenne. Il ne s'agit en rien de réduire ce en quoi nous sommes chacun dans nos pays, souverains, en rien. Mais il s'agit de constater que lorsque cette souveraineté nationale se conjugue avec l'esprit de division européen, nous nous affaiblissons en nous-mêmes, avant toute chose. C'est pour cela que cette session est si importante à mes yeux, aux yeux de la France, parce qu'il s'agit d'une étape décisive vers une souveraineté européenne véritable, une étape décisive mais qui en appelle tant et tant d'autres.
Je suis convaincu que les habitudes de travail en commun que vous commencez à prendre aujourd'hui sonneront demain comme une évidence. Je suis convaincu que dans quelques années, on regardera ce jour où pour la première fois les représentants des services de renseignements d'Europe se sont tous réunis dans une même salle, non pas tellement comme un moment historique même si c'en est un, que je ne minore pas mais comme une forme d'étonnement consistant à se dire : « On a donc pu si longtemps procéder autrement ».
Ce qui commence aujourd'hui, c'est je crois une ambition commune que nous devons porter dans notre quotidien, nos pratiques et notre volonté stratégique : celle de bâtir justement cette souveraineté véritable et cette autonomie de notre Europe. Je crois donc, vous l'avez compris, dans l'importance stratégique comme dans le détail de vos travaux. Je sais combien ils seront difficiles, combien certains prendront du temps et pour autant combien ils sont nécessaires.
C'est pourquoi une nouvelle fois, je tiens à vous renouveler mes remerciements pour votre présence, pour votre engagement pionnier pour le renseignement, pour la sécurité de nos peuples et pour l'Europe.
Vive l'Europe, Vive la République et Vive la France. Merci à vous.
Les propositions d'il y a quelques mois (lors du discours de la Sorbonne) deviennent des actes concrets. Découvrez-les :
Point d’étape de l’initiative de la Sorbonne
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