9 octobre 2017 - Seul le prononcé fait foi
Déclaration conjointe avec le Haut commissaire des Nations Unies Filippo Grandi
SEUL LE PRONONCE FAIT FOI.
Mesdames et Messieurs,
Je voulais d’abord souhaiter la bienvenue et remercier ici de sa présence le HCR parce que nous avons eu, je crois, une discussion utile comme nous avons depuis plusieurs mois un partenariat utile, utile parce que les missions du HCR, c’est celles qui consistent à défendre nos valeurs et la préservation du droit d’asile et de la situation des réfugiés et parce que c’est aujourd’hui tout particulièrement une mission absolument indispensable à l’heure où plus de 65 millions de personnes sont déracinées – c’était presque la moitié il y a dix ans.
Et donc nous sommes dans un monde où la problématique des réfugiés est à la fois un devoir moral mais une réalité absolument galopante. Nous avons évoqué un instant l’ensemble des sujets d’intérêt commun et j’ai pu redire ainsi la conviction qui est la mienne et la volonté qui est la nôtre de défendre le droit d’asile, qui fait partie de nos valeurs les plus fondamentales et d’avoir une France qui est à la hauteur de celui-ci.
Ainsi le HCR sera pleinement associé aux réformes que la France a lancées et qui conduiront à des modifications législatives pour rapprocher la France et l'Allemagne en particulier sur le plan de l'organisation de l'asile et je souhaite que, à ce titre, le HCR soit pleinement consulté, puisse donner son avis.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, je souhaite qu'on accueille mieux celles et ceux qui sont en situation de demander l'asile ; je souhaite qu'on puisse accélérer les délais de traitement administratif et je crois que nous sommes parfaitement en ligne sur ce sujet, les délais aujourd'hui sont à la fois inhumains et inefficaces et ne sont bons pour personne, que nous puissions ensuite de manière beaucoup plus justement cohérente, avoir des programmes d'intégration à la langue, à la société, au travail de celles et ceux qui sont admis en statut de réfugié dans notre pays et qu'on soit aussi beaucoup plus rigoureux dans les reconduites à la frontière de celles et ceux qui n'ont pas droit à cette procédure.
C'est la philosophie que j'ai exposée il y a quelques semaines à Orléans que j'ai réaffirmée ici en particulier devant les préfets et qui est aujourd'hui progressivement mise en œuvre dans la pratique et qui donnera lieu à des modifications législatives et réglementaires dans les prochaines semaines, dispositions auxquelles sera donc pleinement associé le HCR.
De la même façon, je souhaite que ce devoir moral, cette exigence et ce souci d'efficacité que nous partageons soient pleinement intégrés aux démarches européennes, c'est ce que j'ai pu évoquer il y a quelques jours à la Sorbonne, en insistant sur la nécessité pour l'Europe de construire un espace commun de protection et de solidarité, en particulier en créant un Office européen de l'Asile qui accélère et harmonise nos procédures en mettant aussi en place un programme commun de formation et d'intégration des réfugiés.
En tout cas dès le court terme dans cette avancée européenne, je souhaite que nous puissions rapprocher nos droits et nos pratiques ; c'est la position que défendra la France dans le cadre des discussions en cours des différents textes législatifs européens et c'est la position que nous adopterons en convergeant justement avec l'Allemagne sur ce point.
Protéger, c’est aussi agir au plus près des zones de conflit en apportant d'abord un soutien financier au HCR dans les pays qui accueillent le plus de réfugiés au Proche-Orient et en Afrique et à ce titre, je souhaite que notre soutien au HCR et à l'OIM soit augmenté de 10 millions d'euros pour appuyer notamment les actions qui sont menées en Libye. La protection des réfugiés doit se faire, en effet, au plus près des zones de conflit, c'est ce que nous avons ensemble évoqué d'abord en partageant notre préoccupation commune sur le sujet de la Birmanie où le commissaire me rappelait évidemment le caractère très critique et inédit de la situation. La France à ce titre, conformément aux engagements que j'avais pris il y a quelques semaines à New York, a pris l'initiative au Conseil de Sécurité avec ses partenaires, en particulier le Royaume-Uni.
Pour ce qui est de la Libye, nous l'avons là aussi évoqué, la situation reste aujourd'hui critique ; je souhaite que le HCR puisse renforcer sa présence tout simplement parce que c'est évidemment l'intérêt de celles et ceux qui sont en situation de déplacés ou de réfugiés, mais parce que c'est aussi l'intérêt de la Libye pour sa stabilité et sa sécurité. Et à cet égard, j'ai rappelé quelle était notre philosophie d'action et notre volonté, celle qui m'avait conduit à rassembler à La Celle Saint-Cloud au mois de juillet messieurs SARRAJ et HAFTAR et ensuite à soutenir la feuille de route justement du représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies il y a quelques semaines dans le droit fil de la conférence de La Celle Saint-Cloud, celle de construire une solution politique négociée en Libye qui permettra la stabilité, un processus de stabilité institutionnelle et dans ce nouveau cadre, des élections.
Mais dans ce contexte et en attendant, il est indispensable que nous puissions avoir une approche extrêmement scrupuleuse du sujet des réfugiés et le rôle du HCR et de l'OIM est absolument indispensable dans le pays. De la même façon, le rôle du HCR est indispensable dans le cadre de ce que nous avons acté ici même le 28 août dernier avec la Libye, le Tchad le Niger, l'Italie, l'Espagne, l'Allemagne, et l’Union européenne, c'est-à-dire un processus dans lequel nous souhaitons pouvoir sur liste fermée du HCR mieux prévenir la situation depuis le Niger et le Tchad pour éviter un afflux supplémentaire de personnes en situation justement de demander l'asile ou de déplacés ou de migrants économiques, pouvoir apporter la protection la plus adaptée possible justement dans des zones stabilisées et le faire en lien direct avec le HCR.
Cette volonté demeure la nôtre, les choses progressent en ce sens, nos discussions avec le Niger et le Tchad ont permis des réalisations extrêmement concrètes ces dernières semaines ; vous avez-vous même échangé avec le président ISSOUFOU et dans les prochaines semaines nous aurons les premières opérations qui seront conduites dans ce cadre, avec une coopération dont je me félicite entre l'OFPRA et le HCR.
Enfin, nous avons évidemment évoqué la situation en Syrie et au Proche- et Moyen-Orient où là aussi le sujet, nous le savons, des réfugiés reste extrêmement critique qu'il s'agisse des réfugiés à l'intérieur de la Syrie, mais également ceux qui se trouvent au Liban, en Jordanie ou en Turquie. A cet égard, notre souhait est de rester sur la ligne qui a toujours été la nôtre que j'ai rappelée il y a une dizaine de jours lorsque le président AOUN s'est rendu à Paris : nous apporterons au sein des organisations internationales et des engagements multilatéraux auxquels nous participons toute notre aide aux pays qui ont cette charge. Je pense en particulier au Liban qui, au prorata de sa population, a une charge extrêmement importante en termes de réfugiés mais notre volonté est que les réfugiés soient pleinement protégés et nous ne soutiendrons pas des actions qui conduisent à raccompagner de manière subite des réfugiés sans que toutes les garanties soient apportées et que la stabilité politique soit assurée. C'est pourquoi, pour moi, la capacité collective que nous aurons à apporter une réponse au sujet des réfugiés dans la zone irako-syrienne, ce sera la stabilisation politique dans la durée de la Syrie.
Et ce titre, la France continue à soutenir la nécessité d'un groupe de contact qui permettra de construire la solution politique inclusive dans la durée, seul cadre dans lequel la Syrie pourra trouver une sortie de crise, c'est encore cette position que j'ai défendue ces derniers jours dans mes discussions avec messieurs POUTINE ou ERDOGAN et je considère, pour ma part, que dans cette solution politique inclusive, les réfugiés de toute la région doivent être pleinement défendus !
Les engagements pris par le passé par la France en termes de réfugiés pour accompagner le travail du HCR n'ont pas toujours été tenus et à ce titre, je veux que nous puissions dans les prochaines années, en particulier en lien avec les deux principales régions de conflit et de crise que je viens d'évoquer que la France puisse être au rendez-vous de manière réaliste des attentes qui sont légitimes à son endroit. Dans les deux prochaines années, la France offrira 10 000 places de réinstallation avec le HCR pour des réfugiés depuis la Turquie, le Liban, la Jordanie, le Niger et le Tchad.
Et en parallèle, nous accélérerons évidemment les relocalisations de réfugiés depuis l'Italie ; nous le ferons avec un esprit à la fois d'humanité, d'exigence, celui même qui présidera à nos décisions en matière de réforme de l'asile et de l'immigration comme je l’ai évoqué il y a un instant, c'est-à-dire en organisant un accueil pour le logement, la santé, l'éducation, l'intégration mais en visant de manière très scrupuleuse à distinguer les sujets entre celles et ceux qui relèvent du droit d'asile et celles et ceux qui ne sont pas éligibles à ces procédures.
Nous y tenons l'un comme l'autre parce que c'est la condition même qui permettra dans la durée, de continuer à faire vivre l'asile et à protéger toutes celles et ceux qui sont réfugiés à travers le monde.
Je conclus sur une note d'optimisme en saluant le partenariat entre le HCR et le CIO qui a permis notamment à une équipe de réfugiés de participer aux Jeux Olympiques de Rio pour vous dire, Monsieur le Haut-Commissaire, que nous y veillerons aussi pour les Jeux Olympiques de 2024 et que, à Paris, il y aura aussi une équipe qui portera ces couleurs internationales, celles de l'humanisme qui est le nôtre et pour lequel, au quotidien, vous vous battez et pour lequel vos équipes se battent au quotidien.
Et je veux terminer ce propos en vous remerciant pour le travail qui est fait à longueur d'année et en remerciant celles et ceux qui, à vos côtés, se battent pour que ce droit soit respecté, y compris dans les régions les plus difficiles, parfois les plus dangereuses, avec beaucoup de courage, un engagement et un dévouement que je veux ici saluer.
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