16 mars 1987 - Seul le prononcé fait foi
Déclaration à la presse de M. François Mitterrand, Président de la République, à l'issue de sa visite sur la base aérienne de Strasbourg le 16 mars 1987, sur la défense européenne.
Mesdames et messieurs,
- Nous achevons quasiment cette visite en Alsace. Nous avons pu prendre part et observer une fraction des exercices qui se déroulent dans toute la France, puisque l'armée de l'air tout entière est concernée par ces manoeuvres.
- J'ai donc pu ici, et un peu plus au Nord `à Drachenbronn`, voir, écouter, constater, de quelle façon nos forces armées s'organisent pour la surveillance, la détection, pour savoir ce qui se passe à tout moment, de jour et de nuit, à longueur d'année. Cette mission de sécurité du territoire est assumée dans des conditions techniques et humaines que je crois aussi poussées qu'il est possible. C'est intéressant pour moi, comme cela l'était pour le ministre de la défense `André Giraud`, de pouvoir constater, sur place, de quelle manière nos armées veillent à la sécurité de la France.
- Chaque année, des exercices de ce type ont lieu. Ceux-ci durent onze jours. Pendant ces onze jours, notre armée de l'air, à l'exception de quelques éléments d'outre-mer, est mobilisée pour agir dans une sorte de fiction qui se rapproche le plus près possible de la réalité : tous les moyens sont mis en jeu, et les défaillances qui seraient ressenties, ici ou là, ne pourraient pas être corrigées par d'autres, puisque personne n'échappe à l'exercice `Exercice Airex`. Je pense que pour le commandement c'est une façon utile de contrôler l'-état des troupes, des matériels et la manière dont fonctionnent les liaisons, dont s'exerce le commandement. Il en va de même pour moi. Et si j'ai pu, comme cela, depuis le début de l'après-midi, participer à ces manoeuvres d'observation, j'en tirerai quelques conclusions personnelles qui, je le pense, me seront utiles pour mes propres responsabilités. Voilà, c'est donc du travail tout à fait pratique qui ne prête pas à grand discours. Est-ce qu'il y a des questions qui vous intéressent ?
- QUESTION.- (inaudible)... un an jour pour jour après le 16 mars 1986 (inaudible) ... 16 mars 1987 ?
- LE PRESIDENT.- Cela fait deux 16 mars de suite ! Et la France continue !
- QUESTION (Journaliste A2).- Le président du Conseil supérieur chiite a déclaré aujourd'hui à Beyrouth qu'il avait pris un contact sérieux ce matin avec les ravisseurs de Jean-Louis Normandin et qu'il pensait que la vie de notre reporter d'A2 serait épargnée. Croyez-vous que l'OJR entendra les différents appels à la clémence, et aujourd'hui êtes-vous moins inquiet que ces jours derniers sur le sort des sept otages français ?
- LE PRESIDENT.- Mesdames et messieurs, nous sommes ici sur un terrain militaire, pour suivre des opérations militaires, des exercices militaires, où se trouve engagée la qualité militaire de nos forces. Je ne suis pas ici pour traiter des problèmes extérieurs à ce type d'action. Vous me pardonnerez si je m'en tiens strictement au thème que nous avons choisi.\
QUESTION.- Monsieur le Président, Jacques Delors a proposé hier de parler, au cours d'un Conseil européen, pour répondre aux propositions de M. Gorbatchev concernant les euromissiles et d'autre part il a proposé également que ce Conseil européen serait pour se mettre d'accord sur les bases de la future armée européenne. Est-ce que cela veut dire que l'idée de Communauté européenne de défense pourrait éventuellement sortir d'un traité entre les Etats-Unis et l'Union soviétique sur les euromissiles ?
- LE PRESIDENT.- C'est un grand sujet. Il est à l'ordre du jour depuis longtemps, il le restera encore. M. Delors m'en a parlé, l'autre jour, quand il est venu me voir. Je suis tout à fait d'accord lorsque l'on s'interroge sur les moyens de resserrer les liens entre les pays de la Communauté, pour organiser la meilleure défense possible, compte tenu de situations très différentes dans lesquelles se trouvent les pays membres de la Communauté. L'un de ces pays est même un pays neutre. Certains sont orientés vers des préoccupations différentes de celles de leurs voisins. Puis il y a les pays dotés d'une force nucléaire et ceux qui n'en ont pas. Donc, la matière n'est pas simple.
- Mais enfin, tout ce qui peut, d'abord dans les esprits, et donc dans les volontés, ensuite dans les méthodes et dans les pratiques, organiser une meilleure efficacité, une meilleure liaison, une harmonisation des forces de pays alliés, tout cela est bon, et l'on a déjà, autour du concept d'une défense européenne, fait des progrès. Pas assez à mon gré. Mais encore faut-il épouser le terrain politique et diplomatique, tel qu'il est, un peu plus de quarante ans après la fin de la dernière guerre mondiale, qui a vu se déchirer les pays aujourd'hui associés dans la même Communauté. Donc, vive les progrès ! l'initiative de M. Delors est une bonne initiative.
- En vérité les ministres de la défense et les ministres des affaires étrangères se rencontrent souvent : entre Allemands et Français, c'est quatre fois par an £ avec les Britanniques c'était encore il y a peu £ nous avons eu une conversation de ce genre, très récemment, avec les Espagnols. C'est dire que plusieurs éléments de cette construction future se mettent déjà en place. Est-ce qu'il faudrait qu'un Conseil européen spécial se réunisse sur ce sujet ? Il appartient au Président actuel du Conseil, c'est-à-dire M. Maertens, Premier ministre belge, de savoir s'il entend convoquer les membres du Conseil. Est-ce que la France doit prendre une initiative ? Elle ne lui appartient pas présentement. Mais bien entendu, nous avons toute liberté de pensée, d'initiative et d'action, et si nous jugeons nécessaire de le faire, nous prierons le Président en titre de bien vouloir y procéder. Mais enfin il n'y a pas d'urgence, il n'y a pas de nécessité. D'autant plus tous les pays engagés dans l'Alliance `atlantique` se retrouvent, au sein de l'OTAN, de même que certains d'entre eux se retrouvent au sein de l'Union de l'Europe Occidentale `UEO`. Il y a un certain nombre de lieux où se déroulent ces conversations. Qu'il y en ait d'autres, je n'y vois pas d'inconvénient.\
QUESTION.- Monsieur le Président, les armes chimiques ont été évoquées au cours de votre visite. Est-ce qu'il est dans la volonté de l'armée de l'air, de l'armée française, de se doter elles aussi d'armes chimiques ?
- LE PRESIDENT.- C'est une volonté qui appartient au Président de la République et au gouvernement. J'ai dit, écrit, à diverses reprises, et vous me pardonnerez si je me répète : la France ne s'interdit la possession d'aucune arme que posséderaient les autres grandes puissances. Nous ne nous interdisons la possession d'aucune arme, d'aucune forme d'armes, dans la mesure, naturellement, de nos techniques et de nos moyens. Donc il n'y a d'interdit sur rien dès lors que, fusse à notre grand regret, un certain nombre de grands pays se dotent de ce type d'armes.
- Voilà ce que je voulais vous dire aujourd'hui. Je vous remercie. Nous allons maintenant rentrer à Paris.
- QUESTION.- Où en est le programme d'équipement de la FATAC en Mirage. Est-ce que son programme serait éventuellement mis en cause ?
- LE PRESIDENT.- Il y aura d'ici peu un débat à l'Assemblée nationale et la loi de programmation militaire sera soumise à l'examen des parlementaires.\
- Nous achevons quasiment cette visite en Alsace. Nous avons pu prendre part et observer une fraction des exercices qui se déroulent dans toute la France, puisque l'armée de l'air tout entière est concernée par ces manoeuvres.
- J'ai donc pu ici, et un peu plus au Nord `à Drachenbronn`, voir, écouter, constater, de quelle façon nos forces armées s'organisent pour la surveillance, la détection, pour savoir ce qui se passe à tout moment, de jour et de nuit, à longueur d'année. Cette mission de sécurité du territoire est assumée dans des conditions techniques et humaines que je crois aussi poussées qu'il est possible. C'est intéressant pour moi, comme cela l'était pour le ministre de la défense `André Giraud`, de pouvoir constater, sur place, de quelle manière nos armées veillent à la sécurité de la France.
- Chaque année, des exercices de ce type ont lieu. Ceux-ci durent onze jours. Pendant ces onze jours, notre armée de l'air, à l'exception de quelques éléments d'outre-mer, est mobilisée pour agir dans une sorte de fiction qui se rapproche le plus près possible de la réalité : tous les moyens sont mis en jeu, et les défaillances qui seraient ressenties, ici ou là, ne pourraient pas être corrigées par d'autres, puisque personne n'échappe à l'exercice `Exercice Airex`. Je pense que pour le commandement c'est une façon utile de contrôler l'-état des troupes, des matériels et la manière dont fonctionnent les liaisons, dont s'exerce le commandement. Il en va de même pour moi. Et si j'ai pu, comme cela, depuis le début de l'après-midi, participer à ces manoeuvres d'observation, j'en tirerai quelques conclusions personnelles qui, je le pense, me seront utiles pour mes propres responsabilités. Voilà, c'est donc du travail tout à fait pratique qui ne prête pas à grand discours. Est-ce qu'il y a des questions qui vous intéressent ?
- QUESTION.- (inaudible)... un an jour pour jour après le 16 mars 1986 (inaudible) ... 16 mars 1987 ?
- LE PRESIDENT.- Cela fait deux 16 mars de suite ! Et la France continue !
- QUESTION (Journaliste A2).- Le président du Conseil supérieur chiite a déclaré aujourd'hui à Beyrouth qu'il avait pris un contact sérieux ce matin avec les ravisseurs de Jean-Louis Normandin et qu'il pensait que la vie de notre reporter d'A2 serait épargnée. Croyez-vous que l'OJR entendra les différents appels à la clémence, et aujourd'hui êtes-vous moins inquiet que ces jours derniers sur le sort des sept otages français ?
- LE PRESIDENT.- Mesdames et messieurs, nous sommes ici sur un terrain militaire, pour suivre des opérations militaires, des exercices militaires, où se trouve engagée la qualité militaire de nos forces. Je ne suis pas ici pour traiter des problèmes extérieurs à ce type d'action. Vous me pardonnerez si je m'en tiens strictement au thème que nous avons choisi.\
QUESTION.- Monsieur le Président, Jacques Delors a proposé hier de parler, au cours d'un Conseil européen, pour répondre aux propositions de M. Gorbatchev concernant les euromissiles et d'autre part il a proposé également que ce Conseil européen serait pour se mettre d'accord sur les bases de la future armée européenne. Est-ce que cela veut dire que l'idée de Communauté européenne de défense pourrait éventuellement sortir d'un traité entre les Etats-Unis et l'Union soviétique sur les euromissiles ?
- LE PRESIDENT.- C'est un grand sujet. Il est à l'ordre du jour depuis longtemps, il le restera encore. M. Delors m'en a parlé, l'autre jour, quand il est venu me voir. Je suis tout à fait d'accord lorsque l'on s'interroge sur les moyens de resserrer les liens entre les pays de la Communauté, pour organiser la meilleure défense possible, compte tenu de situations très différentes dans lesquelles se trouvent les pays membres de la Communauté. L'un de ces pays est même un pays neutre. Certains sont orientés vers des préoccupations différentes de celles de leurs voisins. Puis il y a les pays dotés d'une force nucléaire et ceux qui n'en ont pas. Donc, la matière n'est pas simple.
- Mais enfin, tout ce qui peut, d'abord dans les esprits, et donc dans les volontés, ensuite dans les méthodes et dans les pratiques, organiser une meilleure efficacité, une meilleure liaison, une harmonisation des forces de pays alliés, tout cela est bon, et l'on a déjà, autour du concept d'une défense européenne, fait des progrès. Pas assez à mon gré. Mais encore faut-il épouser le terrain politique et diplomatique, tel qu'il est, un peu plus de quarante ans après la fin de la dernière guerre mondiale, qui a vu se déchirer les pays aujourd'hui associés dans la même Communauté. Donc, vive les progrès ! l'initiative de M. Delors est une bonne initiative.
- En vérité les ministres de la défense et les ministres des affaires étrangères se rencontrent souvent : entre Allemands et Français, c'est quatre fois par an £ avec les Britanniques c'était encore il y a peu £ nous avons eu une conversation de ce genre, très récemment, avec les Espagnols. C'est dire que plusieurs éléments de cette construction future se mettent déjà en place. Est-ce qu'il faudrait qu'un Conseil européen spécial se réunisse sur ce sujet ? Il appartient au Président actuel du Conseil, c'est-à-dire M. Maertens, Premier ministre belge, de savoir s'il entend convoquer les membres du Conseil. Est-ce que la France doit prendre une initiative ? Elle ne lui appartient pas présentement. Mais bien entendu, nous avons toute liberté de pensée, d'initiative et d'action, et si nous jugeons nécessaire de le faire, nous prierons le Président en titre de bien vouloir y procéder. Mais enfin il n'y a pas d'urgence, il n'y a pas de nécessité. D'autant plus tous les pays engagés dans l'Alliance `atlantique` se retrouvent, au sein de l'OTAN, de même que certains d'entre eux se retrouvent au sein de l'Union de l'Europe Occidentale `UEO`. Il y a un certain nombre de lieux où se déroulent ces conversations. Qu'il y en ait d'autres, je n'y vois pas d'inconvénient.\
QUESTION.- Monsieur le Président, les armes chimiques ont été évoquées au cours de votre visite. Est-ce qu'il est dans la volonté de l'armée de l'air, de l'armée française, de se doter elles aussi d'armes chimiques ?
- LE PRESIDENT.- C'est une volonté qui appartient au Président de la République et au gouvernement. J'ai dit, écrit, à diverses reprises, et vous me pardonnerez si je me répète : la France ne s'interdit la possession d'aucune arme que posséderaient les autres grandes puissances. Nous ne nous interdisons la possession d'aucune arme, d'aucune forme d'armes, dans la mesure, naturellement, de nos techniques et de nos moyens. Donc il n'y a d'interdit sur rien dès lors que, fusse à notre grand regret, un certain nombre de grands pays se dotent de ce type d'armes.
- Voilà ce que je voulais vous dire aujourd'hui. Je vous remercie. Nous allons maintenant rentrer à Paris.
- QUESTION.- Où en est le programme d'équipement de la FATAC en Mirage. Est-ce que son programme serait éventuellement mis en cause ?
- LE PRESIDENT.- Il y aura d'ici peu un débat à l'Assemblée nationale et la loi de programmation militaire sera soumise à l'examen des parlementaires.\