Dans le cadre de la Semaine mondiale de la vaccination, le Président Emmanuel Macron a accueilli le Forum mondial pour la souveraineté et l’innovation vaccinales ce jeudi, au Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.
Ce Forum, coorganisé avec l’Union africaine (UA) et l’Alliance du vaccin (GAVI), a réuni des chefs d'État et des ministres venus de tous les continents, ainsi que de représentants de la société civile et des laboratoires pharmaceutiques et instituts de recherche.
La France, qui co-préside ce Forum, a déjà investi plus de 300 millions d'euros depuis 2020 pour financer les capacités de production locales de vaccins, la recherche et le développement, les capacités réglementaires et la formation des professionnels.
Afin de renforcer la souveraineté sanitaire du continent africain, qui ne produit que 0,2% de l'offre mondiale de vaccins, le Président de la République a annoncé :
- Le lancement de l'AVMA (L’Accélérateur de production de vaccins en Afrique) : un fonds doté de plus de 1,1 milliard de dollars pour créer un marché africain du vaccin ;
- Le lancement du cycle de reconstitution des ressources de l’Alliance du Vaccin (GAVI) pour la période 2026-2030 ;
- 10 millions d’euros pour le soutien à la production de vaccins contre le choléra produits en Afrique
- L'adhésion de la France à l’International Vaccine Institute, qui développe, teste et déploie des vaccins contre les maladies infectieuses affectant principalement les populations des pays en voie de développement.
Revoir l'intervention du Président :
20 juin 2024 - Seul le prononcé fait foi
Discours du Président de la République à l’occasion du Forum mondial pour l’innovation et la souveraineté vaccinales.
Messieurs les Présidents de la République du Botswana, du Ghana, du Rwanda, et du Sénégal.
Monsieur le Président de la Commission de l'Union Africaine, cher Moussa FAKI,
Monsieur le Président BARROSO,
Mesdames et Messieurs les dirigeants d'organisations internationales,
Madame la Commissaire,
Mesdames et Messieurs les ministres et les ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs les dirigeants d'entreprises pharmaceutiques, de laboratoires de recherche, et agents de CDC Africa,
Mesdames et Messieurs les représentants de la société civile engagés pour la santé mondiale,
Chers amis,
Je suis très heureux et très fier du chemin collectif que nous avons engagé ensemble ces dernières années pour œuvrer que la santé soit une priorité internationale. Parce que, d'abord, c'est un enjeu vital et collectif. Protéger les autres, c'est nous protéger nous-mêmes, et c'est un travail de conviction, qu'on a souvent fait à l'égard des pays les plus riches. C'est un partenariat véritable au sens propre du terme, ce n'est pas une aide, parce que si on ne protège pas les continents qui sont touchés par les débuts de pandémie, c'est le monde entier qui est touché. Parce que la santé est un droit fondamental et c'est un enjeu d'équité et de progrès, un enjeu d’égalité aussi entre les femmes et les hommes. La santé est un enjeu de souveraineté, au cœur de ce partenariat, vous l'avez évoqué à l'instant, entre l'Afrique et l'Europe, que nous avons réaffirmée lors du dernier sommet entre l'Union africaine et l'Union européenne. La santé mondiale est devenue géopolitique et la coopération en matière de santé est une preuve de confiance mutuelle.
Ce combat pour la santé mondiale est exigeant et je veux ici vous dire que la France l'assume et en est fière. Fière que la contribution de la France à la solidarité internationale ait augmenté de 50 % en 7 ans avec un fort accent sur la santé. Fier de préserver un outil comme le Fonds de solidarité pour le développement et le lien si symbolique entre les prélèvements sur les flux de la mondialisation, comme les billets d'avion et les transactions financières, et le financement de la solidarité internationale. Je veux ici dire que ce lien sera préservé envers et contre tout. Et nous pouvons être fiers ensemble du chemin accompli avec l'exemple de l'Alliance du vaccin GAVI, 1 milliard d'enfants vaccinés, avec ce travail qui est fait en synergie entre GAVI, Unitaid, l'OMS et l'ensemble des organisations qui contribuent à cet effort.
Quand certains sont tentés par le repli, quand certains considèrent que, au fond, aider l'Afrique ou d'autres continents sur ce sujet serait superflu et une source d'économie possible, je redis avec force que notre conviction est au contraire que ce partenariat équilibré est essentiel pour le continent africain et pour la compréhension de ce qu'est l'ordre du monde contemporain. Alors, tout ça a beaucoup évolué ces dernières années, et je me souviens avec vous qui êtes là, présents aujourd'hui, de la période de Covid. Dès les premières semaines, j'étais à vos côtés. Vous m'aviez invité à un bureau de l'Union africaine. Le président Kagamé était là. Je crois que le Président Nana AKUFO-ADDO aussi, évidemment, autour de Moussa FAKI, le président RAMAPHOSA et quelques autres. Nous étions au début de cette épidémie qui nous touche tous.
C’est comme ça que nous avons commencé à inventer cette initiative, COVAX, qui ensuite a été portée par le G20. Mais elle fait vraiment partie de l'Union africaine et de ce dialogue que nous avons eu les uns et les autres. Durant la pandémie, nous avons mis en place des mécanismes de solidarité qui n'existaient pas. Transfert de doses, Initiative aussi pour avoir des tests, pour déployer les vaccins dès qu'ils ont été disponibles. Néanmoins, on a vu les limites de cette solidarité. On les a tous vus et de manière très simple, c'est que quand les pays les plus riches ont été touchés, ils ont privilégié leurs populations sur cette solidarité. Et même si on avait mis en place ces mécanismes, ce financement supplémentaire. Et ne l'aurions-nous pas fait, la situation aurait été terrible. On a vu certaines limites. D'abord, quand on avait désinvesti pendant tant d'années sur les systèmes de santé primaires dans beaucoup de pays, c'était trop tard pour aller vacciner. Puis, on a vu l'autre limite, c'est que quand ça devenait difficile et qu'il manquait des doses, les pays producteurs d'abord, des premières composantes, les gardaient pour eux. L'Europe l'a vécu, parce qu'on était dépendant de certains autres. Et puis, où que l'on soit, on gardait nos doses avant de les distribuer.
Le continent africain, qui représentait 20 % des besoins et qui ne produit que 2 % des doses de vaccins dans le monde, a vu l'injustice criante et a dit : non, on veut bien de votre solidarité pendant un temps mais le cœur de la priorité, c'est qu'on puisse produire. Et on a commencé, pendant les mois qui ont suivi, on s'en souvient, à développer des capacités de production en s'appuyant sur l'Institut Pasteur à Dakar, en allant développer des productions des capacités qui n'existaient pas à Kigali ou en allant justement aussi en Afrique du Sud, développer avec des partenariats des capacités nouvelles. Nous avons commencé, ce faisant ce travail, constatant que COVAX ne suffisait pas, qu'il ne fallait pas simplement acheter, mais bien produire. Et cette quête revêt une importance singulière, je le disais. L'Afrique ne produit que 2 % des vaccins qu'elle utilise et l'objectif que nous nous sommes donnés, c'est de pouvoir produire, d'ici à 2040, 60 % de ces vaccins. La France et l'Europe accompagnent cette ambition depuis 2021, à hauteur de 1,3 milliard d'euros et il faut l'accélérer. Et vous l'avez dit à l'instant, président BARROSO, c'est le cœur même de cette initiative que nous lançons aujourd'hui.
Un engagement conjoint de l'Alliance du vaccin et de l'Union africaine, et c'est cet esprit de production par l'Union africaine et l'ensemble justement des pays membres qui est l'accélérateur de production de vaccins en Afrique et sur le sol africain. La France a choisi de réallouer 100 millions de dollars vers ce mécanisme et l'équipe Europe — madame la commissaire, merci de votre présence — assure les trois quarts de ces financements de 1,2 milliard de dollars aux côtés de nos partenaires, que je veux aussi remercier, qui se sont engagés : États-Unis, Canada, Royaume-Uni, Norvège, Japon et Fondation Gates.
C'est un mouvement global dont AVMA, cet accélérateur de production de vaccins en Afrique, sera une brique essentielle pour bâtir ce véritable marché africain du vaccin. Ce mouvement est africain, et nous sommes heureux de l'accompagner, d'en célébrer les premières étapes, mais sa force, c'est qu'il est pensé, conçu, voulu par les Africains. C'est un mouvement que la France accompagne avec plus de 300 millions d'euros investis depuis 2020 sur 4 axes. Et je veux ici les rappeler parce que c'est un tout solidaire. D'abord, les capacités de production, en soutenant en particulier les laboratoires africains Biovac et Aspen, que j'avais pu visiter à l'été 2021, et l'Institut Pasteur de Dakar. Ensuite, c'est les capacités de recherche et développement, notamment par cette initiative très ambitieuse portée avec l'OMS, et merci au docteur Tedros, et le Medicines Patent Pool, cher Charles GORE, de hub de transfert de la technologie ARN messager en Afrique du Sud, et qui rayonnent dans 15 pays sur tout le continent, avec un rôle aussi important du Rwanda. C'est, troisièmement, des capacités réglementaires, et je salue les progrès majeurs au Rwanda, au Sénégal et la future agence africaine du médicament que vous venez d'évoquer, le président FAKI. Et enfin, c'est la formation des professionnels de la chaîne des produits de santé avec un rôle clé pour l'académie de l'OMS. Je suis d'ailleurs fier de vous annoncer que la France rejoint l'International Vaccine Institute, qui trouverait toute sa place au sein de cette Académie de l'OMS à Lyon.
Pour avancer, nous aurons aussi besoin du secteur privé, et je veux ici saluer l'engagement de plusieurs entreprises, qu'il s'agisse d'EuBiologics en Corée ou de Sanofi, qui pourront nous détailler leurs annonces aujourd'hui. C'est un signal très fort de l'ambition portée par AVMA. Cet investissement dans la santé mondiale est un effort sans relâche. Si nous avons en partie rattrapé le retard dans la vaccination de routine causée par la pandémie, il y a encore beaucoup de chemin à faire pour atteindre nos objectifs d'accès équitable à l'horizon 2030, et nous le savons. C'est pourquoi nous lançons aujourd'hui à Paris, en parallèle, la campagne de mobilisation de ressources de GAVI pour 2026 à 2030. Fidèle à l'engagement historique de la France, je vous appelle tous ici à soutenir cette alliance, qui est une belle démonstration, vous l'avez rappelé, président BARROSO, de l'efficacité du multilatéralisme.
La France maintiendra son soutien à GAVI pour le cycle 2026-2030, au moins à la hauteur de son engagement précédent, de sorte à mettre en œuvre très concrètement nos priorités. Pour cela, il nous faudra continuer de raffermir notre cadre d'action collectif, celui de GAVI, mais aussi de toutes les autres initiatives de santé mondiale : le Fonds mondial, UNITAID présent ici, l’OMS, bien entendu, dans son rôle normatif et de coordination. Je pense que l'ensemble de ces agences autour de l'Organisation mondiale de la Santé jouent un rôle essentiel, et elles doivent coopérer maintenant, comme elles le font depuis tant d'années, mais renforcées encore, avec à la fois, évidemment, l'action normative et de coordination de l'OMS, mais les stratégies nationales portées et endossées par les pays. C’est tout le sens du Pacte de Paris pour les Peuples et la Planète (4P) que nous avons lancé en juillet dernier qui a aussi permis de mobiliser plus de financements pour les stratégies nationales de santé. La présence de plusieurs dirigeants africains et de plusieurs ministres du continent est essentielle pour ce sujet. La condition de la réussite, c'est que ce travail international s'appuie sur des stratégies nationales portées par les pays, ce qui est cohérent avec cette appropriation que vous venez d'évoquer, mais ce qui est aussi un des enseignements que nous avons tirés de la pandémie. S'il n'y a pas une stratégie nationale forte qui est portée par le pays, et le président AKUFO-ADDO le sait à combien, qui a défendu cette idée durant tout le long de la crise, les initiatives internationales, les milliards auxquels on s'engage ne sont pas efficaces, parce qu'ils ne sont efficaces que s'il y a une stratégie nationale forte, un système de santé primaire qui est consolidé. C’est tout le sens de l'action et du travail que nous avons beaucoup renforcé ces dernières années avec l'AFD, qui a remis beaucoup de financements sur les systèmes de santé primaires des différents pays et sur notre volonté d'accompagner ces stratégies nationales pour renforcer ces systèmes de santé primaires.
Je voudrais terminer mon propos par un mot sur la flambée mondiale de choléra, qui est, je dirais, l'illustration la plus criante, la plus cruelle de la nécessité de l'effort que nous sommes en train de conduire. En effet, le choléra frappe aujourd'hui durement la moitié de l'Afrique. Depuis quelques semaines, le territoire de Mayotte est aussi touché. Et face à l'urgence, la France est fière d'avoir été le 1er pays à répondre à l'appel de l'OMS. Je vous invite à suivre tous et toutes ici l'appel de l'Organisation mondiale de la Santé. Face à ce type de crise, notre initiative pour démultiplier les capacités de production locale prend tout son sens, parce qu'elle permet de renforcer cette souveraineté, mais aussi une rapidité de réaction. Un vaccin efficace et peu coûteux existe contre le choléra. Or, nous nous trouvons aujourd'hui face à une pénurie mondiale, car il n'y a plus qu'un seul producteur qui est loin, très loin du continent africain.
Aujourd'hui, grâce aux efforts de nos partenaires et notamment de GAVI, je suis heureux de pouvoir vous annoncer qu'une chaîne de production de vaccins contre le choléra pourra être déployée en Afrique par notre partenaire Biovac. L'outil que nous lançons aujourd'hui, AVMA, pourra à terme soutenir ces investissements de manière prioritaire, ce qui est une illustration très concrète de la pertinence de votre initiative. En première démonstration concrète de soutien, la France consacrera 10 millions d'euros pour accélérer la production de ce vaccin contre le choléra en Afrique du Sud. Alors, si vous partagez cette ambition de renvoyer le choléra au passé en soutenant ces actions d'urgence, d'investissement dans la production locale et dans la prévention de long terme, je vous invite, tous présents ici, à rejoindre cette initiative contre le choléra aux côtés de 12 pays et organisations présents ce matin dans cette pièce.
Je ne serai pas plus long, mais je veux vous remercier pour votre engagement de chaque jour, pour l'engagement des organisations et alliances que j'ai évoquées, leurs présidentes et présidents et directrices et directeurs généraux. Remercier l'OMS de son travail et dire combien le travail de l'Union africaine et des dirigeants ici présents est essentiel. Il y a tant de priorités sur le continent africain : la sécurité, la pauvreté, l'alimentation, que je sais combien la tentation serait grande de laisser à d'autres la nécessité de porter la question de la santé. Mais c'est par votre constance et votre volonté, justement, de renforcer la souveraineté africaine que ces initiatives peuvent avancer.
Je suis très fier et heureux que la France, en vous accueillant aujourd'hui, mais surtout en continuant de s'engager à vos côtés, puisse porter ce message.
Merci à toutes et tous.
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