Le Président Emmanuel Macron s'est exprimé ce dimanche à l'occasion d'une interview au 20h de TF1 et France 2.

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24 septembre 2023 - Seul le prononcé fait foi

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Interview d’Emmanuel Macron au 20h de TF1 et de France 2.

Anne-Claire COUDRAY
Bonsoir Monsieur le Président.

Emmanuel MACRON
Bonsoir. 

Anne-Claire COUDRAY
Merci beaucoup de nous recevoir après une semaine riche, une semaine chargée pour la France et pas seulement à cause de la Coupe du monde de rugby. Nous avons reçu le roi Charles III, nous avons reçu le pape à Marseille, le pape qui a interpellé nos démocraties européennes, y compris le dirigeant que vous êtes sur le drame des migrants. Quand il parle, quand il met en garde contre le fanatisme de l'indifférence. Que lui répondez-vous ?

Emmanuel MACRON
D'abord, vous venez de le dire, je voudrais commencer cet entretien en félicitant les Français parce qu'il y a peu de pays aujourd'hui dans le monde qui peuvent relever des défis concomitants de cette nature. Nous accueillons la Coupe du monde de rugby Lille, Marseille, Paris, Saint-Etienne, cette semaine, ont accueilli des matches. On a reçu le roi, la reine d'Angleterre à Paris puis Bordeaux et le pape est venu à Marseille. Et donc je veux remercier nos élus, nos bénévoles, les services de l'Etat et des collectivités qui ont rendu cela possible. On a mobilisé en particulier ce samedi près de 100 000 policiers et gendarmes. Sur les 166 unités de forces mobiles que nous avons dans le pays, toutes ont été mobilisées. On a remis les vacances. Donc tout ça arrive parce qu'il y a aussi une capacité à accueillir, à assurer la sécurité, à être exemplaire dans l'accueil. Donc, je le dis à tous nos compatriotes, grâce à cet effort collectif, vous pouvez être fiers. Et cette France qui était au rendez-vous, cette France qui sait accueillir le monde, qui s'est donné cette formidable image, c'est aussi celle que nous saurons être dans 300 jours, quand il faudra accueillir les Jeux olympiques et paralympiques. 

Laurent DELAHOUSSE
Alors, il y a le discours du pape sur les migrants et puis il y a la réalité politique française, européenne. 

Emmanuel MACRON
Oui. 

Anne-Claire COUDRAY
Est-ce que vous pouvez répondre au pape, par exemple ?

Emmanuel MACRON
Non. Le pape a raison d'appeler à ce sursaut contre l'indifférence parce qu'à chaque fois qu'on parle du sujet de l'immigration, on parle de femmes et d'hommes, il ne faut jamais l'oublier. Puis après… 

Anne-Claire COUDRAY
28 000 morts en 10 ans. Est-ce que l’Europe fait assez ? 

Emmanuel MACRON
Et j'ai eu l'occasion moi-même de le dire, mais l'Europe est le continent qui fait le plus. Et donc ce qu'il faut voir aujourd'hui, c'est que d'abord, nous, Français, nous faisons notre part. Il y a en moyenne environ 100 000 demandeurs d'asile chaque année dans notre pays. On accueille de plus en plus d'enfants. Nos départements le savent et l'Etat est à leur soutien et continuera de l'être. Je veux ici leur dire. Nous investissons et on l'a augmenté très fortement ces dernières années 2 milliards d'euros par an sur ce qu'on appelle l'hébergement d'urgence, ce qui permet de loger les sans abri de notre pays. Mais pour près de 60 %, ce sont des femmes et des hommes qui attendent un titre ou sont en situation irrégulière que nous logeons. Donc la France fait sa part. Mais il faut ce message d'universalisme. Moi, je ne suis pas indifférent et nous devons être humains, accueillir en particulier ceux qui fuient des conflits. Mais on doit aussi être rigoureux parce qu'on a un modèle social qui est généreux et on ne peut pas accueillir toute la misère du monde comme disait un ancien Premier ministre.

Laurent DELAHOUSSE
Concrètement pour les migrants de Lampedusa, combien on va en accueillir ? Et Gérald DARMANIN a parlé de ceux qui auraient et obtiendraient l'asile politique. Combien de migrants de Lampedusa vont arriver en France ? 

Emmanuel MACRON
Le ministre de l'Intérieur a eu raison de faire de distinguer la situation de migrants qui arrivent et qui ira à travers l'Europe avec des femmes et des hommes à qui on donnera des titres et qui sont en attente de l'asile, qui sont à ce moment-là des réfugiés, des gens qui… donc on instruit la situation. Qu'est-ce qui se passe d'abord à Lampedusa, ce que vous avez montré ces dernières semaines ? C'est la réalité du phénomène migratoire, il est européen. Et donc le cœur de la réponse n'existe pas en franco-français. Et moi, c’est aussi pour ça que je veux qu'on travaille avec la présidente du Conseil italien, parce qu'elle a fait un choix fort qui n'avait pas été celui, il y a quelques mois, suivie par l'Italie. 

Laurent DELAHOUSSE
C’est cette crise migratoire qui l'a amené aussi au pouvoir. 

Emmanuel MACRON
Oui, mais je note que là où il y a dans sa majorité des gens qui sont sur une réponse simpliste et nationaliste, là où il y a pu avoir, à certains moments, une Italie qui a dit : on ne prend plus les bateaux, on les renvoie chez les autres, l'Italie prend sa responsabilité et elle joue son rôle de ce qu'on appelle le premier port sûr. Nous, nous devons jouer notre rôle en européen et aider les Italiens. On ne peut pas laisser…

Anne-Claire COUDRAY
Comment ? 

Emmanuel MACRON
…les Italiens seuls. Et donc, la réponse, elle est d'ensemble, elle est européenne. Première chose. On doit, nous Européens, avoir une approche cohérente avec les pays d'origine et donc…

Laurent DELAHOUSSE
C'est-à-dire que ce n'est pas qu'une question européenne, ça veut dire que c'était une question qui relève aussi des États africains ? 

Emmanuel MACRON
En l'espace, c'est une question où l'Europe doit se regrouper, ce qu'elle n'a pas fait jusqu'alors et où on doit jouer avec les pays d'origine, et ce qu'on appelle les pays de transit. Laissez-moi vous le dire juste de manière très simple. La plupart des migrants qui sont arrivés à Lampedusa venaient d'Afrique subsaharienne avec beaucoup de pays auxquels nous envoyons beaucoup d'aide publique en développement. Et la France a augmenté cette aide. Nous sommes au rendez-vous de nos engagements. Et beaucoup de pays dans lesquels nous avons des ambassades qui délivrent des visas. Donc, nous devons en européen mieux conditionner notre aide à une politique responsable en matière migratoire et en disant « on vous aide » sur des projets pour donner des opportunités économiques 
à la population. Mais vous devez nous aider à démanteler chez vous les réseaux qui conduisent ces gens à quitter leur pays…

Laurent DELAHOUSSE
Mais jusqu'ici ça.

Emmanuel MACRON
…et surtout beaucoup mieux coopérer au retour. Ça ne fonctionne pas parce qu'on ne l'a jamais fait en vrai en européen… 

Laurent DELAHOUSSE
Et vous dites quoi à la Tunisie, en Maroc, à l’Algérie ? 

Emmanuel MACRON
J’ai essayé de le faire en franco-français. Alors ça, ce sont les pays de transit. 

Laurent DELAHOUSSE
Oui.

Emmanuel MACRON
Moi, je dis 1) Première bataille avec les pays d'origine et c'est coopératifs. Mais on doit les réengager, et ça doit faire partie de la relation de partenariat entre l'Europe et l'Afrique. La deuxième chose, ce sont les pays en effet de transit. Là, on a eu en quelques heures, en tout cas en quelques jours, plusieurs milliers de migrants qui arrivent à Lampedusa 
et qui par tous du port de Sfax. 

Anne-Claire COUDRAY
En Tunisie.

Emmanuel MACRON
Je souhaite qu'on engage avec la Tunisie en européen, là aussi, une politique responsable. On vous aide budgétairement. Et là-dessus, l'Italie et la France sont d'accord ensemble, je souhaite qu'on obtienne un accord européen. Il se trouve qu'on va beaucoup parler d'immigration parce que nous avons... 

Emmanuel MACRON
Attendez, je vais au bout, c'est essentiel. Et deuxième chose, moi je veux qu'on leur propose d'embarquer des études, des experts, des matériels, etc sur leurs côtes pour démanteler ces passeurs. Et c'est  un partenariat respectueux. Il se trouve que c'est ce qu'ont fait nous avec les Britanniques. On accepte d'avoir des experts britanniques à Calais pour nous aider à démanteler ces réseaux de passeurs et on a de très bons résultats. On va proposer la même chose aux États de transit dans la rive sud de la Méditerranée parce que la clé, c'est qu'on doit mieux protéger nos frontières. Et donc doit…

Anne-Claire COUDRAY
La Libye, par exemple, est-ce que vous serez en mesure d’envoyer des équipes ? 

Emmanuel MACRON
Exactement, et aussi, et nous l'avons fait par le passé.

Anne-Claire COUDRAY
Dans un pays qui est politiquement très… 

Emmanuel MACRON
Il y a quelques années, nous avons su le faire en formant des gardes-côtes libyens en équipant mieux. Et donc je veux proposer à la présidente du Conseil italien et convaincre les autres Européens et la Commission de mettre plus de moyens dans ces pays de transit, de leur proposer des partenariats pour éviter les départs, parce que c'est là que les gens prennent tous les risques en Méditerranée, vous l'avez dit, c'est ce que dénonçait le pape. Ensuite… 

Anne-Claire COUDRAY
On va parler [inaudible].

Emmanuel MACRON
Ensuite, il faut aller, c’est un tout. Ensuite, quand on arrive, on doit avoir une politique européenne et c'est là aussi où on va aider l'Italie. Quand les migrants arrivent à Lampedusa, il faut que l'Europe aide à enregistrer des situations et donc ça c'est un investissement de l'Europe tout entière. 

Anne-Claire COUDRAY
On a vu que… 

Emmanuel MACRON
Et puis après…

Anne-Claire COUDRAY
Lampedusa avait été totalement débordée.

Emmanuel MACRON
On va peut-être y venir, mais il y a une réforme nationale. 

Laurent DELAHOUSSE
On ne saura pas combien de migrants vont être accueillis en France.

Emmanuel MACRON
Nous, on en a accueilli plusieurs dizaines de milliers ces dernières années. Mais c’est très peu.

Laurent DELAHOUSSE
Mais on va continuer à le faire. 

Anne-Claire COUDRAY
Pas en relocalisation de l'Italie.

Emmanuel MACRON
En relocalisation et aussi de l'Italie. Mais la clé de tout ça, c'est qu'on ait cette politique que j'évoque. L'efficacité est européenne et l'efficacité par le changement de notre organisation. Et puis, à côté de ça, en effet, on doit changer des choses chez nous en France. 

Anne-Claire COUDRAY
Alors justement, le Sénat va étudier une loi sur l'immigration dont la mesure principale qui fait débat, en tout cas, c'est la régularisation des travailleurs clandestins qui sont déjà en France sur des métiers en tension : le bâtiment, la restauration et même les hôpitaux et les professions médicales. La droite n'en veut absolument pas. Est-ce que vous maintenez cette mesure au risque de ne pas pouvoir faire voter votre loi ? 

Emmanuel MACRON
D’abord, je ne vais pas faire ici le travail du Gouvernement et du Parlement. Il faut faire une loi. Pourquoi ? Pour compléter ce qu'on a fait ces dernières années. Mais au fond, on a besoin de mettre le système français à peu près au diapason des autres Européens. On ne peut pas avoir un modèle qui est plus généreux et qui est trop lent en termes d'instruction. Donc il y a plusieurs réformes très techniques qui sont dans ce texte de loi, préparées par le gouvernement et portées par le ministre de l'Intérieur et j’y viens tout de suite…

Anne-Claire COUDRAY
Sur la régularisation des travailleurs ? 

Emmanuel MACRON
Mais le cœur de ce texte, c'est surtout d'accélérer nos procédures et d'avoir une politique plus efficace pour mieux instruire les situations et renvoyer plus efficacement dans leur pays les femmes et les hommes qui n'ont pas vocation à rester et en même temps mieux protéger les autres.

Laurent DELAHOUSSE
Aujourd'hui, 7 % d'entre eux.

Emmanuel MACRON
Bien sûr, parce que vous savez pourquoi ? Comme on a beaucoup de demandes, notre système explose malgré les moyens qu'on a remis, malgré toutes les réformes qu'on a fait, parce qu'on a changé plein de fois la loi déjà. Donc on doit aller beaucoup plus vite, réduire, comprimer les délais et avoir un modèle qui est aussi au diapason de ce que font les pays voisins. À côté de ça, il ne faut pas être hypocrite. Il y a en effet des métiers en tension qui embauchent beaucoup de femmes et d'hommes qui viennent de l'immigration et qui sont souvent en situation précaire.

Laurent DELAHOUSSE
Et depuis plusieurs années.

Emmanuel MACRON
Et depuis plusieurs années, parfois plusieurs décennies. Là-dessus, moi je souhaite qu'un compromis soit trouvé. Je pense qu'il y a un compromis intelligent, mais je veux être simple. 1) Les métiers en tension, il faut d'abord quand même essayer de faire que ce soit nos compatriotes qui y aillent. On a encore 7 % de chômage et c'est le cœur de la réforme France Travail. On ne peut pas accepter un dialogue, un discours qui consisterait à dire : c'est des gens qui sont étrangers, en situation irrégulière, qui vont occuper les métiers dans le BTP, la restauration ou autres, non. Il y a des françaises et des français qui sont au RSA, qui parfois ont la possibilité d'occuper ces emplois. Il faut les former, les aider parfois au déplacement, au relogement, mais enfin le plus tôt les accompagner sur ces métiers.

Laurent DELAHOUSSE
Justement

Emmanuel MACRON
Ensuite, il n'y a pas de droit inconditionnel à la régularisation. Il n’y en aura jamais. Il faut continuer à lutter contre les réseaux d'immigration clandestine, pénaliser les employeurs qui utilisent ces réseaux. Et après, il y a des situations très humaines. Quand vous avez des femmes et des hommes qui sont là pour travailler, qui travaillent bien, qui sont de fait intégrés, il ne faut pas les laisser dans la précarité administrative. Et donc, c'est ça ce que doit trouver ce texte. C'est du bon sens. 

Laurent DELAHOUSSE
On a beaucoup de questions ce soir. Le pouvoir d'achat qui est devenu une urgence pour beaucoup de Français. Le 15 du mois, beaucoup d'entre eux, finalement, ont beaucoup de mal à finir ses fins de mois, demandent à leur patron, parfois justement, un salaire anticipé. Face à l'inflation, comment vous allez vous débrouiller pour faire baisser ces prix auprès des distributeurs, auprès des grandes surfaces et des industriels ? Vous allez les remettre à la table pour que finalement, on arrive à baisser les prix de l'alimentaire ? C'est ce que les Français attendent. Ils ne voient que les prix augmenter depuis des mois.

Emmanuel MACRON
Vous avez raison. Alors d'abord, vous avez commencé votre question. Moi, je trouve… l'approche que je partage, c'est-à-dire que le pouvoir d'achat, c'est la rencontre d'un salaire et des prix de la vie. La première chose sur laquelle on se concentre, on va continuer de le faire, c'est créer des emplois et d'avoir des emplois qui sont de mieux en mieux payés. Depuis 2017, on a créé 2 millions d'emplois. Donc, on a beaucoup de gens qu'on a sortis d'une plus grande précarité encore. Ensuite, …

Laurent DELAHOUSSE
Avec des salaires parfois très faibles.

Emmanuel MACRON
Non, mais pardon mais avec beaucoup de contrats contrairement à ce qui est dit qui sont contestables. Ensuite,…

Laurent DELAHOUSSE
Ça veut dire qu'il faut indexer les salaires ?

Emmanuel MACRON
Non. On a un système qui fait que le SMIC, il est plus qu’indexé. Donc, depuis le début de la crise énergétique, depuis le début de l'année dernière, notre SMIC en France, il a augmenté de 11 %. C'est très peu. Il y a très peu de pays européens. D'abord, où il y a un tel salaire minimum et où il a autant augmenté. Ensuite, la dynamique salariale, elle a, à peu près, suivi l'inflation quand on regarde les choses. Donc, on va continuer le travail pour créer des emplois et aller vers le plein emploi. C'est essentiel. On va ensuite continuer d'accompagner l’augmentation salariale et c'est pour ça qu'il y a une co.nférence sociale qui va 
s'organiser début octobre ou qu’est-ce qu’on va faire

Laurent DELAHOUSSE
Donc ça veut dire que les Français, ce qu'ils entendent, ce soir, c'est qu'il y a une possibilité pour eux pour les classes moyennes, pour les plus bas salaires d’être augmentés.

Emmanuel MACRON
En fait, on va travailler avec toutes les branches qui ont encore un salaire minimum, qui est sous le SMIC légal. Et il faut en effet que dans certaines branches, les employeurs embauchent mieux, accompagnent mieux. On a aujourd'hui beaucoup de femmes et d'hommes qui sont dans des métiers, par exemple de l'aide à domicile. Ils ont une indemnité kilométrique qui ne correspond plus au vrai coût de la vie. Ils ont des taux horaire qui ne sont plus satisfaisants, C'est d'ailleurs pour ça qu'ils ont de plus en plus de mal à embaucher. 

Anne-Claire COUDRAY
Justement, vous parlez…

Emmanuel MACRON
Donc, ça c'est des négociations sociales. Et puis, il y la question des salaires, ça c'est au niveau de l'entreprise qu'il faut le faire. Je ne suis pas pour qu'on indexe tous les salaires sur les prix parce qu'à ce moment-là, on crée complètement une boucle inflationniste. Je crois au dialogue social au niveau des branches. Là, on a les problèmes identifiés. Et au niveau des entreprises, pour la question de la carrière. Ensuite,…

Anne-Claire COUDRAY
Vous parliez d’indemnité kilométrique ? Si vous le voulez bien, …

Emmanuel MACRON
Attendez, je vais répondre à la question sur l'alimentation parce que

Anne-Claire COUDRAY
Rapidement.

Emmanuel MACRON
Ça, c’est ce qu'on a fait, c'est sur les salaires, c'est très important.

Laurent DELAHOUSSE
On ne les met plus régulièrement à la table des négociations. 

Emmanuel MACRON
À côté de ça, je veux ici redire que la nation française, elle a investi des dizaines de milliards d'euros pour bloquer les prix sur l'électricité, le gaz et les aides, les chèques successifs… 

Anne-Claire COUDRAY
Alimentation, +20 % en deux ans. 

Laurent DELAHOUSSE
Mais malgré ça, les Français ont du mal.

Emmanuel MACRON
Sur l'alimentation, aujourd'hui, les gens ont du mal. Et ils ont du mal pourquoi ? Parce qu'ils sont obligés de choisir dans le caddie, parce qu'ils ont vu le prix du dentifrice, du paquet de pâtes, du bébé… du lait, pardon, ou de la poudre pour pour bébé, la poudre de lait infantile qui a augmenté. Quand on voit les prix, c'est très nettement au-dessus de l'augmentation des matières premières. Donc qu'est-ce qu'on fait ? Ce mercredi, au conseil de ministres, un texte arrive qui va nous permettre de réouvrir ce qu'on appelle les négociations commerciales. Et avec… 

Anne-Claire COUDRAY
À la fois les grandes enseignes et les industriels. 

Emmanuel MACRON
… avec les grands industriels. Parce qu'aujourd'hui, il faut être clair. Est-ce que nos agriculteurs, ils profitent de la crise ? Non. 

Laurent DELAHOUSSE
Non. 

Emmanuel MACRON
Donc nos agriculteurs, il faut... On sait tout ce qu'on a fait ces dernières années avec ce qu'on appelle EGAlim 1 et EGAlim 2. Il faut préserver le pouvoir d'achat de nos agriculteurs, il ne faut pas casser les prix de l'alimentation. L'alimentation, elle a un coût quand c'est justifié. Est-ce que les petits industriels de l'agroalimentaire aujourd'hui bénéficient ? Non. On a des grands groupes qui, en effet, ont fait flamber les prix de certaines de leurs marques. 

Anne-Claire COUDRAY
Qui ne jouent pas toujours le jeu. 

Emmanuel MACRON
Et donc eux, on veut les remettre autour de la table et passer plus vite la baisse des prix. Parce que parfois, ils ont augmenté les prix en prenant le haut de la courbe de leurs matières premières qui remontait il y a quelques mois. Donc le Gouvernement va prendre ce texte qui passe au Conseil des ministres dès mercredi. On va remettre les 60 plus gros industriels de l'agroalimentaire derrière…

Laurent DELAHOUSSE 
On va suivre ces négociations. 

Emmanuel MACRON
… et surtout on va mettre en place… 

Laurent DELAHOUSSE
Anne-Claire.

Emmanuel MACRON
… et je vais y veiller personnellement, un accord sur la modération des marges dans tout le secteur. 

Anne-Claire COUDRAY
On parle, on continue de parler de…

Emmanuel MACRON
… c’est-à-dire qu'aujourd'hui, au fond, on a une crise sur l'alimentaire, ça pèse sur la vie de nos compatriotes. Moi, j'en ai… c'est insupportable de voir tant de nos compatriotes qui sont dans cette situation de devoir choisir des biens essentiels pour eux, pour leurs enfants, pour leur famille. Donc on doit… 

Anne-Claire COUDRAY
Ce qui pèse aussi…

Emmanuel MACRON
… personne ne doit profiter de cette crise. 

Anne-Claire COUDRAY
Ce qui pèse aussi…

Laurent DELAHOUSSE
Modérer les marges, pardon. Modérer l'image, ça veut dire quoi ? Blocage des prix ? Ça veut dire quoi ? 

Emmanuel MACRON
Non, on n'est pas dans des prix administrés. Ça veut dire que tous ceux qui font des excès… 

Laurent DELAHOUSSE
Certaines personnes de l’opposition souhaitent un blocage des prix pour que ce soit une baisse de la TVA.

Emmanuel MACRON
Ça, je vais vous dire, ça ne marche pas le blocage des prix. 

Laurent DELAHOUSSE
Pourquoi ça ne marche pas ?

Emmanuel MACRON
Parce que les prix sont plus administrés dans notre pays. Ce qui marche, c'est de remettre tout le monde autour de la table et de vérifier en y mettant des contrôleurs et de faire un accord sur la modération des marges. Parce qu'au fond, là où vous avez votre agriculteur qui vend… 

Anne-Claire COUDRAY
Est-ce que ce sera la même logique ?

Emmanuel MACRON
… et qui a une toute petite marge, il ne peut pas faire vivre sa famille sinon. Vous avez votre PME de province qui va vendre ses biscuits et qui fait à peine tourner son commerce, et à côté de ça, vous avez des grands groupes qui vous ont mis une belle augmentation sur le dentifrice et, elles, se la mettent dans la poche.

Laurent DELAHOUSSE
Anne-Claire.

Anne-Claire COUDRAY
Alors vous interpellez les industriels. Mais sur le carburant, 60 % du prix du carburant, ce sont des taxes de l'État… 

Emmanuel MACRON
Moins de 60 %, mais c'est à peu près moitié moitié. 

Anne-Claire COUDRAY
Alors est-ce que vous comptez faire quelque chose sachant que le prix du carburant a augmenté de 15 centimes par litre depuis le début juillet pour le sans plomb et cette semaine, la Première ministre… 

Laurent DELAHOUSSE
Et que la vente à perte, ça marchera. 

Anne-Claire COUDRAY
… a proposé la vente à perte, aucune enseigne ne s'en est emparé. Qu'est-ce que vous comptez faire ?

Emmanuel MACRON
Bien écouter là-dessus, d'abord, je regarde le sujet et puis on apporte des réponses concrètes, pragmatiques et pas démago. Pourquoi l'essence augmente ? Parce que le brut de pétrole augmente. On paye notre dépendance. C'est ça la réalité. Et je le dis, on va venir, j'espère, à la planification écologique et à l'écologie. 

Anne-Claire COUDRAY
Tout à fait.

Laurent DELAHOUSSE
On y arrive. 

Emmanuel MACRON
Nous ne sommes pas producteurs de pétrole. Bon. Depuis le début de l'année 2023, les prix dont le prix du baril a augmenté d'un tiers environ. 

Anne-Claire COUDRAY
Et pourquoi vous ne baissez pas les taxes ? 

Emmanuel MACRON
Mais attendez, et ça va durer et ça va durer. 

Laurent DELAHOUSSE
Donc ça veut dire qu'il faut continuer à accompagner avec une indemnité carburant. Ça veut dire qu'il faut responsabiliser tout le monde et accompagner. Mais ce que je veux dire 
par là, c'est que la raison de l'augmentation, ce ne sont pas les taxes, c'est la géopolitique internationale. C'est-à-dire que c’est…

Anne-Claire COUDRAY
Non, mais vous pourriez jouer sur ce [inaudible] 

Emmanuel MACRON 
Mais c’est la décision de l'Arabie-saoudite d'une part, qui est un gros producteur, l'accord un peu tacite avec la Russie et toutes les tensions que nous connaissons. La France va continuer de jouer. Mais je veux le dire ici, il n'y a pas de solution miracle. 

Laurent DELAHOUSSE
Les Français, ils veulent savoir si ils vont être encore accompagnés… 

Emmanuel MACRON 
Ensuite, nos taxes, elles servent à quoi ? Il y a environ 50 % de taxe sur le prix de l'essence. A quoi servent ces taxes ? Pour moitié à financer la transition écologique, c'est-à-dire à financer la rénovation des bâtiments parce qu'on a besoin d'argent public. Nous dépensons aujourd'hui dans notre budget 33 milliards d'euros pour la transition écologique. L'année prochaine, on dépensera 40 milliards d'euros. Donc, est-ce qu'on peut réduire les taxes qui permettent de le financer ? Non. Pour un quart, c'est la Sécurité sociale. Est-ce qu'on peut baisser ce qu'on met dans nos hôpitaux ? Non. Et pour un quart, ce sont les régions. Quand j'entends des présidents de région dire il faut baisser les taxes sur le carburant, faites-moi une proposition pour baisser vos budgets. 

Laurent DELAHOUSSE
Alors, monsieur le Président…

Emmanuel MACRON 
Mais je n'ai pas le sentiment qu'il me fasse une proposition là-dessus. 

Laurent DELAHOUSSE
Alors, monsieur le Président, est-ce que la solution, c'est encore d'apporter une indemnisation, d'accompagner les travailleurs ? 

Emmanuel MACRON
Alors, la solution, elle est double. Elle est… Il y a une chose sur laquelle on peut agir, c'est d'essayer là aussi qu’il y ait des marges abusives qui se fassent sur le raffinage. Et donc la menace de baisser le seuil de revente à perte a été brandie. Elle ne sera pas dans le texte de mercredi. On la garde comme menace. La Première Ministre va rassembler tous les acteurs de la filière cette semaine et on va leur demander de faire à prix coûtant, 
c'est-à-dire que personne ne fasse de marges et en particulier qu'on ait un système de transparence. On l'a sur l'alimentaire, on ne l'a pas assez sur le carburant. On a déjà obtenu 
d'un grand acteur français, TotalEnergies nouvel, de ne jamais dépasser 1,99 euros. On a quand même 3 500 stations-service qui sont, du coup, concernées par cette mesure. Les autres distributeurs, ils ne sont pas raffineurs comme l’est Total. Et donc pour tous les autres, on va demander aux raffineurs de nous donner la transparence, de voir là aussi où il y en a qui profitent et d'aller rechercher leurs marges. Donc ça, c’est la première chose.

Laurent DELAHOUSSE
Donc pas d’indemnité supplémentaire pour les Français travailleurs ? 

Emmanuel MACRON
Et donc prix coûtant, mécanisme de transparence, pression. Et puis à côté de ça, j'ai demandé au Gouvernement, pour le budget qui arrive, de continuer à accompagner les Françaises et les Français qui travaillent et qui ont besoin de rouler pour travailler. 

Laurent DELAHOUSSE
Donc c’est quoi qu'il en coûte. Enfin, effectivement. 

Emmanuel MACRON
Non, pas du tout. On est sorti de cette logique. 

Laurent DELAHOUSSE
Ce n'est pas un chèque de plus ? Ce n'est pas un chèque de plus c’est pas quelque chose qui coûtera beaucoup d'argent ? 

Emmanuel MACRON
Non. C’est un mécanisme qui doit être limité.

Laurent DELAHOUSSE
Pour qui ? Pour les employeurs..

Emmanuel MACRON
Ça dépend de comment évolue le prix qui sera limité aux travailleurs qui ne dépassera pas…

Laurent DELAHOUSSE
Les travailleurs, c’est vaste.

Emmanuel MACRON
… Qui ne dépassera pas les ce qu'on appelle les 5 premiers déciles, c'est-à-dire 50 % des travailleurs les plus modestes 

Laurent DELAHOUSSE
Et avec un montant…

Emmanuel MACRON
Et qui sera au maximum de 100 euros. Quand on regarde ce qui est moyen, on connaît les mécanismes qu'on a déjà pu avoir. C'est 100 euros par voiture et par an, mais…

Anne-Claire COUDRAY
Monsieur le Président…

Emmanuel MACRON
C'est très limité, mais c'est beaucoup plus pertinent si je puis dire c’est-à-dire on n’aide pas les ménages qui en ont pas besoin et on n'aide pas les déplacements si je puis dire, de confort. On aide ceux qui en ont besoin pour travailler. Pour travailler parce qu'au-delà de la pression qu'on met, on ne peut pas laisser certains de nos compatriotes qui ont besoin de rouler pour travailler face à des prix qui sont durablement élevés. Par contre, je vais être clair, on sort du “Quoi qu'il en coûte”. C'est pour ça qu'on revient sur des prix du gaz et sur des prix de l'électricité où il y a des hausses qui vont se passer en 2024. Mais c'est pour ça qu'en parallèle, j'ai aussi été très clair avec le Gouvernement, il ne doit pas y avoir d'augmentation d'impôts. On va continuer les baisses d’impôts…

Laurent DELAHOUSSE
L'écologie avec Anne-Claire.

Emmanuel MACRON
… Depuis 5 ans. Et ça, je vais ici aussi dire parce que j'ai beaucoup entendu dans les titres de ces dernières semaines. Quand vous avez votre taxe foncière qui augmente, ce n'est pas le gouvernement, ce n'est pas le gouvernement. C'est votre commune qui le décide. Et c'est un scandale quand j'entends des élus qui osent dire que c'est la faute du gouvernement. Ces 6 dernières années, on a baissé les impôts de plus de 60 milliards d'euros pour nos compatriotes. On a supprimé la taxe d'habitation et la redevance télé pour nos compatriotes. C'est plusieurs centaines d'euros de gain de pouvoir d'achat. Et je le dis parce qu'on a beaucoup de maires qui ont décidé de ne pas augmenter la taxe foncière. Et c'est dur parfois pour leurs finances. Et à côté de ça, nous n'avons pas baissé les dotations des collectivités territoriales. Et donc, quand je vois des communes comme Tourcoing, comme Angers, comme d'autres qui n'ont pas augmenté d'un centime leur taxe foncière et que Paris l’a augmenté de 60 %, c’est la responsabilité des élus.

Anne-Claire COUDRAY
Il faut que nous passions à l’écologie qui est un des enjeux majeurs

Emmanuel MACRON
Mais pas du gouvernement. Le gouvernement, il doit continuer de baisser les impôts.

Anne-Claire COUDRAY
…Qui est un des enjeux majeurs des années qui viennent. 

Emmanuel MACRON
Et c’est ça aussi le pouvoir d’achat parce que j’entends beaucoup de gens…(inaudible) dans la démagogie qui disent (inaudible)

Anne-Claire COUDRAY
Mais justement, justement, on va continuer… Vous savez, le problème que nous avons avec l'écologie en France, c'est à dire que pour les Français, l'écologie et la transition énergétique, ça veut dire aussi payer plus cher sa voiture parce qu'une voiture électrique c'est plus cher qu'une voiture thermique. Ça veut dire changer sa chaudière au gaz par quelque chose qui va coûter plus cher. Votre objectif, il est gigantesque. C'est réduire de 50 % les émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030. 2030, c’est demain. Comment on fait, sur quels leviers vous pouvez jouer sans pénaliser et aggraver encore les inégalités sociales  ?

Emmanuel MACRON
Vous avez raison, c'est le défi. C'est le défi de l'ambition juste. Bon ! Moi je pense, je ne pense pas. Je suis convaincu que nous avons un chemin qui est celui de l'écologie à la française, qui n'est ni le déni parce qu'on voit beaucoup de formations politiques et surtout de voisins qui disent : on abandonne, qui rouvrent, des centrales à charbon qui disent : on abandonne nos objectifs. Ni la cure qui consiste à dire ça va être un massacre, on va faire, nos agriculteurs vont arrêter leur activité, on va fermer des sites industriels. Il y a un chemin d'écologie à la française qui est une écologie de progrès. D'abord, je veux dire aux françaises et aux français. On a fait la moitié du chemin. On a fait la moitié du chemin qu'on avait à faire et on l'a fait parce que ces 5 dernières années, on a réduit nos émissions de CO2 deux fois plus qu'on ne l'avait fait les 5 années d'avant. Et donc, vous le voyez, d'ici à 2030, il nous faut faire l'autre moitié du chemin, simplement, il faut aller deux fois plus vite.

Anne-Claire COUDRAY
Sur quels leviers ?

Emmanuel MACRON
Et donc j'avais pris des engagements en campagne. J'avais dit ; la Première Ministre va être en charge de la planification écologique. Vous aurez deux Ministres en charge, l’un de la transition écologique et de sa déclinaison avec les territoires, l’autre de la transition énergétique. C'est fait. Demain, je validerai ici même, à l’Élysée, dans un Conseil présidentiel de l'écologie, la planification qui est le fruit d'un énorme travail qui a été fait, qui touche tous les secteurs, qui a été concerté avec tous les acteurs et que nous allons ensuite décliner. 
Laurent DELAHOUSSE
Est-ce qu'on peut avoir une mesure ? D’une centrale à charbon par exemple.
Emmanuel MACRON
D'abord, ce qu'on va faire, c'est qu'on va investir massivement. Donc on va investir l'année prochaine 40 milliards d'euros sur cette transition. Et en effet, on va toucher tous les secteurs. La première chose, c'est le combat qu'on doit mener pour le pays et à l'international. On doit sortir du charbon. C'est ce qu'on appelle une énergie fossile. C'est la plus polluante et c'est la clé. Les scientifiques nous disent:  il faut que, au fond, l'humanité sorte du charbon d'ici à 2030.
Laurent DELAHOUSSE
Donc on va faire l'inverse que l'Allemagne. Nous, on va fermer nos centrales à charbon définitivement ?

Emmanuel MACRON
C'est le bon chemin. Tout autre chemin est mauvais. Et donc nous, d'ici à 2027, eh bien, qu'est-ce qu'on va faire ? Et d'ailleurs notre régulateur RTE l'a dit par un rapport récent, on a encore deux centrales à charbon qui tournent, à Cordemais et Saint-Avold. On va complètement les convertir à la biomasse, c’est-à-dire qu'au fond, là où on mettait du charbon, on va mettre le travail et le recyclage de notre agriculture et les forêts.

Anne-Claire COUDRAY
Pour les français dans leur quotidien (inaudible)…

Emmanuel MACRON
Et donc ça, c'est très clair. Donc la France sortira, elle sera parmi les premiers d'Europe à sortir du charbon. Et donc on va pouvoir continuer à produire notre énergie de manière indépendante et souveraine, mais en sortant du charbon. Première mesure très concrète de cette planification. La deuxième chose, vous l'avez évoqué, c'est qu'il faut continuer ce qu'on appelle l'électrification de nos véhicules. C'était le grand défi qui est le nôtre. Et donc on doit accompagner. Et ça, on doit le faire de manière intelligente, c’est-à-dire qu'on doit pousser nos ménages à céder les vieux diesels et les vieux véhicules thermiques, comme on dit pour aller plus vers ou de l'hybride et de l'électrique et progressivement de plus en plus de l'électrique. Mais on doit le faire en étant intelligent, c’est-à-dire en les produisant chez nous, les véhicules et les batteries.

Laurent DELAHOUSSE
Ça veut dire, il faut avoir les moyens pour le faire aussi parfois...

Emmanuel MACRON
Oui… 

Laurent DELAHOUSSE
… changer de voiture.

Emmanuel MACRON
… mais je vais vous dire. Ce qui est très important pour nos Français, c'est qu'on est attachés à la bagnole, on aime la bagnole et moi, je l'adore. Mais la voiture dans notre pays, il faut le dire, ça a été de la restructuration industrielle ces 20 dernières années, on a perdu beaucoup d'emplois. Et aujourd'hui, on produit à peu près, je parle de mémoire, entre 1 million et 1,5 million de véhicules sur notre sol. Ce que nous avons fait ces dernières années, c'est qu'on a relocalisé grâce à l'écologie. Et donc nous sommes en train de reproduire des véhicules électriques sur le sol français.

Laurent DELAHOUSSE
Puisque ces véhicules électriques avant, ils étaient chinois.

Emmanuel MACRON
Non, parce qu'en fait, avant, on les produisait beaucoup moins. 

Laurent DELAHOUSSE
Oui. Ce qui étaient achetés, ils étaient chinois.

Emmanuel MACRON
Ils sont encore chinois, beaucoup trop. Mais d'abord… 

Laurent DELAHOUSSE
Alors comment on incite qu’ils achètent des produits européens. 

Emmanuel MACRON
… on ne les produisaient pas du tout chez nous. 

Laurent DELAHOUSSE
Donc pour qu’ils achètent à prix européens aussi. 

Emmanuel MACRON
… comme ils sont à plus haute valeur ajoutée, on peut les produire en France. Donc d'ici à la fin du quinquennat, on aura au moins 1 million de véhicules électriques qu'on produit. Ça veut dire qu'on ré-industrialise par l'écologie. Ensuite, il y a 5 ans, quand je parlais aux constructeurs, ils me disaient : Malheureux, n’allez pas trop vite sur l'électrique, on ne produit pas une seule batterie. On ouvre 4 très grandes usines de batteries électriques en France en ce moment même. Et toute cette vallée électrique qui ira de Douai à Dunkerque, c'est des dizaines de milliers d'emplois industriels qui vont être créés dans les prochaines années grâce à ça. 

Anne-Claire COUDRAY
Une question internationale.

Emmanuel MACRON
Donc ça c'est sur les véhicules. Et ensuite, il faut accompagner les ménages. Qu'est-ce qu'on fait ? Notre fameux bonus-malus. Donc on encourage et on allège le coût du véhicule électrique. Et d'ici à la fin de l'année, on va mieux accompagner encore de ménages, on va finaliser ce leasing que j'avais promis. C'est-à-dire qu'on va à la fin de l'année mettre en place un système au fond, à horizon d'environ 100 euros par mois, on va permettre à des ménages d'acheter des véhicules produits en Europe, électriques qu’ils vont pouvoir amortir. Mais ça marche. Et si vous voulez, par rapport au débat sur le pouvoir d'achat qu'on vient d'avoir, l'écologie est la réponse. Ici même, vous savez, à l'Elysée, il y a 5 ans, quand j'ai été élu, on avait deux centrales. Je vous parle très concrètement parce que l'État doit être exemplaire. On avait deux chaudières au fioul. On les a passées toutes les deux d'abord au gaz, c'est la bonne transition. Ensuite, on a mis en place un système de géothermie. Grâce à ça, on est en train de se passer d'une de ces deux chaudières. Et d'ici à 2024, on va pouvoir faire le froid et le chaud grâce à la géothermie. Bilan des courses: on aura réduit de 80 % les émissions. On aura divisé par 3 la facture. Et en moins de 5 ans, on aura fait un investissement rentable. C'est ce qu'on doit faire partout. Simplement, qu’est-ce qu'il faut faire ? Il faut accompagner les ménages les plus modestes.

Laurent DELAHOUSSE
Accompagner, parce que pour les Français, changer une chaudière, parfois, c'est 15 000 euros et c’est compliqué.

Emmanuel MACRON
Bien sûr. Et c'est pour ça que, par exemple, sur les chaudières…

Anne-Claire COUDRAY
C’est ça. C’est plus compliqué que pour [inaudible] .

Emmanuel MACRON
Mais non, mais je vous l'assure. Non, non, mais il faut le faire pour tout le monde parce que c'est rentable. Mais il faut que ce chemin-là, on l'écrase. Mais pour les entreprises, c'est ce qu'il faut faire. Pour les ménages, je vais être très clair: on est sorti des chaudières au fuel nouvelles, on n’en installe plus. On a tenu ça. Sur les chaudières au gaz, je me suis beaucoup poser la question.

Anne-Claire COUDRAY
D'interdire ? 

Emmanuel MACRON
On n'interdira pas, parce qu'on ne peut pas justement laisser nos compatriotes, en particulier dans les zones les plus rurales, sans solution. Par contre, qu'est-ce qu'on va faire ? On va développer les pompes à chaleur et accompagner les ménages pour s'équiper de pompes à chaleur. Parce que les pompes à chaleur, c'est intelligent, ça fait des économies d'énergie, ça réduit très fortement les émissions et on va produire en France ces pompes à chaleur, on va en produire, on va tripler la production. Donc c'est tout ça la planification écologique.

Anne-Claire COUDRAY
Une question internationale si vous le permettez. Le Niger. La France depuis deux mois, est dans une situation quasiment intenable. Notre ambassadeur ne peut plus sortir de l'ambassade. Nos 1 500 militaires ne peuvent plus sortir de leur base. Combien de temps ça peut durer ? 

Emmanuel MACRON
Ecoutez, d'abord, nous sommes au Niger parce que, à la demande des pays de la région, nous avons été lutter contre le terrorisme. Et quand je vous parle aujourd'hui de cette question, je pense à tous nos soldats qui sont morts au Sahel pour la paix de cette région et pour lutter contre le terrorisme. Nous avons été, à la demande du Burkina Faso, du Mali, du Niger sur leur sol pour mener cette guerre. Et Barkhane, cette opération militaire est un succès parce que sans celle-ci. La plupart de ces pays auraient déjà été pris par des khalifa territoriaux et des Djihadistes.

Anne-Claire COUDRAY
Ils nous ont demandé de partir depuis et la situation a régressé.

Emmanuel MACRON
Non mais ces pays ont été frappés par des coups d'État. Est-ce que c'est la faute de nos militaires ou de la France ? Non. Il n'y a plus de Françafrique. Donc quand il y a des coups d'État, nous, on n'interfère pas dans la vie politique des pays.

Laurent DELAHOUSSE
Cela veut dire qu'on ne reste pas là-bas ? 

Emmanuel MACRON
Contrairement à ce qu’il dit. Mais j'ai eu cet après-midi le président Bazoum parce que la seule autorité légitime du Niger, c'est le président Bazoum, qui a été élu par son peuple et qui aujourd'hui est détenu en otage et l'objet de ce coup d'État parce qu'il menait des réformes courageuses et parce qu'il y a au fond des règlements de compte largement ethniques et beaucoup de lâcheté politique. Je l'ai dit au président BAZOUM. Et donc la France a décidé de ramener son ambassadeur et donc dans les prochaines heures, notre ambassadeur, avec plusieurs diplomates, rentreront en France et nous mettons fin à notre coopération militaire avec les autorités de fait du Niger car elles ne veulent plus lutter contre le terrorisme.

Laurent DELAHOUSSE
C'est donc la fin de la présence française militaire au Niger ?

Emmanuel MACRON
Elle sera organisée dans le temps dans les semaines à venir. Mais c'est la fin de cette coopération parce que nous ne sommes pas là pour participer à la vie politique, pour être les otages en quelque sorte de putschistes. Mais je vais être très clair. On le voit déjà aujourd’hui au Mali.

Anne-Claire COUDRAY
Ces soldats-là, ils vont rentrer quand ?

Emmanuel MACRON
Ils vont rentrer de ordonnée dans les semaines et les mois qui viennent. Et là, nous concerterons avec les putschistes parce que nous voulons que cela se fasse dans le calme.

Anne-Claire COUDRAY
Mais d’ici la fin de l’année.

Emmanuel MACRON
Mais d'ici la fin de l'année. Nous continuerons d'accompagner le continent africain pour lutter contre le terrorisme.

Laurent DELAHOUSSE
Ça veut dire que si on part, ça ne veut pas dire qu’on ne reviendra pas ?

Emmanuel MACRON
Nous ne le faisons pas

Anne-Claire COUDRAY
En termes de renseignement ?

Emmanuel MACRON
Mais nous ne le faisons que si c'est à la demande des pouvoirs démocratiquement élus et des autorités régionales.

Laurent DELAHOUSSE
Fin 2023, il n’y aura plus de militaires français au Niger.

Emmanuel MACRON
Au Niger. Tout à fait. Par contre, nous continuerons d'être engagés partout où les États africains nous demandent de la coopération. 

Laurent DELAHOUSSE
Oui.

Emmanuel MACRON
Avec un agenda clair. Nous, on n'est pas là pour participer à des coups d'État ou interférer. On est là pour lutter contre le terrorisme. Mais je vous le dis, les putschistes sont les amis du désordre. Regardez aujourd'hui : le Mali, chaque jour a des dizaines de morts. Au moment où je vous parle, il y a plus de morts liés au terrorisme islamiste au Niger depuis le début de ce coup d'État qu'il n'y en a eu dans les 18 mois précédents. Et donc, moi, je suis très inquiet par cette région. Je pense que la France, parfois seule, a pris toutes ses responsabilités grâce à nos militaires et je suis fier d'eux et nous devons être fiers d'eux car cette opération a été un succès.

Laurent DELAHOUSSE
Monsieur le Président.

Emmanuel MACRON
Nous ne sommes pas responsables de la vie politique de ces pays et on doit en tirer les conséquences.

Laurent DELAHOUSSE
C'est une question sur notre conflit au cœur de l'Europe qui oppose l'Arménie aux Azéris. Est(ce que vous confirmez le soutien de la France au peuple arménien ? Beaucoup de Français d'origine arménienne vous écoutent ce soir et s'inquiètent et s'interrogent. Si vous apportez votre soutien, il ne sera que verbal. Sous quelle forme on peut soutenir les Arméniens ?

Emmanuel MACRON
Il est inconditionnel, il est entier et il est constant depuis le début et ils le savent. Ces derniers jours, nous avons vécu des crimes inacceptables et des opérations de guerre en Nagorny Karabakh, c’est-à-dire dans cette région qui a été reprise par l'Azerbaïdjan à l'automne hiver 2020 dans des conditions terribles et où le droit des minorités, et en particulier de plusieurs chrétiens qui vivent là-bas, de population d'origine arménienne qui vivent sur ce sol, ont été complètement bafoués.

Laurent DELAHOUSSE
Comment faire pour empêcher que ça continue et que ça se prolonge ? 

Emmanuel MACRON
Premièrement, nous allons et nous continuerons de nous mobiliser sur le plan humanitaire pour venir en secours des populations qui sont au Nagorny Karabakh et venir les aider sur la question alimentaire et les secours. La deuxième chose. Nous apportons un soutien politique pour que dans la seule paix durable qui peut être négociée, passé des heures de discussion entre le président de l'Azerbaïdjan et le premier ministre d'Arménie, le droit des minorités, en particulier au Nagorny Karabakh, soient respectés. Et la troisième chose. La France est aujourd'hui très vigilante à l'intégrité territoriale de l'Arménie, car c'est ça ce qui se joue. Il faut être très clair. 

Anne-Claire COUDRAY
Une question…

Emmanuel MACRON
On a aujourd'hui une Russie qui est complice de l'Azerbaïdjan, une Turquie qui a toujours été en soutien de ses manœuvres et un pouvoir qui est désinhibé et qui menace la frontière de l'Arménie. C'est ça aujourd'hui qui est en risque. La France se tiendra aux côtés du peuple arménien de manière claire et aux côtés du droit international à chaque fois.

Anne-Claire COUDRAY
Une question politique pour finir. Vous avez été réélu il y a un an. Pourtant, ils sont nombreux à penser déjà à vous remplacer. Que pensez-vous de ce bal des prétendants ? Quel regard vous portez ?

Emmanuel MACRON
Écoutez, moi, je pense à tout le travail que nous avons devant nous et à nos compatriotes qui parfois, ne savent pas comment ils finiront la semaine et on en a beaucoup parlé et je vous en remercie. Et au fond, on a fait le grand écart ce soir dans les temporalités. On est au milieu d'immenses bouleversements, mais la France est au rendez-vous. Et au rendez-vous des grands moments de son histoire, on l'a encore vu cette semaine. On sera au rendez-vous de la bataille pour le pouvoir d'achat, de la bataille pour le plein emploi, la réindustrialisation, de la bataille pour l'écologie et la biodiversité. La France, elle sera au rendez-vous de la géopolitique et du rôle qui est le sien, de la réindustrialisation, de l'école et de la santé. On n'a pas parlé d'école, mais on aurait pu parler aussi de la bataille pour nos enfants et les protéger. Parce que l'école, c'est aujourd'hui du régalien. C'est un sanctuaire qu'il faut retrouver. Et la lutte contre le harcèlement est absolument essentielle. Et je vous le dis, moi, je suis concentré à la tâche avec le Gouvernement, avec tous les élus, avec nos mères sur le terrain qui jouent un rôle essentiel avec toutes les formations politiques à l'Assemblée et au Sénat. Au moment où je vous parle, on a un tiers de nos sénateurs qui sont renouvelés. Et je veux avoir aussi un mot de respect et d'amitié démocratique et républicaine à l'égard de toutes les sénatrices et sénateurs, élus ou réélus, et puis de tous les grands électeurs qui aujourd'hui ont accompli leur devoir. Et donc, on est une démocratie stable qui avance. Moi, je suis garant de cela. Et au fond, au milieu de tous ces changements, la France est au rendez-vous et la France sera au rendez-vous. 

Laurent DELAHOUSSE
Monsieur le Président, il nous reste…

Emmanuel MACRON
Et que veulent nos compatriotes ? Ils veulent qu'on reprenne le contrôle de notre destin, le contrôle du pouvoir d'achat, le contrôle de nos finances. Et c’est ça ce qu’on veut continuer de faire, c’est ça mon travail.

Laurent DELAHOUSSE
Il nous reste juste une minute. (inaudible) nos compatriotes, vraiment que la vie politique soit beaucoup plus apaisée, qu'elle n'en finisse avec les outrances. Cette semaine encore, Fabien ROUSSEL comparait aux collaborateurs Doriot. Qu'est-ce qui arrive à la classe politique ? Et à qui profite tout cela ? Il nous reste juste quelques.

Emmanuel MACRON
Au démagogues et aux extrêmes. Et donc, je pense que — j'ai essayé de le montrer lors de ces rencontres de Saint-Denis — l'ensemble des responsables politiques de groupes représentés à l'Assemblée et au Sénat étaient avec moi. On a parlé 12 heures dans le respect. Moi, j'appelle au respect, à l'humilité, à la concorde. Ça ne veut pas dire qu'on est d'accord sur tout. Mais dans une démocratie, si on veut justement avancer de manière efficace, permet à la France, au fond, de défendre son modèle et d'être au rendez-vous, on doit lutter contre tous les excès, toutes les démagogies et toutes les violences. Elle commence, on est en verbale, elle finit dans la rue. Je suis leur ennemi.

Laurent DELAHOUSSE
Merci Monsieur le Président. Merci Anne-Claire.

Anne-Claire COUDRAY
Merci beaucoup, merci Monsieur le Président.

Emmanuel MACRON
Merci à vous. Merci à tous les deux.

Laurent DELAHOUSSE
Et merci à vous qui nous avez suivi ce soir. À très bientôt.

Emmanuel MACRON
Merci beaucoup. 

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