28 août 2023 - Seul le prononcé fait foi

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INTERVENTION DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE : 150EME ANNIVERSAIRE DE L’INSTITUT DE DROIT INTERNATIONAL.

Monsieur le Président, 
Monsieur le Secrétaire général,
Mesdames et Messieurs,

C’est un grand honneur pour la France et pour Angers, je le sais, d’accueillir cette année la session de l’Institut de droit international, à l’occasion de laquelle nous aurons l’honneur de commémorer le 150ème anniversaire de sa création. 

Depuis 1873, l’Institut apporte une contribution fondamentale au développement du droit international. C’était l’ambition de ses onze pères fondateurs, lors de sa création à Gand, alors que l’Europe se remettait d’une nouvelle guerre sanglante qui avait opposé la France et la Prusse.

Leur vision a façonné le monde qui nous entoure, des règles qui régissent l’action internationale jusqu’aux instruments multilatéraux dont nous disposons désormais dans de nombreux domaines, que ce soit le commerce, la lutte contre la drogue et le crime, etc. 

Jusqu’alors, les rapports de force prévalaient. Mais, grâce au travail passionné et à l’engagement de vos prédécesseurs, et sans doute aussi au prix du choc des deux guerres mondiales que nous avons traversées, c’est une autre vision qui a progressivement prévalu. 

Celle d’une approche humanitaire, soucieuse de créer et préserver la paix par le droit, de limiter les armes et d’encadrer les pratiques de la guerre. C’est celle du règlement pacifique des différends, pour lequel les institutions et les méthodes pertinentes ont depuis été mises en place. Cette vision a peu à peu fait évoluer le droit international vers les principes que nous connaissons aujourd’hui, reflétés dans la Charte des Nations unies. Le droit international est devenu notre langage commun, pour paraphraser Boutros Boutros-Ghali. 

Je sais le rôle essentiel que l’Institut de droit international a joué dans ce progrès. Cet engagement a d’ailleurs été reconnu par un prix Nobel de la paix au début du XXème siècle et vos travaux continuent d’avoir, encore aujourd’hui, une influence considérable dans le développement du droit international. Vous vous êtes par exemple exprimés en 2019 sur les risques liés à internet, en 2021 sur les pandémies. Vos réflexions s’inscrivent dans l’actualité avec grande pertinence. 

Or le respect du droit international est à nouveau aujourd’hui mis à l’épreuve avec violence. Et au moment où je vous parle, ce droit international existant, au-delà des réflexions nouvelles que vous produisez, est en effet bousculé par l’agression russe en Ukraine, les crimes commis dans ce contexte, qui constituent un déni fondamental d’un monde régi par la règle de droit et les valeurs universelles qui doivent nous rassembler.
Mais dans ce contexte qui pourrait être particulièrement négatif, je vois aussi des motifs d’espoir.

D’abord dans la force de notre réponse collective à cette attaque contre les fondements de notre communauté internationale. Cette réponse, nous l’avons portée au nom du droit international et de ses valeurs, et ce avec détermination. Et je le redis ici avec beaucoup de clarté, nous avons pris plusieurs résolutions très claires, qui ont été votées par l’Assemblée générale des Nations unies, à une majorité incontestable. Mais surtout nous ne devons pas laisser s’installer que la guerre en Ukraine serait une guerre régionale, qui ne concernerait que les Européens ou les occidentaux. C’est précisément une guerre qui touche la communauté internationale et qui ne saurait souffrir quelque double standard, parce qu’elle touche nos normes, nos règles, notre droit international. Et à chaque fois que nous avons voulu nous accommoder avec celui-ci, à chaque fois que les occidentaux d’ailleurs ont voulu prendre des libertés avec ce droit international, ils ont commis une erreur car ils ont justifié en quelques sortes un contre-discours ou une forme de remise en cause, de relativisme de ce droit. C’est là où un double standard peut s’immiscer, pas dans ce que nous sommes en train de faire aujourd’hui.

De même, je tiens à saluer la mobilisation absolument inédite de l’ensemble de la communauté des juristes, notamment au sein des juridictions internationales, pour défendre les institutions, les règles et les logiques du droit international. En effet, la lutte contre toute forme d’impunité, contre tout déni de droit, est absolument essentielle. Plusieurs ONG l’ont défendue, plusieurs d’entre vous et vos collègues l’ont porté.

Vous pourrez toujours compter sur la France, qui a toujours cru et œuvré à la consolidation du droit international. Notre mobilisation pour la justice internationale, pour l’autorité des jugements de la Cour internationale de justice, pour l’affirmation de la Cour pénale internationale en sont une illustration. Notre engagement aux côtés de l’Ukraine, que ce soit pour recueillir les preuves des crimes dont sa population est victime ou pour y consolider le droit et son système judiciaire, le montre également. 

Si le cas de l’Ukraine nous préoccupe tous aujourd’hui par sa dimension fondamentale, notre mobilisation est constante et nous engage sur tous les continents. J’aurai l’occasion de rappeler, demain, dans mon discours à la Conférence des ambassadrices et des ambassadeurs, l’importance pour la France du respect du droit international et des valeurs universelles partout dans le monde.

Je vois donc une très grande convergence entre les idéaux que l’Institut de droit international porte depuis 150 ans et la vision de la France. A ce titre, je vous remercie d’avoir choisi notre pays pour cet important anniversaire.

J’y vois aussi le signe de l’engagement, de votre reconnaissance pour le professeur Pellet que nous admirons tous. 

Je vous souhaite d’excellents travaux tout au long de la semaine, la communauté internationale compte sur votre engagement, qui continue, 150 ans après, à faire rayonner les idéaux de Gand, qui sont nos idéaux. Et plus encore aujourd’hui qu’hier. Sachez que vous pouvez compter sur la France pour les porter à vos côtés et n’accepter aucune forme d’accommodement, de concession ou de relativisme. C’est notre socle. 

Je vous remercie. 
 

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