La disparition de Bernard Lapasset, mardi 2 mai, laisse un immense vide, à proportion de son rôle dans la vie sportive de notre nation, et de sa personnalité exceptionnelle. Dirigeant de la Fédération française de rugby (1991-2008) puis de la Fédération internationale (2008-2016), artisan du succès de l’obtention des Jeux olympiques et paralympiques de Paris en 2024, Bernard Lapasset figurait les valeurs du sport à leur meilleur : authenticité, humanité, partage et ambition.

Né le 20 octobre 1947 à Tarbes, fils d’un maire de la ville, Bernard Lapasset s’inscrivit d’abord dans une tradition familiale d’engagement et de service. Après des études à Bordeaux, major de l’école des douanes en 1969, il devint haut-fonctionnaire, jusqu’à atteindre le poste de directeur interrégional des douanes et droits indirects. Mais, en enfant des Hautes-Pyrénées, Bernard Lapasset grandit aussi dans l’amour du rugby. Comme sa haute-stature le prédisposait à jouer deuxième ligne, c’est à ce poste qu’il fit merveille, remportant le titre de champion de France des moins de 20 ans en 1967 avec le Sporting Union Agenais.

C’est là que Bernard Lapasset fit une rencontre qui bouleversa le cours de son existence. Car le Président du SUA s’appelait alors Albert Ferrasse, légendaire dirigeant du rugby français, président de la Fédération (1968-1991), qui prit alors ce jeune homme efficace et discret sous son aile. Bernard Lapasset devint ainsi responsable de la communication du Président, secrétaire général adjoint en 1984, puis secrétaire général en 1991. Les deux hommes, deux secondes lignes d’Agen comme joueurs, deux épicuriens intransigeants, et dans un style complémentaire, façonnèrent alors des pages majeures du rugby français. En 1991, au terme d’une élection surprise, où sa force de travail et sa rigueur firent consensus, Bernard Lapasset succéda à son mentor.

Il demeura Président de la FFR pendant dix-sept ans, à un moment charnière où le rugby entrait pleinement dans l’ère de la professionnalisation. Président en 1995 de la Fédération internationale, dans le cadre de la présidence tournante de l’International Rugby Board, Bernard Lapasset négocia la fin de la référence à l’amateurisme. En France, une ligue professionnelle vit le jour en 1998. Bernard Lapasset gouverna le rugby français avec un sens de l’efficacité et une humanité qui laissèrent une empreinte durable sur toute une génération de dirigeants, d’entraîneurs et de joueurs. Sur les terrains, ses choix pour mener le XV de France, tant de Pierre Berbizier, Jean-Claude Skrela que de Bernard Laporte premier sélectionneur qui n’était pas un ancien international, enrichirent le palmarès national de plusieurs Tournois des Six Nations dont 4 Grand Chelem, et une finale de Coupe du monde (1999). Surtout, Bernard Lapasset obtint l’organisation de cette même Coupe du monde en France en 2007.

Marchant une nouvelle fois sur les pas d’Albert Ferrasse, premier président français de la Fédération internationale de rugby, Bernard Lapasset fut élu à la tête de l’IRB en 2008. Ses qualités de dialogue lui permirent de nouer des liens par-delà les frontières, à l’âge d’un rugby mondialisé. Il ouvrit le rugby vers de nouveaux horizons, avec notamment un Mondial organisé pour la première fois sur le continent asiatique, au Japon.

Après deux mandats, Bernard Lapasset jeta ses forces dans une nouvelle bataille, le rugby étant avant tout un sport de combat et un art de l’engagement. Il devint alors le maître d’œuvre de la candidature de Paris pour les Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Car son expérience internationale – il avait déjà persuadé le Comité internationale olympique d’intégrer le rugby à VII au programme des JO – comme son sens de la diplomatie furent des atouts décisifs. Reprenant l’expérience de la candidature de Londres pour les JO de 2017, il enrôla l’ensemble des acteurs français, politiques et sportifs, et s’activa dans les coulisses. Dans ce match, il joua là encore deuxième ligne, dans l’ombre mais indispensable, en duo avec Tony Estanguet, pour arracher une victoire collective.

Bernard Lapasset fut toujours l’homme d’une imposante allure et d’une haute stature. Très attaché à sa commune de Louit, il ne s’éloigna jamais, malgré les sollicitations de ses activités internationales, de son berceau natal. Car il était aussi un homme qui marquait par sa bienveillance et la vérité de ses engagements.

Le Président de la République et son épouse saluent la mémoire d’un meneur d’équipe et un stratège, qui, des Hautes-Pyrénées aux instances mondiales, porta avec élégance et ténacité les valeurs du sport français. Ils adressent à sa famille et à ses proches leurs condoléances émues.

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