Fait partie du dossier : L'écologie, combat du siècle.

Le Président Emmanuel Macron a participé au Congrès mondial de la nature de l'IUCN (Union internationale pour la conservation de la nature) à Marseille. 

Il a notamment annoncé que la France allait porter à 5 % les zones de protection forte en Méditerranée, soit 25 fois plus qu’aujourd’hui.

Revoir la cérémonie d'ouverture : 

3 septembre 2021 - Seul le prononcé fait foi

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CONCLUSION DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE AU CONGRÈS MONDIAL DE LA NATURE DE L’IUCN

Merci beaucoup, madame la ministre. Je voulais d’abord vous remercier pour la préparation et l’animation de cette session et remercier aussi Monique BARBU qui à nos côtés, a vraiment contribué à permettre tous ces travaux, vous pouvez l’applaudir, parce qu’elle a ardemment travaillé. Et je suis chargé de vous transmettre les salutations du Cacique RAONI qui voulait venir à nos côtés et être là et malheureusement, les conditions sanitaires, et il faut bien le dire, la fatigue l'ont tenu loin de nous, donc il a adressé un message amical et je voulais simplement être modestement son ambassadeur, et Harrison FORD et beaucoup d'autres ici, comme aussi Nicolas HULOT, ont mené tant de combats à ses côtés que je voulais le citer. 

Je suis pour ma part très fier que nous ayons, durant cette année, eu à organiser deux temps forts pour la biodiversité : le One Planet Summit biodiversité en janvier à Paris et ce Congrès de l’UICN à Marseille, qui sont deux moments où on le voit bien - parce que les gens se posent toujours des questions, « à quoi ça sert ces moments ? » - ce sont des moments où on crée des alliances et où on prend des engagements. Et donc, plus on a des éléments de mobilisation comme ceux-ci, plus on accélère en quelque sorte la marche de notre action, la capacité à avancer et à tenir le rythme parce que l'urgence est là. Ça a été rappelé, ça a été dit, l'IPBES a fait ses rapports, le GIEC aussi. Maintenant, la gravité de la situation n'est plus à documenter. 

Mais il y a une remarque introductive et qui sort de tous les échanges qu'on a eus ces dernières heures tous ensemble et que je voulais partager ici avec vous, qui me semble particulièrement forte et qui, à mes yeux, nourrit un certain espoir si on se mobilise. C’est qu’on voit bien que le climat, la nature et l'humanité sont inséparables. Et je pense que nous le mesurons beaucoup mieux, malheureusement, depuis que nous avons vécu cette pandémie de Covid-19 - parce que nous avons refait l'expérience de notre ancrage dans le vivant - ces mutations, ces transformations, les bouleversements qu'entraîne la mondialisation dans la porosité entre les écosystèmes, les conséquences qu’ont la destruction de certains écosystèmes. Alors, plusieurs initiatives ont été prises. 

Quand on a pris une initiative One Health c'est véritablement pour mettre au cœur et resynchroniser ces agendas. Mais on voit bien que tout est lié. Et vous l'avez d'ailleurs rappelé les uns et les autres. Alors, il y a un versant inquiétant de ce lien, c'est en quelque sorte que la situation de la planète étant connue, on sait qu'on ne peut pas vivre bien et en bonne santé dans une planète malade et il n'y a pas de vaccin face à une planète malade. Mauvaise nouvelle. Mais à côté de ça, s'il y a une mobilisation collective et si nous arrivons à recréer une dynamique vertueuse, un cycle vertueux, les effets accélérateurs sont là. 

A chaque fois qu'on recrée de la biodiversité, on apporte une solution au dérèglement climatique. La mangrove aide à régler les problèmes, justement de recul du trait côtier. Les posidonies dont nous avons parlé ce matin sont des puits de carbone. Et donc, le combat pour la biodiversité, il est aussi un élément qui permet de répondre aux conséquences du dérèglement climatique et d'avancer là aussi plus rapidement. Ces combats sont des combats indispensables pour non seulement la bonne santé de la planète, mais pour la survie des peuples autochtones. Et donc, se battre pour la biodiversité, contre le dérèglement climatique, c'est se battre pour ces peuples qui, pendant des siècles, parfois des millénaires, ont préservé ces espaces que la mondialisation a bousculés. 

Et donc, on le voit bien, un cercle vertueux qui existe, et ceci pour une raison simple, c'est que nous avons jusqu'alors sous-estimé aussi l'impact économique de la nature. Les services rendus par la nature c’est 1,5 fois le PIB mondial. Et les activités économiques qui dépendent directement de la nature, c'est à peu près la moitié de notre PIB. Cette aventure est inséparable. Et donc, on le voit bien, si on sait accélérer, changer d'échelle, dans la lutte contre le réchauffement climatique, la lutte pour la biodiversité et la lutte pour les peuples autochtones et la préservation de l'humanité, on a des synergies positives qui permettent d'avancer. 

Alors, face à ça, plusieurs engagements ont été pris et nous avions pris des engagements en début d'année au One Planet Summit. Je veux ici juste revenir sur quatre points rapides. D'abord, il y a la question de la protection, de la préservation des sols vivants. Nous avons pris plusieurs initiatives. Maintenant, c'est une question de mise en œuvre. Vous avez porté, madame la ministre, un texte de loi qui est en train de se décliner la lutte contre l'artificialisation des sols est de manière très concrète, le moyen d'arrêter ce grignotage progressif. Et donc, la France a pris une loi, des engagements, des chiffres, des dates et pour y parvenir aussi, des mesures d'accompagnement comme par exemple un investissement massif pour permettre de reconvertir les friches existantes, ce qui permet quand on crée de l'activité parce qu'il faut concilier toujours nos objectifs multiples, de créer de l'activité sans prendre à nouveau des espaces à la nature, mais en permettant de reconvertir des espaces qui ont déjà été artificialisés, qui sont parfois abandonnés. Cela, c'est ce que nous voulons poursuivre maintenant à l'échelle européenne avec la Commission et nos partenaires, parce que cette lutte contre l'artificialisation, nous allons la mettre au cœur de la Présidence française du Conseil de l'Union européenne. Cette préservation, ça rejoint plusieurs engagements qui ont été pris par le premier ministre grec. C'est aussi, évidemment, de protéger des espaces et donc c'est l'objectif de protection d'espaces maritimes et terrestres. 

Nous avons pris l'engagement au printemps 2019, d'avoir 30 % de protection et 10 % de protection forte. Ceci à horizon 2027, sur les 30 %, je vous le dis tout de suite, la loi est passée et nous y serons en 2022 de manière mesurable et quantifiable. Nous y serons et nous aurons mis à côté de ça les moyens pour nous assurer que ces 30 % sont bien contrôlés et vérifiés. Alors quand on parle ensuite de protection forte de là où nous nous plaçons, je suis obligé de regarder notre Méditerranée et aujourd'hui, si je regarde lucidement les choses, nous protégeons avec ce qu'on appelle « une protection forte » 0,2 %, nous Français, de notre espace. Nous n'y sommes pas. Alors, il y a une explication à ça. Notre Méditerranée est au carrefour de multiples activités et en particulier d'activités de pêche et autres et donc c'est évidemment extrêmement dur, mais on ne peut pas faire porter l'intégralité de cette protection à notre zone maritime qui ne soit pas hexagonale. C'est pourquoi, après un travail ces dernières semaines, beaucoup de discussions, en particulier avec nos pêcheurs que je veux remercier, nous allons porter d'ici à 2027 ce 0,2 % de protection forte à 5 % de protection forte de notre Méditerranée en 2027, c'est-à-dire multiplier par 25 celle-ci, ce qui est un vrai changement. C'est ce qui nous permettra d'atteindre notre objectif de 10 % à 2030 en faisant le même effort et la France a une responsabilité particulière parce qu'on entend souvent dire que nous ne sommes que 1 % des émissions de CO2, c'est vrai, mais en l'espèce, nous sommes la deuxième puissance maritime mondiale. Et donc, quand la France s'engage sur ces espaces maritimes à faire du 30 % et du 10 %, cela a un impact au niveau de la planète tout entière. Et c'est un vrai effort que nous faisons tous ensemble. 

Alors, quand on parle enfin de préservation, ce premier objectif et de protection des sols vivants, il y a la question si sensible des pesticides. Sur ce sujet, le combat, nous le menons. Nous avons commencé à infléchir l'augmentation, nous sommes en train de continuer à innover, trouver des substitutions. Mais on sait combien le combat est dur, donne lieu à des controverses politiques, parfois des tensions dans notre pays. Mais est-ce qu'on va assez vite ? Non. Est-ce qu'on peut sous-estimer l'effort qu'on demande en particulier à nos agriculteurs ? Non. Parce que nos agriculteurs vivent déjà tellement mal de leurs activités, ont tellement de difficultés. Nous devons construire un chemin, une transition tous ensemble pour réussir à reprotéger nos sols, reprotéger nos activités agricoles et progressivement réduire et partout on le peut nous passer des pesticides. Alors, ça on commence. On a amplement commencé à le faire sur plusieurs pesticides que nous allons fortement réduire encore dans les prochains mois, avec deux méthodes : la recherche et donc nous continuons à investir. C'est dans le plan de relance, dans nos comptes courants, si je puis dire, et nous allons encore accroître cet effort budgétaire dans les cinq prochaines années parce qu'à chaque fois qu’on part à la recherche, on trouve des substituts non chimiques, à chaque fois que par la recherche, on crée des cépages résistants et on arrive à modifier utilement le vivant, on peut se passer de pesticides et produire en étant compétitif. Et puis, c'est accompagner nos agriculteurs, qui sont les premiers acteurs du vivant, qui sont au contact de celui-ci, qu'ils entretiennent et qui sont aussi des éléments de la préservation de nos paysages et de notre sol. C'est de les aider à sortir de la dépendance aux pesticides. Et ça, c'est un investissement. Et cet investissement, nous devons l'assumer et en plus de ce qui est prévu dans la PAC, nous avons décidé, la ministre de la Transition et ministre de l'Agriculture le portent dans le plan de relance, un plan massif pour l'accompagnement à la mécanisation, pour le plan protéines, plusieurs autres aussi le plan haies etc. Nous allons compléter ce plan de relance avec, dans le cadre de France 2030, un plan massif d'investissements pour accompagner nos agriculteurs. Je veux que sur ce sujet des pesticides, la Présidence française de l'Union européenne porte et je m'y engage ici, une initiative forte avec tous les collègues de sortie accélérée des pesticides. Ça n'est qu'au niveau européen que nous y arriverons. Sinon, nous nous ralentirons. 

Le deuxième grand sujet, ce sont les forêts et la restauration des écosystèmes. Là-dessus, je ne vais pas être plus long. Tout a été dit par nos amis et je vous en remercie, mais je vais quand même rappeler quelques éléments. La France a été l'un des premiers pays à proposer une stratégie de lutte contre la déforestation importée. Nous l'avons traduit dans la loi et nous souhaitons, cher Frans, comme tu l'as évoqué, accélérer les travaux qu’a menés la Commission pour qu’au niveau européen, nous ayons une stratégie claire et forte de lutte contre la déforestation importée. Qu’est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire ne plus importer d’huile de palme quand elle est produite par de la déforestation et quand elle nourrit de la déforestation. Cela veut dire ne plus importer de soja ou de protéines quand ils ont pour conséquence la déforestation en particulier en Amazonie. Cet engagement, nous l'avons lancé au printemps 2019. On l'a inscrit dans une trajectoire, mais je vais être très clair avec vous parce que ce sont toujours des transitions. Pourquoi nous importons le soja d'Amazonie du Brésil et d'autres pays ? Parce que depuis les années 60, il y avait cette organisation entre l'Europe et le continent américain qui avait construit cette dépendance protéinique par des grands accords commerciaux et de répartition de nos spécialités. Cette dépendance protéinique à l'égard de l'Amérique du Nord et de l'Amérique du Sud, si nous voulons en sortir et stopper cette importation, nous devons reconstruire notre souveraineté protéinique. Cette stratégie, nous l'avons bâtie en France par des investissements, mais en mobilisant toutes nos filières. Et nos agriculteurs sont des porteurs de solutions de la lutte contre la déforestation parce qu'on va reproduire des protéines en France qui vont nous donner notre souveraineté alimentaire pour nous-mêmes comme pour notre bétail, et nous permettre de stopper cette importation. C'est cela qu'il faut développer en Europe massivement. Ce sont des investissements, ce sont des emplois et c'est la réconciliation de l'agenda pour la biodiversité, contre le dérèglement climatique, pour la souveraineté européenne et pour la création d'activités économiques. Formidable aventure. 

Sur ce sujet, je veux aussi saluer l'engagement de plusieurs filières. La filière cacao, par exemple, vient de s'engager là pour, dans les 5 ans, lutter contre la déforestation et permettre d'avoir un cacao durable qui soit ainsi consommé sur notre sol en réduisant drastiquement, en supprimant la déforestation importée qui jusqu'alors, était souvent liée à cette filière. Ça, c'est une mobilisation de la filière, il n'y a pas que les Etats et les gouvernements qui se bougent, tous les acteurs se bougent en même temps. 

Et puis, il y a plusieurs initiatives que nous avions lancées en début d'année, je veux ici en rendre compte. L'Alliance pour les forêts tropicales, qui est venue compléter des initiatives prises depuis longtemps par la Norvège, l'Allemagne qui ont été précurseurs en la matière avec beaucoup de grandes ONG, en particulier comme Conservation International. Cette alliance pour les forêts tropicales depuis janvier, elle a grandi, elle compte aujourd'hui 10 fois plus de monde qu'au début. Ce n'était pas très difficile, vous me direz. Nous sommes 31 maintenant autour de la table, avec des résultats qui commencent à se construire. L'initiative amazonienne, je pense que Harrison en parlera tout à l'heure que nous avions lancé en septembre 2019, en réaction à l'Amazonie qui brûla a aussi grandi avec des résultats concrets. 

Et puis nous avons accéléré cette stratégie qui a plusieurs années, celle de la Grande muraille verte et je veux saluer la mobilisation du Président ISSOUFOU qui a accepté de remettre les gants, si vous m’autorisez cette familiarité, et qui, après deux mandats en tant que Président du Niger, a accepté de s'engager et je vous le dis parce que ce n'est pas un hasard. Permettez-moi cette remarque un peu personnelle. Le Président ISSOUFOU a fait deux mandats de Président au Niger, qui est l'un des pays les plus pauvres de la planète. Durant ces deux mandats, il a contribué à réduire la pauvreté. Il s'est battu contre la guerre et le terrorisme, mais surtout il a permis la première transition démocratique dans l'histoire de son pays, la première et donc, ce n'est pas un hasard si un homme comme lui a considéré qu'il était naturel pour son pays, son continent après ce petit miracle, de poursuivre la tâche et de venir pour s'occuper de la Grande muraille verte. 

La Grande muraille verte, c'est 18 milliards de dollars que nous avons mobilisés. Ils sont là et nous avons - je parle sous le contrôle de Monique -75 % des engagements qui sont tenus et donc nous allons poursuivre les derniers bailleurs parce que je tiens la liste, car il ne faut pas que ce soit que des mots. Mais surtout, on a déjà 45 % des montants qui sont engagés, ce qui montre qu'il y a une mobilisation sur le terrain de tous les acteurs et maintenant, ce qui est clair, on en parlait avec vous, avec le FIDA tout à l'heure, c'est que les acteurs sur le terrain puissent avoir les projets et qu'on puisse les accompagner de manière très concrète parce que l'objectif de cette Grande muraille verte, c'est de lutter contre la désertification et de reconquérir 100 millions d'hectares de terres dégradées qui vont du golfe de Guinée jusqu'à la Corne de l'Afrique. C'est un formidable travail de réconciliation géopolitique dans tout le continent, mais c'est surtout de la lutte contre la désertification, de la lutte contre le dérèglement climatique et c'est une contribution de l'Afrique. Or, à l'agenda de Paris, et je le dis ici parce qu'il n'y a pas que les pays riches qui y contribuent, des pays qui subissent plus que d'autres les conséquences de cet agenda à travers la Grande Muraille verte sont des surcontributeurs à cet agenda de Paris. Et c'est là aussi de la création d'activités économiques par de la reforestation, par des projets agroécologiques, agroforestiers et agricoles. Et donc, nous allons aller au bout mais cela avance bien, je voulais en rendre compte. Sur l'agenda forêt, on va continuer à avancer, vous l'avez compris, avec force, détermination. Mais déjà, depuis le début d'année on a fait des progrès conséquents et mesurables. 

Troisième élément de remarque : les océans. Ça a été très bien dit, je ne vais pas répéter ce qui a été souligné par l'ensemble des interlocuteurs. La stratégie de lutte contre le plastique est absolument clé. La France a porté une loi. On est en train de la mettre en œuvre. Elle a été renforcée encore récemment. Nous sommes en train de sortir partout où on le peut du plastique à usage unique. On est en train de construire les filières d'économie circulaire. Il faut le faire partout, dans tous les pays développés et dans les pays en voie de développement, parce que c'est porteur d'activité économique et il faut le faire dès maintenant. Et on avance. Ensuite, pour préserver les océans, c'est le travail d'éducation, d'accompagnement pour prévenir la pollution. On a vu ce matin des initiatives absolument formidables et je veux ici être leur porte-parole parce que c'est ce qu'ils nous ont dit ce matin, une initiative « 7ème continent » et d'autres. Le plastique, quand il est en mer, c'est déjà trop tard. Ramasser le plastique en mer fait partie des initiatives fortes, visibles, de bonne volonté, mais c'est déjà trop tard parce que le plastique, au-delà du macro-plastique visible, ce sont déjà des milliards de particules qui ont déjà pollué, qui ont déjà affecté les écosystèmes qui ont déjà parfois tué des poissons, voire des planctons, et qui ont infesté les écosystèmes vivants. 

La seule solution, c'est que le plastique n'arrive pas dans nos mers et nos océans. C'est donc de réduire les usages et c'est éduquer et prévenir le gaspillage et l'arrivée du plastique dans nos mers. Indispensable. Alors, pour réussir cette aventure, je veux saluer le travail de la Commission. Frans, tu auras l'occasion, je crois, dans les prochains jours, ou les prochaines semaines, de présenter le travail que tu as porté, qui a beaucoup mobilisé. Je veux aussi saluer la mobilisation de Pascal LAMY à tes côtés et c'est l'initiative Star Fish qui est en effet une initiative qui va permettre de reconstituer, régénérer l'hydrosphère à travers 5 grandes initiatives un financement massif d'avancées et, pour l'Hydrosphère de corriger, régénérer et prévenir avec de l'économie, avec des initiatives et avec de la science. Au-delà de ça, nous avons lancé là aussi, en septembre 2019 et en début d'année, des alliances, en particulier l'alliance de nos transporteurs, SAILS, pour réduire les émissions, convertir les flottes au LNG et à d'autres techniques et rejoindre le label européen Green Marine auquel nous sommes quelques-uns à tenir beaucoup et je veux saluer tous les acteurs qui ont annoncé leur adhésion à cette initiative et en particulier, CMA-CGM puisque nous sommes à Marseille qui a acté et confirmé le fait qu'elle rejoignait cette initiative. 

Nous battre pour les pôles, c'est aussi entendre ce qui est dit par les experts. J'écoute toujours ce qui nous est expliqué, nous battre pour les pôles et donc nous avons été sollicités ces dernières heures, ces derniers jours par les Nations unies, par nos scientifiques qui nous ont dit : il y a ces initiatives, elles sont très utiles. Mais si vous voulez sauver les océans, vous devez réduire le plastique. Vous devez vous battre pour les aires marines protégées, ce que nous sommes en train de faire en tant qu’Européen, on l'a dit et on va essayer de convaincre les autres d'avoir cet agenda international, mais vous devez aller plus loin, vous devez mener le combat à l'international, d'abord pour convaincre d'autres puissances de faire des aires marines protégées et parce qu'il vous faut aussi continuer le travail pour mieux connaître nos océans. Et il faut mener ce travail parce que 60 % de notre espace maritime est hors du droit, 60 % de notre espace maritime, en quelque sorte, il est hors de nos aires marines qui sont sous ce que nous maîtrisons. Et si nous ne voulons pas que 60 % de nos océans deviennent des zones de non-droit, de concurrence, de prédation géopolitique, marchande et une catastrophe pour la biodiversité et pour la science, nous devons nous battre pour un agenda qui met nos océans au cœur de nos objectifs en tant que bien public mondial, que bien commun. Cet agenda, nous devons le porter, je vous le dis très sincèrement, c'est un agenda scientifique, géopolitique, environnemental essentiel. 

Pour répondre à l'invitation des Nations unies, je prends ici l'engagement de tenir le « One Ocean Summit » qui nous permettra de mettre toutes les parties prenantes autour de la table pour à la fois construire des initiatives concrètes, fortes, mais un agenda juridique international pour porter ce projet de bien public mondial. Et se battre pour nos océans, c'est se battre pour nos pôles. Nous avons un ancien de nos grands explorateurs, quelques-uns sont dans la salle, monsieur Étienne est là et je le salue avec respect et admiration et bravo pour tout ce que vous avez fait et ce que vous nous avez apporté. Et donc, depuis le One Planet Summit, on a accéléré ce qui était une aventure de presque 10 ans que vous portiez. Et donc, on va vous accompagner dans cette aventure d’exploration de nos pôles. 

Mais cette bataille est en risque, je vous le dis très clairement. Pourquoi ? Parce que sur l'Antarctique, un combat a été mené il y a plusieurs décennies et un combat d'ailleurs qui doit beaucoup à la France et à Michel ROCARD à qui je veux ici rendre hommage, parce que sans Michel ROCARD, sans cet échange extraordinaire qu'il a eu et on le rappelait ce matin avec quelques-uns extraordinaires, sans doute aurions-nous décidé de nous répartir l'Antarctique et de l'exploiter, peut-être un peu moins, mais de l'exploiter et on a conjuré le destin avec quelques-uns, et on a réussi à développer la science libre dans l'Antarctique et à protéger ce pôle. L'Arctique est aujourd'hui en danger. Il y a une part d'inéluctable qui est la conséquence du réchauffement et il y a ce que nous devons maintenant réussir à lancer comme initiative. Nous devons convaincre les grandes puissances qui sont présentes en Arctique de bâtir à nos côtés un agenda pour essayer de préserver ce que l'on peut encore préserver. Et donc, je vous le dis très clairement, je vais le dire en des termes qui je pense parleront à celles et ceux qui s'intéressent à ce sujet. Nos lois sont aujourd'hui imparfaites et ne permettent pas de tout protéger en matière de biodiversité. La France n'attendra pas les lois pour prendre toutes les mesures qu'elle peut prendre pour que rien de la biodiversité dans la région arctique ne puisse être dégradé par des projets économiques portés par des entreprises. Mais plus clairement, lors de ce sommet, je veux que nous puissions essayer de convaincre les grandes puissances qui sont autour de la table de l'Arctique, de bâtir un agenda de bien public mondial et un agenda scientifique de biodiversité climatique pour essayer de sauver ce qu’on peut encore sauver. C'est notre devoir. Une stratégie polaire me sera soumise à l'automne. Je remercie notre ambassadeur et tous nos scientifiques et sur cette base-là, on essaiera de convaincre nos partenaires d'aller au bout de cette aventure pour l'autre pôle. C'est absolument essentiel. 

Ma quatrième et dernière remarque, elle est sur nos instruments, nos méthodologies. On ne pourra pas réussir tout ça si on n'arrive pas à se doter des bons instruments. Le premier, Christine LAGARDE l'a dit, plusieurs autres aussi, c'est « mesurer ». On ne bouge pas bien les choses quand on ne les mesure pas proprement. On a réussi un miracle et je veux ici aussi, comme cela a été fait, saluer la présence à nos côtés de Laurent FABIUS. Je le fais avec beaucoup d'amitié, mais là aussi avec beaucoup d'estime parce que cher Laurent, vous portiez à ce moment-là le marteau, chacun s'en souvient, pour la France. Mais la mobilisation internationale qui a été permise et possible, a été clef parce que nous avons construit pour la première fois un agenda international avec des objectifs, des chiffres et des dates et ce travail diplomatique inédit, il a été possible parce que nous avons su construire de manière consensuelle une mesure commune. Nous devons absolument sur les sujets de biodiversité nous doter des mêmes instruments pour mesurer les impacts, pour mesurer aussi en termes de comptabilité et réussir à bâtir le consensus. Gilbert le disait pour le FIDA tout à l'heure à raison, on voit aujourd'hui trop de chiffres hétérogènes sortir. Et donc, premier objectif que nous devons parachever dans les prochains mois et je pense que Kunming doit nous permettre de faire ça, avoir des standards scientifiques consensuels pour mesurer les sujets biodiversité et les sujets financiers publics et privés en matière de biodiversité. 

Ensuite, nous devons changer l'intérieur du modèle de deux manières. Nos banques publiques de développement doivent tenir des engagements en matière de changement de leur financement. Ce que nous avons fait pour le climat, on doit le faire pour la biodiversité. Et je salue ici l’AFD et le FIDA. Les engagements pris au One Planet Summit de janvier sont tenus. Merci pour cela et bravo à vous. Mais on doit élargir le club des banques publiques de développement pour que toutes, elles aillent vers ce 30 % pro biodiversité au moins et qu'on arrive à faire ce qu'on a fait en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Et on doit faire la même chose en matière privée. Christine LAGARDE l'a dit, nous avons lancé cette initiative de task force pour la transparence des financements pour la nature. C'est un combat qui suit celui qu'on a mené pour le carbone et qui produit ses premiers résultats. On a réussi à convaincre une écrasante majorité des fonds souverains, des gestionnaires d'actifs, des entreprises de la planète depuis le premier One Planet Summit pour aller dans cette initiative, des One Planet Sovereign Wealth Funds. Et on a des résultats. On doit faire la même chose en matière de biodiversité. Et donc pour ça, on doit avoir une méthodologie commune et précise et on doit mettre la pression sur tous les financeurs de la planète pour qu'il la rejoigne. Et je vous le dis avec clarté, cette méthodologie, nous devons en garder la maîtrise, la maîtrise, c'est-à-dire que je souhaite qu'on puisse la construire à ciel ouvert avec des financiers. Et chère Christine, si je peux être votre avocat pour convaincre tous vos membres, que vous soyez notre ambassadrice, ce serait formidable que la présidente de la BCE prenne en quelque sorte cette responsabilité, en plus de tout le reste. Mais qu'on puisse, à travers les différents One Planet Sovereign en rendre compte aux scientifiques, aux associations, aux ONG, aux entreprises et aux gouvernements pour que cette méthodologie se fasse à ciel ouvert. Je ne veux pas que cette méthodologie pour la biodiversité se fasse comme les standards financiers, c'est-à-dire un peu à l'écart, dans des cénacles trop techniques et en n'atteignant pas les objectifs qui sont les nôtres. Et donc, mesurer, bâtir cette méthode et financer, c'est de manière transversale ce qu'il nous faut construire. Merci Sylvie et quelques autres du travail qui est fait par nos banquiers centraux à cet égard. Ensuite, nous devons être cohérents. 

Le deuxième grand élément transversal, c'est la cohérence de nos politiques publiques. Et je vais ici être très clair avec vous. La France a porté en quelque sorte une resynchronisation de l'agenda commercial avec notre agenda climatique et biodiversité. Quand nous avons dit non au Mercosur, c'était avec cela en tête. Alors, je vais vous dire deux choses très clairement aujourd'hui. La France est contre le Mercosur tel qu'il est négocié aujourd'hui et nous le resterons très clairement, pas parce que nous ne sommes pas à l'aise avec nos amis du Mercosur, au contraire, mais parce que par définition, cet accord tel qu'il a été conçu et pensé, ne peut pas être compatible avec notre agenda climatique et de biodiversité, ça n'est pas vrai. Et donc, nous ne pouvons pas le conclure aujourd'hui ainsi. Mais surtout, nous devons bâtir des contrats commerciaux de l'Union européenne avec les autres partis qui reflètent ce même objectif. Notre politique commerciale doit porter des clauses miroirs sur le plan climatique et sur le plan de la biodiversité. Cela, c'est ce que je veux que la présidence française, aux côtés de nos partenaires avec la Commission, puisse porter. Nous devons réinventer nos politiques commerciales pour qu'elles soient cohérentes avec nos politiques climatiques, avec nos politiques de biodiversité. C'est une nécessité. 

Et puis enfin, c'est un agenda de transition. On n'arrivera pas à faire tout ça en un jour. Il faut réconcilier, vous l'avez dit, l'écologie, l'économie, le social. Il faut donc accepter dans cette période de changer nos paradigmes, accepter de financer massivement ces transitions, accepter d'accompagner nos agriculteurs, nos pêcheurs, nos concitoyens, pour que ces transitions soient possibles, accepter d'accompagner les pays en voie de développement et les pays les plus pauvres pour les aider à faire ces transitions et donc nous devons changer les paradigmes financiers qui sont les nôtres comme gouvernements et aider à changer les paradigmes financiers qu'ont les investisseurs privés internationaux. En quelque sorte, ce qui était aux portes du capitalisme international, nous devons le remettre au cœur et bâtir vraiment cette responsabilité économique, écologique et sociale. Nous avons commencé avec le plan de relance européen et les déclinaisons nationales à faire cette transformation. Nous allons devoir aller encore beaucoup plus vite et beaucoup plus fort. 

Voilà, mes chers amis que je voulais vous dire pour ce qui nous concerne, c'était les 4 remarques que je voulais faire. Ce multilatéralisme efficace auquel je crois, c'est celui qui permet de retrouver tous ensemble un sens et de rebâtir des écosystèmes, c'est-à-dire ce qu'on a déréglé, ça ne se fera pas en un jour. Ce n'est pas une mesure qui permet de le bouger, ce n'est pas une chose. C'est un ensemble de décisions où on remet en cohérence cette bataille pour le climat, pour la nature pour les peuples autochtones et, au fond, pour l'humanité. 

Ce combat, je veux que nous le menions ensemble et je suis pour ma part extraordinairement confiant. La situation est dramatique, mais notre volonté est immense. La capacité d'innover de l'espèce humaine est massive. Il faut juste qu'on la remette au service de ces solutions. Donc nous allons y arriver parce que nous allons nous battre. Voilà ce que je voulais vous dire. Merci aux combattants que vous êtes et aux enthousiastes. Alors, avant d’ouvrir le congrès, pour les tous derniers mots, je veux passer la parole à un combattant inspiré. Il s'est battu dans la forêt amazonienne. Après, il s'est battu pour elle et aux côtés des peuples autochtones. Harrison FORD voulait lancer un appel. Cher Harrison, la parole est à vous.

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