Si Johnny Hallyday fut pour bien des Français cette figure de grand frère protecteur, France Gall fut assurément leur éternelle petite sœur, dont la fragilité radieuse a accompagné des générations.

Sa victoire en 1965, à 18 ans, au concours de l’Eurovision (concourant pour le Luxembourg) vint récompenser le tandem qu’elle formait avec Serge Gainsbourg et qui fit naître des tubes aigre-doux qui ont traversé les époques – depuis Laisse tomber les filles jusqu’aux Sucettes et Attends ou va-t’en. Elle était alors la plus juvénile vedette des yéyés, et Serge Gainsbourg en jouait plaisamment, la qualifiant de « Lolita française » au moment où la France, après avoir reçu le choc du roman de Nabokov (traduit en 1957), se découvrait une jeunesse aspirant à toutes les émancipations. Baby Pop (1966) porte la marque de cette ambivalence étrange, Gainsbourg dictant à sa chanteuse un amer adieu à la jeunesse.

Pendant presque dix ans, France Gall aura porté les paroles de Baby Pop comme une prémonition. L’image et le répertoire qu’elle s’était constitués se brisèrent sur les évolutions d’une chanson française plus militante ou plus rock. La vague des yéyés s’achevait et la carrière de France Gall aurait pu s’interrompre comme d’autres si n’avait eu lieu la rencontre voulue mais inespérée avec Michel Berger, en 1973. De cette rencontre devenant bientôt un mariage (1976) naquirent les chansons qui firent de France Gall une des principales figures de la chanson française pendant plus de vingt ans.

Enumérer ses chansons des années 80, c’est faire l’inventaire des titres qui ont le plus marqué les Français, toutes générations confondues, par leur sensibilité extrême, tant dans la romance (Evidemment) que dans le registre pop (Résiste, Tout pour la musique), sans oublier l’opéra-rock Starmania, dont tous les airs restent dans la mémoire du public. Le génie de Michel Berger aura permis à France Gall de trouver dans son timbre resté adolescent des brisures et des accents touchant directement le cœur du public.

Alors qu’elle entendait déjà prendre du recul avec la scène, le décès brutal de Michel Berger (1992) puis de sa fille Pauline (1997) interrompirent les projets musicaux de France Gall. Elle donna encore des concerts importants mais c’est surtout son engagement dans de nombreuses causes qui se fit plus intense. Outre la cause des femmes, celles des sans-papiers, elle s’impliqua de plus en plus pour l’Afrique, qu’elle avait découverte en 1968, pour laquelle elle s’était engagée sur le plan humanitaire à partir de 1986, notamment au Mali puis au Sénégal, où elle passait une partie de l’année.

France Gall avait repris le chemin du spectacle en écrivant à partir de chansons de Michel Berger la comédie musicale Résiste, qui avait connu en 2015-2016 un très grand succès. Ce spectacle (où elle ne chantait pas) avait rappelé notamment aux plus jeunes un répertoire qui n’avait pas pris une ride et une artiste aimée de toutes les générations.

Le président de la République présente au compagnon de France Gall, à son fils, à ses petits-enfants, à ses amis, au monde de la chanson et aux habitant de l’île de Ngor ses sincères condoléances.

À consulter également

Voir tous les articles et dossiers