1 avril 1981 - Seul le prononcé fait foi

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Interview de M. Valéry Giscard d'Estaing accordée au "Journal de l'Ile de la Réunion", sur le bilan de son action en faveur des DOM, Paris, avril 1981.

QUESTION.- On a dit que les "DOM - TOM sont les danseuses de la France". On vous a même attribué cette expression. Estimez-vous effectivement que l'outre-mer "coûte trop cher" dans les circonstances actuelles ?
- LE PRESIDENT.- Je n'ai jamais tenu de tels propos. Je démens formellement avoir prononcé cette expression. Les départements et territoires d'outre-mer sont un atout pour la France. Tout ce que nous avons fait depuis 7 ans a reposé sur cette convention. L'attachement du million six cent mille Françaises et Français à la mère patrie n'a pas de prix. Comptabilise-t-on ce que les Réunionnais ou les Martiniquais ont fait pour la France au-cours des guerres mondiales ? Le fait-on pour les Auvergnats ou les Parisiens ?
- Bien au contraire, l'outre-mer est une grance chance pour la France. Certes, ses productions tropicales (sucre,banane ...) évitent d'importer. De même, la venue de touristes étrangers rapporte des devises à la France. Et, les perspectives offertes par le développement des ressources de la zone maritime économique de l'outre-mer (près de 11,5 millions de kilomètres carrés) sont considérables. La Réunion est sur-ce-plan-là très bien placée comme en témoignent les expériences aquacoles de Saint-Leu ou les campagnes expérimentales dans les mers australes.
- Mais l'outre-mer, c'est d'abord et surtout la présence de la France dans les océans atlantique, indien et pacifique. C'est la présence commerciale et économique : c'est aussi la présence culturelle par le rayonnement de nos départements et territoires d'outre-mer. C'est aussi la présence politique dans un monde où la liberté est un bien rare, les départements et territoires d'outre-mer sont des exemples de ce qu'un grand pays libre et démocratique peut faire pour le progrès économique et social de ses habitants.
- L'effort consenti par la communauté nationale pour l'outre-mer, qui est effectivement important, n'a pas à être comptabilisé. Il est ce qu'il doit être pour des citoyens et des citoyennes de la France qui ont à faire face à des difficultés (éloignement, isolement...) particulières et qui se sont engagés sur la voie du développement des capacités locales de production. La Réunion est à cet égard, exemplaire, comme en témoignent les progrès de la production sucrière, ceux de l'industrie, de l'artisanat et du tourisme au-cours de ses dernières années.\
QUESTION.- Quel est le bilan de la départementalisation économique à la Réunion ? La situation actuelle de l'emploi ne nécessite-t-elle pas un effort supplémentaire de l'Etat ?
- LE PRESIDENT.- La Réunion a réalisé ces dernières années de très importants progrès dans-le-cadre de la politique de départementalisation économique. En premier lieu, les équipements se sont beaucoup améliorés. Par exemple, le réseau routier grâce à la politique intelligente de votre conseil général est tout à fait remarquable. De même, l'équipement hydroélectrique permet à la Réunion de produire l'énergie électrique qu'elle consomme. L'aéroport de Gillot est tout à fait adapté au trafic moderne. Et vous connaissez le projet de deuxième port dont les travaux vont bientôt commencer, comme le gouvernement s'y était engagé.
- En second lieu, la Réunion s'est - et j'en rends hommage à ses élus et à ses responsables économiques et sociaux - mobilisée autour de grands projets dont les résultats sont maintenant évidents. Le plan d'aménagement des Hauts qui bénéficie des divers -concours publics pour 160 millions de francs en 1981, a permis de mettre en valeur en 3 ans près de 2300 ha de prairies, d'améliorer les routes et d'apporter l'eau et l'électricité à de nombreux quartiers éloignés. Les progrès de l'élevage et de la diversification de la production agricole (maraîchage ...) y sont directement liés. La population des Hauts est désormais, comme je l'ai souhaité, associée au développement de l'ensemble du département.
- Le plan de modernisation sucrier a permis à la production sucrière de progresser très sensiblement en 6 ans. Les revenus des planteurs ont bénéficié des progrès apportés par la productivité et l'amélioration des techniques de production. La Réunion est devenu un grand département sucrier, et l'objectif de production de 300000 tonnes est à sa portée.
- Le plan triennal de développement touristique guide les progrès des activités touristiques. Je rappelle que la capacité hôtelière a doublé en cinq ans, créant ainsi de nombreux emplois pour le département.\
`Suite réponse sur la départementalisation économique`
- L'industrie et l'artisanat ont bénéficié de régimes d'aides et d'incitations exceptionnellement favorables qui ont été encore améliorées en 1980, comme vous le savez. Les zones industrielles du Port de Saint-Denis ou de Saint-Pierre sont un bon exemple de ce qu'il faut faire. Je sais qu'une Chambre de métiers volontaire réfléchit actuellement à la mise au-point d'un plan de développement artisanal. Voilà quelques exemples de la départementalisation économique dont les résultats sont indiscutables et prometteurs pour l'avenir.
- Entre 1974 et 1979, le produit intérieur brut `PIB` de la Réunion a progressé à un rythme plus rapide que celui de la métropole pendant la même période : ces résultats sont d'autant plus remarquables qu'à plusieurs reprises, et notamment en 1980, la Réunion a subi de très rudes épreuves avec des cyclones meurtriers.
- Il faut poursuivre et accentuer encore cet effort qui demande tenacité et continuité. J'ai souhaité, vous le savez, que les départements d'outre-mer bénéficient intégralement des dispositifs métropolitains de création d'emplois. Ainsi la Réunion a bénéficié des trois pactes pour l'emploi. Il en sera de même à l'avenir. De même que j'ai voulu que les aides aux créations d'entreprises industrielles soient accrues et améliorées, les aides pour l'installation des jeunes agriculteurs, qui ont été étendues aux DOM sont plus favorables que celles accordées en métropole.\
`Suite réponse sur la décentralisation économique`
- La Réunion dispose aussi d'atouts qu'elles doit utiliser au mieux : un appareil de scolarisation et de formation comparable à celui d'un département métropolitain £
- des ressources énergétiques (l'hydroélectricité) et de vastes espaces encore disponibles, notamment dans les Hauts £
- l'intégration effective à la Communauté européenne `CEE` qui garantit les conditions d'exportation des productions agricoles et qui assure au département l'intervention massive des fonds européens £
- enfin, le haut niveau de vie de la population dont le pouvoir d'achat assure des débouchés aux productions agricoles ou industrielles locales. La départementalisation économique n'est pas imposée de Paris. Elle est surtout l'oeuvre des élus et des responsables économiques et de toute une population dont j'ai pu apprécier moi-même l'ardeur et la ténacité, et qui a montré son courage dans la tragédie de "Hyacinthe" `cyclone`.\
QUESTION.- La crise mondiale nous touche durement. Une Europe solidaire aurait peut-être permis d'en limiter les effets. Avez-vous le sentiment d'avoir tout fait pour l'unité de l'Europe et l'intégration des DOM à la Communauté européenne ?
- LE PRESIDENT.- La construction de l'Europe communautaire ne dépend pas uniquement de la France : aujourd'hui, il y a dix nations qui sont parties prenantes. Pendant sept années, dans des circonstances économiques difficiles et qui incitent plus les nations au repliement sur elles-mêmes qu'à l'ouverture sur les autres, nous avons tout de même fait de très grands pas. La France a joué chaque fois un rôle déterminant : par exemple, la politique monétaire européenne a largement progressé grâce aux efforts de la France. De même, la concertation politique entre les Dix a, elle aussi, progressé, grâce à l'-institution du Conseil politique `Conseil européen` qui se réunit trois fois par an. Je rappelle aussi l'élection en 1979 au suffrage universel de l'Assemblée des Communautés européennes. Et nous avons maintenu et renforcé les acquis de la politique agricole commune.\
`Suite réponse sur l'intégration des DOM à la CEE`
- Par ailleurs, je considère comme une des grandes réussites du septennat pour l'outre-mer, l'intégration désormais réalisée et effective des départements d'outre-mer à la Communauté européenne `CEE`. Les mémorandums que la France avait déposés à Bruxelles en 1976 et en 1978 nous ont permis d'obtenir l'intervention massive de tous les Fonds européens : Fonds social, Fonds de développement économique régional, Fonds d'orientation et de garantie agricole, Banque européenne d'investissements.
- Vous avez pu constater combien la Communauté est intervenue rapidemment et efficacement pour aider la Réunion au lendemain du cyclone Hyacinthe. De même, elle contribue au financement du plan des Hauts ou des programmes d'irrigation comme celui du Bras de Cilaos.
- L'intégration de la Réunion à l'Europe permet aussi l'accès des productions du département à un marché de 200 millions de consommateurs à haut pouvoir d'achat. Chacun doit mesurer les conséquences considérables de cette réalité pour l'avenir économique de la Réunion.\
QUESTION.- Le gouvernement a-t-il bien défendu les industries françaises ? N'aurait-il pas mieux valu fermer nos frontières aux produits fabriqués dans des pays où le salaire des ouvriers est dix fois plus bas que chez nous ? N'y a-t-il pas un risque particulier pour les départements d'outre-mer ?
- LE PRESIDENT.- Le Général de Gaulle et le Président Pompidou ont présidé à l'intégration de la France dans la Communauté européenne `CEE`. Cette intégration s'est traduite par des acquits incontestables et irréversibles dont l'ouverture du marché européen aux produits agricoles et industriels français. Dans le monde actuel, le repliement sur soi-même `protectionnisme`, à supposer qu'il soit possible, conduirait au déclin et l'asphyxie économique.
- La Communauté européenne n'est pas fermée sur elle-même. Elle a voulu entretenir avec les pays en voie de développement des relations économiques privilégiées qui favorisent leur croissance. Les deux Conventions de Lomé ont permis d'établir sur des bases solides cette coopération qui fait honneur à l'Europe. Pour tenir compte des spécificités des productions des départements d'outre-mer, la Convention de Lomé a prévu, vous le savez, des mécanismes de sauvegarde et de protection en cas de menace grave sur les débouchés de telle ou telle production. En réalité, l'existence de relationséconomiques privilégiés entre l'Europe, dont font partie intégrante les départements d'outre-mer, et les pays en voie de développement est une chance pour les DOM. Leur position géographique leur permet d'avoir un rayonnement particulier. Ils constituent une base naturelle pour toutes les relations techniques, financières ou économiques avec les pays engagés sur la voie du développement.\
QUESTION.- Au lendemain du cyclone "Hyacinthe", la solidarité nationale s'est manifestée avec une grande ampleur. Pourtant un secteur entier de l'économie semble avoir été oublié. Il s'agit des entreprises industrielles qui ont été sinistrées et qui n'ont pas bénéficié d'indemnisation. Peut-on envisager des mesures spécifiques en leur faveur ?
- LE PRESIDENT.- Dans les jours qui ont suivi Hyacinthe, tout a été mis en oeuvre pour aider la Réunion à remettre en-état ses équipements, son économie et pour aider ceux qui avaient été le plus durement touchés. L'ensemble des aides nationales et européennes représentent plus de 400 millions de francs. Je rends à cet égard, hommage aux élus et aux fonctionnaires qui ont bien travaillé, je le sais, pour utiliser efficacement et rapidement ces crédits.
- Le dispositif retenu à cette occasion - comme pour la Martinique et la Guadeloupe `Antilles` - était, à part quelques adaptations rendues nécessaires par les spécificités de la Réunion, comparable à celui qui aurait été adopté dans un département métropolitain.
- Or, la législation métropolitaine exclut du bénéfice du fonds de secours les entreprises ayant un statut de société, industrielle ou commerciale. Bien entendu, ces dernières ont bénéficié de facilités. Ainsi le gouvernement a donné des instructions aux services fiscaux ou à la Sécurité sociale pour assouplir les conditions de recouvrement des taxes ou des cotisations sociales en 1980.
- De même, des dispositifs d'aides bancaires ont été mis en place - notamment par réescompte à taux privilégié de crédits à moyen terme. Il s'agit, je le répète, de mesures tout à fait identique à celles adoptées en métropole dans des circonstances comparables.\
QUESTION.- Considérez-vous la départementalisation sociale comme achevée ? L'alignement intégral sur la métropole de l'ensemble des régimes sociaux est-il un de vos objectifs ?
- LE PRESIDENT.- Comme je m'y était engagé en 1974, des étapes très importantes ont été réalisées pour donner aux Françaises et aux Français de l'outre-mer, les droits sociaux qui existaient ou qui, depuis, ont été créés en métropole. C'est ainsi qu'on été étendus aux DOM : l'allocation logement £ la mensualisation des prestations familiales et l'attribution de complément familial £ l'allocation de rentrée scolaire et celle d'éducation spéciale, les régimes d'assurance maladie et veillesse des travailleurs indépendants (commerçants, artisans, professions libérales...) £ et bien sûr, en 1980, le régime de protection contre le chômage qui bénéficie, vous le savez, de la solidarité financière avec la métropole. Cette solidarité permettra de maintenir les taux de cotisation très raisonnables. De même l'extension de la notion d'enfants à charge et celle des prestations familiales pour les femmes isolées a permis d'améliorer considérablement la situation de ces dernières.
- On peut donc dire, pour l'essentiel, que la quasi totalité des prestations sociales sot désormais étendues aux DOM. J'ajoute q'un groupe de travail comprenant notamment le président Lagourgue, va se réunir pour arrêter les modalités de la suppression progressive des critères d'activités nécessaires à l'obtention des prestations familiales.
- Cette politique résolue d'extension sociale a été conduite en parfaite concertation avec les parlementaires, les conseils généraux et les organisations professionnelles. Elle a bénéficié de la solidarité financière de la métropole.\
`Suite réponse sur la départementalisation sociale`
- Dans le même temps, nous avons poursuivi notre effort d'équipement scolaire, sanitaire et social qui améliore les conditions et le niveau de vie de la population. Savez-vous qu'à la Réunion le nombre de bacheliers est passé de 463 en 1970 à 1226 en 1980 ? Au-plan sanitaire, l'équipement n'a cessé de s'améliorer et le nombre de médecins à la Réunion, est passé de 289 en 1975 à 520 en 1980.
- Enfin, nous avons engagé à la Réunion un programme de résorption de l'habitat insalubre. En 1981, la Réunion disposera à cette fin de 160 millions de francs. Cette politique de progrès social a fait, chacun le sait, des pas considérables en peu d'années. Il faut la poursuivre dans la concertation et dans la progressivité, en veillant à ne pas rompre les équilibres économiques du département.\
QUESTION.- Le statut départemental de la Réunion est-il irréversible ? Peut-on envisager des adaptations, compte-tenu des spécificités et de l'éloigneement de la Réunion ?
- LE PRESIDENT.- La réponse est très nette et catégorique : le statut départemental est irréversible. Bien entendu, comme en métropole d'ailleurs, nous devons rechercher toujours les moyens de simplifier les procédures administratives et de confier de nouvelles responsabilités aux élus du département. A cet égard, je rappelle que depuis 1979, la moitié du FIDOM soit 110 millions de francs en 1981 pour tous les DOM, est entièrement confiée aux élus qui sont responsables de sa répartition. De même, la procédure d'approbation des délibérations des conseils généraux concernant l'octroi de mer a été simplifiée et accélérée.
- Par ailleurs, je rappelle que les communes des DOM ont intégralement bénéficié des améliorations apportées à la tutelle communale comme à leurs ressources. J'ai d'ailleurs demandé que le projet de loi concernant les collectivités locales, qui est actuellement soumis au Parlement, s'applique de plein droit aux départements d'outre-mer.\
QUESTION.- L'existence d'une région vous paraît-elle fondée alors que les conseils général et régional sont composés des mêmes hommes ?
- LE PRESIDENT.- Je me félicite de l'existence des régions d'outre-mer. Elles fonctionnent dans des conditions strictement identiques à celles de la métropole, comme vos élus l'ont souhaité.
- Certes, les conseils régionaux sont peu différents des conseils généraux. Mais la région a entraîné la création des comités économiques et sociaux qui associent les responsables économiques et sociaux aux décisions de chaque établissement public régional.
- Les régions contribuent au développement économique et social, et à la Réunion, je sais que la région conduit une action exemplaire dans de nombreux domaines aussi importants que l'aménagement des Hauts ou les énergies nouvelles.\
QUESTION.- L'attitude du gouvernement français n'entretient-elle pas une équivoque sur le statut de Mayotte alors que les Mahorais dans une forte majorité se veulent Français. Quelle garantie pouvez-vous leur donner ? Quel est leur avenir ?
- LE PRESIDENT.- Le parlement s'est prononcé par la loi du 22 décembre 1979 qui précise dans son article 1 que Mayotte restera française aussi longtemps que sa population le voudra. Le gouvernement a pour sa part engagé un effort important et désintéressé pour améliorer la situation sanitaire, scolaire, sociale et économique de Mayotte. Cet effort sera poursuivi.\
QUESTION.- Quel est l'avenir des îles Eparses compte tenu des revendications de la République Malgache ?
- LE PRESIDENT.- La France a pris position pour ce qui concerne les îles Eparses, chaque fois que sa souveraineté, qui est ancienne et effective, a été contestée dans des enceintes internationales, et notamment aux Nations unies. Je ne pense pas que les îles Eparses puissent être un sujet de différend avec les pays voisins de la Réunion avec lesquels la France souhaite entretenir des relations d'amitié et de coopération.
- QUESTION.- La France n'a-t-elle pas abandonné les Français des Nouvelles-Hébrides ?
- LE PRESIDENT.- Les Nouvelles-Hébrides n'étaient ni un département, ni un territoire d'outre-mer mais un territoire d'outre-mer sous tutelle franco - britannique. Elles ont accédé à l'indépendance après que leur population en ait librement exprimé la volonté. Nous avons récemment signé des accords de coopération avec le gouvernement de ce nouvel Etat. Cette coopération est bien sûr fondée sur le principe de non ingérence dans les affaires intérieures de chaque pays. Mais elle doit permettre d'entretenir les liens entre la France et le Vanuatu, de faire fructifier en quelque sorte un héritage commun. Nos compatriotes qui vivent au Vanuatu en seront notamment les bénéficiaires car il est évident que, là comme ailleurs dans le monde, la France ne saurait se désintéresser de leur sort.\
QUESTION.- Que pensez-vous de la proposition du président malgache faisant de l'océan indien une zone de paix ? Ne croyez-vous pas que cette proposition pourrait conduire à affaiblir la position de la France dans cette région ?
- LE PRESIDENT.- La France ne peut être que favorable à l'étude de toute proposition ayant pour but de favoriser la paix dans le monde ... et bien entendu dans l'océan indien. La France, grâce à la Réunion, est une nation de l'océan indien et en tant que telle assume ses responsabilités de riveraine. La première de ses responsabilités est de veiller à la sécurité de la Réunion, partie intégrante du sol national. Sur ce point, il ne doit pas y avoir le moindre doute sur ma résolution de veiller à la sécurité de ce département français.
- En second lieu, la France, nation de l'océan indien, considérée et respectée comme telle par ses voisins, se doit d'entretenir évidemment des -rapports d'amitié et si possible de coopération économique ou culturelle avec les pays voisins. Il est clair que la Réunion par son niveau de vie, par le dynamisme de son économie et par son rayonnement contribue au rôle de la France dans cette région du monde.\
QUESTION.- Certains reprochent à votre politique étrangère d'avoir été "atlantiste". L'élection de M. Reagan aux Etats-Unis comme la gravité de la crise internationale, conduiront-elles à infléchir votre politique étrangère ?
- LE PRESIDENT.- La politique étrangère française est indépendante. Elle n'a pour objet que la défense des intérêts de la France. Personne ne peut sérieusement le contester et aucun observateur qualifié et responsable ne lui adresse le reproche que vous évoquez. Elle se développe comme elle l'a fait depuis le début de la Vème République, dans le respect de ses amitiés et de ses alliances mais avec le souci de promouvoir le dialogue et la coopération avec les pays qui y sont disposés. Dans une période d'incertitude et de tension sur-le-plan international, comme celle que nous connaissons, il importe tout spécialement que la France reste fidèle à ces principes fondamentaux. C'est ce qu'elle fait.\
QUESTION.- Etre Président de la République, surtout dans la Constitution de la Vème République, rend nécessairement vulnérable le titulaire de la magistrature suprême à toutes sortes d'attaques personnelles. Souhaitez-vous pour le "Journal de l'Ile de la Réunion" répondre à celles concernant les cadeaux de l'ex-empereur Bokassa ?
- LE PRESIDENT.- J'ai répondu à ces accusations méprisables au-cours de l'émission télévisée du 10 mars dernier. Il n'y a rien à ajouter.\
QUESTION.- La rivalité entre les différentes tendances de la majorité ne vous paraît-elle pas détestable outre-mer et particulièrement à la Réunion où le véritable débat est celui de l'appartenance ou non à la France ?
- LE PRESIDENT.- Il est certain que l'unité de la majorité nationale outre-mer est d'autant plus nécessaire que des forces politiques continuent de combattre le statut départemental de la Réunion. Pour ma part vous le savez, j'ai décidé de présenter aux Françaises et aux Français mon programme et de conduire ma campagne `campagne électorale` sans attaquer les autres candidats. C'est la conception que j'ai de l'élection du Président de la République. Je suis convaincu que mes compatriotes d'outre-mer mieux que quiconque, en comprennent la signification.
- QUESTION.- Que pensez-vous de la candidature de M. Michel Debré notamment dans l'outre-mer, compte tenu de sa personnalité et de l'héritage gaulliste qu'il représente ?
- LE PRESIDENT.- Je m'abstiens vous le savez, de porter un jugement sur les autres candidats à l'élection présidentielle.\
QUESTION.- Les Français divisent la vie politique en droite et en gauche. A gauche ceux qui veulent le bien du peuple. A droite ceux qui l'exploite. ! On vous accuse de conduire une politique de droite. Que répondez-vous ?
- LE PRESIDENT.- Toute mon action au-cours du septennat écoulé a eu pour principal objectif, celui de rassembler les Françaises et les Français. Je suis persuadé que mes compatriotes d'outre-mer et notamment ceux de la Réunion me comprennent lorsque je dis que dans les circonstances difficiles que la France traverse, cette -recherche de l'unité nationale est plus indispensable que jamais. C'est en ce sens que les qualificatifs de "droite" ou de "gauche" ne me paraissent pas correspondre aux réalités de la vie politique française, ni à ce qu'attendent les Françaises et les Français.
- Croyez-vous que la politique que nous avons engagée pour améliorer les conditions de vie des personnes âgées, ou la condition de la femme ... soit de "droite" ? L'extension du droit de vote à 18 ans est-elle une mesure de "droite" ? De même l'extension de la protection contre le chômage aux départements d'outre-mer relève-t-elle d'une politique de "droite" ? En vérité, le Président de la République est l'élu de tous les Français. La politique qu'il conduit doit avoir pour seul objectif l'intérêt de la France.\