29 janvier 1981 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution prononcée par M. Valéry Giscard d'Estaing, à l'occasion du dîner offert en l'honneur de M. le président de la République fédérative du Brésil et de Mme Joao Figueiredo lors de leur visite officielle en France, Versailles, Grand Trianon, jeudi 29 janvier 1981

`Politique étrangère ` relations franco - brésiliennes`
- Monsieur le président,
- madame,
- Le Brésil, vous ai-je dit à votre arrivée à Paris, est une des espérances du monde. Ce n'était pas une formule de politesse. C'était la vérité. Pour son équilibre et sa sécurité, le monde a besoin que ses forces soient réparties. Il a besoin de diversité car un monde coupé en deux est un monde dangereux. Nous savons que, dans le monde multipolaire qui se construit sous nos yeux, le Brésil sera l'un des centres actifs de progrès et de paix. Tout ceci est inscrit à l'avance dans le grand livre des choses, dans la géographie, dans la démographie et dans l'économie. Plus vite il en sera ainsi et mieux cela vaudra.\
`Politique étrangère ` relations franco - brésiliennes`
- C'est cette espérance que nous célébrons en vous accueillant ce soir. C'est aussi une amitié ancienne. Elle nous est naturelle.
- Français et Brésiliens ont été spontanément portés les uns vers les autres aux diverses étapes de notre histoire. Les fondateurs de la République brésilienne ont puisé leur inspiration chez les penseurs français du Siècle des Lumières, dans les principes de notre Révolution et, plus encore, dans le positivisme d'Auguste COMTE et dans sa foi, que rien ne pouvait décourager, dans le progrès. Votre devise nationale : "Ordre et Progrès" en témoigne.
- Ces affinités ont ensuite irrigué les courants qui se sont établis entre les élites de nos deux pays et dont on trouve des expressions remarquables dans nos Arts et dans nos Lettres comme dans les vôtres. Elles expliquent aussi que nos deux pays aient combattu côte à côte, lors des deux guerres mondiales, pour la défense des mêmes valeurs de liberté, d'indépendance et de respect des nations, qui nous guident aujourd'hui dans nos politiques. Ainsi s'est fortifiée cette amitié qui nous rapproche, et fait que nous nous connaissons et que nous nous estimons.
- J'y associe, si vous me le permettez, les souvenirs personnels gardés de ma visite au Brésil, il y a de cela deux ans. Souvenir d'un peuple ardent dans sa jeunesse, sa vitalité et sa spontanéité. Souvenir d'un pays où tout apparaît possible comme le manifeste Brasilia, ville surgie d'un sol vierge et dont les monuments se préparent à apparaître demain comme autant d'oeuvres classiques. Comme je l'ai découvert aussi, après Sao Paulo et Rio de Janeiro, à Manaus où s'exprime la puissance d'une nature et d'un espace qui n'ont livré qu'une faible partie de la puissance et des richesses qu'ils contiennent. Telles sont, monsieur le président, les très fortes images que je retiens de ma visite dans votre pays.\
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- Le peuple brésilien puise son énergie créatrice dans ses racines européennes et africaines, dans son instinct de ce qui est beau, et dans un incomparable élan de vie et d'harmonie. Cette force créatrice constitue un atout essentiel, pour vous-même, monsieur le président, et pour tous ceux qui ont la charge de conduire la profonde transformation que connaît votre pays.
- L'immensité de son territoire, la diversité de sa population, les données de son développement qui le confronte à la fois aux problèmes des pays en développement et à ceux des pays industrialisés, soulignent la dimension de l'action. Mais cette action est à la mesure du dynamisme brésilien, à la mesure aussi de toutes les ressources dont la découverte progressive, année après année, stimule vos efforts.\
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- Certes vous rencontrez des difficultés comme chacun. Il y a celles qui tiennent à l'ampleur de la tâche £ mais les résultats déjà acquis et que traduisent votre développement industriel, scientifique et technique, ainsi que le progrès des conditions de vie, ont toutes les raisons de vous donner confiance dans votre avenir.
- Il y a aussi celles qui tiennent à la situation du monde et en-particulier, au renchérissement des approvisionnements pétroliers. La France, comme vous le savez, qui importe la quasi totalité du pétrole qu'elle consomme, s'efforce de s'en dégager par la réalisation d'un important programme de centrales électro-nucléaires auquel va s'ajouter désormais le développement de carburants de substitution. Son objectif est de faire en sorte qu'à la fin de la présente décennie, en 1990, 90 % de l'électricité consommée soient fournis par des ressources d'origine nationale. Pour sa part, le Brésil peut avoir recours aux vastes ressources que la nature lui prodigue. Qu'il s'agisse de l'eau, du charbon, de l'alcool de canne, vous disposez des moyens de vous libérer du fardeau des importations d'énergie.\
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- Cette -entreprise suppose de multiples -concours. Pour ce qui concerne l'hydraulique, mais aussi les usines de charbon, la France vous apporte déjà le sien. L'usine de Tucurui en offre une démonstration. Et voici, monsieur le président, un sujet tout naturel pour notre coopération. Nous avons les mêmes problèmes £ nous conduisons les mêmes efforts pour nous libérer peu à peu du poids des importations d'énergie. Nous pouvons donc vous aider à mettre en oeuvre la technologie qui permette d'exploiter de manière intensive vos gisements de charbon. Nous pouvons examiner ensemble le développement des carburants de substitution.
- Une autre des difficultés que vous rencontrez tient aux distances dans un pays aussi vaste que le vôtre. Nous pouvons étendre aux télécommunications, aux liaisons par satellites, aux applications de la télématique, la coopération que nous avons déjà-entreprise dans le domaine des transports terrestres et des avions où nos industriels sont habitués à travailler ensemble.
- Dans les domaines scientifique et technique, nous mettons en oeuvre des formes modernes de coopération de -nature à accompagner notre développement. Et les accords que nous allons signer demain, à l'occasion de votre visite, en offriront le témoignage.\
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- C'est aussi, bien entendu, dans le domaine politique que se manifeste notre rapprochement. Les trois visites d'Etat que nous avons échangées en cinq ans, deux brésiliennes et unefrançaise, en sont l'illustration. Alors que s'affirme le rôle du Brésil sur la scène internationale, c'est-à-dire celui d'un grand pays occupant une place éminente et comptant comme un des partenaires importants de la fin du siècle, la France se félicite qu'une concertation régulière se soit établie entre nous et qu'elle fasse apparaître la convergence de nos vues dans les grands problèmes du monde.
- Cette approche semblable des problèmes tient aux principes qui guident nos deux pays dans leur action internationale, c'est-à-dire la défense de la paix, le respect de l'indépendance et celui de la diversité des options politiques et sociales des Etats.
- Le Brésil, comme la France, agissent aussi pourque s'expriment de manière concrète les liens de solidarité qui unissent les pays du monde devant les problèmes fondamentaux que sont la préservation de la paix et le maintien de la sécurité, la poursuite du développement, la mise en oeuvre des technologies de l'avenir, qui ne mesure, qui n'aperçoit l'unité croissante du monde ? Cette unité appelle au dialogue et à la coopération. C'est à les développer que nous consacrons nos efforts.\
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- Lorsqu'elle a pris l'initiative du dialoque Nord-Sud, la France a trouvé le Brésil à ses côtés. Si les progrès accomplis ne sont encore ni à la mesure de nos espoirs, ni à cellede l'attente des pays les plus démunis, une voie cependant a été ouverte et tracée. Pays industriel, mais traditionnellement ouvert aux préoccupations du Tiers-monde, la France ainsi que le Brésil, que son développement spectaculaire place, en réalité, à la charnière du Nord et du Sud, ont un rôle particulier à jouer dans l'instauration de nouvelles relations économiques. Ainsi pourront être assurées la stabilité sans laquelle nos efforts s'épuisent en vain, et la justice qui peut seule garantir l'adhésion des peuples.
- Monsieur le président, la France et le Brésil seront présents aux grands rendez-vous du monde en cette fin difficile d'un siècle qui n'aura pas été épargné par les épreuves. Ils le seront parce qu'ils en ont la volonté et la capacité. Il faut qu'ils soient côte à côte pour contribuer, chacun avec sa personnalité, chacun avec ses atouts, à l'édification d'un monde plus sûr, plus juste et plus fraternel. C'estla signification de nos rencontres et de la poursuite de notre dialogue.\
`Politique étrangère ` relations franco - brésiliennes`
- Monsieur le président, je vous remercie que vous ayez réservé à la France la première visite que vous effectuez en Europe dans votre qualité de Président de la République fédérative du Brésil. J'y vois le témoignage de la qualité et de la confiance de nos rapports.
- Permettez-moi donc, monsieur le président, de vous dire l'estime dans laquelle je vous tiens depuis notre premier entretien à Brasilia, le matin dans la belle lumière de votre capitale. Je mesure, mieux sans doute que d'autres, la difficulté de votre tâche. Je comprends l'amour que vous portez à votre pays, l'ardent désir que vous avez de le conduire sur le chemin où se rejoignent la liberté de ses aspirations et les disciplines d'un progrès régulier et ordonné. Je vous souhaite d'y réussir, et sachez que les voeux de la Frnce accompagnent le progrès et le succès du Brésil.
- Tels sont les voeux que j'exprimeraien vous invitant, mesdames et messieurs, à lever votre verre en l'honneur du président FIGUEIREDO et de Mme FIGUEIREDO, que nous sommes heureux d'accueillir à ses côtés, en l'honneur des membres éminents du gouvernement brésilien et des hautes personnalités politiques et administratives qui l'accompagnent, au bonheur et à la prospérité du grand peuple brésilien qui pourra toujours se sentir l'ami du peuple français.\