18 janvier 1981 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution prononcée par M. Valéry Giscard d'Estaing à l'occasion de la 5ème semaine du travail manuel, Paris, Théatre Marigny, dimanche 18 janvier 1981

Mesdames,
- messieurs,
- La 5ème semaine du travail manuel qui se déroule en ce moment dans chacune de nos 22 régions est à la fois un témoignage et un symbole.
- Le témoignage de la persévérance dans l'action,
- Le symbole de la considération dans le travail.
- Un témoignage de persévérance d'abord. Quand nous regardons un de nos enfants, nous nous apercevons qu'aujourd'hui il est grand. Et pourtant, nous ne l'avons pas vu grandir. Il en est de même des changements profonds de notre pays tels que l'action travail manuel : jour après jour, mois après mois, nous ne les voyons pas. Mais, avec le recul, en prenant la perspective de quelques années, les transformations apparaissent dans toute leur ampleur.
- Je n'entrerai pas aujourd'hui dans ces mots que je veux très brefs, dans une description détaillée de l'action menée depuis six ans pour revaloriser le travail manuel £ je me bornerai à deux résultats essentiels. Premier résultat : les jeunes Français ont retrouvé le goût pour le travail manuel. En l'espace de quelques années, c'est par dizaines de milliers, que dans nos écoles, à tous les niveaux, les jeunes reviennent vers les études techniques, le baccalauréat technique, l'apprentissage, le compagnonnage, les écoles de métiers d'art. Pour ne prendre qu'un exemple, nous formons cette année 220000 apprentis, alors que nous n'en avions que 150000 il y a quelques années.\
Deuxième résultat : les salaires des ouvriers ont augmenté deux fois plus vite que les autres, ce qui leur a permis de recevoir 10 points de pouvoir d'achat en plus en six ans. Il y avait en effet un retard important pris par les salaires ouvriers £ chaque année, un rattrapage a été effectué, et ce n'est que justice. Ce plus juste salaire doit permettre d'attirer des jeunes de haut niveau vers les métiers manuels, et de rendre acceptables par les Français des tâchesqui, jusqu'à présent, étaient remplies essentiellement par des étrangers.
- Il me paraît important de faire remarquer que ce résultat remarquable sur les salaires a été acquis sans nouvelle réglementation autoritaire, mais par la seule politique contractuelle négociée patiemment entre syndicats et patronat. C'est la meilleure voie du progrès social.\
La présence aujourd'hui de toutes ces délégations régionales, la remise des médailles que je viens d'effectuer à des travailleurs manuels venant de chaque région, sont aussi le symbole de la considération dans le travail. Peu à peu, comme le prouvent toutes les études et enquêtes, l'ensemble des Français retrouve enfin envers nos ouvriers et nos artisans la considération qu'ils accordaient jadis à ceux qui ont bâti notre pays.
- Il y a un an, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, je présidais la cérémonie où nos prix Nobel, nos professeurs, nos académiciens, nos écrivains remettaient leurs diplômes à nos lauréats du concours meilleur ouvrier de France. C'était un hommage d'égal à égal. D'égal à égal : c'est la règle que doivent respecter les Français dans leurs relations quotidiennes.
- Aujourd'hui, l'action "travail manuel" est lancée : nul ne l'arrêtera plus, car c'est une action juste au service d'une nation moderne. Elle s'imposera comme le tournant historique d'une société industrielle, qui commence enfin à comprendre que la force d'une nation n'est rien d'autre que la force de son travail, c'est-à-dire la force et la qualité de ses hommes.\