19 juin 1980 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. Valéry Giscard d'Estaing à l'ouverture de la réunion de travail avec les élus locaux sur le développement de la Bretagne, Paris, Palais de l'Élysée, le jeudi 19 juin 1980

Je vous remercie d'être venus aujourd'hui à l'Elysée pour participer à une réunion de travail d'un type inhabituel.
- Selon nos usages administratifs et politiques, le Gouvernment délibère dans le secret, et les assemblées locales délibèrent de leur côté en l'absence de représentants du Gouvernement - sous-réserve du rôle du Préfet. Je vous invite aujourd'hui à participer à une réflexion conjointe du Gouvernement et des représentants des assemblées régionales et départementales de la Bretagne. J'ai l'intention, en effet, en ce début d'une décennie nouvelle, de faire le point de la situation économique des régions dont dépend, à un titre ou à un autre, notre avenir national. La Bretagne est une de ces régions.
- Pour introduire nos travaux je ferai trois observations :
- La première est une constatation historique. A l'époque où je suis entré pour la première fois au Gouvernement, la Bretagne était une de nos régions les moins développées. 50 % `statistique` de sa population active était employée dans l'agriculture. Son industrie se limitait au bâtiment et aux travaux publics. Elle subissait de plein fouet le handicap de son éloignement géographique.
- Vingt ans après, la Bretagne est une région de pointe, non seulement à l'échelle de la France, mais à l'échelle européenne. La voilà devenue la première région agricole de France, avec une productivité des sols double de la moyenne nationale. Son potentiel de recherche `recherche scientifique` est sans équivalent en France dans les télécommunications, l'océanologie, l'agronomie. Autour de ces centres de recherche s'est créée une industrie électronique qui emploie 15000 personnes `nombre` - le quart des effectifs nationaux de cette branche.
- En 1980 Rennes sera reliée par autoroute à Paris. A côté du plan routier breton, dont nous allons parler, s'est mis en_place ce qu'on aurait pu appeler un plan aérien breton : 10 aéroports de commerce sur 78 se trouvent dans votre région.
- Mais le signe le plus incontestable et le plus significatif de la transformation de la Bretagne réside dans le renversement d'un mouvement démographique séculaire : la Bretagne est devenue aussi l'une de nos régions les plus dynamiques quant à la démographie. Ce dynamisme a trouvé sa juste expression dans la composition du Gouvernement.\
Pourtant - et c'est ma deuxième observation - en recevant les maires des Côtes-du-Nord et du Finistère, en écoutant les ministres bretons, en lisant la presse régionale j'ai senti qu'il y avait en Bretagne un certain sentiment qu'on peut décrire comme exprimant une frustration collective.
- Je me suis interrogé sur ce sentiment. Je crois qu'il s'explique par deux sources.
- D'abord les bretons considèrent que l'opinion nationale n'est pas assez informée et n'est pas assez consciente de leurs remarquables progrès. Ils sont choqués de voir que la Bretagne n'occupe la "une" des médias qu'à l'occasion des catastrophes écologiques, hélas trop fréquentes. Ils sont déçus que la presse économique ignore la vitalité d'une agriculture plus performante que l'agricultue hollandaise et d'une industrie dont l'essor n'a rien à envier aux Japonais.
- En même temps, les Bretons redoutent que cette réussite provoque un moindre intérêt de la part de l'Etat. Certains l'ont dit ou l'ont cru, en voyant les actions engagées en_faveur de telle région, frappée par la conversion de ses industries lourdes, ou de telle autre, dont le dynamisme économique devait être stimulé. Là est précisément ma troisième observation.
- Je le dis très clairement : l'Etat continuera à aider la Bretagne. Mais il doit aider non plus la Bretagne de 1960, mais la Bretagne des années 1980 : c'est-à-dire une de nos régions de pointe, qui constitue un des points forts de la France dans la compétition internationale de la fin du siècle.\
La réussite de la Bretagne dépend d'abord des Bretons eux-mêmes. De ses admirables agriculteurs, de ses marins, de ses industriels, de ses chercheurs. Que pouvons-nous faire, nous, élus locaux, responsables régionaux, représentants de l'Etat pour aider les Bretons ?
- 1 - Achever et consolider la politique de développement -entreprise il y a quinze ans. Je veux parler notamment des infrastructures de transport, routes et chemins_de_fer, et de l'industrie électronique.
- 2 - Mettre en_valeur les ressources naturelles et le potentiel nouveau de la Bretagne :
- ressources agricoles : par le développement des industries alimentaires.
- ressources maritimes : par la transformation des produits de la pêche et le développement des ressources nouvelles de l'aquaculture.
- ressources scientifiques : en faisant profiter les PMI régionales des résultats des recherches `recherche scientifique` conduites en Bretagne.
- ressources énergétiques : c'est un des rares domaines où la Bretagne est encore en retard, et je sais que vos assemblées ont exprimé les positions réalistes `nucléaire` qui s'imposaient.
- 3 - Protéger le capital économique et touristique que constitue le merveilleux littoral breton contre les atteintes à l'environnement venant de la terre, ou de la mer.
- Vous savez que je connais et que j'aime la Bretagne. En tant que Président de la République j'y suis allé à plusieurs reprises. Chaque fois que s'est posé un problème grave intéressant votre région, il a été évoqué et traité ici même. J'ai l'intention de retourner l'hiver prochain à Ouessant pour vérifier personnellement la mise en marche du nouveau centre de surveillance `navigation`.
- Ce sera aussi pour moi - je le dis à messieurs les ministres - l'occasion d'aller faire sur_place un premier examen de la mise en_oeuvre des décisions que nous prendrons aujourd'hui.\