20 janvier 2011 - Seul le prononcé fait foi
Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, sur les efforts en faveur de la santé publique, à Châtillon-sur-Indre (Indre) le 20 janvier 2011.
Mesdames les Ministres, chères Roselyne BACHELOT, Nora BERRA, Marie-Anne MONTCHAMP,
Monsieur le Ministre, cher Xavier BERTRAND,
Monsieur le Maire de Châtillon-sur-Indre,
Monsieur le Président, cher Louis PINTON,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de venir à la rencontre des personnels de santé et du secteur médico-social dans ce département de l'Indre pour vous présenter mes voeux. L'hôpital que je viens de visiter m'a permis, encore une fois, de mesurer la confiance méritée des patients dans leur personnel soignant, le dévouement des équipes de soins et la parfaite intégration d'une structure médicale dans un territoire comme le vôtre.
Je voudrais en tant que chef de l'Etat vous dire que la France peut et que la France doit être fière de son système de soins et de ses professionnels de santé.
Je sais que cette réussite tient à l'engagement et à la mobilisation de tous. Ensemble dans votre diversité vous contribuez à la richesse du système de santé français.
Par votre diversité nous avons tous un accès aux soins rapide et facile, nous avons un accès à des soins très pointus et nous parvenons à tirer le meilleur de l'engagement individuel des soignants et des valeurs collectives de solidarité.
Mesdames et Messieurs, mes chers compatriotes, je ne suis pas là pour passer sous silence les difficultés auxquelles se trouve confronté notre système de santé £ mais je veux rappeler parce que c'est mon devoir à quel point la France à la chance de pouvoir s'appuyer sur un système de santé absolument remarquable et qui n'a pas d'équivalent dans le monde.
Regardons ce qui se passe dans d'autres pays livrés, soit à l'inertie des monopoles qui par nature sont impossibles à moderniser, soit à une concurrence dérégulée entre acteurs privés et qui se déploie souvent au détriment de l'accès aux soins.
En France -- je veux le rappeler parce que c'est mon devoir -- on ne perd pas sa couverture maladie quand on perd son emploi. En France, on a l'habitude de pointer toujours ce qui va mal, mais quand on perd son emploi, et c'est bien le moins, on ne perd pas sa couverture maladie. Avez-vous vu ce qui se passe chez nombre de nos partenaires lorsqu'il y a une crise et lorsqu'il y a du chômage ? En France, on garantit aux plus pauvres un accès à une gamme de soins sans équivalent dans le monde. Et ceux qui sont juste au-dessus des seuils sont aidés à financer leur couverture complémentaire. Et je ne comprends pas pourquoi on ne souligne pas cette réalité.
Tout cela, c'est à porter au crédit de notre pays et de notre modèle.
La présence d'un secteur public et d'un secteur privé dans l'offre hospitalière, la conjonction de la prise en charge libérale et de l'intervention d'un service public développé constituent ce que l'on pourrait appeler une alchimie puissante. Regardez toutes les enquêtes qui sont menées sur l'attractivité de notre pays et vous noterez comme moi que les performances de notre système de soins sont dans la compétition internationale un atout reconnu pour la France.
Chaque année, mes chers compatriotes, nous consacrons 160 milliards de dépenses publiques à la santé. 160 milliards d'euros. Je ne m'en plains pas, quel est le capital plus précieux dont nous disposons si ce n'est celui de la santé. Mais je veux donner ce chiffre qui n'est jamais cité. 160 milliards d'euros.
Alors certains ont beau toujours mettre en avant le soi-disant démantèlement de la sécurité sociale, avec 160 milliards d'euros, le système collectif finance 75 % des dépenses de santé des Français £ les trois quarts de nos dépenses de santé sont pris en charge par le système collectif et ce taux est quasiment stable depuis 15 ans, ce qui me permet de dire que le système de santé français est le plus protecteur au monde. Et je ne pense pas qu'il se trouve un français pour le regretter.
Nous avons choisi de continuer à investir dans votre santé et dans notre système de santé et nous avons choisi de refuser de couper dans les dépenses de santé. Concrètement, cela signifie qu'en 2010, notre taux de croissance devrait être sur l'année un peu supérieur à 1,5 %. Avec une croissance un peu supérieure à 1,5 % l'ONDAM, c'est-à-dire le budget public que nous allouons à notre santé, a progressé de 3 %, soit le double. Je ne laisserai dire à personne que la France rationne les dépenses de santé. La croissance à 1,5 %, la croissance du budget collectif consacré aux dépenses de santé : 3 %. Ce n'est jamais suffisant, mais c'est une réalité, et je ne le dis pas pour vous dire que tout va bien, mais parce que les Français doivent être informés des vrais sujets et la santé est un véritable sujet. L'année prochaine nous tablons sur une croissance de 2 %, l'ONDAM, le budget public que nous allouons à notre santé, progressera de 2,9 %. Donc on consacrera plus d'argent que la croissance naturelle de notre économie à la santé. Et ce n'est pas une chose virtuelle, cela représente 5 milliards d'euros qui permettent chaque année de financer la modernisation de l'hôpital, de nouveaux traitements, ou le paiement des professionnels de santé.
Alors naturellement tout n'est pas une question d'argent. Il y a d'abord la richesse de la compétence des professionnels de santé qui s'investissent dans leur métier avec compétence et passion.
J'ai toujours été convaincu qu'il était vain de vouloir maitriser les dépenses d'assurance maladie par le rationnement, le refus de toute dépense nouvelle, le refus de tout investissement. Parce que cela conduit à la paupérisation.
Nous avons mis en oeuvre la réforme du LMD, à l'époque avec Roselyne BACHELOT, dont Xavier BERTRAND et Nora BERRA auront la responsabilité de la mettre en pratique et qui est la reconnaissance pour les infirmiers et les infirmières de notre pays de leurs qualités professionnelles. Tout le monde vous l'avait promis et je ne pouvais pas aller dans un endroit sans rencontrer des infirmières qui me disaient « et le LMD ? ». C'est fait. Et c'est normal parce que le demi million d'infirmières et d'infirmiers le méritait par le dévouement extraordinaire qui est le leur et la compétence remarquable qui est la leur.
J'assume les choix qui ont été faits, qui sont portés par Xavier BERTRAND de la revalorisation des médecins généralistes pour l'augmentation de leur consultation. Et comprenez moi bien : on ne peut pas dire à la fois qu'il faut soutenir la médecine générale, la médecine de proximité et refuser dans le même temps les moyens d'assurer la juste reconnaissance de la médecine générale et de la médecine de proximité.
Nous devons garantir la qualité et la sécurité des soins. C'est vrai, il y a des problèmes. J'avais indiqué il y a quelques semaines que la transparence la plus totale serait la règle sur le sujet du Médiator. C'est ce qu'a fait avec beaucoup de courage le ministre de la santé Xavier BERTRAND. Le rapport a été remis le 15 janvier au ministre qui l'a rendu public le même jour et le même jour Xavier BERTRAND a annoncé les premières mesures, notamment sur le renforcement de la chaine de pharmacovigilance et sur les conflits d'intérêts. Je comprends l'incompréhension, la colère de nos concitoyens et celle des familles de victimes. Il faut tirer toutes les leçons de ce dossier.
Nous allons donc engager une démarche de refondation, en profondeur, de notre politique du médicament. Il ne s'agit pas de mettre à bas tout ce qui a été construit en France depuis 20 ans en matière de sécurité sanitaire, d'accès à l'innovation, de gouvernance et de régulation du secteur du médicament.
Mais dans le même temps, nous devons ensemble poser des questions fondamentales qui touchent tous les acteurs du médicament.
- comment resserrer les mailles du filet de notre système de pharmacovigilance au travers de procédures plus réactives et d'autorités publiques plus efficaces ?
- comment renforcer la garantie absolue d'indépendance, de transparence, d'impartialité dans les prises de décision qui concernent toutes les facettes et tous les moments de la vie d'un médicament ?
- comment mieux accompagner les prescripteurs soumis à des attentes fortes des patients et à un flux d'informations non contrôlées ?
- comment renforcer la formation continue de vos médecins pour qu'ils soient au courant, dans le maquis de la profusion d'informations médicales innombrables auxquelles personne ne peut en temps réel avoir un accès sérieux ?
Répondre à ces questions, mes chers compatriotes, ne se fait pas en quelques jours. C'est la raison pour laquelle Xavier BERTRAND, et Nora BERRA, vont associer l'ensemble des acteurs du médicament à cette dynamique de refondation : patients, prescripteurs, autorités de régulation, industriels, experts. Tous seront associés à cette démarche dans un esprit de transparence et les conclusions aboutiront à des décisions que nous prendrons au milieu de cette année.
Mesdames et Messieurs, nous devons absolument sauvegarder notre système et pour le sauvegarder il faut qu'il soit plus efficient. Et je veux parler bien sûr des questions qui fâchent et notamment des problèmes des déficits. A la place qui est la mienne, je ne peux pas laisser les dépenses de santé déraper. Je vous ai dit que l'on consacrerait plus d'argent à la santé et je l'ai prouvé. Mais notre devoir c'est de faire en sorte que cet argent, le vôtre, soit investit de manière efficace. La gabegie et le gâchis, personne ne peut l'accepter. On a trop besoin d'argent pour les nouvelles techniques, pour des machines plus innovantes, pour des médicaments plus performants, pour se permettre de dilapider ou de gaspiller l'argent public. Et je ne peux pas laisser les dépenses des hôpitaux s'abîmer dans des déficits qui empêchent leur modernisation et qui brident leurs marges de manoeuvre.
A voir les deux tiers des hôpitaux, cela va mieux maintenant. Être en déficit, ce n'est simple pour personne et surtout pas pour les professionnels qui travaillent et qui se disent qu'est-ce qui va se passer demain.
Et je ne céderai pas aux demandes inconsidérées, sous prétexte que l'on se rapproche des sciences politiques importantes. D'abord, s'il faut céder aux demandes inconsidérées parce qu'il y a des élections, comme il y a des élections tout le temps, on ne fera plus que ça. Et à l'arrivée, je n'ai pas été élu pour que la France soit considérée comme un pays dépendant et qu'elle connaisse la réalité de ce que connaissent certains de nos partenaires en Europe. Je ne suis pas persuadé que qui que ce soit en France a envie que nous connaissions les affres de l'Irlande, du Portugal, ou de la Grèce. Personne.
Et donc nous allons poursuivre la réforme de l'hôpital. En facilitant la mutualisation des services, en créant des synergies, en encourageant la coopération entre établissements. Les communautés hospitalières de territoire et les groupements de coopération sanitaire permettront d'assurer cette cohérence globale et de tirer les meilleurs atouts en faisant travailler ensemble le public et le privé, la médecine de ville et l'hôpital, les établissements entre eux, comme je l'ai vu ce matin.
Nous avons une obligation éthique de bonne gestion, c'est de la morale. Et nous devons mettre en oeuvre de principes simples : si les médicaments sont inefficaces, il faut les sortir du remboursement, et ne pas avoir peur des protestations de tel ou tel. De toute manière, ça proteste. Donc il faut prendre un peu de distance par rapport à cela et n'avoir comme seul objectif que de protéger les Français et respecter l'intérêt général. Si des services hospitaliers éparpillés doivent être regroupés, au bénéfice de la qualité des soins et de la bonne gestion, il faut le faire. Personne ne peut être satisfait d'être reçu dans un service ou dans un hôpital dangereux pour sa santé. Et si des fraudes aux prestations maladies sont détectées, il faut les pourchasser, sans relâche.
En 2010, nous avons respecté l'ONDAM, l'objectif de dépense d'assurance maladie voté par le Parlement - tenez-vous bien, Mesdames et Messieurs-, pour la première fois depuis la création de l'ONDAM en 1997. Mais est-ce que c'est raisonnable qu'un gouvernement aille devant le Parlement en disant « voilà, le budget public que l'on va consacrer à la santé des Français, le processus a été créé jusqu'en 1997, et jamais, jusqu'à cette année, l'objectif voté par les parlementaires et proposé par un gouvernement n'a été respecté » ? Est-ce que c'est raisonnable ? Je ne le pense pas. Si on ne veut pas respecter les objectifs, qu'on ne s'en fixe pas. Mais si on s'en fixe un, on le respecte. Donc l'année dernière, on avait fixé comme objectif d'augmentation des dépenses santé 3 %. On le respecte. Cette année, on a fixé 2,9 %, on le respectera. Ou alors, Mesdames et Messieurs, qu'est ce qu'il se passe ? C'est n'importe quoi, c'est l'accumulation des dettes et des déficits. Il y a un moment donné où il faut prendre ses responsabilités -- je sais bien, on va dire encore que c'est parce que je veux dire non au non, je suis comme tout le monde, je préfère dire oui -- mais il se trouve que quand une décision arrive dans mon bureau, tous ceux qui pouvaient dire oui avant l'on fait. Et que si ça arrive dans mon bureau, c'est bien souvent parce qu'il faut dire non. Mais, vous-mêmes, dans vos entreprises, dans vos établissements, dans vos familles, vous connaissez cela. Vous-mêmes les élus locaux, par rapport à vos adjoints, aux conseillers municipaux, à la population, vous devez dire non. Mon travail est exactement le même, un peu plus large, mais le principe c'est le même. A un moment donné, il faut prendre ses responsabilités, et, par-dessus tout, faire confiance au bon sens des Français. Qu'on n'abuse pas, surtout si on leur dit les choses comme elles sont.
L'ONDAM, pour moi, n'est pas un Totem, ce n'est pas une obsession comptable. C'est simplement le signe que la France a décidé de garder la maîtrise de son destin £ que nous respectons le vote du Parlement et que nous n'iront pas quémander l'aide de tel ou un tel qui nous dira dans quelle direction aller ou ne pas aller. Voilà la première des souverainetés : la maîtrise de son destin. Et la France doit maîtriser ses finances pour maîtriser son destin.
Alors il faut que l'on s'adapte aux besoins de la population et que l'on prépare les enjeux de l'avenir.
Nous avons une difficulté sur la médecine de proximité. Et c'est vraiment une priorité que j'ai fixée à Xavier BERTRAND. Il faut résoudre les difficultés que rencontrent les professionnels de santé libéraux dans l'organisation de cette médecine de proximité. Il faut donner aux jeunes l'envie d'aller vers cette médecine de proximité. Sur 9 années d'études, un médecin en passe 8,5 à l'hôpital. On s'étonne qu'il veuille rester à l'hôpital et qu'il ne veuille pas aller en ruralité ou dans la médecine de proximité, il faut changer cela. L'hôpital est le lieu d'apprentissage privilégié, bien sûr, mais enfin, au-delà de l'hôpital, il y a des patients, il y a des réalités. Et le fait que nos jeunes médecins se confrontent à cette réalité, c'est très bon pour eux et ça va dynamiser le recrutement pour la médecine de proximité.
Il faut aider les professionnels à se regrouper. Il faut simplifier leur condition d'exercice au quotidien. Il faut leur rendre du temps médical. Maintenant les médecins passent plus de temps à remplir des paperasseries qu'à se consacrer à leurs patients. Laissons-les tranquilles, faisons leur confiance, non seulement en mettant un stop à l'accumulation de paperasseries mais diminuons, ce sera très bien pour l'écologie, cela fera des économies de papier et on détruira moins d'arbres par ailleurs. Et je ne suis pas persuadé qu'on saura moins de choses, on en saura d'ailleurs beaucoup plus. A force de demander des papiers, il n'y a plus personne qui les lit. Pour remplir le dossier d'une malheureuse personne âgée pour rentrer en maison de retraite, il faut Bac + 24. La meilleure preuve, c'est que comme personne ne comprend le dossier et n'est capable de le rédiger qu'est-ce qui se passe ? On va voir son médecin généraliste et on lui dit : vous ne pouvez pas me rendre service, remplissez-moi le dossier, je ne comprends pas. Le médecin n'est pas là pour remplir des dossiers, il est là pour soigner des patients. Est-ce que je me trompe dans ce que je dis, ce n'est pas la réalité que vous connaissez tous, tous les jours ? Je prends ma part de responsabilités aussi mais ce système effrayant qui fait que l'on veut contrôler tous et chacun, faut qu'on ne contrôle personne. Cela n'empêche pas la fraude mais cela favorise la paperasse, moyennant quoi on paie des médecins pour faire de la paperasse qui ne peuvent plus faire de la médecine et tout le monde est perdant.
Vous m'entendez bien, c'est un engagement que je prends devant vous : les décisions que va prendre Xavier BERTRAND avec Nora BERRA, c'est cette année qu'il va les prendre. Je préfère que l'on aille même un peu trop loin plutôt que pas assez, parce que cela changera tellement avec ce qui se passe depuis tant d'années que je suis persuadé que l'on a de la marge. J'y veillerai.
Je pense aussi qu'il faut diversifier les modes de rémunération des médecins. Je vois, on va immédiatement me dire : la rémunération à l'acte, vous allez la supprimer ? Pas du tout. J'aimerai tellement que l'on puisse réfléchir sans paniquer tout le monde. J'aimerai tellement que l'on comprenne que nous avons changé de siècle il y a 11 ans. C'est une information incroyable que je viens de vous révéler, c'est une novation extraordinaire, nous sommes au XXIème siècle. Donc poser la question du mal-être de tant de médecins, c'est poser une véritable question. Les conditions d'exercice, le stress, la responsabilité, les rémunérations. Il y a 20 ans ou 25 ans, le rêve d'un médecin, c'était de s'installer seul en libéral. Aujourd'hui, beaucoup veulent être en cabinet groupé et de préférence salarié, beaucoup, pas tous,.. Qu'est-ce qui s'est passé ? Il n'y a jamais eu tant de médecins en France, plus de 200.000 et jamais autant de spécialités où il n'y a personne et de territoires où l'on manque de médecin. Il y a peut-être quelque chose qui se passe. Quand je dis au ministre de la Santé, en qui j'ai pleine confiance, réfléchissons aux modes de rémunération, je ne veux pas remettre en cause ce qui marche, je veux compléter ce qui est insuffisant. Je n'ai jamais cru en la matière à la contrainte. Je crois à la confiance, à la responsabilité et à l'incitation. S'il y a des régions où l'on n'a pas assez de médecins, est-ce que l'on ne peut pas considérer que l'activité médicale est une activité en quelque sorte de service public qui à ce titre doit être rémunérée ? Je sais bien qu'en France il y a « égalité » au frontispice de tous nos établissements. Mais j'aimerais que l'on réfléchisse au mot égalité. Egalité cela ne veut pas dire donner la même chose à chacun. Cela veut dire donner plus à celui qui le mérite, donner plus à celui qui a le plus de difficulté. L'égalité ce n'est pas l'égalitarisme. Et l'unité ce n'est pas l'uniformité. Et je veux aller très au fond de ces débats avec les Français. Qu'est-ce que l'égalité ? Si vous donnez la même chose à chacun vous êtes injustes avec celui qui fait plus que les autres. Si vous donnez la même note à tous les élèves dans une classe, alors vous êtes injustes à l'endroit de celui qui a travaillé. Et si vous considérez qu'il faut donner les mêmes investissements publics à toutes les régions, alors vous êtes injustes à l'endroit des régions enclavées qui ont des handicaps naturels. Et je me battrai sur cette idée. L'égalité n'est pas l'égalitarisme.
Et je me battrai aussi sur une autre idée. Qu'est-ce que la justice ? La justice c'est que celui qui travaille ait la juste récompense de son travail, et que celui qui travaille soit toujours mieux traité que celui qui ne travaille pas. Ça c'est la justice. La justice ce n'est pas le même salaire et la même prestation, la même vie pour tout le monde. Bien sûr qu'il faut accompagner celles et ceux d'entre nous qui ont des difficultés. Mon dieu la vie est si dure ! Ne rajoutons pas une forme d'inhumanité. Mais en même temps, la justice ce n'est pas que le chômeur au chômage soit accompagné pour que cela soit le moins douloureux possible, la justice c'est que le chômeur au chômage, on se mobilise pour lui trouver un emploi. Voilà la justice. Pas simplement une allocation. Et je le dis pour les médecins, je suis prêt à aller assez loin dans la définition d'une nouvelle politique. La justice c'est que si tel ou tel d'entre vous, médecin, quel que soit votre âge, vous acceptez d'aller exercer dans des régions où on manque de médecins, la justice c'est que l'on tienne compte de cet effort et qu'on vous en récompense plutôt que pour que celui qui choisira d'exercer dans un quartier d'une grande ville où il y a tellement de médecins qui se marchent sur les pieds. C'est la justice.
Je veux que nos compatriotes réfléchissent sur ces idées qui sont très fortes. Je veux dire : égalité, unité, justice. L'unité de notre pays est quelque chose de très important. Mais l'unité de notre pays ce n'est pas d'imposer à une région qui se trouve à 8 000 kilomètres de l'hexagone d'être gérée exactement de la même façon que la région parisienne. Même le représentant de l'Etat, le Préfet, doit avoir plus de pouvoirs et d'autonomie lorsqu'il se trouve à 8 000 kilomètres de la capitale que lorsqu'il se trouve à 5 minutes des ministères.
Et donc, je crois profondément qu'il va falloir prendre à bras le corps tout ces sujets. Alors je me félicite de la décision que nous avions prise de financer les études d'un certain nombre de jeunes médecins en échange de quoi, puisque c'est l'Etat qui finance leurs études, ils vont s'installer et exercer pendant quelques années dans des régions où il n'y a pas assez de médecins.
Nous avons prévu 400 bourses pour cela, il y en a déjà 200 qui ont été affectées, je souhaite qu'on développe beaucoup ceci.
Je voudrais également qu'on décloisonne le système pour permettre des parcours de soins adaptés à l'état des patients. Et les agences régionales de santé ont à mes yeux une responsabilité extrêmement importante. Lorsqu'un malade reçoit des soins en ambulatoire, puis qu'il est hospitalisé, puis il est ensuite admis dans établissement de soins de suite, sa prise en charge ne doit pas pâtir du fait que plusieurs institutions publiques sont responsables des segments de cette prise en charge.
Désormais il y a un seul pilote, c'est l'Agence régionale de santé. Et Monsieur le Directeur, que cette agence prenne ses responsabilités. C'est ça que j'attends de vous. Parce que pour le patient, il y a la phase dans l'hôpital, il y a la phase après l'hôpital, il y a la phase du retour chez lui. C'est le même patient, c'est la même souffrance et je souhaite qu'il ait le même interlocuteur, qu'il n'ait pas le sentiment de passer d'un monde à un autre, surtout lorsque l'on est malade et qu'on se sent naturellement en situation de fragilité.
J'attache le plus grand prix au plan Alzheimer, je remercie Florence LUSTMAN et ses équipes du travail qu'ils ont réalisé. Je m'en félicite. Je soutiens de toutes mes forces la deuxième étape du plan cancer qui s'inscrit également dans la même logique.
Et je voudrais pour terminer vous dire un mot d'une réforme à laquelle j'attache une très grande importance qui est la réforme de la dépendance.
Mesdames et Messieurs, on est au coeur de l'idée que je me fais de mes responsabilités de chef de l'Etat. J'ai été élu pour 5 ans mais j'ai été élu pour résoudre des problèmes, pas pour les commenter. Pas pour mettre la poussière sous le tapis, en disant « on verra bien demain ». C'est la raison de mon élection, je dois donc travailler de la 1ère minute de mon mandat jusqu'à la dernière.
Travailler sur quoi ? Travailler sur les questions qui se posent à vous, pas celles qui ne se posent pas. Or forcément elles sont difficiles. Il y a eu l'affaire des retraites qui a suscité beaucoup de mauvaise humeur et beaucoup de protestation, je le comprends. Qui peut se satisfaire et être très heureux qu'on lui demande de travailler 2 années de plus sans gagner davantage ? Mais je vous pose une question, mes chers compatriotes, qui que vous soyez et quelle que soit votre sensibilité politique. Est-ce que vous auriez été plus heureux d'avoir un système de retraite en faillite ? Est-ce que de votre point de vue, y aurait-il eu moins de mauvaise humeur si les Français, au lieu qu'on leur demande 2 années de plus, alors qu'ils vivent plus longtemps, on leur avait dit au moment où ils partent à la retraite : « il n'y a pas d'argent pour payer ». Il y a 15 millions de retraités, 15 millions. Il y a 700 000 retraités de plus chaque année et pour 1 million et demi de retraités, les retraites n'étaient pas payées, c'est l'emprunt à la banque. Est-ce que c'était raisonnable ? Tout le monde le savait, à gauche, à droite, au centre. Tout le monde le savait. Et tout le monde savait que pour s'en sortir il fallait prendre des décisions difficiles. Est-ce que vous auriez été plus satisfait de moi si j'avais dit : « allez, ça fait 20 ans qu'on en parle, on va encore prendre une petite vingtaine d'années ». Ce n'est pas ma conception du service public. Et ce n'est pas l'idée que je me fais de mes responsabilités. Aujourd'hui je peux regarder chacun d'entre vous et vous dire : « à la minute où vous partirez à la retraite, il y aura les sommes nécessaires pour payer votre retraite ».
Quand on a voulu faire descendre dans la rue des lycéens, manifester pour la retraite à 60 ans. Est-ce qu'on a dit à ces lycéens que un sur deux, avec l'allongement de la durée de la vie, sera centenaire ? Et on les fait manifester pour la retraite à 60 ans ? Dans un pays où un sur deux sera centenaire, tant mieux pour eux ! Est-ce que c'est raisonnable ? Est-ce que c'est respectueux ? Est-ce que c'est digne ?
L'affaire de la dépendance, c'est exactement la même chose. Je vais m'en expliquer devant vous. 14 millions de Français ont plus de 60 ans. 3 millions ont plus de 80 ans. Et d'ores et déjà un million de personnes âgées sont dépendantes. C'est-à-dire qu'ils ne peuvent pas, seuls, se débrouiller. Ils ont perdu leur autonomie. Mais la question que je pose à la société française, quand on perd son autonomie physique, est-ce que l'on doit également renoncer à sa dignité ? Est-ce que l'on est moins un être humain ? Cet homme ou cette femme, victime du ravage des souffrances du grand âge, c'est un père, c'est une mère. C'est une femme ou un homme qui a travaillé toute sa vie, qui a élevé des enfants. C'est un destin. Est-ce qu'on doit le respecter ou est-ce qu'on ne doit pas le respecter ? Et cet homme ou cette femme que vous voyez, ayant perdu la connaissance de tout, ça pourrait être nous demain. Chacun d'entre nous demain. Est-ce que ça ne vaut pas la peine qu'on s'occupe de cette question ?
Tout le monde a les chiffres, tout le monde sait ce qu'il en est. Et tout le monde sait que l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ne permet pas de payer une maison de retraite spécialisée ou les aides à domicile qui leur sont nécessaires. Tout le monde le sait. Il y a très exactement 20 % des familles qui peuvent payer la maison de retraite de la personne dépendante. Et vous, Mesdames et Messieurs, je vous souhaite de tout coeur d'avoir vos parents- pour ceux qui les ont -- dans une société où les femmes travaillent, si votre père ou votre mère est dépendant, c'est votre femme qui va pouvoir s'en occuper ? Comment elle fera avec son travail ?
Dans une société où les maisons sont moins grandes, où les appartements sont moins grands, vous avez une chambre pour votre père ou votre mère ? Comme on faisait à la campagne au milieu du XXème siècle. Qui a ces moyens ? Pratiquement personne. Et quand bien même vous les auriez, la lourdeur des soins à apporter, parfois la violence et l'agressivité dues à la maladie, vous ne croyez pas que ça risque de faire exploser une famille unie ? D'être confronté à cela ?
Quel est mon devoir ? Repousser parce que c'est difficile, parce qu'il y a des élections ? Ou assumer et prendre les décisions ? Nous assumerons et nous prendrons les décisions.
C'est un chantier que j'ai confié à Roselyne BACHELOT et à Marie-Anne MONTCHAMP. Il s'agira de répondre à des questions difficiles, qui permettront d'ailleurs à tous ceux qui travaillent dessus et notamment, cher Louis PINTON, ce que vous faites de remarquable avec le conseil général, ici, mais il faudra répondre à des questions difficiles. Comment on finance ? Question très difficile mais que j'affronterai avec les ministres, parce qu'elle est incontournable. Il faut des moyens supplémentaires. Est-ce que ça sera de l'assurance ? Est-ce que ça sera plus de travail ? Est-ce que ce seront des prélèvements ? Le débat éclairera la position des uns et des autres mais une décision, il faudra la prendre. Pas assez de maisons, pas assez de personnel, pas assez d'aides, comment fait-on ? En tout cas je pense que c'est notre devoir d'affronter ces questions.
Voilà, Mesdames et Messieurs. Les Français attendent beaucoup de vous. La santé est une préoccupation essentielle. Cela rend votre métier exaltant.
Ce n'est pas pour rien que les Français considèrent le métier de médecin comme le plus prestigieux. Dans les sondages qui sont faits, avant le chef d'entreprise, avant le cadre, avant l'ingénieur, avant le professeur, il y a le médecin. Mais voyez-vous, quand les Français disent médecin, je pense qu'ils englobent l'ensemble des professionnels de santé. Les infirmières, les infirmiers, ...je pense que les Français ont un très grand respect pour les professionnels de santé. Et une très grande conscience pour les professionnels de santé. Il s'agit de voir d'ailleurs avec quel abandon, lorsqu'on est à l'hôpital, on fait confiance à ceux qui vous soignent.
Voilà les défis : que les professionnels de santé soient mieux reconnus dans leur métier, mieux formés encore. Que notre système collectif dégage les marges de manoeuvre pour améliorer la santé des Français. Et en même temps, que je ne laisse faire aucun gaspillage parce que la France doit rétablir ses comptes.
Redéfinir une chaine de pharmaco vigilance pour que vous retrouviez la confiance dans vos médicaments, sans en même temps tuer l'effort nécessaire de recherche pour l'innovation, De façon à ce que vous ayez les mêmes traitements.
Enfin, être transparent sur les problèmes de notre système et en même temps défendre notre système de santé, parce qu'il est l'un des meilleurs au monde.
Merci de m'avoir écouté, bonne année, vive la République et vive la France !
Monsieur le Ministre, cher Xavier BERTRAND,
Monsieur le Maire de Châtillon-sur-Indre,
Monsieur le Président, cher Louis PINTON,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de venir à la rencontre des personnels de santé et du secteur médico-social dans ce département de l'Indre pour vous présenter mes voeux. L'hôpital que je viens de visiter m'a permis, encore une fois, de mesurer la confiance méritée des patients dans leur personnel soignant, le dévouement des équipes de soins et la parfaite intégration d'une structure médicale dans un territoire comme le vôtre.
Je voudrais en tant que chef de l'Etat vous dire que la France peut et que la France doit être fière de son système de soins et de ses professionnels de santé.
Je sais que cette réussite tient à l'engagement et à la mobilisation de tous. Ensemble dans votre diversité vous contribuez à la richesse du système de santé français.
Par votre diversité nous avons tous un accès aux soins rapide et facile, nous avons un accès à des soins très pointus et nous parvenons à tirer le meilleur de l'engagement individuel des soignants et des valeurs collectives de solidarité.
Mesdames et Messieurs, mes chers compatriotes, je ne suis pas là pour passer sous silence les difficultés auxquelles se trouve confronté notre système de santé £ mais je veux rappeler parce que c'est mon devoir à quel point la France à la chance de pouvoir s'appuyer sur un système de santé absolument remarquable et qui n'a pas d'équivalent dans le monde.
Regardons ce qui se passe dans d'autres pays livrés, soit à l'inertie des monopoles qui par nature sont impossibles à moderniser, soit à une concurrence dérégulée entre acteurs privés et qui se déploie souvent au détriment de l'accès aux soins.
En France -- je veux le rappeler parce que c'est mon devoir -- on ne perd pas sa couverture maladie quand on perd son emploi. En France, on a l'habitude de pointer toujours ce qui va mal, mais quand on perd son emploi, et c'est bien le moins, on ne perd pas sa couverture maladie. Avez-vous vu ce qui se passe chez nombre de nos partenaires lorsqu'il y a une crise et lorsqu'il y a du chômage ? En France, on garantit aux plus pauvres un accès à une gamme de soins sans équivalent dans le monde. Et ceux qui sont juste au-dessus des seuils sont aidés à financer leur couverture complémentaire. Et je ne comprends pas pourquoi on ne souligne pas cette réalité.
Tout cela, c'est à porter au crédit de notre pays et de notre modèle.
La présence d'un secteur public et d'un secteur privé dans l'offre hospitalière, la conjonction de la prise en charge libérale et de l'intervention d'un service public développé constituent ce que l'on pourrait appeler une alchimie puissante. Regardez toutes les enquêtes qui sont menées sur l'attractivité de notre pays et vous noterez comme moi que les performances de notre système de soins sont dans la compétition internationale un atout reconnu pour la France.
Chaque année, mes chers compatriotes, nous consacrons 160 milliards de dépenses publiques à la santé. 160 milliards d'euros. Je ne m'en plains pas, quel est le capital plus précieux dont nous disposons si ce n'est celui de la santé. Mais je veux donner ce chiffre qui n'est jamais cité. 160 milliards d'euros.
Alors certains ont beau toujours mettre en avant le soi-disant démantèlement de la sécurité sociale, avec 160 milliards d'euros, le système collectif finance 75 % des dépenses de santé des Français £ les trois quarts de nos dépenses de santé sont pris en charge par le système collectif et ce taux est quasiment stable depuis 15 ans, ce qui me permet de dire que le système de santé français est le plus protecteur au monde. Et je ne pense pas qu'il se trouve un français pour le regretter.
Nous avons choisi de continuer à investir dans votre santé et dans notre système de santé et nous avons choisi de refuser de couper dans les dépenses de santé. Concrètement, cela signifie qu'en 2010, notre taux de croissance devrait être sur l'année un peu supérieur à 1,5 %. Avec une croissance un peu supérieure à 1,5 % l'ONDAM, c'est-à-dire le budget public que nous allouons à notre santé, a progressé de 3 %, soit le double. Je ne laisserai dire à personne que la France rationne les dépenses de santé. La croissance à 1,5 %, la croissance du budget collectif consacré aux dépenses de santé : 3 %. Ce n'est jamais suffisant, mais c'est une réalité, et je ne le dis pas pour vous dire que tout va bien, mais parce que les Français doivent être informés des vrais sujets et la santé est un véritable sujet. L'année prochaine nous tablons sur une croissance de 2 %, l'ONDAM, le budget public que nous allouons à notre santé, progressera de 2,9 %. Donc on consacrera plus d'argent que la croissance naturelle de notre économie à la santé. Et ce n'est pas une chose virtuelle, cela représente 5 milliards d'euros qui permettent chaque année de financer la modernisation de l'hôpital, de nouveaux traitements, ou le paiement des professionnels de santé.
Alors naturellement tout n'est pas une question d'argent. Il y a d'abord la richesse de la compétence des professionnels de santé qui s'investissent dans leur métier avec compétence et passion.
J'ai toujours été convaincu qu'il était vain de vouloir maitriser les dépenses d'assurance maladie par le rationnement, le refus de toute dépense nouvelle, le refus de tout investissement. Parce que cela conduit à la paupérisation.
Nous avons mis en oeuvre la réforme du LMD, à l'époque avec Roselyne BACHELOT, dont Xavier BERTRAND et Nora BERRA auront la responsabilité de la mettre en pratique et qui est la reconnaissance pour les infirmiers et les infirmières de notre pays de leurs qualités professionnelles. Tout le monde vous l'avait promis et je ne pouvais pas aller dans un endroit sans rencontrer des infirmières qui me disaient « et le LMD ? ». C'est fait. Et c'est normal parce que le demi million d'infirmières et d'infirmiers le méritait par le dévouement extraordinaire qui est le leur et la compétence remarquable qui est la leur.
J'assume les choix qui ont été faits, qui sont portés par Xavier BERTRAND de la revalorisation des médecins généralistes pour l'augmentation de leur consultation. Et comprenez moi bien : on ne peut pas dire à la fois qu'il faut soutenir la médecine générale, la médecine de proximité et refuser dans le même temps les moyens d'assurer la juste reconnaissance de la médecine générale et de la médecine de proximité.
Nous devons garantir la qualité et la sécurité des soins. C'est vrai, il y a des problèmes. J'avais indiqué il y a quelques semaines que la transparence la plus totale serait la règle sur le sujet du Médiator. C'est ce qu'a fait avec beaucoup de courage le ministre de la santé Xavier BERTRAND. Le rapport a été remis le 15 janvier au ministre qui l'a rendu public le même jour et le même jour Xavier BERTRAND a annoncé les premières mesures, notamment sur le renforcement de la chaine de pharmacovigilance et sur les conflits d'intérêts. Je comprends l'incompréhension, la colère de nos concitoyens et celle des familles de victimes. Il faut tirer toutes les leçons de ce dossier.
Nous allons donc engager une démarche de refondation, en profondeur, de notre politique du médicament. Il ne s'agit pas de mettre à bas tout ce qui a été construit en France depuis 20 ans en matière de sécurité sanitaire, d'accès à l'innovation, de gouvernance et de régulation du secteur du médicament.
Mais dans le même temps, nous devons ensemble poser des questions fondamentales qui touchent tous les acteurs du médicament.
- comment resserrer les mailles du filet de notre système de pharmacovigilance au travers de procédures plus réactives et d'autorités publiques plus efficaces ?
- comment renforcer la garantie absolue d'indépendance, de transparence, d'impartialité dans les prises de décision qui concernent toutes les facettes et tous les moments de la vie d'un médicament ?
- comment mieux accompagner les prescripteurs soumis à des attentes fortes des patients et à un flux d'informations non contrôlées ?
- comment renforcer la formation continue de vos médecins pour qu'ils soient au courant, dans le maquis de la profusion d'informations médicales innombrables auxquelles personne ne peut en temps réel avoir un accès sérieux ?
Répondre à ces questions, mes chers compatriotes, ne se fait pas en quelques jours. C'est la raison pour laquelle Xavier BERTRAND, et Nora BERRA, vont associer l'ensemble des acteurs du médicament à cette dynamique de refondation : patients, prescripteurs, autorités de régulation, industriels, experts. Tous seront associés à cette démarche dans un esprit de transparence et les conclusions aboutiront à des décisions que nous prendrons au milieu de cette année.
Mesdames et Messieurs, nous devons absolument sauvegarder notre système et pour le sauvegarder il faut qu'il soit plus efficient. Et je veux parler bien sûr des questions qui fâchent et notamment des problèmes des déficits. A la place qui est la mienne, je ne peux pas laisser les dépenses de santé déraper. Je vous ai dit que l'on consacrerait plus d'argent à la santé et je l'ai prouvé. Mais notre devoir c'est de faire en sorte que cet argent, le vôtre, soit investit de manière efficace. La gabegie et le gâchis, personne ne peut l'accepter. On a trop besoin d'argent pour les nouvelles techniques, pour des machines plus innovantes, pour des médicaments plus performants, pour se permettre de dilapider ou de gaspiller l'argent public. Et je ne peux pas laisser les dépenses des hôpitaux s'abîmer dans des déficits qui empêchent leur modernisation et qui brident leurs marges de manoeuvre.
A voir les deux tiers des hôpitaux, cela va mieux maintenant. Être en déficit, ce n'est simple pour personne et surtout pas pour les professionnels qui travaillent et qui se disent qu'est-ce qui va se passer demain.
Et je ne céderai pas aux demandes inconsidérées, sous prétexte que l'on se rapproche des sciences politiques importantes. D'abord, s'il faut céder aux demandes inconsidérées parce qu'il y a des élections, comme il y a des élections tout le temps, on ne fera plus que ça. Et à l'arrivée, je n'ai pas été élu pour que la France soit considérée comme un pays dépendant et qu'elle connaisse la réalité de ce que connaissent certains de nos partenaires en Europe. Je ne suis pas persuadé que qui que ce soit en France a envie que nous connaissions les affres de l'Irlande, du Portugal, ou de la Grèce. Personne.
Et donc nous allons poursuivre la réforme de l'hôpital. En facilitant la mutualisation des services, en créant des synergies, en encourageant la coopération entre établissements. Les communautés hospitalières de territoire et les groupements de coopération sanitaire permettront d'assurer cette cohérence globale et de tirer les meilleurs atouts en faisant travailler ensemble le public et le privé, la médecine de ville et l'hôpital, les établissements entre eux, comme je l'ai vu ce matin.
Nous avons une obligation éthique de bonne gestion, c'est de la morale. Et nous devons mettre en oeuvre de principes simples : si les médicaments sont inefficaces, il faut les sortir du remboursement, et ne pas avoir peur des protestations de tel ou tel. De toute manière, ça proteste. Donc il faut prendre un peu de distance par rapport à cela et n'avoir comme seul objectif que de protéger les Français et respecter l'intérêt général. Si des services hospitaliers éparpillés doivent être regroupés, au bénéfice de la qualité des soins et de la bonne gestion, il faut le faire. Personne ne peut être satisfait d'être reçu dans un service ou dans un hôpital dangereux pour sa santé. Et si des fraudes aux prestations maladies sont détectées, il faut les pourchasser, sans relâche.
En 2010, nous avons respecté l'ONDAM, l'objectif de dépense d'assurance maladie voté par le Parlement - tenez-vous bien, Mesdames et Messieurs-, pour la première fois depuis la création de l'ONDAM en 1997. Mais est-ce que c'est raisonnable qu'un gouvernement aille devant le Parlement en disant « voilà, le budget public que l'on va consacrer à la santé des Français, le processus a été créé jusqu'en 1997, et jamais, jusqu'à cette année, l'objectif voté par les parlementaires et proposé par un gouvernement n'a été respecté » ? Est-ce que c'est raisonnable ? Je ne le pense pas. Si on ne veut pas respecter les objectifs, qu'on ne s'en fixe pas. Mais si on s'en fixe un, on le respecte. Donc l'année dernière, on avait fixé comme objectif d'augmentation des dépenses santé 3 %. On le respecte. Cette année, on a fixé 2,9 %, on le respectera. Ou alors, Mesdames et Messieurs, qu'est ce qu'il se passe ? C'est n'importe quoi, c'est l'accumulation des dettes et des déficits. Il y a un moment donné où il faut prendre ses responsabilités -- je sais bien, on va dire encore que c'est parce que je veux dire non au non, je suis comme tout le monde, je préfère dire oui -- mais il se trouve que quand une décision arrive dans mon bureau, tous ceux qui pouvaient dire oui avant l'on fait. Et que si ça arrive dans mon bureau, c'est bien souvent parce qu'il faut dire non. Mais, vous-mêmes, dans vos entreprises, dans vos établissements, dans vos familles, vous connaissez cela. Vous-mêmes les élus locaux, par rapport à vos adjoints, aux conseillers municipaux, à la population, vous devez dire non. Mon travail est exactement le même, un peu plus large, mais le principe c'est le même. A un moment donné, il faut prendre ses responsabilités, et, par-dessus tout, faire confiance au bon sens des Français. Qu'on n'abuse pas, surtout si on leur dit les choses comme elles sont.
L'ONDAM, pour moi, n'est pas un Totem, ce n'est pas une obsession comptable. C'est simplement le signe que la France a décidé de garder la maîtrise de son destin £ que nous respectons le vote du Parlement et que nous n'iront pas quémander l'aide de tel ou un tel qui nous dira dans quelle direction aller ou ne pas aller. Voilà la première des souverainetés : la maîtrise de son destin. Et la France doit maîtriser ses finances pour maîtriser son destin.
Alors il faut que l'on s'adapte aux besoins de la population et que l'on prépare les enjeux de l'avenir.
Nous avons une difficulté sur la médecine de proximité. Et c'est vraiment une priorité que j'ai fixée à Xavier BERTRAND. Il faut résoudre les difficultés que rencontrent les professionnels de santé libéraux dans l'organisation de cette médecine de proximité. Il faut donner aux jeunes l'envie d'aller vers cette médecine de proximité. Sur 9 années d'études, un médecin en passe 8,5 à l'hôpital. On s'étonne qu'il veuille rester à l'hôpital et qu'il ne veuille pas aller en ruralité ou dans la médecine de proximité, il faut changer cela. L'hôpital est le lieu d'apprentissage privilégié, bien sûr, mais enfin, au-delà de l'hôpital, il y a des patients, il y a des réalités. Et le fait que nos jeunes médecins se confrontent à cette réalité, c'est très bon pour eux et ça va dynamiser le recrutement pour la médecine de proximité.
Il faut aider les professionnels à se regrouper. Il faut simplifier leur condition d'exercice au quotidien. Il faut leur rendre du temps médical. Maintenant les médecins passent plus de temps à remplir des paperasseries qu'à se consacrer à leurs patients. Laissons-les tranquilles, faisons leur confiance, non seulement en mettant un stop à l'accumulation de paperasseries mais diminuons, ce sera très bien pour l'écologie, cela fera des économies de papier et on détruira moins d'arbres par ailleurs. Et je ne suis pas persuadé qu'on saura moins de choses, on en saura d'ailleurs beaucoup plus. A force de demander des papiers, il n'y a plus personne qui les lit. Pour remplir le dossier d'une malheureuse personne âgée pour rentrer en maison de retraite, il faut Bac + 24. La meilleure preuve, c'est que comme personne ne comprend le dossier et n'est capable de le rédiger qu'est-ce qui se passe ? On va voir son médecin généraliste et on lui dit : vous ne pouvez pas me rendre service, remplissez-moi le dossier, je ne comprends pas. Le médecin n'est pas là pour remplir des dossiers, il est là pour soigner des patients. Est-ce que je me trompe dans ce que je dis, ce n'est pas la réalité que vous connaissez tous, tous les jours ? Je prends ma part de responsabilités aussi mais ce système effrayant qui fait que l'on veut contrôler tous et chacun, faut qu'on ne contrôle personne. Cela n'empêche pas la fraude mais cela favorise la paperasse, moyennant quoi on paie des médecins pour faire de la paperasse qui ne peuvent plus faire de la médecine et tout le monde est perdant.
Vous m'entendez bien, c'est un engagement que je prends devant vous : les décisions que va prendre Xavier BERTRAND avec Nora BERRA, c'est cette année qu'il va les prendre. Je préfère que l'on aille même un peu trop loin plutôt que pas assez, parce que cela changera tellement avec ce qui se passe depuis tant d'années que je suis persuadé que l'on a de la marge. J'y veillerai.
Je pense aussi qu'il faut diversifier les modes de rémunération des médecins. Je vois, on va immédiatement me dire : la rémunération à l'acte, vous allez la supprimer ? Pas du tout. J'aimerai tellement que l'on puisse réfléchir sans paniquer tout le monde. J'aimerai tellement que l'on comprenne que nous avons changé de siècle il y a 11 ans. C'est une information incroyable que je viens de vous révéler, c'est une novation extraordinaire, nous sommes au XXIème siècle. Donc poser la question du mal-être de tant de médecins, c'est poser une véritable question. Les conditions d'exercice, le stress, la responsabilité, les rémunérations. Il y a 20 ans ou 25 ans, le rêve d'un médecin, c'était de s'installer seul en libéral. Aujourd'hui, beaucoup veulent être en cabinet groupé et de préférence salarié, beaucoup, pas tous,.. Qu'est-ce qui s'est passé ? Il n'y a jamais eu tant de médecins en France, plus de 200.000 et jamais autant de spécialités où il n'y a personne et de territoires où l'on manque de médecin. Il y a peut-être quelque chose qui se passe. Quand je dis au ministre de la Santé, en qui j'ai pleine confiance, réfléchissons aux modes de rémunération, je ne veux pas remettre en cause ce qui marche, je veux compléter ce qui est insuffisant. Je n'ai jamais cru en la matière à la contrainte. Je crois à la confiance, à la responsabilité et à l'incitation. S'il y a des régions où l'on n'a pas assez de médecins, est-ce que l'on ne peut pas considérer que l'activité médicale est une activité en quelque sorte de service public qui à ce titre doit être rémunérée ? Je sais bien qu'en France il y a « égalité » au frontispice de tous nos établissements. Mais j'aimerais que l'on réfléchisse au mot égalité. Egalité cela ne veut pas dire donner la même chose à chacun. Cela veut dire donner plus à celui qui le mérite, donner plus à celui qui a le plus de difficulté. L'égalité ce n'est pas l'égalitarisme. Et l'unité ce n'est pas l'uniformité. Et je veux aller très au fond de ces débats avec les Français. Qu'est-ce que l'égalité ? Si vous donnez la même chose à chacun vous êtes injustes avec celui qui fait plus que les autres. Si vous donnez la même note à tous les élèves dans une classe, alors vous êtes injustes à l'endroit de celui qui a travaillé. Et si vous considérez qu'il faut donner les mêmes investissements publics à toutes les régions, alors vous êtes injustes à l'endroit des régions enclavées qui ont des handicaps naturels. Et je me battrai sur cette idée. L'égalité n'est pas l'égalitarisme.
Et je me battrai aussi sur une autre idée. Qu'est-ce que la justice ? La justice c'est que celui qui travaille ait la juste récompense de son travail, et que celui qui travaille soit toujours mieux traité que celui qui ne travaille pas. Ça c'est la justice. La justice ce n'est pas le même salaire et la même prestation, la même vie pour tout le monde. Bien sûr qu'il faut accompagner celles et ceux d'entre nous qui ont des difficultés. Mon dieu la vie est si dure ! Ne rajoutons pas une forme d'inhumanité. Mais en même temps, la justice ce n'est pas que le chômeur au chômage soit accompagné pour que cela soit le moins douloureux possible, la justice c'est que le chômeur au chômage, on se mobilise pour lui trouver un emploi. Voilà la justice. Pas simplement une allocation. Et je le dis pour les médecins, je suis prêt à aller assez loin dans la définition d'une nouvelle politique. La justice c'est que si tel ou tel d'entre vous, médecin, quel que soit votre âge, vous acceptez d'aller exercer dans des régions où on manque de médecins, la justice c'est que l'on tienne compte de cet effort et qu'on vous en récompense plutôt que pour que celui qui choisira d'exercer dans un quartier d'une grande ville où il y a tellement de médecins qui se marchent sur les pieds. C'est la justice.
Je veux que nos compatriotes réfléchissent sur ces idées qui sont très fortes. Je veux dire : égalité, unité, justice. L'unité de notre pays est quelque chose de très important. Mais l'unité de notre pays ce n'est pas d'imposer à une région qui se trouve à 8 000 kilomètres de l'hexagone d'être gérée exactement de la même façon que la région parisienne. Même le représentant de l'Etat, le Préfet, doit avoir plus de pouvoirs et d'autonomie lorsqu'il se trouve à 8 000 kilomètres de la capitale que lorsqu'il se trouve à 5 minutes des ministères.
Et donc, je crois profondément qu'il va falloir prendre à bras le corps tout ces sujets. Alors je me félicite de la décision que nous avions prise de financer les études d'un certain nombre de jeunes médecins en échange de quoi, puisque c'est l'Etat qui finance leurs études, ils vont s'installer et exercer pendant quelques années dans des régions où il n'y a pas assez de médecins.
Nous avons prévu 400 bourses pour cela, il y en a déjà 200 qui ont été affectées, je souhaite qu'on développe beaucoup ceci.
Je voudrais également qu'on décloisonne le système pour permettre des parcours de soins adaptés à l'état des patients. Et les agences régionales de santé ont à mes yeux une responsabilité extrêmement importante. Lorsqu'un malade reçoit des soins en ambulatoire, puis qu'il est hospitalisé, puis il est ensuite admis dans établissement de soins de suite, sa prise en charge ne doit pas pâtir du fait que plusieurs institutions publiques sont responsables des segments de cette prise en charge.
Désormais il y a un seul pilote, c'est l'Agence régionale de santé. Et Monsieur le Directeur, que cette agence prenne ses responsabilités. C'est ça que j'attends de vous. Parce que pour le patient, il y a la phase dans l'hôpital, il y a la phase après l'hôpital, il y a la phase du retour chez lui. C'est le même patient, c'est la même souffrance et je souhaite qu'il ait le même interlocuteur, qu'il n'ait pas le sentiment de passer d'un monde à un autre, surtout lorsque l'on est malade et qu'on se sent naturellement en situation de fragilité.
J'attache le plus grand prix au plan Alzheimer, je remercie Florence LUSTMAN et ses équipes du travail qu'ils ont réalisé. Je m'en félicite. Je soutiens de toutes mes forces la deuxième étape du plan cancer qui s'inscrit également dans la même logique.
Et je voudrais pour terminer vous dire un mot d'une réforme à laquelle j'attache une très grande importance qui est la réforme de la dépendance.
Mesdames et Messieurs, on est au coeur de l'idée que je me fais de mes responsabilités de chef de l'Etat. J'ai été élu pour 5 ans mais j'ai été élu pour résoudre des problèmes, pas pour les commenter. Pas pour mettre la poussière sous le tapis, en disant « on verra bien demain ». C'est la raison de mon élection, je dois donc travailler de la 1ère minute de mon mandat jusqu'à la dernière.
Travailler sur quoi ? Travailler sur les questions qui se posent à vous, pas celles qui ne se posent pas. Or forcément elles sont difficiles. Il y a eu l'affaire des retraites qui a suscité beaucoup de mauvaise humeur et beaucoup de protestation, je le comprends. Qui peut se satisfaire et être très heureux qu'on lui demande de travailler 2 années de plus sans gagner davantage ? Mais je vous pose une question, mes chers compatriotes, qui que vous soyez et quelle que soit votre sensibilité politique. Est-ce que vous auriez été plus heureux d'avoir un système de retraite en faillite ? Est-ce que de votre point de vue, y aurait-il eu moins de mauvaise humeur si les Français, au lieu qu'on leur demande 2 années de plus, alors qu'ils vivent plus longtemps, on leur avait dit au moment où ils partent à la retraite : « il n'y a pas d'argent pour payer ». Il y a 15 millions de retraités, 15 millions. Il y a 700 000 retraités de plus chaque année et pour 1 million et demi de retraités, les retraites n'étaient pas payées, c'est l'emprunt à la banque. Est-ce que c'était raisonnable ? Tout le monde le savait, à gauche, à droite, au centre. Tout le monde le savait. Et tout le monde savait que pour s'en sortir il fallait prendre des décisions difficiles. Est-ce que vous auriez été plus satisfait de moi si j'avais dit : « allez, ça fait 20 ans qu'on en parle, on va encore prendre une petite vingtaine d'années ». Ce n'est pas ma conception du service public. Et ce n'est pas l'idée que je me fais de mes responsabilités. Aujourd'hui je peux regarder chacun d'entre vous et vous dire : « à la minute où vous partirez à la retraite, il y aura les sommes nécessaires pour payer votre retraite ».
Quand on a voulu faire descendre dans la rue des lycéens, manifester pour la retraite à 60 ans. Est-ce qu'on a dit à ces lycéens que un sur deux, avec l'allongement de la durée de la vie, sera centenaire ? Et on les fait manifester pour la retraite à 60 ans ? Dans un pays où un sur deux sera centenaire, tant mieux pour eux ! Est-ce que c'est raisonnable ? Est-ce que c'est respectueux ? Est-ce que c'est digne ?
L'affaire de la dépendance, c'est exactement la même chose. Je vais m'en expliquer devant vous. 14 millions de Français ont plus de 60 ans. 3 millions ont plus de 80 ans. Et d'ores et déjà un million de personnes âgées sont dépendantes. C'est-à-dire qu'ils ne peuvent pas, seuls, se débrouiller. Ils ont perdu leur autonomie. Mais la question que je pose à la société française, quand on perd son autonomie physique, est-ce que l'on doit également renoncer à sa dignité ? Est-ce que l'on est moins un être humain ? Cet homme ou cette femme, victime du ravage des souffrances du grand âge, c'est un père, c'est une mère. C'est une femme ou un homme qui a travaillé toute sa vie, qui a élevé des enfants. C'est un destin. Est-ce qu'on doit le respecter ou est-ce qu'on ne doit pas le respecter ? Et cet homme ou cette femme que vous voyez, ayant perdu la connaissance de tout, ça pourrait être nous demain. Chacun d'entre nous demain. Est-ce que ça ne vaut pas la peine qu'on s'occupe de cette question ?
Tout le monde a les chiffres, tout le monde sait ce qu'il en est. Et tout le monde sait que l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) ne permet pas de payer une maison de retraite spécialisée ou les aides à domicile qui leur sont nécessaires. Tout le monde le sait. Il y a très exactement 20 % des familles qui peuvent payer la maison de retraite de la personne dépendante. Et vous, Mesdames et Messieurs, je vous souhaite de tout coeur d'avoir vos parents- pour ceux qui les ont -- dans une société où les femmes travaillent, si votre père ou votre mère est dépendant, c'est votre femme qui va pouvoir s'en occuper ? Comment elle fera avec son travail ?
Dans une société où les maisons sont moins grandes, où les appartements sont moins grands, vous avez une chambre pour votre père ou votre mère ? Comme on faisait à la campagne au milieu du XXème siècle. Qui a ces moyens ? Pratiquement personne. Et quand bien même vous les auriez, la lourdeur des soins à apporter, parfois la violence et l'agressivité dues à la maladie, vous ne croyez pas que ça risque de faire exploser une famille unie ? D'être confronté à cela ?
Quel est mon devoir ? Repousser parce que c'est difficile, parce qu'il y a des élections ? Ou assumer et prendre les décisions ? Nous assumerons et nous prendrons les décisions.
C'est un chantier que j'ai confié à Roselyne BACHELOT et à Marie-Anne MONTCHAMP. Il s'agira de répondre à des questions difficiles, qui permettront d'ailleurs à tous ceux qui travaillent dessus et notamment, cher Louis PINTON, ce que vous faites de remarquable avec le conseil général, ici, mais il faudra répondre à des questions difficiles. Comment on finance ? Question très difficile mais que j'affronterai avec les ministres, parce qu'elle est incontournable. Il faut des moyens supplémentaires. Est-ce que ça sera de l'assurance ? Est-ce que ça sera plus de travail ? Est-ce que ce seront des prélèvements ? Le débat éclairera la position des uns et des autres mais une décision, il faudra la prendre. Pas assez de maisons, pas assez de personnel, pas assez d'aides, comment fait-on ? En tout cas je pense que c'est notre devoir d'affronter ces questions.
Voilà, Mesdames et Messieurs. Les Français attendent beaucoup de vous. La santé est une préoccupation essentielle. Cela rend votre métier exaltant.
Ce n'est pas pour rien que les Français considèrent le métier de médecin comme le plus prestigieux. Dans les sondages qui sont faits, avant le chef d'entreprise, avant le cadre, avant l'ingénieur, avant le professeur, il y a le médecin. Mais voyez-vous, quand les Français disent médecin, je pense qu'ils englobent l'ensemble des professionnels de santé. Les infirmières, les infirmiers, ...je pense que les Français ont un très grand respect pour les professionnels de santé. Et une très grande conscience pour les professionnels de santé. Il s'agit de voir d'ailleurs avec quel abandon, lorsqu'on est à l'hôpital, on fait confiance à ceux qui vous soignent.
Voilà les défis : que les professionnels de santé soient mieux reconnus dans leur métier, mieux formés encore. Que notre système collectif dégage les marges de manoeuvre pour améliorer la santé des Français. Et en même temps, que je ne laisse faire aucun gaspillage parce que la France doit rétablir ses comptes.
Redéfinir une chaine de pharmaco vigilance pour que vous retrouviez la confiance dans vos médicaments, sans en même temps tuer l'effort nécessaire de recherche pour l'innovation, De façon à ce que vous ayez les mêmes traitements.
Enfin, être transparent sur les problèmes de notre système et en même temps défendre notre système de santé, parce qu'il est l'un des meilleurs au monde.
Merci de m'avoir écouté, bonne année, vive la République et vive la France !