27 août 2010 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, en hommage au capitaine Lorenzo Mezzasalma et au caporal chef Jean-Nicolas Panezyck, morts au combat en Afghanistan, à Fréjus (Var) le 27 août 2010.

Monsieur le Ministre,
Monsieur le Secrétaire d'Etat,
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Maire,
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes réunis pour un dernier hommage au capitaine Lorenzo MEZZASALMA et au caporal chef Jean-Nicolas PANEZYCK, tombés au champ d'honneur le 23 août.
Je me devais d'être à vos côtés aujourd'hui. Pour partager avec vous, personnellement et au nom de la Nation tout entière, la peine et le chagrin provoqués par la disparition de ces hommes courageux. Ils ont quitté brutalement une vie encore pleine de promesses, laissant une famille, laissant deux petits garçons à l'incompréhensible douleur de leur absence.
Nous sommes réunis, avec leurs proches et leurs frères d'armes, dans ce camp « Lecocq », en ce haut lieu des troupes de marine, pour dire le respect, l'admiration, que nous éprouvons pour leur héroïsme et pour leur sacrifice. Ils avaient choisi de mettre leur vie au service de la France et de leurs compatriotes. En tant que chef de l'État, je m'incline devant leur mémoire.
Aujourd'hui, je suis venu témoigner la gratitude et la solidarité de tous les Français. Je suis aussi venu vous dire qu'en tant que chef de l'Etat et chef des Armées, je mesure et j'assume les responsabilités qui sont les miennes lorsque nos soldats sont engagés au péril de leur vie. Je porte en moi la tragédie de chacune de ces vies interrompues dans la fleur de l'âge. Nous ne les oublierons pas. Leur souvenir renforce en chacun de nous la détermination à poursuivre notre engagement au service de la France.
A travers Lorenzo et Jean-Nicolas, je veux rendre hommage à tous les soldats français tombés en servant notre pays, et particulièrement aux nombreux marsouins qui ont versé leur sang pour la France. Mes pensées vont aussi vers vos frères d'armes du « 21 », blessés quelques heures plus tôt au cours de l'opération qui a coûté la vie à Lorenzo et Jean-Nicolas : l'adjudant Patrice LEFEVRE, le caporal Alexandre DELOT et le caporal Stéphane BOISSINOT. Qu'ils sachent, avec leurs familles, que nous sommes à leurs côtés dans l'épreuve qu'ils traversent. Je leur souhaite du fond du coeur de se rétablir rapidement.
Comme leurs 9 autres camarades du « 21 » blessés depuis le début de nos opérations en Afghanistan, ils peuvent compter sur le soutien de l'armée française.
Capitaine Lorenzo MEZZASALMA,
Caporal-chef Jean-Nicolas PANEZYCK,
Vous avez vécu votre engagement jusqu'au sacrifice suprême. Vous avez été mortellement blessés au combat, lundi dernier, au sud de Tagab, dans la province de Kapisa. Au sein de la Task Force Hermès, vous meniez une opération pour sécuriser la zone et permettre à ses habitants de vivre en paix.
Vous aviez rejoint l'Afghanistan le 7 juin dernier, au terme d'un parcours en tous points remarquable.
Caporal-chef PANEZYCK,
Engagé volontaire au sein du 21ème Régiment d'infanterie de marine, vous aviez participé à plusieurs missions, en Nouvelle-Calédonie, au Kosovo, en Guyane. Vous vous étiez distingué comme grenadier voltigeur, comme tireur Eryx et comme chef d'équipe. Votre énergie, votre courage vous valaient l'admiration de tous.
Capitaine MEZZASALMA,
Vous aviez choisi les troupes de marine à votre sortie de l'école nationale des sous-officiers d'active : le 3ème Régiment d'infanterie de marine d'abord, puis le 3ème Régiment de parachutistes d'infanterie de marine. De la République de Côte d'Ivoire au Gabon, de la Guyane à Djibouti, de l'Ex-Yougoslavie à la Nouvelle-Calédonie, vos compétences, votre enthousiasme et votre charisme vous avaient permis de gravir tous les grades du corps des sous-officiers. Animé par la volonté de progresser sans cesse, c'est en qualité d'officier que vous aviez rejoint le 21ème Régiment d'infanterie de marine.
Comme tous vos camarades choisis pour partir en Afghanistan, vous étiez tous les deux des soldats d'exception. Votre engagement était total. Un engagement à la mesure de celui de la France, pour la défense de la liberté et de la dignité humaine. Un engagement au service de la sécurité du monde, contre le terrorisme et ses barbares, contre la violence aveugle. Un engagement aux côtés des Afghans, pour leur permettre de vivre en paix et de prendre en main leur destin.
Tel est le sens de ce combat, pour lequel vous avez donné votre vie. La détermination dont vous avez fait preuve est celle de la France, qui restera en Afghanistan aussi longtemps que nécessaire. Nous ne pouvons laisser le champ libre aux fanatiques, aux barbares, aux terroristes qui menacent nos sociétés, qui bafouent les valeurs universelles de l'humanité, qui sèment la mort. Notre sécurité, ici, en France, repose aussi sur notre engagement là-bas. La barbarie ne peut pas l'emporter contre la démocratie.
Je sais combien cette mission est difficile, j'en mesure les risques et j'en assume les responsabilités, mais la France ne peut pas se dérober aux impératifs de sa sécurité, la France ne peut pas se dérober à ses responsabilités dans la lutte contre le terrorisme mondial. Dans la fidélité à nos valeurs, à notre engagement, et au souvenir des 45 soldats français tombés comme vous au champ d'honneur, nous devons poursuivre notre action en faveur du peuple afghan avec nos alliés.
Lorenzo,
Jean-Nicolas,
Là-bas en Kapisa, vous incarniez cette fraternité d'armes si singulière, cette solidarité que vous avez vécue jusque dans la mort : vous, caporal-chef, qui êtes tombé en soldat héroïque, alors que vous étiez en train d'ouvrir la voie à vos camarades, et vous, mon capitaine, qui avez donné votre vie en tentant de sauver celle de votre camarade. Votre courage illustre ce qu'il y a de meilleur en l'homme.
Je suis fier de pouvoir compter sur la valeur au combat et le sens du sacrifice d'hommes tels que vous. Je suis fier de l'esprit qui vous anime tous, marsouins, cet esprit de Bazeilles dont nous célébrerons ici-même, dans quelques jours, le 140ème anniversaire.
Capitaine Lorenzo MEZZASALMA,
Caporal-chef Jean-Nicolas PANEZYCK,
Sous l'ancre d'or des troupes de marine, vous avez rejoint vos glorieux anciens. Aujourd'hui, fidèles à la devise du « 21 », « croche et tiens », vos camarades continuent leur route en terre afghane, guidés par le souvenir de votre générosité, de votre amour du métier des armes et de votre foi en cette mission.
En vous remettant les insignes de chevalier de la Légion d'honneur, je veux vous exprimer la gratitude de la Nation pour votre sacrifice et sa profonde tristesse d'avoir perdu deux de ses enfants les plus valeureux et les plus dévoués.
Vous aviez choisi de placer votre existence sous le signe de cet idéal unique : la France. Vous avez donné votre vie pour elle.
Une vie trop courte. Mais une vie exemplaire. Une grande vie.
Une de ces vies qui ont construit l'histoire de notre pays et qui forgent son avenir.
Je sais bien que ces mots ont peu de poids face au chagrin d'une femme, d'une fiancée, d'une mère, d'un fils, mais je veux dire à vos familles que nous les entourerons, que nous les soutiendrons, qu'elles ne sont pas seules.
Je veux dire à vos deux enfants qu'ils peuvent être fiers de leur père : ils ont choisi leur vie et ce n'est pas tout le monde qui peut dire avoir choisi sa vie.
Puisse leur exemple nourrir notre détermination à défendre les valeurs de la France, dans le souvenir de leur héroïsme et de leur courage.