19 juin 2010 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, sur les relations franco-russes dans le cadre international, à Saint-Pétersbourg le 19 juin 2010.

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Mesdames et Messieurs, très brièvement puisque j'ai déjà eu l'occasion lors du Forum de donner la position de la France. Je veux dire combien j'ai été honoré d'être l'invité de ce Forum de Saint-Pétersbourg, qui est devenu un rendez-vous international incontournable, combien je suis heureux de travailler main dans la main avec le président Medvedev. Nous avons fait un très large tour d'horizon sur tous les dossiers, notamment le G20, le G8, où nous nous rendrons à la fin de la semaine prochaine ensemble. Nous partageons la même volonté de faire bouger les choses. J'ai eu également l'occasion de dire combien la France avait apprécié l'attitude de la Russie s'agissant des sanctions à l'endroit de l'Iran. Enfin, devant les chefs d'entreprise et les ministres, je veux dire combien je suis satisfait de l'évolution spectaculaire des relations économiques entre nos deux économies £ spectaculaire en volume, c'est sans précédent et spectaculaire quant à la diversification de nos activités communes qui ne sont plus simplement dans les secteurs stratégiques habituels mais qui maintenant adoptent l'ensemble des secteurs importants de nos deux économies. Je crois qu'on peut le dire, rarement dans l'histoire, les relations entre la Russie et la France n'ont été à ce point ambitieuses, sans nuage et pleine de confiance réciproque.
Q - Je voudrais poser la question au président Sarkozy et au président Medvedev. Lors de vos interventions au Forum, vous avez dit qu'il faut élargir le nombre des devises de réserve et au plus vite. A l'instant, vous avez dit que vos positions concernant le G8 et le G20 sont coordonnés. Avez-vous parlé de cette liste de devises de réserve ? Que pense M. Sarkozy du rouble et du yuan ? Aujourd'hui, nous avons reçu des informations que la Chine veut consolider le yuan et peut-être que la Chine fait partie de la liste. Une autre question sur l'euro au président Sarkozy, les positions de la France sont-elles coordonnées avec Mme Merkel en ce qui concerne le soutien de l'euro ?
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R - Madame, trois remarques. La première, c'est que naturellement la Russie a un rôle à jouer dans l'élaboration du futur nouvel ordre monétaire mondial. La Russie est une puissance qui compte sur la scène internationale et la Russie a des idées à apporter sur cette nouvelle organisation. Nous sommes d'accord, la Russie et la France, sur l'idée qu'il faut que les choses bougent et qu'elles doivent bouger dans les mois qui viennent.
Deuxièmement, les récentes déclarations des dirigeants chinois sur le yuan sont plutôt encourageantes. Et nous les prenons avec satisfaction. Nous disons que personne n'a à se sentir accusé et que chacun doit apporter sa pierre à ce nouvel édifice.
Troisièmement, par construction, s'agissant de la France et de l'Allemagne et du soutien à l'euro, nous avons la même position. Les responsabilités de l'Allemagne et de la France en Europe sont telles que nous convergeons sur la totalité de nos positions. Nous ne pouvons pas nous permettre quelque opposition que ce soit. Elles n'ont pas lieu d'être. Nous parlons très souvent avec la chancelière. Nos ministres se rencontrent sans cesse. Nos positions, quand elles ne sont pas spontanément les mêmes, eh bien nous prenons le temps qu'il faut pour qu'elles se rapprochent. C'est clair, c'est simple, l'Allemagne et la France ont la même position s'agissant de l'euro.
Q - Plusieurs des contrats annoncés aujourd'hui portent sur des secteurs dit sensibles, il y a le nucléaire, il y a l'aérospatiale et également en discussion la livraison par la France de porte- hélicoptères Mistral à la Russie. Alors où se situent aujourd'hui, si elles existent, les limites au transfert de technologie entre la France et la Russie ? Par ailleurs, vous vous êtes déclarés tous les deux, à l'issue du Forum, raisonnablement optimistes sur la sortie de la crise. Sur quels éléments concrets fondez-vous cet optimisme ? Et dans le cas de la France, Monsieur le Président, faut-il voir un signe de votre confiance dans l'objectif de croissance affiché pour la France l'an prochain, qui est de 2,5 % et que certains trouvent un peu optimiste ?
R - Les limites au contrat que nous signons, elles sont toutes simples, c'est que ces contrats doivent être dans l'intérêt réciproque de la Russie et de la France. C'est cela que nous essayons de faire. Un partenariat, c'est cela. Que nos amis russes trouvent intérêt à travailler avec nos entreprises et que nous trouvions le même intérêt à travailler avec eux. Nous ne sommes pas simplement dans une relation client/fournisseur, nous sommes dans une relation de partenaires sur le long terme. Nous savons parfaitement qu'il y aura des transferts technologiques, si c'est l'intérêt des deux.
J'ajoute que vous m'avez posé des questions sur le nucléaire. La Russie est une puissance nucléaire, depuis longtemps. La science française et la science russe travaillent ensemble depuis bien longtemps. Le Mistral, j'ai déjà eu l'occasion de m'en expliquer. Nos amis russes ont pris la position que vous savez sur l'Iran et on devrait en tirer la conclusion qu'on ne peut pas aller leur vendre des Mistral. Cela n'aurait aucun sens, c'est totalement incohérent. Et un grand partenariat dans l'agroalimentaire, un grand partenariat dans le transport, des grands partenariats dans l'énergie et les investisseurs russes ont décidé de construire deux grandes tours pour relancer le marché immobilier à La Défense. Voilà. La seule limite que je vois, c'est que ce soit dans l'intérêt réciproque des deux.
Sur les perspectives, pourquoi sommes-nous optimistes ? La croissance repart partout dans le monde. S'agissant de l'Europe et de la France, tous les organismes internationaux disent que la France a des prévisions meilleures que ses partenaires. Je ne vais pas m'en attrister. Si ce n'était pas le cas, vous n'hésiteriez pas à me le faire remarquer et à juste raison. J'ai pris, d'ailleurs, avec beaucoup d'intérêt les encouragements à poursuivre notre politique de réforme, qui nous ont été adressés par le FMI.
Enfin, quant aux perspectives de croissance, avec Mme Lagarde, nous avons toujours posé les choses de façon raisonnable et jusqu'à présent les perspectives que nous avons fixées, quand nous avons dû les réviser, c'était à la hausse pas à la baisse. Donc, au moins, que ce passé récent nous crédite pour le futur proche.
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Q - Je pose la question aux deux leaders. Le Forum de Saint-Pétersbourg se termine mais les grands événements sont devant nous. Ce sont les sommets du G8 et du G20. Comment va-t-on changer l'économie mondiale ? Quelles sont les questions où vos positions convergent ou diffèrent ? Quelles sont les positions communes ?
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R - Ecoutez très rapidement, si l'on veut bien considérer les choses, il y a parfois au sein du G20 deux camps : le camp des pays qui veulent que cela bouge et qu'on tire les conséquences de la crise et celui des pays qui considèrent que la crise étant en voie de s'estomper, il n'y a lieu d'en tirer aucune conséquence. Je note que sur à peu près tous les dossiers, la Russie et la France sont dans le camp des pays qui veulent un nouvel ordre mondial. Cela ne veut pas dire qu'on a exactement les mêmes positions sur la taxation des transactions financières ou des banques. Mais on a exactement la même stratégie. Nous voulons que les mêmes causes ne produisent pas les effets. Je pense qu'en disant cela, je vous dis les choses de la façon la plus honnête et la plus transparente, notre stratégie est la même, qu'on tire les leçons de la crise et qu'on les tire tout de suite. Quand on a des points où l'on n'est pas spontanément en accord, on en discute.
J'ajoute que nous avons décidé également qu'avec l'Allemagne, nous allons nous voir plus souvent à trois, Russie, Allemagne, France, de façon à coordonner nos positions et à faire avancer le système. Notre stratégie est donc exactement la même. A l'intérieur de cette stratégie, il peut y avoir tel ou tel dossier où nos intérêts ne sont pas exactement les mêmes, où nos sensibilités ne sont pas exactement les mêmes. Dans ce cas, on fait un compromis, on s'entend.
Q - C'est une question pour le président de la République française. Comme des millions de Français, j'imagine, Monsieur le Président, vous avez suivi l'épopée des Bleus en Afrique du Sud. Depuis ce matin, une polémique agite cette équipe, son entraîneur et prend des allures d'affaire nationale. Elle devrait se conclure par l'exclusion d'un joueur. Je voudrais savoir comment vous avez jugé ce parcours ? Comment considérez-vous cette polémique ? Etes-vous comme votre ministre des Sports, Roselyne Bachelot, vous pensez que cela manque de dignité vis-à-vis du maillot de l'équipe de France, qui est censé représenter la France ?
R - Franchement, ce n'est pas à moi de porter des jugements. Je me contenterai de dire que, dans le sport comme dans la vie, naturellement on ne peut pas toujours gagner. Et que, bien sûr, on ne compte pas sur moi pour apporter ma voix, pour accabler tel ou tel. Ce n'est pas la conception que j'ai de mon rôle. Mais si les événements qui ont été rapportés ce matin par la presse sont exacts, je n'y étais pas, ils sont inacceptables. Pour le reste, je fais confiance à la ministre pour que les conclusions soient tirées de cet échec et que les mesures soient mises en oeuvre pour que la France du football puisse à nouveau être pleine d'espérance. Merci.