23 mars 2010 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, en hommage aux policiers français tués en mission notamment l'un d'entre eux assassiné par des membres de l'ETA, à Melun le 23 mars 2010.

Monsieur le Président du Gouvernement espagnol, Cher José Luis ZAPATERO,
Madame et Messieurs les Ministres espagnols et français,
Mesdames et Messieurs,
Nous sommes réunis aujourd'hui pour rendre un dernier hommage au Commandant Jean-Serge
NERIN.
Un homme d'exception qui a dédié sa vie à un métier d'exception, le métier de policier.
Un époux, un père de famille, un frère, un ami, lâchement assassiné dans l'accomplissement de son devoir, alors qu'il protégeait nos concitoyens et défendait les valeurs de notre démocratie.
C'est une vie d'homme, une vie unique, une vie irremplaçable, qui a été interrompue trop tôt, anéantie par des criminels sans pitié.
C'est une perte cruelle, irréparable, intolérable.
Ce crime déshonore ceux qui l'ont commis, ce crime déshonore ceux qui les soutiennent.
Ce crime, - j'en prends l'engagement solennel devant vous -, ce crime ne restera pas impuni.
Jean-Serge NERIN avait 52 ans, il était père de 4 enfants.
Né à Cayenne, il était entré dans la police en 1979. Affecté en 1980 à la brigade de roulement de Dammarie-les-Lys, il y a effectué ses 30 années de carrière. Cette fidélité à un service, à une ville, à un département, Jean-Serge NERIN en était fier. Le commissariat de Dammarie-les-Lys était pour lui comme une seconde famille : il était pour tous ses collègues un ami, un soutien, une force sur laquelle chacun savait pouvoir s'appuyer.
Tous les policiers saluaient son expérience, son engagement, son professionnalisme. Sa bravoure lui avait valu de recevoir à plusieurs reprises les félicitations du Directeur général de la police nationale.
Jean-Serge NERIN était aussi un homme d'une profonde humanité : pendant 30 ans, au Commissariat de Dammarie-les-Lys, il a été en quelque sorte l'âme de la brigade. Il était bien plus qu'un collègue : c'était un meneur d'hommes, un formateur, un modèle pour les jeunes recrues de la police nationale.
Dévoué aux autres, dévoué à ses missions, il aimait la Guyane, qui l'avait vu naître et à laquelle il restait très lié.
Jean-Serge NERIN faisait honneur à la police nationale et à la France.
A Julienne, son épouse, à ses quatre enfants Prisca, Floryan, Anaïs, Melyssa, aux membres de sa famille venus de Guyane, je veux dire que nous partageons leur chagrin et leur douleur. Je pense également aux trois équipiers qui accompagnaient Jean-Serge NERIN le 16 mars. Je veux les féliciter et leur dire mon admiration. Damien BOUDESOCQUE, Marie STEIMETZ, Michael OUETTE. Tous trois vous faites aussi honneur à la police nationale.
Aujourd'hui, nous ressentons un sentiment d'injustice devant la mort d'un homme.
Nous sommes fiers de lui, fiers de son exemple.
Saluer sa mémoire, c'est rappeler les valeurs pour lesquelles il s'était engagé et qu'il a défendues jusqu'à sa mort.
La société confie aux policiers et aux gendarmes, une mission particulière : protéger nos concitoyens, veiller sur la paix civile, défendre la démocratie. Garants ultimes de l'ordre public et des libertés, ils se trouvent aux avant-postes de la République.
Le 16 mars, Jean-Serge NERIN et ses trois collègues pensaient n'avoir affaire qu'à une bande de malfaiteurs comme ils en avaient déjà arrêtés si souvent. Avec ses camarades, il s'est trouvé confronté à un groupe de terroristes de l'ETA. Malgré le feu nourri, malgré le péril mortel, ils ont réussi à interpeller l'un des membres de ce groupe criminel. Il est aujourd'hui sous les verrous. Tout sera mis en oeuvre pour arrêter ses complices. Les assassins de Jean-Serge NERIN seront retrouvés et seront châtiés avec la plus extrême sévérité.
L'ETA est une organisation sanguinaire. C'est la première fois qu'un policier français tombe sous les balles de ces fanatiques assoiffés de sang. Je n'oublie pas les centaines de victimes innocentes qui, en Espagne, ont payé de leur vie cette folie meurtrière. Aucune cause, aucune idéologie, aucun mot d'ordre ne peut justifier la violence aveugle et les assassinats et la barbarie.
Que les choses soient claires, Monsieur le Président du Gouvernement espagnol, la France ne se laissera jamais intimider par le terrorisme. 33 membres de l'ETA ont été arrêtés en 2009 en France.
Notre mobilisation est totale. Nous allons éradiquer, une à une, toutes les bases de l'ETA en France.
Nous allons les débusquer un à un et nous démantèlerons tous les soutiens de cette organisation terroriste. Nous ne laisserons pas le territoire français devenir la base arrière de terroristes et d'assassins.
A nos amis venus d'Espagne, je veux dire que la France est plus que jamais aux côtés de la démocratie espagnole. Je remercie chaleureusement le Président ZAPATERO et le Ministre RUBALCABA, pour le geste fort que constitue leur présence parmi nous aujourd'hui. Monsieur le Président du gouvernement espagnol, au nom du peuple français, je vous demande de remercier le peuple espagnol pour sa solidarité et son soutien dans cette épreuve.
L'Espagne est aux côtés de la France endeuillée aujourd'hui, comme hier la France pleurait les victimes espagnoles.
Il y a un an, à Madrid, nous avons décidé, avec le Président ZAPATERO et nos Ministres, de renforcer notre combat commun contre le terrorisme.
Nos deux pays ne baisseront jamais les bras face à l'ignominie, pas plus que nous ne baisserons les bras devant aucune forme de violence commise à l'encontre des dépositaires de la force publique. Je l'ai dit et je le redis devant vous solennellement devant la dépouille de votre camarade : si l'on accepte sans réagir qu'un policier ou un gendarme soit insulté, alors on accepte ensuite qu'il soit frappé. Si l'on accepte qu'il soit frappé, alors on finira un jour par accepter qu'il soit assassiné. Et c'est toute la société qui se trouvera condamnée à l'escalade de la violence.
Que les choses soient claires, quiconque porte atteinte à un policier, à un gendarme, à un fonctionnaire, par l'insulte ou par le geste, porte atteinte à la République elle-même. Face à ces agressions, nous appliquerons la tolérance zéro. Leurs auteurs devront systématiquement en répondre devant la justice. Brice HORTEFEUX et Madame ALLIOT-MARIE exécuteront cette politique avec beaucoup de fermeté.
En 2009, 6500 policiers et gendarmes ont été blessés en mission. 24 d'entre eux ont trouvé la mort. Le département de la Seine et Marne, Mesdames et Messieurs les élus, a payé un lourd tribut avec la mort, le 27 décembre dernier, de Patrice POINT, un policier que des cambrioleurs ont délibérément écrasé. Que sa femme, que son fils, ici présents trouvent ici l'expression de notre plus profonde sympathie. L'un des auteurs de ce meurtre barbare a été arrêté. Son complice sera mis hors d'état de nuire sous peu.
Mes pensées vont aussi aux fonctionnaires de police récemment blessés. Christophe COYCAULT, sauvagement agressé à Tarascon le 3 mars dernier. Michel HUSSON, grièvement blessé à Epernay le 8 mars. Leurs agresseurs sont désormais sous les verrous. La justice les punira comme ils le méritent.
Le Parlement examinera une modification de la loi pénale qui punira plus sévèrement les assassins de policiers et de gendarmes. Pour ces meurtriers, la peine de sûreté incompressible sera portée de 22 à 30 ans. Ils encourront désormais la perpétuité réelle.
L'insécurité est l'une des premières injustices dont souffrent nos compatriotes. Ceux qui la combattent doivent être assurés de notre détermination à garantir leur propre sécurité dans l'exercice de leurs missions. Mon devoir de chef de l'Etat est de protéger et de soutenir les agents en charge de l'ordre public.
Jean-Serge NERIN, comme Patrice POINT, comme tous leurs policiers et gendarmes décédés, sont morts en d??fendant les valeurs les plus profondes de notre pays.
La Nation pour laquelle ils sont morts en héros, la Nation aujourd'hui tout entière réunie en communion avec sa police, leur témoigne son respect et sa reconnaissance.
Commandant de police Jean-Serge NERIN, vous avez rendu des services éminents à votre pays. C'est pourquoi vous avez été cité à l'ordre de la Nation. C'est pourquoi, dans quelques instants, je vous remettrai les insignes de Chevalier de la Légion d'Honneur. Je sais que vous auriez été fier du comportement exemplaire de vos coéquipiers.
A vos côtés, ils recevront tous les trois les insignes de Chevalier dans l'Ordre national du Mérite. Le Président du Gouvernement espagnol leur remettra la croix du mérite policier et il vous décernera la médaille d'or du mérite policier.
Commandant de police Jean-Serge NERIN, nous ne vous oublierons pas, car nous n'en avons pas le droit. Jean-Serge NERIN puisse votre souvenir nourrir la détermination de chacun d'entre nous à protéger les valeurs que vous avez défendues au prix de votre vie.
Que vos enfants, que votre femme, que votre famille soient fiers de vous.
Commandant Jean-Serge NERIN, au nom de la république française, nous vous faisons Chevalier de la Légion d'Honneur.
Gardien de la paix Mickaël OUETTE, au nom de la république française, nous vous faisons Chevalier de l'Ordre National du Mérite.
Gardien de la paix Damien BOUDESOCQUE, au nom de la république française, nous vous faisons Chevalier de l'Ordre National du Mérite.
Gardien de la paix Marie STEIMETZ, au nom de la république française, nous vous faisons Chevalier de l'Ordre National du Mérite.