28 janvier 2010 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, sur les politiques à mettre en oeuvre pour rétablir les finances publiques, à Paris le 28 janvier 2010.


Monsieur le Premier Ministre,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs,
Au lendemain de la plus grave crise financière de l'après-guerre, tous les pays développés sont confrontés à deux défis majeurs : la lutte contre le chômage, bien sûr, et la réduction des déficits.
Nos finances publiques ont été durement touchées par la récession qui a creusé l'écart entre nos recettes et nos dépenses. Notre déficit atteint 7,9 % de la richesse nationale en 2009. Bien sûr, nous assumons entièrement le choix qui a été fait de soutenir l'économie pendant la crise par le libre jeu de ce qu'on appelle les stabilisateurs automatiques et le plan de relance. Mais il nous faut à présent, comme tous les pays européens, préparer l'étape suivante, c'est-à-dire le rétablissement de l'équilibre de nos comptes, la stabilisation puis la réduction de notre dette.
Nous devons le faire pour préserver notre modèle social.
Cet effort nous concerne tous. Avec le Premier ministre et les ministres, nous avons réuni aujourd'hui les responsables de l'Etat, des collectivités locales et de la sécurité sociale pour lancer un débat sans tabou sur notre déficit. Nous avons eu deux heures et demie de discussions franches et constructives.
Au terme de cette réunion, nous avons décidé collectivement qu'il fallait aboutir à un diagnostic partagé de la situation de nos finances publiques. L'idée est que si l'on arrivait, au fond, à se mettre d'accord sur le diagnostic, les remèdes pourraient être eux aussi partagés.
Pour arriver à ce constat partagé, nous avons demandé à MM. Champsaur et Cotis d'établir un document de synthèse sur la situation des comptes publics. Ils devront analyser l'évolution des comptes publics sur les 30 dernières années et les perspectives pour la prochaine décennie. Leur rapport sera rendu public. Il servira de point de départ incontestable à la deuxième réunion de la Conférence du déficit que nous réunirons avec le Premier ministre et les ministres en avril.
Notre deuxième conviction, c'est qu'il nous faut agir sur chacune des composantes de la dépense.
Les dépenses sociales représentent plus de la moitié des dépenses publiques, ce sont celles qui croissent le plus vite. Il nous faut agir pour sauvegarder notre modèle social.
Nous avons d'ores et déjà annoncé la réforme des retraites en 2010. Dès le 15 février prochain, nous discuterons de ce calendrier avec les partenaires sociaux.
Sur l'assurance-maladie, nous ramènerons les budgets des hôpitaux publics à l'équilibre d'ici à 2012. L'objectif national de dépense d'assurance maladie que la ministre de la Santé a fait adopter pour 2010, 3% de progression, est l'objectif le plus ambitieux depuis 10 ans.
Mais ce n'est pas assez de définir des objectifs ambitieux. Il faut les tenir. Un groupe de travail, que présidera Raoul Briet, proposera les règles permettant d'assurer que l'objectif national d'assurance maladie voté chaque année par le Parlement soit respecté. Il rendra ses conclusions avant la seconde session de la conférence sur le déficit.
Par ailleurs, nous allons mettre en place - le Premier ministre le fera dans les jours qui viennent - la commission réunissant le gouvernement et le Parlement pour trouver des solutions pour rembourser la dette exceptionnelle que la sécurité sociale a accumulée pendant la crise.
S'agissant des collectivités locales, on sait que depuis 1980, leurs dépenses ont augmenté de 20 % en proportion du PIB indépendamment des effets de la décentralisation.
L'Etat a une part de responsabilité dans cette dérive, c'est incontestable, par exemple en fixant des normes excessives sans concertation avec les collectivités locales. Il faut identifier les problèmes pour les régler, y compris en revenant sur des normes déjà en place.
Un groupe de travail devra mesurer l'impact des normes imposées par l'Etat et réfléchir à la mise en place d'un objectif de dépenses pour les collectivités locales. Il remettra ses conclusions en avril. Gilles Carrez, président du Comité des finances locales, et Pierre-René Lemas, préfet, ont accepté de le présider.
Reste l'Etat. Beaucoup a été fait depuis 2007. La dépense de l'Etat ne progresse pas plus vite que l'inflation. Un départ de fonctionnaire à la retraite sur deux n'est pas remplacé. Mais il faut que nous allions plus loin.
Nous affecterons toutes les recettes supplémentaires qui pourraient venir de la croissance au désendettement.
Avec le Premier ministre, nous avons demandé à Eric Woerth de présenter, lors de la prochaine session de la conférence sur le déficit, un plan d'action complet pour réduire la dépense de l'Etat. Toutes les options seront mises sur la table, notamment sur les niches sociales et fiscales, leur démantèlement, ou leur réduction.
Mais je souhaite que nous allions encore plus loin et que la France se dote d'une règle d'équilibre pour l'ensemble de ses administrations publiques. C'est ce sur quoi nous allons travailler.
Les Allemands sont parvenus à un accord transpartisan sur ce sujet. C'est ce que nous allons essayer de faire. Nous avons demandé à Michel Camdessus de présider un groupe de travail sur cette question. Il devra se poser des questions comme : l'objectif de retour à l'équilibre doit-il être 2020, comme les Allemands l'ont fixé ? Quelles sont les modalités du rétablissement ?
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Vous le voyez, Mesdames et Messieurs : en avril prochain, pour les collectivités locales, pour la sécurité sociale comme pour l'Etat, nous prendrons des décisions extrêmement importantes pour contenir les déficits, à l'image de ce que font nos partenaires. Bien évidemment, comme pourra le préciser Christine Lagarde, nous devons faire ceci en suivant les recommandations du FMI sur la sortie de crise, qui disent en substance : "attention, le retour à la croissance est sensible, ne nous trompons pas dans l'utilisation des différents moyens qui sont à notre disposition".
Je regrette que les représentants des départements et des régions ne soient pas venus, alors que les représentants des maires sont venus. Il est difficile de trouver des accords entre les uns et les autres si certains refusent de s'asseoir à la table pour discuter.
Les déficits concernent tout le monde. Cela fait trente-cinq ans que notre pays présente un budget en déficit. Durant ces trente-cinq années, il y a eu autant de gouvernements de gauche que de droite et l'objectif des dix prochaines années concerne également tout le monde.
Voilà ce que nous avons décidé ce matin. En avril, nous prendrons des décisions extrêmement précises pour enrayer la spirale des déficits et éviter qu'elle ne porte atteinte à la crédibilité de notre pays.Je vous remercie./.