5 janvier 2010 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, sur les efforts en faveur de l'artisanat, de l'apprentissage et de la formation professionnelle, à Paris le 5 janvier 2010.

Monsieur le Président de la Confédération nationale de la boulangerie française,
Mesdames et Messieurs,
Et si vous me le permettez, chers amis,
C'est un plaisir de vous rencontrer pour cette galette de l'épiphanie. Je suis heureux de pouvoir renouer avec cette belle tradition, qui illustre la place des boulangers dans notre pays.
Depuis des temps immémoriaux, vous nourrissez non seulement les corps, mais aussi la sociabilité et la convivialité, au coeur de nos villes et de nos villages.
Vous êtes également les porteurs de valeurs - que nous partageons, Monsieur le Président -, de valeurs fondamentales pour notre société. L'artisanat, c'est le travail en son sens premier, l'activité par laquelle les hommes transforment le monde et produisent des biens, de leurs mains, pour les échanger avec leurs semblables. C'est l'amour du travail bien fait, et c'est la qualité des produits. C'est un travail où ni l'employé ni le patron ne ménagent leur peine. Dire que vous êtes la France qui se lève tôt serait presque une insulte puisque vous ne vous êtes souvent même pas couchés ! En prenant des mesures comme la défiscalisation des heures supplémentaires, ou la suppression des droits de succession, j'ai voulu réhabiliter une France du labeur, une France de gens comme vous, qui travaillent dur, et souvent en famille.
Vous incarnez un capitalisme d'entrepreneurs, qui repose sur le travail et sur la responsabilité, qui crée des richesses et - vous avez raison, Monsieur le Président -, qui crée des emplois pour notre pays.
Passionnés par votre métier, vous avez souvent pris des risques personnels pour l'exercer. Depuis la loi de modernisation de l'économie, vous avez désormais l'assurance que, si vous rencontrez des difficultés dans votre activité, l'ensemble de votre patrimoine immobilier non professionnel ne pourra être saisi. Nous avons décidé d'aller plus loin pour libérer l'esprit d'entreprise. Comme François Fillon et Hervé Novelli l'ont annoncé, nous allons créer l'entreprise à patrimoine affecté, qui permettra aux artisans de protéger l'ensemble de leurs biens personnels. Concrètement, chaque entrepreneur qui le souhaitera pourra limiter sa responsabilité à son patrimoine «professionnel», - ce qu'on appelle le patrimoine «affecté» -, tout en protégeant son patrimoine «personnel». La responsabilité de l'entrepreneur sera donc limitée au capital de l'entreprise. Cette réforme concerne près d'un million et demi d'artisans, elle sera présentée au Parlement avant l'été. Avec ce nouveau statut d'entreprise individuelle à responsabilité limitée, chaque entrepreneur que vous êtes, pourra protéger ses biens personnels, et donc sa famille, des aléas que pourrait connaître son activité professionnelle. C'est une réforme extrêmement importante, attendue par chacun d'entre vous depuis des décennies, qui vous avait été promise par tout le monde et qui n'avait été tenue par personne.
Votre savoir-faire, la renommée de vos produits et le capital humain de vos entreprises sont des richesses pour notre pays.
Ces richesses, nous voulons les faire fructifier et les transmettre aux jeunes générations, avec le patrimoine artisanal de la France. Pour cela, il faut faire naître des vocations. Et je sais que c'est pour chacun d'entre vous une préoccupation constante. Combien de boulangers, combien d'artisans m'ont dit : « comme on aimerait vendre notre fonds de commerce à un successeur de notre métier, de notre famille professionnelle ! Hélas, on ne trouve personne ».
Je salue les jeunes gens ici présents, qui ont reçu le prix de Meilleur jeune boulanger et de Meilleur apprenti pâtissier de France. Ils représentent la relève de cette tradition boulangère française, connue - il faut bien le dire - dans le monde entier depuis des décennies, peut-être même depuis des siècles. Que votre réussite encourage d'autres jeunes à s'engager dans l'apprentissage.
L'apprentissage est l'arme la plus efficace contre le chômage des jeunes.
C'est pourquoi j'ai voulu que nous développions les formations en alternance. C'est le meilleur moyen de transmettre, par la pratique, le savoir-faire de nos artisans et une compétence très recherchée par les entreprises. Les chiffres le prouvent : à l'issue de leur formation, 7 jeunes sur 10 trouvent un emploi. J'ai voulu relancer ces filières - qui sont des filières d'excellence -, qui avaient été fragilisées par la crise.
Désormais, pour toute embauche d'un apprenti avant le 30 juin 2010, votre entreprise ne paiera aucune charge sociale pendant un an, et les entreprises de moins de 50 salariés recevront une prime de 1800 euros. Pour l'embauche d'un jeune de moins de 26 ans en contrat de professionnalisation, la prime sera de 1000 euros, voire 2000 s'il n'a pas le baccalauréat. Et les premiers résultats sont là : 212 000 contrats en alternance ont été signés cet automne, soit une augmentation de près de 4% par rapport à l'an dernier.
Je veux aller plus loin. J'ai donc demandé à Laurent Wauquiez d'organiser des ateliers de l'apprentissage et de l'alternance, pour relancer ces filières dans la durée et faire qu'en 2015 un jeune sur 5 soit en alternance.
Aider notre pays à se doter des compétences de demain, c'est investir pour la croissance future. Il était donc normal qu'une partie du grand emprunt soit consacrée au développement de la formation professionnelle. 500 millions d'euros viendront compléter l'investissement des régions, des entreprises et des partenaires sociaux, pour moderniser les centres de formation, et notamment, dans ces centres, leurs équipements. Il n'est pas normal de former les jeunes aux métiers de demain sur les machines d'hier.
Investir, créer de nouveaux dispositifs, c'est nécessaire. Mais cela ne suffit pas : c'est toute une mentalité que nous devons changer. Nous devons mettre en valeur la noblesse du travail manuel, le vecteur de promotion sociale que constitue l'entreprise artisanale. A l'orée de cette nouvelle année, je souhaite, Monsieur le Président, que nous y travaillions ensemble.
Je vous remercie d'être venus et je vous souhaite en 2010 la réussite dans vos projets personnels et professionnels. Je veux vous dire combien je me sens heureux et à l'aise parmi vous car j'ai l'impression que nous partageons les mêmes valeurs.
Je vous invite maintenant au plus facile, à partager cette galette, et à la savourer d'autant mieux qu'à ma connaissance, il n'y a pas à chercher la fève : il n'y en a pas, tout simplement parce qu'on ne saurait désigner un roi au sein de la Présidence de la République !
Bonne année.