27 novembre 2009 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, notamment sur la préparation du Sommet de Copenhague concernant la lutte contre le réchauffement climatique, à Port d'Espagne le 27 novembre 2009.

Mesdames et Messieurs,
Bonjour. C'est la première fois qu'un Président français est invité au Sommet du Commonwealth. C'est un grand honneur pour la France. Je voudrais remercier le Premier ministre MANNING pour son accueil.
Cette invitation est le signe d'une très grande urgence : Copenhague dans 20 jours, nous n'avons pas le droit d'échouer. Tous les efforts qui ont été engagés par Gordon BROWN, par le Président LULA, par Angela MERKEL, par Lars RASMUSSEN, qui font un travail remarquable en tant que pays hôte et Président de la Conférence de Copenhague, commencent à porter leurs fruits. Hier à Manaus, c'est l'Amazonie qui a apporté son soutien à la position commune franco-brésilienne. Les Etats-Unis viennent d'annoncer des objectifs chiffrés, c'est une avancée majeure. Je veux rendre hommage au Président OBAMA qui a pris une décision importante dans un contexte difficile. Hier également, les Chinois ont fait des annonces chiffrées qui vont dans le bon sens.
C'est la preuve qu'on a eu raison de ne pas se résigner mais on n'est pas encore au succès. Il faut que l'engagement se fasse au plus haut niveau. Seuls les chefs d'Etat et de gouvernement pourront prendre les décisions majeures qui s'imposent. Il faut que les chefs d'Etat et de gouvernement soient présents les 17 et 18 décembre à Copenhague car c'est là que tout va se décider. D'ores et déjà, 85 chefs d'Etat et de gouvernement ont décidé de leur présence à Copenhague les 17 et 18 décembre.
La réunion d'aujourd'hui était importante, c'était un message fort pour la négociation à Copenhague. Cela prouve surtout qu'on peut sortir de l'affrontement stérile Nord-Sud, qui est un piège.
Les conditions du succès, on les connaît. A Copenhague, il nous faut un accord politique avec des engagements contraignants, c'est-à-dire chiffrés, pour les pays industrialisés comme pour les pays émergents. Les pays industrialisés se sont déjà engagés à réduire leurs émissions de 80% d'ici 2050. Il faut aller plus loin avec des objectifs de moyen terme crédibles et comparable avec ceux que l'Europe a signé avec le paquet énergie-climat. Les pays émergents doivent à l'image du Brésil s'engager à diminuer les émissions globales de 50% d'ici 2050, à atteindre le pic d'émission le plus tôt possible et s'engager sur des objectifs chiffrés.
J'ai déjeuné avec le Premier ministre indien SINGH avec qui j'ai eu un déjeuner très productif en lui faisant valoir ces arguments. J'ai confiance dans le Premier ministre indien. Je suis sûr que l'Inde sera présente au rendez-vous de Copenhague. C'est également ce que j'ai dit au Président ZUMA de l'Afrique du Sud, à qui j'ai demandé de venir à Copenhague et de s'engager puissamment pour faire de Copenhague un succès.
Pour les pays en développement et les plus pauvres, nous avons un devoir de solidarité. Nous devons les aider financièrement à faire face au défi du réchauffement climatique. La France propose un plan justice-climat qui répond à cette nécessité.
Nous devons donner la priorité à la lutte contre la déforestation qui est l'un des moyens les moins coûteux pour limiter le réchauffement climatique. J'ai proposé que l'on consacre, pour la période 2010-2012, 20% des financements prévus pour les pays en développement à la lutte contre la déforestation.
Il faut également à Copenhague que nous nous mettions d'accord sur des financements innovants. Il existe différentes pistes. Copenhague doit faire des propositions. Je pense à la taxation sur la spéculation. Je pense à la taxation sur le kérosène pour les bateaux ou pour les avions.
Dernier point, il faut qu'à Copenhague, nous décidions des mécanismes de vérification des engagements qui seront pris, pas seulement pour les pays industrialisés mais pour tout le monde. C'est pourquoi, il faut créer une Organisation Mondiale de l'environnement.
Copenhague, dans 20 jours, ce n'est plus le temps des petits arrangements ou des petites ambitions. A Copenhague, soit nous réussirons ensemble, soit nous échouerons. Et à ce moment-là, tout le monde sera perdant. Copenhague n'est pas une négociation comme les autres. Ce qui est en jeu, c'est l'avenir de la planète. 20 jours, c'est très court. Mais c'est suffisant pour être à la hauteur de ce rendez-vous historique. Les choses bougent plus fortement qu'on ne pouvait pas l'imaginer, c'est une très bonne nouvelle. Cela n'a pas encore assez bougé. Ces 20 jours vont servir à faire bouger ce qui n'a pas encore assez bougé. Je vous remercie et je me livre à vos questions.
QUESTION - Est-ce qu'on peut avoir quelques détails sur vos conversations avec M. SINGH ? Est-ce qu'il vous a dit qu'il viendrait à Copenhague ? Est-ce qu'il vous a dit qu'il présenterait des propositions unilatérales comme l'ont fait la Chine, les Etats-Unis et d'autres pays avant le sommet. Est-ce que, dans le plan justice-climat, l'Inde peut être bénéficiaire des aides ou est-ce quelque chose qui est réservé simplement aux pays les plus pauvres en excluant l'Inde ? Donc cela veut dire, quelle part récupèrerait l'Inde d'une telle aide ? Est-ce que la France a fait des promesses supplémentaires en matière de nucléaire pour l'Inde ?
LE PRESIDENT - Sur l'Inde, d'abord dans le plan justice-climat, oui l'Inde serait éligible à des financements supplémentaires. Pourquoi ? Parce que l'Inde émet très peu de carbone par habitant, en tonne par habitant. L'Inde est un pays pauvre, l'Inde doit être aidée. Deuxièmement, la préoccupation du Premier ministre indien, c'est la préoccupation des transferts de technologie. Vous savez qu'entre l'Inde et la France, il existe sur le nucléaire un accord très important. J'irai, à l'invitation du Premier ministre SINGH, en Inde à la fin du mois de mars ou au début du mois d'avril pour signer et concrétiser tous ces accords importants.
Vous comprendrez que c'est au Premier ministre indien d'annoncer la position de l'Inde. Je peux simplement vous dire que je lui ai fait valoir d'abord qu'on avait besoin qu'il soit là, que l'Inde n'avait rien à perdre et tout à gagner £ par ailleurs, ce qui est ma conviction, c'est qu'à Copenhague se joue autre chose que l'avenir environnemental de la planète : la mise en place d'une nouvelle gouvernance mondiale. Je crois à l'émergence de cette superpuissance qu'est l'Inde, d'un milliard d'habitants. Si l'Inde veut peser dans les affaires du monde, et elle doit peser, l'Inde doit être présente. Le Premier ministre m'a indiqué qu'il en parlerait dès son retour en conseil de cabinet en Inde pour établir leur position définitive. Et d'ici-là, nous avons convenu que nos deux plus proches collaborateurs, en l'occurrence Jean-David LEVITTE du côté de la France, se rencontreront dans les tous prochains jours en Inde pour essayer d'établir une position commune.
Pour être encore plus précis, en accord avec Gordon BROWN, nous avons proposé que, dès le début de l'après Copenhague, c'est-à-dire 2010, 2011, 2012, soient mobilisés 10 milliards de dollars de crédit public pour amorcer en quelque sorte la pompe des financements pour les pays les plus pauvres, les pays émergents qui en ont besoin, et que sur ces 10 milliards, 20 % soient consacrés à la lutte contre la déforestation. Pour que cela ne soit pas simplement un financement de moyen terme, mais que tout de suite, on ait de l'argent qui soit mis sur la table.
Pour le reste, vous comprendrez que je ne suis pas le porte-parole du Premier ministre indien, mais c'était une discussion très intéressante, très productive et absolument capitale, en tout cas de mon point de vue, bien sûr.
QUESTION - Est-ce que le sommet de Copenhague a un sens si Barack OBAMA est absent les 17 et 18 décembre ?
LE PRESIDENT - On ne peut pas ramener les affaires du monde à la présence d'un seul chef d'Etat. Mais nous nous sommes vus avant, le Secrétaire général BAN Ki-Moon, le Premier ministre RASMUSSEN et moi. Nous avons parlé tous les trois et nous avons confirmé que, dans notre esprit à tous les trois, le moment décisif de la présence à Copenhague, c'est les 17 et 18. Il faut bien que vous compreniez que Copenhague va durer deux semaines, on ne peut pas mobiliser des chefs d'Etat et de gouvernement sur une aussi longue période. Si certains d'entre nous viennent au début, si d'autres viennent à la fin, à quel moment gérerons nous les décisions ? Il y a une solution, qui pourrait être une solution de compromis, c'est que si tel ou tel chef d'Etat souhaite venir avant, par exemple le 9, pour encourager la négociation et revenir pour le moment de la décision, c'est très positif. Avec le pays hôte qui présidera la conférence, nous nous sommes mis d'accord là-dessus : le moment décisif est le 17 et le 18, c'est-à-dire le moment des derniers arbitrages. Qui met l'argent ? Par exemple, les financements innovants, qui sont absolument indispensables, seront décidés... sauf si tout est réglé dès le 9, je m'en réjouirais beaucoup. La présence des chefs d'Etat et de gouvernement est capitale, mais il faut qu'ils soient là ensemble pour pouvoir discuter, amender, négocier, trouver des solutions. Si on n'est pas là en même temps, quelle solution pourrons-nous trouver ?
QUESTION - Bonjour, je suis plus intéressée par l'entretien avec le Premier ministre indien parce que récemment, l'Inde et la Chine ont signé un mémorandum d'entente pour aller d'une seule voix à Copenhague. Les deux pays ne veulent pas baisser leurs émissions car ils pensent que cela va affecter leur développement. Est-ce que cela en a été discuté dans votre entretien avec le Premier ministre indien ? Ma seconde question : est-ce que vous pensez qu'il y aura une décision, quelle qu'elle soit, à Copenhague ?
LE PRESIDENT - Madame, s'il n'y avait pas de décisions prises à Copenhague, ce serait un échec historique, pas une, il y en a 7 ou 8 qui doivent être prises. La notion d'accord de Copenhague, ce sont des engagements contraignants. Et je veux d'ailleurs vous dire ma conviction que soit on prendra toutes les décisions, soit on n'en prendra aucune. Pourquoi ? Parce qu'il y a un équilibre à trouver. Vous comprenez, on ne peut pas prendre la décision d'essayer de ne pas dépasser les deux degrés de température en plus sans prendre les décisions sur l'aide financière pour les pays les plus pauvres. Tout se tient. Ce n'est pas une décision qui sera prise, c'est plusieurs décisions et ce sera la condition du succès.
Deuxièmement, sur la Chine, depuis qu'il y a eu le mémorandum, la position de la Chine a évolué. Les chiffres annoncés par les Chinois sont extrêmement prometteurs. On est en train de travailler et les premiers éléments techniques que nous avons montrent que la pente chinoise est très compatible avec la pente retenue par les Etats-Unis et avec la pente retenue par l'Europe si on prend comme date 2030, la date de départ 1990 et la date 2030. Cela peut être aussi une formule pour l'Europe si nous décidions d'aller plus loin.
Troisième point, le Premier ministre SINGH m'a dit que, d'ores et déjà, jamais l'Inde ne produirait plus de carbone que la moyenne des autres pays et deuxièmement, il me l'a dit, jamais l'Inde ne sera un obstacle à un accord à Copenhague. Voilà, c'est ce que je peux vous dire d'un peu plus par rapport à ce que j'ai répondu à M. LEPARMENTIER. Je crois dans l'homme d'Etat qu'est le Premier ministre SINGH, à l'intérêt de l'Inde à participer à cette négociation et je ne doute pas qu'ils mettront, à un moment ou un autre, des chiffres sur la table. En tout cas, j'ai confiance en lui et c'est absolument indispensable. Je trouve que, dans les trois derniers jours, les choses ont commencé à vraiment bouger. On est rentré dans la phase très active de la négociation.
QUESTION - Quelles garanties avons-nous que les pays développés s'engageront sur des objectifs chiffrés de réduction d'émission ? Et dans la mesure où le changement climatique est à l'ordre du jour aujourd'hui, à cette réunion, le Premier ministre MANNING a dit que les droits de l'Homme étaient des questions d'ordre national. Est-ce que vous d'accord ?
LE PRESIDENT - Quelles garanties ? Si nous arrivons à créer l'Organisation Mondiale de l'Environnement, c'est la garantie pour tous les pays qu'il n'y aura pas deux poids et deux mesures, qu'il y aura un organisme international dépendant des Nations unies qui évaluera les efforts de chaque pays et le respect des engagements de chaque pays. Parce que se posera la question, après Copenhague, de qui mettra en oeuvre et comment les engagements de Copenhague ? La logique, c'est que ce soit l'Organisation Mondiale de l'Environnement.
Deuxième chose, Monsieur, la garantie pour les pays les plus pauvres ou les pays en développement, c'est que nous proposons, avec Gordon BROWN, 10 milliards de dollars de fonds publics tout de suite, dès 2010, c'est-à-dire dès la première année, 10 milliards par an pour les trois premières années. Pourquoi ? Parce que, imaginons qu'on se mette d'accord sur le principe d'un financement innovant, entre le moment où l'on se met d'accord sur le principe et l'entrée en vigueur du financement, il se passera forcément du temps. Donc, nous proposons, avec Gordon BROWN, 10 milliards de dollars d'argent public dès la première année, chaque année pendant trois ans. J'estime que ce sont des garanties.
Sur les droits de l'Homme, il est évident que c'est une question universelle.
QUESTION - Monsieur le Président, deux questions. Premièrement, avez-vous parlé au Premier ministre MANNING sur la question du changement climatique ? Et deuxièmement, dans des pays comme Trinidad-et-Tobago par exemple, nous avons une activité industrielle ici, est-ce que cela entre en conflit avec l'initiative de sauver l'environnement ?
LE PRESIDENT - L'intérêt de Copenhague, c'est que nous ne demandons pas au pays de choisir entre la croissance et la protection de l'environnement. Cela, c'est un raisonnement du XXème siècle. Nous vous proposons, par l'aide financière pour moderniser votre industrie et par des transferts de technologie, d'adhérer au principe de la croissance durable. Copenhague ne veut pas dire la décroissance. Copenhague ne veut pas dire le refus de la croissance pour des pays qui en ont bien besoin, même si Trinidad-et-Tobago a des ressources importantes et un niveau de vie important. Personne ne doit choisir entre la croissance et la protection de l'environnement. Ce que nous voulons, c'est une croissance durable, une croissance décarbonée et pour cela on a besoin d'objectifs chiffrés, de moyens financiers pour vous aider et de transferts de technologie. C'est sans doute le débat et le fossé qui existent entre un mouvement politique, écologiste qui milite pour la décroissance et le monde entier, à Copenhague militera pour la croissance durable. Là, il y a un fossé, c'est très clair. Mais moi, je ne vais pas avoir le ridicule de dire au Premier ministre d'un pays d'un milliard d'habitants, dont des centaines de millions d'habitants sont pauvres, qu'ils doivent s'abstenir de la croissance. Ce serait inadmissible de leur proposer ce choix. Mais en même temps, on est bien obligé de considérer que le constat du GIEC s'impose à nous tous, si on continue dans les mêmes conditions, on va à la catastrophe. Et vous, ici, vous êtes bien placés pour savoir ce que cela représente la montée des eaux et le réchauffement du climat. Personne n'est en situation de choisir entre croissance et protection de l'environnement. C'est le choix d'une croissance durable, d'une croissance décarbonée.
QUESTION - Monsieur le Président, vous avez dit que l'Inde, en tant que pays émergent, pourrait bénéficier de certains des fonds qui seraient destinés aux pays en développement en raison de ses faibles émissions de carbone par habitant. Mais d'autres pays comme Trinidad-et-Tobago ont des émissions élevées simplement parce qu'ils ont une petite population, qu'est-ce que vous en pensez ?
LE PRESIDENT - Ce n'est pas moi qui répartirai les choses entre chaque pays. Je veux dire par là que si vous regardez les émissions de carbone pour l'année prochaine, les Etats-Unis et la Chine, à eux deux, font plus de 40%, près de 50% des émissions de carbone. Ce n'est pas le cas de l'Inde, c'est comme cela. Quelle que soit l'importance de Trinidad-et-Tobago, je ne pense pas qu'à elles toutes seules, les deux îles mettent en péril l'équilibre mondial. La question qui m'a été posée : est-ce que l'Inde pourra accéder au financement pour aider à la transformation d'une industrie ? La réponse est oui, en vertu des chiffres dont nous disposons. Je ne connais pas assez, je m'en excuse, la situation de Trinidad-et-Tobago pour faire une réponse aussi définitive sur le cas qui vous occupe, même si j'ai vu les puits de pétrole de la fenêtre de mon hôtel.
Peut-être une ou deux dernières questions.
QUESTION - Vous nous avez dit à l'instant que vous iriez au printemps en Inde signer des accords de transferts de technologie, notamment dans le domaine nucléaire. Que se passe-t-il à propos des accords qui ont été signés ou qui sont en cours de négociation plus exactement dans les Emirats Arabes Unis ? Dans le nucléaire justement, on a l'impression que cela piétine.
LE PRESIDENT - Vous savez, il faut faire attention avec vos impressions. Hier, vous aviez l'impression que le Commissaire français n'aurait pas le marché intérieur. Cette impression n'a pas été confirmée. S'agissant des Emirats, nous sommes en discussion sur plusieurs très grands contrats. Les discussions suivent leur cours. S'agissant de l'Inde, on est plus avancé puisque, d'ores et déjà, des papiers ont été signés. Et nous travaillons sur deux centrales nucléaires. Nous avons d'autres projets que j'aurai l'occasion de signer quand j'irai là-bas. Sur les Emirats, je ne peux pas vous en dire plus. Il y aura une procédure d'appel d'offre à laquelle nous concourrons, comme d'autres pays. On verra bien ce qui se décidera.
QUESTION - Pardon de vous poser cette question qui n'a rien avoir avec le sujet mais en France, l'épidémie de grippe A semble s'accélérer de façon inquiétante. Les centres de vaccination sont débordés, la Police... a dû intervenir dans plusieurs. Il y a eu deux cas de mutation qui ont été découverts aujourd'hui sur le virus. Est-ce que vous souhaitez que le gouvernement renforce le programme de vaccination, qui n'a plus l'air du tout d'être à la hauteur ?
LE PRESIDENT - Regardez comme c'est difficile. La semaine dernière, la totalité des papiers de la presse faisait écho d'un gouvernement trop précautionneux, qui avait inutilement affolé les populations. Et je passais mon temps à répondre à des questions : « Pourquoi avez-vous acheté tant de vaccins ? Pourquoi avez-vous ouvert tant de centres de vaccinations ? Les Français ne veulent pas se faire vacciner ». Cela a été l'actualité des dix derniers jours. Je ne vous en fais nullement le reproche, je constate. J'arrive à la conférence de presse et on me dit : «Pourquoi n'avez-vous pas ouvert plus de centres de vaccination ou pris plus de précaution pour être plus à la hauteur de la situation ? Franchement, c'est difficile.
Alors, la vérité, c'est qu'il faut prendre au sérieux cette épidémie de grippe. Si nous avons acheté des milliers de vaccins, c'est parce que nous avons anticipé ce problème, qui concerne d'ailleurs le monde entier. Et j'ai demandé au ministre de la Santé et au ministre de l'Intérieur de faire deux choses : d'ouvrir un plus grand nombre de centres, puisqu'à ma connaissance, ne m'en veuillez pas si je suis imprécis, mais il y en a un peu plus de la moitié qui sont ouverts, sur un potentiel de un peu moins de 1 200. Donc on va en ouvrir d'autres. Surtout, Madame, on va essayer d'élargir les plages d'ouverture. Dans vos journaux, il y avait des sondages disant : les Français ne croient pas à la grippe et ne veulent pas se faire vacciner. Trois jours après, il y a la queue dans les centres de vaccination. Je ne dis pas qu'on a bien fait mais je pense que nous tous, gouvernement comme médias, on doit garder notre sang-froid et faire en sorte de ne pas sur réagir en permanence pour dire un jour blanc, l'autre noir.
La vaccination, c'est très important. Aujourd'hui en France, il y a 750 000 personnes qui ont été vaccinés. Les demandes sont très nombreuses depuis quelques jours. L'épidémie est une réalité. On va donc ouvrir plus de centres et élargir les plages d'ouverture, notamment le mercredi et le samedi qui sont naturellement les moments de disponibilités pour les familles.
Je ne suis pas scientifique. Je suis cela bien sûr de près. Je vois un certain nombre de cas. Il y a des spécialistes qui travaillent dessus. Il est beaucoup trop tôt pour dire exactement ce qu'il en est.
QUESTION - Etes-vous vacciné vous-même ?
LE PRESIDENT - Je répondrai à la question le moment venu. Je ne voudrais pas ramener la grippe à mon seul cas personnel. C'est pour cela que je ne vous réponds pas. En tout cas, j'avais dit que je voulais le faire et je vous dirai la suite. C'est difficile de dire aux gens : « vous avez raison de vous faire vacciner » et de considérer de ne pas se faire vacciner soi-même.
QUESTION - Est-ce que les derniers développements sur le nucléaire iranien, ce qui s'est passé aujourd'hui, vous inquiète ?
LE PRESIDENT - Non, je pensais que vous alliez, au contraire, me parler de la décision prise aujourd'hui par le Conseil des gouverneurs de l'AIEA qui a décidé de transmettre le dossier nucléaire militaire iranien au Conseil de sécurité. Mais peut-être que comme vous étiez en voyage avec moi, vous n'avez pas suivi la dernière actualité. Ce qui est très important, c'est que le Conseil des gouverneurs de l'AIEA a voté une résolution pour transmettre au Conseil de sécurité, qui prépare les sanctions. Je voudrais signaler que la Chine a voté ce projet, que la Russie a voté ce projet. Tous les membres permanents du Conseil de sécurité ont voté au Conseil des gouverneurs de l'AIEA la transmission du dossier au Conseil de sécurité. Il y a eu six abstentions et trois votes contre, ce qui est insuffisant pour repousser, et dedans aucun des membres permanents du Conseil de sécurité. C'est donc très important. Comme vous voyez, c'est tout frais, c'est une décision prise ce matin. Et la Chine et la Russie ont voté la transmission au niveau des gouverneurs de l'AIEA, ce qui est la première étape avant une décision du Conseil de sécurité. C'est donc progressivement un consensus qui se fait. Je crois que les trois pays qui ont voté contre ce sont la Malaisie, Cuba et le Venezuela et les six pays qui se sont abstenus.
QUESTION - La question des émissions de gaz par habitant, est-ce que vous pensez que c'est une question qui est juste pour la Chine et surtout par rapport aux petits pays en développement ?
LE PRESIDENT - Je ne suis pas sûr d'avoir tout à fait compris. Je pense qu'on habite la même planète, les uns et les autres, et que les pays industrialisés comme nous, la France, l'Europe, les Etats-Unis, on doit reconnaître notre responsabilité historique, c'est vrai. Comme on était plus développé que les autres, on a pollué plus que les autres, donc les engagements que nous devons prendre sont des engagements plus importants que les autres, si on veut bien considérer que la planète, c'est notre bien à tous.
Ensuite, les pays les plus pauvres sont les plus vulnérables au changement climatique et donc on a un intérêt commun à avoir une croissance décarbonée. C'est pourquoi la France a inventé, - et je veux rendre hommage, d'ailleurs, à Jean-Louis BORLOO et à son travail - le plan justice-climat, la façon pour les pays les plus pauvres d'accepter de prendre des engagements chiffrés de limitation du carbone, c'est la certitude pour eux que, par les financements innovants et les transferts de technologie, on les aidera à faire cette mutation. Tout est lié, les deux choses sont liées. Il n'y peut pas avoir de respect des engagements de diminution des émissions s'il n'y a pas engagements financiers au profit des plus pauvres. Donc, tout est lié. Merci à tous et bon retour.
A tous les journalistes européens, je voudrais dire un mot de la nomination de Michel BARNIER, de son portefeuille puisque le Président BARROSO a annoncé qu'il lui confiait le portefeuille du marché intérieur y compris les services financiers et les droits d'auteur. C'est la première fois depuis 50 ans que la France a ce portefeuille, c'est extrêmement important. Alors, je fais toute confiance à Michel BARNIER. Je voudrais dire combien j'ai apprécié cette décision, ce qu'elle représente pour la France, notamment dans le combat qu'a mené la France depuis le début de la crise sur la nouvelle régulation qui est nécessaire. C'est un choix qui pèse lourd. Cela valide à mes yeux la stratégie qui a été la nôtre, de nous battre pour le Traité de Lisbonne et de réintégrer pleinement la France dans l'Europe après le problème que nous avons connu en 2005 avec le non au référendum.
Merci.