19 mai 2009 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, sur la valorisation de la filière bois, à Urmatt (Bas-Rhin) le 19 mai 2009.

Madame et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Ministre d'Etat,
Mesdames Messieurs les parlementaires,
Monsieur le Président du Conseil Général,
Mesdames, Messieurs,
J'ai été très heureux de visiter le site de l'entreprise familiale SIAT BRAUN, premier site de sciage français, dont le métier est situé au coeur de la filière de valorisation du bois.
En venant ici à Urmatt, j'ai voulu dire aux Français que la France a besoin d'une filière bois organisée, et ce n'est pas le Président de la région qui me contredira. Je veux saluer le travail considérable fait par tous ceux chefs d'entreprise, artisans, propriétaires privés, techniciens, salariés, élus locaux, pour mobiliser et valoriser le bois français.
On ne le sait pas assez, mais la forêt française est la troisième plus vaste d'Europe. Elle occupe 30% de notre territoire national et génère 450 000 emplois.
Il s'agit donc d'un atout considérable pour l'économie de nos territoires. Pourtant, chose étrange, cet atout demeure considérablement sous-exploité. On ne cesse de se plaindre de ne pas avoir de ressources en matière première, on en a une sous nos yeux et on la sous exploite.
La balance extérieure de la France pour l'ensemble de la filière du bois et de l'ameublement affiche un solde négatif de plus de 6 milliards d'euros en 2008. On dépense 6 milliards d'euros pour aller chercher du bois et de l'ameublement chez les autres alors qu'on l'a, à portée de la main. C'est le deuxième poste de déficit commercial français, après celui de l'énergie. C'est un gâchis phénoménal. La France n'a pas de pétrole. La France n'a pas de gaz. Mais la France a des territoires ruraux, une géographie, des ressources naturelles qui représentent un potentiel formidable. Le massif forestier français a augmenté de moitié depuis 1950 et, au rythme actuel, la forêt conquiert la surface équivalente à un département chaque décennie. Le potentiel forestier est extrêmement important, mais il y a seulement 60% de l'accroissement naturel annuel qui est prélevé chaque année. C'est-à-dire qu'il y a 40% qu'on peut prélever de plus en gardant notre patrimoine, qu'on ne prélève pas et pendant ce temps on paie 6 milliards d'euros. Voilà la situation dans laquelle nous nous trouvons. Il faut donc tout mettre en oeuvre pour mobiliser la ressource, dans des conditions durables.
Cela fait plus de vingt ans qu'un chef d'Etat français ne s'est pas exprimé sur la mobilisation et la valorisation de nos forêts ! Il ne faut critiquer personne, mais ça en dit long sur le peu de considération économique, écologique de la forêt. Qui peut dire que la mobilisation d'une ressource, je veux dire la forêt, qui concerne 3,5 millions de propriétaires privés, un tiers de notre territoire national, deuxième poste de déficit commercial, qui peut dire que ce n'est pas un sujet digne d'être traiter par le chef de l'Etat ? Il n'est pas normal que nous ayons attendu si longtemps pour développer une filière qui est stratégique.
Le paquet « climat-énergie » que nous sommes parvenus, cher Jean-Louis BORLOO, à faire adopter sous présidence française, constitue une chance extraordinaire pour le développement de la filière bois. D'ici à 2020, nous avons pris un engagement, mais mes chers compatriotes il faut que l'on s'habitue, maintenant quand on prend des engagements on va les tenir. J'ai conscience que c'est un changement, mais j'ai l'intention que cela soit ainsi. Nous avons pris l'engagement d'ici à 2020 de fournir 23% de notre consommation énergétique grâce à des énergies renouvelables, aujourd'hui c'est 9%. On doit passer en 11 ans de 9% à 23% en énergie renouvelable. C'est un défi, mesdames et messieurs, absolument prodigieux. C'est un effort immense pour la filière bois car la filière bois doit fournir, à elle seule, un tiers de cet effort. Cela vous parait abstrait. Est-ce que ça vous parle plus si je vous dis que ça représente pour la filière bois l'équivalent de l'énergie produite par 6 centrales nucléaires. Voilà très exactement le défi qui est le nôtre, passer de 9% d'énergie renouvelable dans notre consommation d'énergie à 23% en 10 ans et faire en sorte que ces 14% gagnés il y en ait un tiers qui soit pour la filière bois, c'est 6 centrales nucléaires en terme d'énergie. Pour parvenir à cet objectif c'est 21 millions de mètres cube de bois supplémentaires qu'il faudra sortir de nos forêts d'ici à 2020 !
Car il serait absurde que la France accroisse ses importations de bois alors qu'elle a un immense gisement forestier inexploité. Il faut donc changer d'échelle dans la mobilisation de la ressource.
C'est la raison pour laquelle, à partir du travail remarquable effectué par Jean PUECH, que je veux remercier, nous allons engager aujourd'hui avec vous un plan d'action sans précédent en faveur de la valorisation de la forêt française. Le bois est une gigantesque source de croissance durable.
Alors en ce début du XXIe siècle, la valorisation du bois de nos forêts est donc stratégique, elle est stratégique pour le réchauffement climatique, enfin sa lutte, pour l'avenir des territoires ruraux, Monsieur le Ministre Michel BARNIER, pour notre économie
Cette filière de surcroit, doit surmonter les conséquences de la tempête Klaus. En plus de la crise économique, on a eu la tempête.
Mesdames et Messieurs nous vivons la pire crise économique que le monde ait connue depuis 1929. L'économie américaine s'est contractée au premier trimestre de cette année en rythme annuel de 6%. L'Allemagne prévoit sur l'année une récession de 6% sur l'année. La production d'emballage et de papiers a baissé de moitié depuis le début de l'année. Evidemment si les autres ont moins de croissance, ils fabriquent moins de produits, il y a moins d'emballages et moins de constructions.
Ma responsabilité, mon devoir, c'est que la France sorte de cette crise plus forte qu'elle n'y est entrée. Nous avons la capacité de le faire, si nous innovons, si nous investissons, si nous allégeons la fiscalité sur la production et sur le travail, si nous préparons l'avenir. Les entreprises françaises doivent être aidées dans cet effort, d'autant plus que les entreprises françaises n'ont pas profitées des bonnes années de croissance parce qu'elles avaient les 35 heures. Je ne me lasserai pas de dire, parce que c'est la vérité, que le problème n'est pas les 35 heures en soit, le problème c'est qu'elles ont été imposées au pays seul dans le monde et que ça ne peut pas marcher comme cela.
Aujourd'hui la crise est là, votre industrie souffre, comme les autres. A crise exceptionnelle, il faut une réponse exceptionnelle. Nous avons décidé la suppression de la taxe professionnelle dès 2010. La taxe professionnelle a été créée en 1975, nous la supprimons. Cela fait 35 ans que j'entends dire dans tous les programmes de la gauche et de la droite : « cet impôt est stupide il faut le supprimer, on le supprimera l'année prochaine ». Et il est toujours là. Il n'y a pas un pays en Europe qui a la taxe professionnel. J'aurais une discussion avec les élus locaux bien sûr. Mais les élus locaux savent parfaitement que si les délocalisations continuent, parce que l'on paie en France des impôts qu'on ne paie pas ailleurs, il n'y aura plus de recettes de taxe professionnelle, pour la raison simple, c'est qu'il n'y aura plus d'usine. Et moi je préfère que l'on garde les usines. C'est un choix stratégique majeur.
Nous avons tout fait pour aider les entreprises dans la crise, pour rendre plus souple le chômage partiel nous travaillons sur la base d'ailleurs d'une idée qu'avait eu Jean-Louis BORLOO avec le contrat de transition professionnel, à un système qui fait qu'aucun salarié mis au chômage pour des raisons économiques ne reste sans rien. Je souhaite un système où toute personne qui est mis au chômage et qui n'y est pour rien, puisse garder son salaire à condition qu'il suive une formation qualifiante pour trouver un autre emploi. Le temps des dispenses d'emploi, de préretraites, stages bidon, ce temps est révolu. Nous devons investir dans les technologies, dans les infrastructures et dans la formation des femmes et des hommes de notre pays. Cet argent là ce n'est pas du déficit, c'est de la richesse que nous investissons et il vaut mieux, croyez moi, garantir le salaire de gens qui sont au chômage et qui n'y sont pour rien et leur apprendre un métier, plutôt que de leur donner une allocation de misère pour rester chez eux à ne rien faire et à penser qu'ils n'ont plus d'utilité pour la société.
Le 24 janvier dernier, la tempête Klaus a provoqué dans le Sud-ouest des très lourds dégâts. 45 millions de mètres cubes de bois ont été abattus. Nous nous y sommes rendus, cher Michel BARNIER, Chantal aussi était là, Jean-Louis également, pour soutenir la filière. Je vous annonce que les décrets relatifs à la mise en place de 600Meuros de prêts bonifiés, pour financer le stockage de bois, sont parus ce weekend end. Les conventions de mise en place de ces prêts viennent d'être signées avec les banques. Les premiers prêts seront octroyés par les banques avant la fin de ce mois. Notre dispositif de soutien sera opérationnel quatre mois après la tempête Klaus. Quatre mois, c'est trois mois de moins que le délai de mise en oeuvre, lors de la tempête de 1999. Je sais bien que quatre mois, c'est trop long pour des propriétaires qui risquent de voir pourrir le bois sur leur terre. Mais en même temps il y avait des délais incompressibles.
Je vous propose donc de renforcer notre tissu industriel de valorisation du bois et, d'engager un véritable programme.
Nous avons 2 000 scieries françaises, 300 assurent plus de 85% de la production nationale. Aucune entreprise française n'est présente dans les vingt premières entreprises de sciages européennes. Ce n'est pas possible que l'on continue comme cela. Vous comprenez bien que c'est un élément de faiblesse considérable.
Nous allons donc mettre en place avec Michel BARNIER et Luc CHATEL, que je remercie, un fonds stratégique d'investissement dont nous avons l'ambition qu'il puisse aller jusqu'à 100Meuros, pour participer au développement et à la consolidation des entreprises de bois, afin de faire émerger un tissu d'entreprises de taille suffisante pour structurer la filière.
Ce fonds sera constitué de participations d'opérateurs privés et d'aides de l'Etat. Son coeur de cible concernera les entreprises du secteur de la construction en bois et de la valorisation énergétique du bois. Dès cette année nous allons débloquer 20Meuros. Le groupe Eiffage, Monsieur le Président, merci, le groupe Crédit Agricole, le Fonds Stratégique d'Investissement, l'Office National des Forêts y souscriront. Il faut restructurer la filière, vous ne pouvez pas rester chacun dans votre coin, c'est capital pour traverser la crise.
Nous allons ensuite développer l'utilisation du bois dans la construction. C'est une réponse essentielle pour développer des logements plus respectueux de notre environnement. Les forêts agissent comme de véritables pompes de gaz carbonique et leur biomasse représente une fois et demie la quantité de carbone présente dans l'atmosphère.
Afin de favoriser le développement de la forêt, nous allons expérimenter la mise en place d'un marché financier visant à valoriser le stockage de carbone dans les produits en bois. Je demande à Jean Louis BORLOO et à Christine LAGARDE de travailler à l'élaboration d'un tel mécanisme que nous pourrions promouvoir lors des prochaines discussions sur la convention Climat, à la fin de cette année. Je veux d'ailleurs dire que ce que nous avons mis en place avec Jean-Louis BORLOO et Chantal JOUANNO sur le Grenelle de l'environnement ça marche et parce que ça marche on a l'impression qu'il n'y a plus rien qui s'y passe. La France change, nous voulons la croissance, mais la croissance durable. Nous n'allons pas recommencer les erreurs qui ont consisté à épuiser les ressources de la planète et à faire comme si on n'avait pas d'enfants, pas de petits enfants, pas d'arrières petits enfants. C'est un sujet majeur que la mise en place d'un marché financier pour valoriser le stockage de carbone dans les produits en bois.
La construction, je le disais il y a un instant, est donc un secteur clé. La forêt française progresse tous les ans de l'équivalent de 50 000 terrains de football. Or la France a une consommation de bois dans la construction trois fois moindre que les Etats-Unis et cinq fois moindre que la Finlande ou le Japon. Augmenter la consommation de bois dans la construction permettra de réduire les émissions de gaz carbonique et de répondre aux engagements européens de la France. Mais voilà le paradoxe Français ce n'est pas une critique. Je vous appelle mes chers compatriotes à regarder le pays que nous l'aimons, le nôtre. Lucidement on a la 3ème forêt d'Europe, on l'exploite très peu. Dans la construction on utilise moins que les autres le bois comme si nous n'en avions pas et on prend des engagements d'économie d'énergie et de croissance durable qu'on ne peut pas tenir si on ne valorise pas la filière du bois. Voilà la réalité. Rien que cette expression là justifie que le Président de la République s'engage aux côtés des Ministres pour que cela bouge et qu'on ne se retrouve pas dans 20 ans à faire un grand discours sur la valorisation d'une filière bois qui aura disparu. Comme la machine à outil a disparu, on ne la construit plus en France, ou si peu. Comme la chimie a disparu, parce qu'on s'en est pas occupé. Et si à l'époque le Général de Gaulle ne s'était pas occupé du nucléaire, ce n'est pas le marché qui l'aurait fait sortir tout de suite.
Nous allons donc multiplier, dès 2010, par dix le seuil minimum d'utilisation de bois dans les constructions neuves, multiplier par dix. De son côté l'Etat s'engagera à promouvoir la certification et l'emploi de bois certifié dans les constructions publiques, dès 2010. Naturellement, Jean-Louis, il n'est pas question de dire aux investisseurs privés : « faites ce que l'Etat ne fait pas ». L'Etat doit donner l'exemple.
Parallèlement, nous allons encourager l'utilisation du bois dans l'isolation thermique des bâtiments. C'est un chantier considérable qui produira une économie de 38% de la facture énergétique des bâtiments d'ici à 2020. Pour y parvenir, il convient de se donner les moyens d'un fort développement des travaux d'isolation, qui inévitablement recourront au matériau bois. Je propose que toute réalisation d'une isolation extérieure ne créant ni surface, ni volume habitable soit exemptée de dépôt de permis de construire et soumise à une simple déclaration préalable, que les gens puissent s'isoler tranquillement sans attendre un an qu'on leur donne l'autorisation de faire ce que, par ailleurs, on s'est obligé, par les engagements internationaux de la France, à faire.
Pour développer l'utilisation du bois pour la production d'énergie, notre objectif doit être de favoriser l'utilisation de la chaleur. Le fond chaleur, avec près d'un milliard d'euros d'engagements d'ici à 2011, soutiendra cet effort puissamment. Parallèlement, nous allons simplifier les conditions d'appel d'offre de la Commission de Régulation de l'Energie, dans un souci d'une plus grande réactivité en direction des grandes unités de cogénération à partir de bois.
Avec Jean Louis BORLOO, nous avons décidé de doubler et si c'est nécessaire, Jean-Louis, de tripler le tarif d'achat obligatoire d'électricité produite par des unités de cogénération, de taille moyenne, à partir du bois. C'est du concret cela aussi, parce que naturellement, si le prix est triplé, vous comprenez bien que l'intérêt des investisseurs pour cette technologie s'en trouvera renforcé.
Pour répondre à la demande croissante de bois, il nous modifier fondamentalement notre mode de gestion de la forêt, tout en préservant sa biodiversité.
En un quart de siècle, alors que la production biologique de la forêt française progressait de plus de 30%, la récolte est restée stable et la demande aussi £ sans action particulière, elle a donc connu un recul relatif comparable d'environ 30%. Comment alors espérer une augmentation de 50% en dix ans de la récolte ? On ne peut reconduire une politique qui a échoué. Elle a échoué.
Naturellement, les forêts domaniale et communale devront participer à cet effort de mobilisation. Mais je vous dois la vérité : 70% de la forêt française est détenue par des propriétaires privés. Or plus de la moitié de l'accroissement naturel non mobilisé y réside. Je répète, 70% de la forêt, c'est privé et plus de la moitié de l'accroissement naturel dont nous avons besoin, non mobilisé, y réside. Qu'est-ce que l'on fait ?
Indéniablement, la structure très morcelée de notre forêt privée en complique la gestion, puisque les 11 millions d'hectares de cette forêt se répartissent entre les mains de 3,5 millions de propriétaires.
La mise en valeur durable de ces forêts doit évidemment être décidée au départ par le propriétaire lui-même. Elle ne peut se limiter à une simple vente de bois confiée à un exploitant forestier. Faute d'être initiée spontanément, elle peut cependant être suscitée et organisée par une structure compétente.
Nous voulons passer d'une gestion trop souvent archaïque, morcelée et inégale de la forêt française, à une véritable gestion patrimoniale, dynamique et durable des 11 millions d'hectares de forêts privés.
Alors, je pose une question, même si je sais que c'est sensible. A quoi cela sert il de soutenir de la même manière par des aides ou des exonérations fiscales celui qui exploite sa forêt et celui qui laisse dormir ce capital ? Ecoutez, ce n'est être désagréable avec personne, nous voulons mobiliser la richesse de la forêt. Nous avons des exonérations fiscales, on les donne aux propriétaires de forêts, qu'ils l'exploitent ou qu'ils ne l'exploitent pas. Je ne peux pas me résigner à constater l'explosion de notre déficit commercial, et l'absence d'exploitation de certaines de nos forêts privées depuis des décennies. J'ai donc décidé que l'ensemble des aides publiques octroyées par l'Etat, et des allègements fiscaux existants seront conditionnés à l'exploitation effective de la forêt. Je souhaite une fiscalité au service des propriétaires qui exploitent leur forêt, et je tiens à saluer, à cet égard, l'excellent travail effectué par les coopératives forestières pour mobiliser cette ressource. Mesdames et messieurs, est-ce que l'on se comprend bien ? Nous avons besoin de la forêt et de son exploitation. Mais si vous donnez le même avantage fiscal à celui qui laisse dormir son patrimoine sans l'utiliser, sans l'exploiter et à celui qui l'exploite, comment fait-on changer les choses ? On ne peut pas les faire changer. Alors, cette fiscalité incitative, elle est pour l'exploitation de la forêt, pas pour le refus d'exploiter.
Alors je souhaite également libérer les contraintes qui pèsent depuis trop longtemps dans la gestion de la forêt. Je crois qu'il faut faire preuve de pragmatisme au service du propriétaire qui exploite. Je souhaite donc que, là où la forêt n'est pas exploitée, nous puissions élargir le champ des intervenants dans la gestion de la forêt privée. Pour ces cas et uniquement pour ceux-là, un mandat de gestion annuel reconductible pourra être proposé par les techniciens forestiers ou l'Office National des Forêts, dans le respect du droit de la concurrence, mais aussi naturellement, comme ils en ont déjà la possibilité, par les coopératives forestières ou les experts forestiers. Pourquoi devrions-nous limiter le champ des intervenants là où il y a carence, alors que nous avons un besoin considérable d'investissement pour mobiliser ce capital dormant ? Notre objectif doit être d'offrir un service à moindre coût aux petites propriétés privées forestières, par des économies d'échelle, comme cela s'est fait dans d'autres pays européens. Je veux mobiliser l'ensemble de la filière autour d'un objectif visant à produire plus de bois tout en préservant mieux la biodiversité.
Enfin, je souhaite que nous menions une démarche territoriale concertée pour mobiliser le bois de ces forêts. Au terme de cette démarche, chaque propriétaire forestier sera informé des conditions d'accès à ce mandat de gestion, et des conditions de soutien apporté par l'Etat aux propriétaires forestiers.
La recherche et l'innovation doivent enfin participer au développement de la filière du bois.
L'innovation, c'est la rencontre de trois acteurs : les universités, les organismes publics de recherche et les entreprises. L'essor des sept pôles de compétitivité dans le secteur du bois et du papier, dont Fibres Grand Est, Monsieur le Président, ici en Alsace, témoigne de la capacité d'innovation de la filière.
Nous avons relancé cette politique des pôles de compétitivité, Cher Luc CHATEL, par une enveloppe de 1,5 Mdseuros sur les trois ans qui viennent. Le développement de la chimie des produits issus de la forêt constitue un axe stratégique de développement. L'utilisation de la biomasse pour améliorer l'autosuffisance énergétique des sites papetiers et le développement des matériaux renouvelables dans le bâtiment et l'industrie et je n'oublie pas non plus nos pôles d'excellence ruraux. Mais vous comprenez bien, Mesdames et messieurs, moi, ce n'est pas un discours pour faire un discours. Nous voulons des résultats. Nous avons besoin de la forêt et de la filière bois. Donc ces décisions que je vous annonce, nous allons les mettre en oeuvre. Cela va changer des habitudes bien-sûr, mais si l'on ne change pas d'habitudes, on ne sortira pas forts de la crise. L'Etat est vraiment derrière la filière, que personne ici n'en doute.
Je propose d'ailleurs, qu'avec les ministres, nous fassions un comité de suivi des décisions que je viens d'annoncer et qui sont importantes, peut-être même historiques, pour la filière de manière à voir d'ici un an, ce que l'on doit corriger, ce que l'on doit rajouter ou ce que l'on doit retrancher. Il n'y a pas d'esprit de système de notre part. Mais nous avons pris, en matière d'environnement des engagements au nom de la France avec Jean-Louis BORLOO. Ces engagements, nous les tiendrons. Energies renouvelables, valorisation de la forêt, développement du solaire, états généraux de la mer sur laquelle je m'exprimerai, protection de la biodiversité et de la ressource halieutique. Je veux que vous compreniez quelque chose : ce n'est pas pour moi un effet de mode. C'est la prise de conscience que la croissance de demain ne ressemblera pas à la croissance d'hier. Il nous faut de la croissance et des emplois pour vous et pour vos enfants. Mais nous ne pouvons pas sacrifier les équilibres de la planète. La croissance demain sera durable ou elle ne sera pas.
Et la défense de l'environnement, c'est trop stratégique, c'est trop capital pour appartenir simplement à un petit groupe sectaire. Il faut que les grandes formations de gouvernements soient persuadées de la nécessité de produire différemment. Il faut continuer à produire en France si l'on veut avoir de l'emploi pour tout le monde. Mais nous produirons d'une façon durable et ce que j'annonce avec les ministres, Cher Michel BARNIER, sur la forêt, je le ferai pour d'autres secteurs décisifs pour l'équilibre de la planète. La France doit montrer l'exemple.
Alors, après, la bagarre ne sera pas terminée parce que si je souhaite que la France soit exemplaire, c'est pour notre intérêt Mesdames et Messieurs, mais c'est pour entrainer le restant du monde. Et nous aurons, dès le lendemain des élections européennes, un combat à mener et nous le mènerons avec nos amis allemands, sur l'instauration d'une taxe carbone aux frontières de l'Europe.
Nous venons de décider que les entreprises européennes qui ne produiraient pas de façon propre, seront sanctionnées. Il n'est pas question d'accepter que des produits soient importés en Europe venant de pays qui ne respectent aucunes des règles environnementales que nous imposons à nos propres entreprises. Nous demanderons donc l'instauration aux frontières de l'Europe d'une taxe carbone pour taxer les produits qui viennent de pays qui ne respectent aucune règle environnementale.
Puis, nous irons au G8 - G14 - en Italie et là, il faudra convaincre les Américains d'aller plus loin dans les engagements qui sont les leurs. Vous savez que pour nous, c'est une chance d'avoir le Président OBAMA et nous devons l'aider à réussir parce que les Etats-Unis, c'est la première économie du monde. Mais il faut que nous arrivions à convaincre le Président OBAMA que le discours qu'il a fait sur l'environnement qui est une formidable nouvelle, il aille encore plus loin et peut-être même qu'il s'inspire de ce que font les Européens. Quand on aura convaincu les Etats-Unis, Europe et Etats-Unis main dans la main, nous irons convaincre les grands pays émergents : la Chine, l'Inde, le Brésil, le Mexique, l'Afrique du Sud, qu'eux aussi, doivent participer à ce combat pour préserver les équilibres de la planète. Après tout, le réchauffement climatique, la montée des eaux, ça les concerne.
Puis, il y aura l'Assemblée Générale des Nations Unis en septembre à New York et puis, il y aura Copenhague à la fin de l'année. La minute de vérité. On verra à ce moment-là les pays du monde qui sont au rendez-vous de l'histoire ou ceux qui ne le veulent pas et ils devront l'assumer devant l'opinion publique internationale. C'est cela qui est en cause.
Et si la France veut être entendue, si l'Europe veut être crédible, nous devons montrer l'exemple et nous le faisons sur la filière bois.
Mesdames et messieurs, vous l'aurez compris, dans mon esprit comme dans celui du gouvernement, du Premier ministre, des ministres, la crise qui vous fait souffrir, qui fait souffrir le pays, nous allons nous en sortir. Mais nous nous en sortirons en travaillant davantage, en étudiant davantage, en nous formant davantage, en innovant davantage, en cherchant davantage. Pas en en faisant moins.
Pourquoi voulons-nous les meilleures universités pour nos étudiants ? Parce qu'une partie de leur avenir en dépend. Et ce n'est pas en bloquant les universités pendant des mois et en demandant qu'on valide des diplômes sans avoir suivi les cours qu'on rend service aux étudiants. On les prive d'avenir en faisant cela.
Pourquoi je tiens à la réforme des lycées et pourquoi je m'y investis personnellement ? Parce que vous êtes en droit d'attendre que l'éducation nationale qui fait un travail remarquable évolue, elle aussi, pour donner la meilleure formation et la meilleure éducation à vos enfants.
Et pourquoi vais-je visiter des scieries et des industries ? Pour aider les chefs d'entreprises à faire comprendre que la France n'a pas besoin de moins de travail mais de plus de travail et que la crise ne fait qu'accélérer l'urgence de la réforme, du mouvement, de la modernisation.
On ne doit pas subir, on doit agir. Et si l'Europe a pu éviter la catastrophe financière, c'est parce qu'elle a agit. Si on avait fait comme les autres à attendre que cela passe, qu'en serait-il aujourd'hui de la situation qui est la notre ?
Voilà, je pense que notre pays a besoin d'énergie, a besoin de se moderniser, a besoin d'aider ceux qui veulent investir, innover, travailler davantage. Et pour moi, il n'y a pas de petit secteur, il n'y a pas de domaines nobles pour le chef de l'Etat et puis de domaines moins nobles. La forêt, la filière bois, ce sont des domaines stratégiques, au même titre que le nucléaire, les nanotechnologies et les inventions formidables d'aujourd'hui. Mais on a séparé de façon artificielle l'économie ancienne - comme on disait - et l'économie nouvelle. Le bois, c'est l'économie nouvelle. C'est l'économie de demain. Ne vous laissez plus entrainer par cette pensée unique qui, au fond, a justifié tant d'erreurs de notre pays et je pense qu'il est tant que la majorité silencieuse, celle que l'on n'entend pas très souvent, dise ce qu'elle souhaite pour son pays. De bonnes universités, des usines qu'on ne délocalise pas, du travail et la récompense du travail, la valorisation du travail, le respect pour le travail et pour le travailleur et qu'on comprenne aussi que dans des technologies traditionnelles comme le bois, des matières premières agricoles, cher Michel BARNIER, il y a de l'avenir, beaucoup d'avenir si la France est au rendez-vous de l'investissement.
J'espère que vous avez compris que pour moi, c'était très important d'être parmi vous, dans cette région, l'Alsace, que j'aime beaucoup, dont je ne peux pas oublier qu'elle m'a quand même fait confiance, qui représente un tel potentiel, voisine de nos principaux partenaires, les Allemands. Et je ne veux pas que cette région là, qui a tellement souffert dans le passé, souffre d'une concurrence qui serait le fait de mesures et de décisions prises par nos voisins qui poussent à la production et à la compétitivité alors que nous même, on s'endormirait sur des lauriers qui ne sont plus.
Voilà pourquoi j'ai voulu venir ici, en Alsace, avec Jean-Louis BORLOO, avec Michel BARNIER, avec Chantal JOUANNO, avec Luc CHATEL, avec Jean PUECH, pour vous dire combien dans la crise, le pays doit se mobiliser.
Mesdames et messieurs, je vous remercie.