8 janvier 2009 - Seul le prononcé fait foi
Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, sur la refondation du capitalisme face à la crise économique, à Paris le 8 janvier 2009.
Cette crise, il va falloir qu'on en sorte, et comme l'a très bien dit Angela Merkel, on ne s'en sortira pas tout seul. Il va bien falloir qu'à un moment ou un autre, les femmes et les hommes qui ont pris la parole aujourd'hui et d'autres, on se mette d'accord pour exiger les changements structurels qu'appelle cette crise. Si on ne le fait pas, personne ne le fera à notre place, et j'attends beaucoup que celle qu'on décrit souvent comme la vieille Europe, elle ne soit pas vieille dans sa tête, et qu'avec l'Italie, avec l'Espagne, avec la Grande-Bretagne, bien sûr avec l'Allemagne, ensemble on porte le discours de l'avenir, alors que nous avons aujourd'hui l'organisation du passé.
C'est pourquoi je suis très heureux de participer et d'organiser ce colloque. Je remercie Eric Besson. Je remercie bien sûr Angela Merkel. Nous devons travailler ensemble, nous travaillons ensemble parce que c'est l'intérêt de l'Europe et parce que l'on partage les mêmes convictions, Angela et moi. Je remercie Tony - pour un retraité, il est drôlement en forme -, il a dit que nous, on ne resterait pas au pouvoir tout le temps. Tu as raison. Mais toi, est-ce que tu resteras à la retraite tout le temps ? Je voudrais remercier également les anciens premiers ministres : Michel Rocard, dont la présence est un plaisir et un honneur £ Jean-Pierre Raffarin, lui dire également mon amitié £ les ministres.
La crise, Mesdames et Messieurs, Madame la Présidente du Libéria qui est l'honneur de l'Afrique, ce n'est quand même pas tous les jours qu'on peut accueillir dans un colloque international un chef d'Etat africain qui aime son pays et qui est un démocrate, c'est donc un honneur, Madame, que de vous recevoir parmi nous. Et bien sûr, comme l'a très bien dit Tony Blair, Angela Merkel et moi, nous pensons qu'on ne peut pas continuer à vouloir régler les choses sans l'Afrique, un milliard d'habitants.
La crise que nous vivons, elle est d'abord une remise en question de nos croyances, de nos certitudes et de nos théories. Nous voici donc tout d'un coup obligés, - ce n'est pas un choix, c'est une obligation, - de penser autrement, de réfléchir autrement, de décider autrement. Parce que le monde change, nous devons changer. Parce que le monde change, nous devons adopter de nouvelles règles et une nouvelle politique. Ce changement, ou nous le voulons et on le contrôlera, ou nous le refusons et on le subira. Et la France comme les autres. Je le dis à mes compatriotes, j'aime la France, mais la France ne peut pas cette fois-ci dire aux autres de faire ce que l'on dit et de s'abstenir nous-mêmes de nous appliquer ce que l'on recommande pour les autres. Si la France veut être entendue, elle doit montrer l'exemple.
Nous avons tous en mémoire, chère Angela, l'extraordinaire espérance qui était née au moment de la chute du mur de Berlin. Quand la jeunesse allemande a démantelé morceau par morceau ce mur de la honte qui a pendant si longtemps été le symbole d'un monde coupé en deux. La défaite du totalitarisme avait été perçue alors comme la promesse d'un monde meilleur. C'est ce que l'on a cru. L'humanité enfin réconciliée, on allait connaître la paix, la liberté, la prospérité.
La mondialisation heureuse annonçait la fin de l'Histoire.
Ce grand rêve de paix s'est brisé. Il s'est brisé sur les passions humaines. Le mur est tombé, mais les revendications identitaires et les radicalismes religieux se sont engouffrés. Le revers de ce modèle où tout était voué à s'organiser, à se régler à l'échelle de la planète tout entière, cela a eu pour résultat que l'homme est demeuré de plus en plus seul face au monde.
La mondialisation a créé un vide en dissolvant les repères, les valeurs, les solidarités traditionnelles qui maintenaient au final un équilibre entre l'individuel et le collectif.
De ce vide est née une angoisse, de cette angoisse est née une révolte. Et la seule réponse qu'on trouvait, c'est l'apologie de la proximité et du local. On a tous rêvé après le mur de Berlin que tout s'arrangerait. Dans la chute du mur se sont engouffrés les reflexes identitaires et des passions extrémistes religieuses. L'homme est resté seul face à un monde qu'il ne comprenait plus sans repère. La seule réaction, c'était tout sur la proximité.
Sur fond de croissance économique forte et d'innovations sans précédent, s'est donc nouée une crise morale et une crise identitaire qui explique des comportements extrêmes.
Moi, je pense que le rêve de la mondialisation heureuse est mort avec le 11 septembre 2001 et l'émergence d'un fanatisme qui semblaient venu du fond des âges. A-t-on assez pris au sérieux depuis les injustices, Tony, les inégalités, les déséquilibres qui offrent à l'extrémisme et à la violence un terreau favorable ?
Notre système économique tel qu'il s'est développé depuis une vingtaine d'années n'a-t-il pas, au fond, contribué à aggraver les choses ? Dans la mondialisation, il y a le bon côté: les progrès techniques, les millions d'habitants des pays émergents arrachés à la pauvreté, la libre circulation des hommes, des idées, des marchandises, c'est bien.
Mais il y a aussi le mauvais côté. Le mauvais côté, il faut le regarder en face : des pays de plus en plus pauvres, des inégalités qui touchent maintenant les classes moyennes, car la précarité n'est plus l'affaire que des seuls pauvres dans nos pays. La question centrale pour nous, Angela, pays développés, c'est la précarité pour les classes moyennes. Et puis il y a tout le reste : l'épuisement des ressources naturelles, la pollution, le réchauffement climatique, les émeutes de la faim, et peut être un jour, les émeutes de l'eau et des migrations massives. Cela aussi, c'est le visage de la mondialisation.
On attendait la concurrence et l'abondance. Au final, on a la rareté, le triomphe de l'économie de rente, la spéculation et les dumpings.
D'énormes déséquilibres sont apparus, les uns engrangeant des déficits, les autres accumulant des excédents à travers une redistribution planétaire de la richesse et de la production tout aussi inégalitaire. Le système financier mondial a prospéré sur ces déséquilibres. En recyclant les excédents financiers pour financer les déficits, oui, Angela, il a permis, autorisé des déséquilibres sans précédent.
Il faut dire les choses telles qu'elles sont, je prends mes responsabilités, le capitalisme purement financier a perverti la logique du capitalisme. Si on n'est pas d'accord sur ce constat là, on est d'accord sur rien.
Le capitalisme, pour moi, c'est l'effort, c'est le travail, c'est l'esprit d'entreprise..., c'est la propriété privée, c'est l'investissement à long terme, c'est l'accumulation finalement, comme dirait Michel Rocard, dans la durée du capital productif.
Le capitalisme financier c'est un système qui donne la préférence au spéculateur sur l'entrepreneur, au capital financier sur le capital productif, au capital circulant sur le capital immobilisé, au court terme sur le long terme, aux signes de la richesse sur la richesse. Les signes de la richesse comptant davantage que la richesse elle-même.
Le capitalisme purement financier c'est un système d'irresponsabilité, je vais utiliser un mot fort, c'est un système amoral où la logique des marchés excuse tout.
C'est un système où l'argent va à l'argent, où le travail est déprécie, où la production est dépréciée, où l'esprit d'entreprise est déprécié.
Mais la crise du capitalisme financier n'est pas la crise du capitalisme. Le remède à la crise que nous connaissons n'est pas l'anticapitalisme. L'anticapitalisme est une impasse. L'anticapitalisme c'est la politique de la table rase, c'est la négation de tout ce qui a permis d'asseoir notre id??e du progrès.
La crise du capitalisme financier n'appelle pas à la destruction du capitalisme qui serait une catastrophe mais à sa moralisation. C'est une deuxième chose sur laquelle je veux me battre. On doit moraliser le capitalisme, non pas le détruire. Voilà le défi, Angela, auquel nous sommes confrontés. Il ne faut pas rompre avec le capitalisme, il faut le refonder.
Et je dis à mes propres amis en France qui ne sont pas d'accord avec cette expression refonder, s'ils n'adoptent pas la refondation du capitalisme, alors ils font le lit de ceux qui veulent détruire le capitalisme. Soit on refonde le capitalisme, soit on le détruit.
Ce défi est immense. C'est un impératif économique, politique et moral. Avec cela, va se poser une question pour nous très difficile : comment convaincre nos concitoyens que nous allons les protéger sans céder à la tentation du protectionnisme ? Si nous ne convainquons pas nos compatriotes qu'on va les protéger, ils entendront d'autres qui les conduiront dans une impasse. Il faut donc protéger nos compatriotes sans le protectionnisme. Il faut agir avec les autres pour sortir de la crise au lieu d'agir tout seul sans se préoccuper de ce que font les autres.
A crise mondiale, réponse mondiale. Mais cela ne veut pas dire, - et c'est un débat que nous avons eu bien souvent avec Angela -, qu'il faille attendre une politique unique à l'échelle planétaire, qui serait une absurdité. Trop de différences entre les continents, les pays, les cultures, les économies rendent cette hypothèse irréaliste. Regardez, malgré ses efforts, où est arrivé le FMI en voulant imposer quels que soient les continents une même politique. Attendre un gouvernement mondial pour régler les problèmes de la planète serait renoncer à en régler aucun.
La voie utile est celle de la coopération et de l'entente sur des principes, des valeurs, des objectifs, des priorités. Angela, c'est ce qu'ensemble on a essayé de faire avec l'Europe. On me dit que ce n'est pas assez. Ceux qui disent que ce n'est pas assez, j'aurais bien voulu les y voir. Parce que je peux vous dire une chose, parlant sous le contrôle de Tony, cela a été décisif d'avoir la Grande-Bretagne aux côtés de ses amis, de ses alliés européens pour exiger un changement dans l'organisation du monde. Je plaiderai, jusqu'à mon dernier souffle, que nous avons besoin des Anglais dans l'Europe, que votre place est avec nous, que nous avons besoin de votre ouverture sur le monde. La Grande-Bretagne est d'autant plus forte qu'elle est solidaire avec l'Europe et pas simplement avec les Etats-Unis. Je suis un ami des Etats-Unis d'Amérique, mais la place de la Grande-Bretagne est en Europe, à la première place avec nous. Et Angela sait parfaitement que c'est une conviction que nous partageons et cela a été décisif, pour Angela Merkel et moi, que d'avoir la Grande-Bretagne d'accord pour imposer l'organisation du G20 à Washington. De la même façon, c'est Angela Merkel qui a montré la voie à Heilligendamm en invitant le G5 aux travaux du G8. Quitte à me répéter, je partage tellement le point de vue exprimé par Tony Blair. Vouloir régler les grands problèmes de la planète sans la Chine, 1 milliard 300 millions d'habitants, sans l'Inde, 1 milliard de plus, sans aucun pays sud-américain et sans aucun pays africain, comme si le milliard d'Africains, cela ne comptait pas, je vais vous dire une chose : si le G8 n'a pas la sagesse, en Italie, d'inviter sérieusement le G5, c'est un jour le G5 qui ne viendra pas s'asseoir à la table du G8. Voilà la réalité des choses parce que l'on ne sort pas 3 milliards d'habitants simplement parce qu'on est des nations qui ont l'habitude de jouer avec la croissance et le progrès. Voilà profondément ce que je pense.
Par ailleurs, il ne s'agit naturellement pas - et je voudrais rassurer les banquiers qui sont dans la salle - de supprimer la finance, franchement, il s'agit simplement de mettre la finance au service de l'économie réelle et de la production.
Il ne s'agit pas de disqualifier l'endettement, par pitié, ne passons pas d'un excès à un autre, parce que l'endettement, je sais que c'est dur de le dire aujourd'hui, exprime la foi dans l'avenir et c'est un moteur essentiel du développement économique. Mais il s'agit de faire en sorte que les risques qui sont la contrepartie inévitable de l'effet de levier soient bien évalués, que les banques fassent réellement leur métier de mon point de vue, je n'arrive pas à comprendre : à chaque fois qu'il y a une bulle qui explose, il s'est trouvé des banquiers pour prêter n'importe quoi à n'importe qui £ et du jour au lendemain, on vous explique que quel que soit le sérieux des projets, on ne peut plus rien prêter. Peut-on arriver à trouver un équilibre ?
Il ne s'agit pas de priver les marchés de la liquidité que leur apportent les opérateurs financiers mais d'éviter que l'on puisse spéculer avec de l'argent que l'on n'a pas. De ce point de vue, je ne comprends pas pourquoi pendant des années, on a trouvé si facilement les bénéficiaires des bonus, on vient maintenant nous expliquer qu'on ne pourrait pas trouver aujourd'hui ceux qui nous ont mis dans la situation où on est.
Le capitalisme, c'est la responsabilité. Dans la responsabilité, on a des responsables qui ont des bonus quand cela marche et il faut quand même trouver des responsables : des centaines de milliards de dollars qui ont disparu en fumée sur le comportement irresponsable de quelques uns. Nos opinions publiques sont scandalisées et elles ont raison. Et s'il n'y a pas de sanction, s'il n'y a pas de responsable, comment voulez-vous que nous expliquions aux millions de nos concitoyens qu'ils doivent faire des efforts et que ceux là même qui nous ont mis dans la situation où on est ne le feront pas ? Qui peut penser cela ? Naturellement, cela amène chacun à être face à ses responsabilités. Nous avons mobilisé beaucoup d'argent du contribuable pour que les banques fassent leur métier. Au moment de la distribution des dividendes, il faudra que chacun soit responsable et pense que le contribuable a permis de sauver des banques et qu'il n'est pas temps aujourd'hui d'en remercier les actionnaires. Chacun doit faire sa part des efforts, sinon le système explosera.
Par ailleurs, il ne s'agit pas de substituer au calcul économique individuel un fatras de règlementations, mais de faire en sorte que le calcul de chacun puisse être effectué en toute connaissance de cause.
Mesdames et Messieurs,
Pour terminer, le fait majeur de cette crise, tout le monde le sait bien, c'est le retour de l'État, c'est la fin de l'idéologie de l'impuissance publique qui était la contrepartie de la toute-puissance du marché. D'ailleurs, cela a été bien curieux de voir appeler au secours les Etats de la part de ceux qui ne voulaient plus en entendre parler. Et quand tout s'écroulait, on a bien été content de trouver nos numéros de téléphone ! Certainement, on ne connaît pas grand-chose, c'est peut-être pour cela que les gens nous faisaient confiance !
Voici l'État rendu à la plénitude de son rôle, et aussi de ses responsabilités.
Il ne s'agit pas de nationaliser toute l'économie mondiale.
Il ne s'agit pas de créer un capitalisme d'État où il n'y aurait plus que l'État. Mais il s'agit de rééquilibrer les rôles respectifs de l'État et du marché.
Dans le capitalisme du XXIème siècle, il y a une place pour l'État.
Le capitalisme doit donc redevenir ce qu'il n'aurait jamais dû cesser d'être : un capitalisme d'entrepreneurs et ce capitalisme d'entrepreneurs, l'État doit l'animer, doit l'entraîner avec sa capacité propre.
Il faudra se défaire d'une illusion qui commence à poindre : remplacer un défaut de règles par un excès de règles. On ne soigne pas le mal par le mal. On ne peut espérer faire aucun progrès en paralysant l'initiative. On refondera le capitalisme sur des règles simples, sur la capacité de l'État à intervenir quand c'est nécessaire et sur l'investissement, comme l'a dit Tony, dans la recherche, dans l'éducation et dans la formation.
La crise a changé beaucoup de choses. Il faut voir la crise actuelle comme la conséquence d'un dégonflement rapide de la bulle de la dette, comme le passage d'un modèle de croissance par l'endettement à un modèle de croissance par le travail. Plus que jamais, je crois à la valeur travail.
Mesdames et Messieurs,
Ce monde qui s'annonce ne sera pas forcément plus facile, mais il peut représenter une opportunité.
La crise ne nous prépare pas des lendemains qui chantent mais elle nous rend libres de construire notre avenir. Elle nous rend libres d'échapper à cette fatalité du sens de l'histoire qui prétend périodiquement nous enfermer dans une pensée unique, une politique unique, un modèle unique et qui n'est en réalité qu'un alibi du renoncement. La crise nous rend libres. Qu'allons-nous faire de cette liberté ? Telle est la question.
J'étais très heureux d'entendre Angela Merkel quand elle a dit : je n'accepterai pas qu'au Sommet de Londres, on ne tire pas les conséquences de ce qui s'est passé. Eh bien, nous serons deux, au moins. Ce n'est pas une question d'idéologie, c'est que nous, nous n'accepterons pas, une fois le gros de la crise passée, que les mêmes viennent nous dire : excusez-nous, partez, vous n'avez plus rien à dire maintenant, les choses sérieuses commencent. Non ! Les décisions nous les prendrons le 2 avril à Londres. Je veux vous dire une chose : j'ai toujours, dans ma vie politique, été partisan d'une alliance très proche avec les Etats-Unis d'Amérique, mais que les choses soient claires, au XXIème siècle, il n'y a plus une seule nation qui peut dire ce qu'il faut faire ou ce qu'il faut penser. Soit les Etats-Unis accompagneront ce changement, et je l'espère de tout coeur, parce qu'un nouveau président apportera son dynamisme, son intelligence et son ouverture, et nous changerons le monde avec les Etats-Unis, mais nous n'accepterons pas le statu quo, nous n'accepterons pas l'immobilisme, nous n'accepterons pas le retour à la pensée unique. Et nous avons besoin que la Chine amène sa force d'entraînement, que le Brésil dise sa part de vérité, que l'Afrique soit associée à ce que nous allons construire et que nous rebâtissons ensemble un système international.
A Bretton Woods, en 1945, il y avait une monnaie. Cette monnaie a construit la prospérité du monde. En 2009, il n'y a plus une monnaie, il y en a plusieurs. Il va falloir que l'on discute comment chacun gère sa monnaie, ses taux d'intérêt, comment on en parle. Il ne peut plus avoir un seul pays qui explique aux autres : payez la dette qui est la nôtre. Il ne peut plus avoir un seul modèle. Il doit y avoir de nouvelles enceintes et de nouvelles décisions. Le 2 avril, c'est déjà loin, mais le 2 avril, c'est un rendez-vous. De deux choses l'une, soit on est à la hauteur, soit on ne l'est pas.
Comprenez bien, économistes, politiques, observateurs, entrepreneurs, nous avons besoin de votre soutien qui n'est pas un soutien qui s'exprime en termes de gauche ou de droite, de socialistes ou de libéraux, c'est un soutien sous le seul clivage qui vaille : d'un côté les réformateurs de gauche et de droite, de l'autre les conservateurs et les immobiles de droite et de gauche. Cela fait du monde ! C'est cela le clivage, et c'est cela qui permettra à des chefs de gouvernement du Sud et du Nord, de gauche et de droite, d'avoir la même vision de l'avenir.
Chère Angela,
Cher Tony,
Madame la Présidente,
La France a choisi son camp, fidèle à son identité et à son histoire, c'est celui du mouvement, de la justice, du changement, du refus du conservatisme et de l'immobilisme.
Je vous remercie.
C'est pourquoi je suis très heureux de participer et d'organiser ce colloque. Je remercie Eric Besson. Je remercie bien sûr Angela Merkel. Nous devons travailler ensemble, nous travaillons ensemble parce que c'est l'intérêt de l'Europe et parce que l'on partage les mêmes convictions, Angela et moi. Je remercie Tony - pour un retraité, il est drôlement en forme -, il a dit que nous, on ne resterait pas au pouvoir tout le temps. Tu as raison. Mais toi, est-ce que tu resteras à la retraite tout le temps ? Je voudrais remercier également les anciens premiers ministres : Michel Rocard, dont la présence est un plaisir et un honneur £ Jean-Pierre Raffarin, lui dire également mon amitié £ les ministres.
La crise, Mesdames et Messieurs, Madame la Présidente du Libéria qui est l'honneur de l'Afrique, ce n'est quand même pas tous les jours qu'on peut accueillir dans un colloque international un chef d'Etat africain qui aime son pays et qui est un démocrate, c'est donc un honneur, Madame, que de vous recevoir parmi nous. Et bien sûr, comme l'a très bien dit Tony Blair, Angela Merkel et moi, nous pensons qu'on ne peut pas continuer à vouloir régler les choses sans l'Afrique, un milliard d'habitants.
La crise que nous vivons, elle est d'abord une remise en question de nos croyances, de nos certitudes et de nos théories. Nous voici donc tout d'un coup obligés, - ce n'est pas un choix, c'est une obligation, - de penser autrement, de réfléchir autrement, de décider autrement. Parce que le monde change, nous devons changer. Parce que le monde change, nous devons adopter de nouvelles règles et une nouvelle politique. Ce changement, ou nous le voulons et on le contrôlera, ou nous le refusons et on le subira. Et la France comme les autres. Je le dis à mes compatriotes, j'aime la France, mais la France ne peut pas cette fois-ci dire aux autres de faire ce que l'on dit et de s'abstenir nous-mêmes de nous appliquer ce que l'on recommande pour les autres. Si la France veut être entendue, elle doit montrer l'exemple.
Nous avons tous en mémoire, chère Angela, l'extraordinaire espérance qui était née au moment de la chute du mur de Berlin. Quand la jeunesse allemande a démantelé morceau par morceau ce mur de la honte qui a pendant si longtemps été le symbole d'un monde coupé en deux. La défaite du totalitarisme avait été perçue alors comme la promesse d'un monde meilleur. C'est ce que l'on a cru. L'humanité enfin réconciliée, on allait connaître la paix, la liberté, la prospérité.
La mondialisation heureuse annonçait la fin de l'Histoire.
Ce grand rêve de paix s'est brisé. Il s'est brisé sur les passions humaines. Le mur est tombé, mais les revendications identitaires et les radicalismes religieux se sont engouffrés. Le revers de ce modèle où tout était voué à s'organiser, à se régler à l'échelle de la planète tout entière, cela a eu pour résultat que l'homme est demeuré de plus en plus seul face au monde.
La mondialisation a créé un vide en dissolvant les repères, les valeurs, les solidarités traditionnelles qui maintenaient au final un équilibre entre l'individuel et le collectif.
De ce vide est née une angoisse, de cette angoisse est née une révolte. Et la seule réponse qu'on trouvait, c'est l'apologie de la proximité et du local. On a tous rêvé après le mur de Berlin que tout s'arrangerait. Dans la chute du mur se sont engouffrés les reflexes identitaires et des passions extrémistes religieuses. L'homme est resté seul face à un monde qu'il ne comprenait plus sans repère. La seule réaction, c'était tout sur la proximité.
Sur fond de croissance économique forte et d'innovations sans précédent, s'est donc nouée une crise morale et une crise identitaire qui explique des comportements extrêmes.
Moi, je pense que le rêve de la mondialisation heureuse est mort avec le 11 septembre 2001 et l'émergence d'un fanatisme qui semblaient venu du fond des âges. A-t-on assez pris au sérieux depuis les injustices, Tony, les inégalités, les déséquilibres qui offrent à l'extrémisme et à la violence un terreau favorable ?
Notre système économique tel qu'il s'est développé depuis une vingtaine d'années n'a-t-il pas, au fond, contribué à aggraver les choses ? Dans la mondialisation, il y a le bon côté: les progrès techniques, les millions d'habitants des pays émergents arrachés à la pauvreté, la libre circulation des hommes, des idées, des marchandises, c'est bien.
Mais il y a aussi le mauvais côté. Le mauvais côté, il faut le regarder en face : des pays de plus en plus pauvres, des inégalités qui touchent maintenant les classes moyennes, car la précarité n'est plus l'affaire que des seuls pauvres dans nos pays. La question centrale pour nous, Angela, pays développés, c'est la précarité pour les classes moyennes. Et puis il y a tout le reste : l'épuisement des ressources naturelles, la pollution, le réchauffement climatique, les émeutes de la faim, et peut être un jour, les émeutes de l'eau et des migrations massives. Cela aussi, c'est le visage de la mondialisation.
On attendait la concurrence et l'abondance. Au final, on a la rareté, le triomphe de l'économie de rente, la spéculation et les dumpings.
D'énormes déséquilibres sont apparus, les uns engrangeant des déficits, les autres accumulant des excédents à travers une redistribution planétaire de la richesse et de la production tout aussi inégalitaire. Le système financier mondial a prospéré sur ces déséquilibres. En recyclant les excédents financiers pour financer les déficits, oui, Angela, il a permis, autorisé des déséquilibres sans précédent.
Il faut dire les choses telles qu'elles sont, je prends mes responsabilités, le capitalisme purement financier a perverti la logique du capitalisme. Si on n'est pas d'accord sur ce constat là, on est d'accord sur rien.
Le capitalisme, pour moi, c'est l'effort, c'est le travail, c'est l'esprit d'entreprise..., c'est la propriété privée, c'est l'investissement à long terme, c'est l'accumulation finalement, comme dirait Michel Rocard, dans la durée du capital productif.
Le capitalisme financier c'est un système qui donne la préférence au spéculateur sur l'entrepreneur, au capital financier sur le capital productif, au capital circulant sur le capital immobilisé, au court terme sur le long terme, aux signes de la richesse sur la richesse. Les signes de la richesse comptant davantage que la richesse elle-même.
Le capitalisme purement financier c'est un système d'irresponsabilité, je vais utiliser un mot fort, c'est un système amoral où la logique des marchés excuse tout.
C'est un système où l'argent va à l'argent, où le travail est déprécie, où la production est dépréciée, où l'esprit d'entreprise est déprécié.
Mais la crise du capitalisme financier n'est pas la crise du capitalisme. Le remède à la crise que nous connaissons n'est pas l'anticapitalisme. L'anticapitalisme est une impasse. L'anticapitalisme c'est la politique de la table rase, c'est la négation de tout ce qui a permis d'asseoir notre id??e du progrès.
La crise du capitalisme financier n'appelle pas à la destruction du capitalisme qui serait une catastrophe mais à sa moralisation. C'est une deuxième chose sur laquelle je veux me battre. On doit moraliser le capitalisme, non pas le détruire. Voilà le défi, Angela, auquel nous sommes confrontés. Il ne faut pas rompre avec le capitalisme, il faut le refonder.
Et je dis à mes propres amis en France qui ne sont pas d'accord avec cette expression refonder, s'ils n'adoptent pas la refondation du capitalisme, alors ils font le lit de ceux qui veulent détruire le capitalisme. Soit on refonde le capitalisme, soit on le détruit.
Ce défi est immense. C'est un impératif économique, politique et moral. Avec cela, va se poser une question pour nous très difficile : comment convaincre nos concitoyens que nous allons les protéger sans céder à la tentation du protectionnisme ? Si nous ne convainquons pas nos compatriotes qu'on va les protéger, ils entendront d'autres qui les conduiront dans une impasse. Il faut donc protéger nos compatriotes sans le protectionnisme. Il faut agir avec les autres pour sortir de la crise au lieu d'agir tout seul sans se préoccuper de ce que font les autres.
A crise mondiale, réponse mondiale. Mais cela ne veut pas dire, - et c'est un débat que nous avons eu bien souvent avec Angela -, qu'il faille attendre une politique unique à l'échelle planétaire, qui serait une absurdité. Trop de différences entre les continents, les pays, les cultures, les économies rendent cette hypothèse irréaliste. Regardez, malgré ses efforts, où est arrivé le FMI en voulant imposer quels que soient les continents une même politique. Attendre un gouvernement mondial pour régler les problèmes de la planète serait renoncer à en régler aucun.
La voie utile est celle de la coopération et de l'entente sur des principes, des valeurs, des objectifs, des priorités. Angela, c'est ce qu'ensemble on a essayé de faire avec l'Europe. On me dit que ce n'est pas assez. Ceux qui disent que ce n'est pas assez, j'aurais bien voulu les y voir. Parce que je peux vous dire une chose, parlant sous le contrôle de Tony, cela a été décisif d'avoir la Grande-Bretagne aux côtés de ses amis, de ses alliés européens pour exiger un changement dans l'organisation du monde. Je plaiderai, jusqu'à mon dernier souffle, que nous avons besoin des Anglais dans l'Europe, que votre place est avec nous, que nous avons besoin de votre ouverture sur le monde. La Grande-Bretagne est d'autant plus forte qu'elle est solidaire avec l'Europe et pas simplement avec les Etats-Unis. Je suis un ami des Etats-Unis d'Amérique, mais la place de la Grande-Bretagne est en Europe, à la première place avec nous. Et Angela sait parfaitement que c'est une conviction que nous partageons et cela a été décisif, pour Angela Merkel et moi, que d'avoir la Grande-Bretagne d'accord pour imposer l'organisation du G20 à Washington. De la même façon, c'est Angela Merkel qui a montré la voie à Heilligendamm en invitant le G5 aux travaux du G8. Quitte à me répéter, je partage tellement le point de vue exprimé par Tony Blair. Vouloir régler les grands problèmes de la planète sans la Chine, 1 milliard 300 millions d'habitants, sans l'Inde, 1 milliard de plus, sans aucun pays sud-américain et sans aucun pays africain, comme si le milliard d'Africains, cela ne comptait pas, je vais vous dire une chose : si le G8 n'a pas la sagesse, en Italie, d'inviter sérieusement le G5, c'est un jour le G5 qui ne viendra pas s'asseoir à la table du G8. Voilà la réalité des choses parce que l'on ne sort pas 3 milliards d'habitants simplement parce qu'on est des nations qui ont l'habitude de jouer avec la croissance et le progrès. Voilà profondément ce que je pense.
Par ailleurs, il ne s'agit naturellement pas - et je voudrais rassurer les banquiers qui sont dans la salle - de supprimer la finance, franchement, il s'agit simplement de mettre la finance au service de l'économie réelle et de la production.
Il ne s'agit pas de disqualifier l'endettement, par pitié, ne passons pas d'un excès à un autre, parce que l'endettement, je sais que c'est dur de le dire aujourd'hui, exprime la foi dans l'avenir et c'est un moteur essentiel du développement économique. Mais il s'agit de faire en sorte que les risques qui sont la contrepartie inévitable de l'effet de levier soient bien évalués, que les banques fassent réellement leur métier de mon point de vue, je n'arrive pas à comprendre : à chaque fois qu'il y a une bulle qui explose, il s'est trouvé des banquiers pour prêter n'importe quoi à n'importe qui £ et du jour au lendemain, on vous explique que quel que soit le sérieux des projets, on ne peut plus rien prêter. Peut-on arriver à trouver un équilibre ?
Il ne s'agit pas de priver les marchés de la liquidité que leur apportent les opérateurs financiers mais d'éviter que l'on puisse spéculer avec de l'argent que l'on n'a pas. De ce point de vue, je ne comprends pas pourquoi pendant des années, on a trouvé si facilement les bénéficiaires des bonus, on vient maintenant nous expliquer qu'on ne pourrait pas trouver aujourd'hui ceux qui nous ont mis dans la situation où on est.
Le capitalisme, c'est la responsabilité. Dans la responsabilité, on a des responsables qui ont des bonus quand cela marche et il faut quand même trouver des responsables : des centaines de milliards de dollars qui ont disparu en fumée sur le comportement irresponsable de quelques uns. Nos opinions publiques sont scandalisées et elles ont raison. Et s'il n'y a pas de sanction, s'il n'y a pas de responsable, comment voulez-vous que nous expliquions aux millions de nos concitoyens qu'ils doivent faire des efforts et que ceux là même qui nous ont mis dans la situation où on est ne le feront pas ? Qui peut penser cela ? Naturellement, cela amène chacun à être face à ses responsabilités. Nous avons mobilisé beaucoup d'argent du contribuable pour que les banques fassent leur métier. Au moment de la distribution des dividendes, il faudra que chacun soit responsable et pense que le contribuable a permis de sauver des banques et qu'il n'est pas temps aujourd'hui d'en remercier les actionnaires. Chacun doit faire sa part des efforts, sinon le système explosera.
Par ailleurs, il ne s'agit pas de substituer au calcul économique individuel un fatras de règlementations, mais de faire en sorte que le calcul de chacun puisse être effectué en toute connaissance de cause.
Mesdames et Messieurs,
Pour terminer, le fait majeur de cette crise, tout le monde le sait bien, c'est le retour de l'État, c'est la fin de l'idéologie de l'impuissance publique qui était la contrepartie de la toute-puissance du marché. D'ailleurs, cela a été bien curieux de voir appeler au secours les Etats de la part de ceux qui ne voulaient plus en entendre parler. Et quand tout s'écroulait, on a bien été content de trouver nos numéros de téléphone ! Certainement, on ne connaît pas grand-chose, c'est peut-être pour cela que les gens nous faisaient confiance !
Voici l'État rendu à la plénitude de son rôle, et aussi de ses responsabilités.
Il ne s'agit pas de nationaliser toute l'économie mondiale.
Il ne s'agit pas de créer un capitalisme d'État où il n'y aurait plus que l'État. Mais il s'agit de rééquilibrer les rôles respectifs de l'État et du marché.
Dans le capitalisme du XXIème siècle, il y a une place pour l'État.
Le capitalisme doit donc redevenir ce qu'il n'aurait jamais dû cesser d'être : un capitalisme d'entrepreneurs et ce capitalisme d'entrepreneurs, l'État doit l'animer, doit l'entraîner avec sa capacité propre.
Il faudra se défaire d'une illusion qui commence à poindre : remplacer un défaut de règles par un excès de règles. On ne soigne pas le mal par le mal. On ne peut espérer faire aucun progrès en paralysant l'initiative. On refondera le capitalisme sur des règles simples, sur la capacité de l'État à intervenir quand c'est nécessaire et sur l'investissement, comme l'a dit Tony, dans la recherche, dans l'éducation et dans la formation.
La crise a changé beaucoup de choses. Il faut voir la crise actuelle comme la conséquence d'un dégonflement rapide de la bulle de la dette, comme le passage d'un modèle de croissance par l'endettement à un modèle de croissance par le travail. Plus que jamais, je crois à la valeur travail.
Mesdames et Messieurs,
Ce monde qui s'annonce ne sera pas forcément plus facile, mais il peut représenter une opportunité.
La crise ne nous prépare pas des lendemains qui chantent mais elle nous rend libres de construire notre avenir. Elle nous rend libres d'échapper à cette fatalité du sens de l'histoire qui prétend périodiquement nous enfermer dans une pensée unique, une politique unique, un modèle unique et qui n'est en réalité qu'un alibi du renoncement. La crise nous rend libres. Qu'allons-nous faire de cette liberté ? Telle est la question.
J'étais très heureux d'entendre Angela Merkel quand elle a dit : je n'accepterai pas qu'au Sommet de Londres, on ne tire pas les conséquences de ce qui s'est passé. Eh bien, nous serons deux, au moins. Ce n'est pas une question d'idéologie, c'est que nous, nous n'accepterons pas, une fois le gros de la crise passée, que les mêmes viennent nous dire : excusez-nous, partez, vous n'avez plus rien à dire maintenant, les choses sérieuses commencent. Non ! Les décisions nous les prendrons le 2 avril à Londres. Je veux vous dire une chose : j'ai toujours, dans ma vie politique, été partisan d'une alliance très proche avec les Etats-Unis d'Amérique, mais que les choses soient claires, au XXIème siècle, il n'y a plus une seule nation qui peut dire ce qu'il faut faire ou ce qu'il faut penser. Soit les Etats-Unis accompagneront ce changement, et je l'espère de tout coeur, parce qu'un nouveau président apportera son dynamisme, son intelligence et son ouverture, et nous changerons le monde avec les Etats-Unis, mais nous n'accepterons pas le statu quo, nous n'accepterons pas l'immobilisme, nous n'accepterons pas le retour à la pensée unique. Et nous avons besoin que la Chine amène sa force d'entraînement, que le Brésil dise sa part de vérité, que l'Afrique soit associée à ce que nous allons construire et que nous rebâtissons ensemble un système international.
A Bretton Woods, en 1945, il y avait une monnaie. Cette monnaie a construit la prospérité du monde. En 2009, il n'y a plus une monnaie, il y en a plusieurs. Il va falloir que l'on discute comment chacun gère sa monnaie, ses taux d'intérêt, comment on en parle. Il ne peut plus avoir un seul pays qui explique aux autres : payez la dette qui est la nôtre. Il ne peut plus avoir un seul modèle. Il doit y avoir de nouvelles enceintes et de nouvelles décisions. Le 2 avril, c'est déjà loin, mais le 2 avril, c'est un rendez-vous. De deux choses l'une, soit on est à la hauteur, soit on ne l'est pas.
Comprenez bien, économistes, politiques, observateurs, entrepreneurs, nous avons besoin de votre soutien qui n'est pas un soutien qui s'exprime en termes de gauche ou de droite, de socialistes ou de libéraux, c'est un soutien sous le seul clivage qui vaille : d'un côté les réformateurs de gauche et de droite, de l'autre les conservateurs et les immobiles de droite et de gauche. Cela fait du monde ! C'est cela le clivage, et c'est cela qui permettra à des chefs de gouvernement du Sud et du Nord, de gauche et de droite, d'avoir la même vision de l'avenir.
Chère Angela,
Cher Tony,
Madame la Présidente,
La France a choisi son camp, fidèle à son identité et à son histoire, c'est celui du mouvement, de la justice, du changement, du refus du conservatisme et de l'immobilisme.
Je vous remercie.