22 janvier 2008 - Seul le prononcé fait foi
Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, sur la lutte contre l'insécurité, notamment par les efforts en faveur de la police et de la gendarmerie, et la réponse judiciaire, à Bordeaux le 22 janvier 2008.
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais remercier le maire de Bordeaux de bien vouloir nous accueillir, cher Alain,
Les parlementaires,
Les ministres,
Michèle ALLIOT-MARIE, qui est chez elle,
Rachida DATI,
Xavier BERTRAND,
Je suis venu d'abord pour vous féliciter pour l'excellence des résultats que vous avez obtenus. Cela n'a pas été facile, ni dans cette ville ni dans ce département. Il a fallu remettre en cause des habitudes. Il a fallu patienter, parce que le taux d'élucidation a commencé à monter avant que les chiffres ne commencent à baisser.
Je me souviens très bien d'être venu ici plusieurs fois, en 2003 et 2004, et cela ne bougeait pas, mais on voyait que cela progressait. Il y avait plus d'activités dans les services, il y avait plus d'élucidation, il y avait plus d'interpellations, mais on n'arrivait pas à faire baisser, à incliner la courbe. A partir de ce moment là, avec vos responsables, on s'est mis à travailler. Qu'est-ce qui n'allait pas ? Là, je voudrais vous remercier tous, parce que vous avez accepté de faire la chose la plus difficile qui est de remettre en cause ses habitudes. Je voudrais remercier tout particulièrement les élus, et tout spécialement le maire de Bordeaux, parce que c'était courageux d'accepter cette idée qu'il y avait trop d'implantations immobilières, d'abord à Bordeaux et sur l'ensemble de la communauté.
Ce n'est pas simple, ce n'est pas facile. Je me souviens très bien des discussions que nous avons eues, parce qu'à chaque fois qu'un poste de police est ouvert, cela fait plaisir aux voisins, mais nous, on raisonne, Michèle et moi, en disant : mais oui, un poste de police, ce sont des fonctionnaires de police ou des militaires de la gendarmerie qui sont à l'intérieur de l'équipement et qui ne sont pas dans la rue. Le passage d'un peu plus d'une trentaine d'installations, je crois, de 33 à 22, c'est-à-dire une diminution d'un tiers en deux ans a été réussi. Il a fallu fermer des postes de police, mais il a fallu la confiance des élus pour pouvoir faire ce travail indispensable. Vous avez accepté de faire quelque chose qui n'a pas été facile pour les « pilotes d'avion », de passer de trois dans la voiture à deux. Le fait de faire avec deux véhicules pour les interpellations, cela permet d'avoir trois personnes, pour garder les trois autres pour intervenir, c'était aussi une nouveauté. Doubler la BAC (Brigade Anti Criminalité) aussi, ce qui me permet de dire un mot sur cette affaire de proximité.
Mesdames et Messieurs, j'ai eu le plaisir d'être ministre de l'Intérieur avant Michèle. Elle a le plaisir de faire un métier que j'ai beaucoup aimé. Cela est vrai, on me dit "vous revenez à vos premières amours". Cela est vrai, cela m'a plus d'être ministre de l'Intérieur. Moi, j'aime travailler avec les policiers, les gendarmes, qui sont des femmes et des hommes qui croient dans leur métier, puis qui ont envie que cela progresse.
Franchement, il faudrait être curieusement fait pour ne pas aimer ce ministère. Un ministère profondément humain. J'ai aimé travailler, mais quand je suis devenu ministre de l'Intérieur, mais qu'est-ce que l'on voyait ! Il y a avait une organisation qui était certainement extraordinaire, mais qui produisait des résultats épouvantables.
Il n'y avait pas une conversation sans que les gens disent : on a peur, on en a assez de l'insécurité. L'insécurité était le premier sujet de préoccupation des Français. Ça et la police de proximité, ils en parlaient, mais les résultats, ils en parlaient aussi les Français. La catastrophe, des fonctionnaires, des militaires démobilisés, des résultats très mauvais, la violence qui avait explosée. Il n'est pas question que l'on revienne à une stratégie qui avait produit des résultats catastrophiques.
En cinq on avait trouvé le moyen d'augmenter de 15% la délinquance. Franchement, comme je ne veux pas croire que c'est parce que les ministres n'étaient pas bons, cela devait donc être la stratégie qui n'était pas bonne. Parce que si la stratégie était bonne, c'est que les ministres n'étaient pas bons. Il faut choisir. Je préfère toujours penser que les gens sont bien.
On a changé complètement la stratégie. On a changé vos équipements, changé vos méthodes, et on a développé un concept de proximité auquel je tiens beaucoup, c'est que la police doit être sur le terrain et pas dans les équipements. La police doit être sur le terrain aux heures où les délinquants sont sur le terrain. Avoir le maximum d'effectifs entre 8 h du matin et 11 h, cela ne sert à rien, parce que nos clients à ce moment là, ils dorment, comme ce n'est pas des gros travailleurs, ils dorment.
Donc, on a redéployé la police. C'est cela la police de proximité. Une police sur le terrain aux heures où les délinquants sont sur le terrain. Et pour faire quoi ? Je peux avoir du tempérament, mais je ne suis pas méchant. Je me souviens d'être allé dans une grande ville du sud, tout le monde s'en souvient, à Toulouse. J'étais en colère ce jour là, pourquoi ? Parce que je découvre, que le taux d'élucidation, tenez-vous bien, était à 11%. Un peu plus de 11% et un peu moins de 12. Je demande à un gradé en allant au poste : "Monsieur quelle est la dernière initiative que vous avez prise ? Il me dit nous avons pris une initiative fantastique. Laquelle ? » En plus, il était content. « J'ai organisé avec mes gars un tournoi de rugby avec les jeunes. Ah bon, formidable, pouvez-vous me dire quel est votre métier Monsieur ? ». Il dit : « je suis gradé, je suis policier ». OK. Vous trouvez que dans une circonscription où l'on trouve un coupable sur 10, il n'y a pas d'autre préoccupation que d'organiser un tournoi de rugby avec les jeunes de la cité. Si la police organise un tournoi de rugby, OK mais qui est-ce qui arrête les délinquants ? Le premier travail de la police comme de la gendarmerie, c'est d'interpeller les délinquants et de protéger les victimes. Si vous ne faites pas ce travail, il n'y a personne qui peut vous remplacer. Comprenez-moi bien, je ne suis pas contre qu'il y ait des activités périphériques mais cela doit rester périphérique avec des résultats impressionnants. J'ai le plus grand respect pour les animateurs sociaux, les animateurs d'associations, les moniteurs sportifs, toutes personnes très utiles mais votre boulot, c'est la sécurité et pour la sécurité, il faut arrêter les coupables et cela c'est capital.
Alors avec Michèle qu'est-ce que l'on va faire maintenant ? On va vous donner les meilleures chances de progresser encore parce que je sais bien qu'avec le statistiques, je vois bien au niveau national, vous êtes à près de 36% de taux d'élucidation et je précise avec la fameuse police de proximité ils étaient à 24, c'est-à-dire qu'en 6 ans, on passe de 24 % à 36% et ce mois-ci, Michèle a obtenu des résultats exceptionnels, puisque vous êtes montés à presque 42. Qu'est-ce que l'on peut faire pour vous aider encore ? On va mettre le paquet sur la police technique et scientifique. Je veux m'en expliquer devant vous, y compris s'il y a les représentants syndicaux - je parle pour la Police et les associations pour les gendarmes, ce n'est pas facile non plus - on a fait un travail 2002-2007 d'augmentation des effectifs, c'est vrai. Moi, je souhaite que maintenant autour du plan préparé par Michèle ALLIOT-MARIE on fasse un travail sur la qualité, moins que la quantité. Je m'explique : les fichiers, les prélèvements, les méthodes d'investigation qui vous permettront de passer de la religion de l'aveu à celle de la preuve. Je veux une police et une gendarmerie qui passent de l'aveu à la preuve. Je sais bien que c'était dans la culture de nos maisons, l'aveu, il est utile mais la preuve c'est la police scientifique. Donc, on va mettre le paquet pour cela et pas simplement à Ecully, mais aussi d'une façon décentralisée pour que vous puissiez, dans vos commissariats, j'y tiens beaucoup, avoir accès à ces fichiers et que l'on puisse être plus efficace.
Deuxièmement, Michèle travaille sur la question : « qu'est-ce que l'équipement d'une police et d'une gendarmerie moderne » ? C'est quelque chose qui est passionnant. On a changé vos équipements, on a changé vos véhicules, je souhaite que l'on aille plus loin vers l'arme non létale pour deux raisons. La première, c'est que je souhaite que l'on puisse vous engager avec moins d'effectifs et plus de sécurité. Vous avez des armes dont vous ne pouvez vous servir que dans des cas bien précis et donc on est obligé bien souvent de vous engager plus nombreux. Avec les armes non létales en revanche, on peut diversifier vos actions. Je souhaite que l'on réfléchisse au flash ball de la nouvelle génération à plus longue portée. Je me souviens quand, en 2002, j'ai annoncé la généralisation du flash ball. Oh la la, qu'est ce que l'on a entendu ? Grâce au flash ball, on a évité bien des drames, notamment dans les émeutes de 2005, mais il faut de plus longue portées pour protéger nos fonctionnaires. J'ajoute également pour ceux que l'on arrête, les armes non létales, c'est mieux. Je souhaite également que l'on réfléchisse aux équipements, notamment lors des problèmes urbains des BAC et des fonctionnaires. Je rêve que l'on généralise les caméras pour tous les véhicules en commençant d'abord par ceux qui interviennent la nuit parce que les caméras, c'est des preuves judiciaires, j'y reviendrai chère Rachida, parce que les caméras c'est dissuasif et enfin parce que les caméras vous protègent de la polémique. Moi, j'en ai eu assez des polémiques à Roissy I, quand on raccompagnait des étrangers en situation irrégulière. Du jour où l'on a mis les associations et les caméras, il n'y a plus eu de polémique et donc une police moderne, c'est une police qui, à l'arrivée, aura des caméras dans tous les véhicules qui interviennent. C'est cela dont on a absolument besoin. Je pense aussi à la police d'hélicoptère, qui est un élément absolument indispensable pour intervenir. Je préfère de beaucoup que dans les grandes conurbations, au lieu que vous soyez motorisés avec des véhicules puissants pour poursuivre les délinquants, vous ayez recours aux hélicoptères. C'est un élément essentiel pour que vous puissiez intervenir. Vous voyez, on est en train de réfléchir à tout cela.
Enfin, dernier point, et c'est la raison de la présence de Madame La Garde des Sceaux, la réponse pénale, la réponse judiciaire. Je veux remercier le Procureur Général, le Premier Président et l'ensemble des magistrats. Et je vais donner un chiffre que je n'ai jamais donné. Vous savez qu'innombrables ont été les policiers et les gendarmes qui, tout au long de ces années, nous ont indiqué « on en a assez d'arrêter toujours les mêmes ». C'est vrai ou ce n'est pas vrai ? Je n'ai cessé d'entendre cela. Et, pendant la campagne présidentielle, j'ai développé l'idée de la nécessité des peines planchers. Et j'ai surmonté la polémique selon laquelle ces peines planchers viendraient contredire le principe d'individualisation de la peine. Absurde ! Je le dis devant les magistrats, si la peine plafond ne vient pas contredire le principe d'individualisation de la peine, je ne vois pas pourquoi la peine plancher viendrait le contredire. On a fait voter - merci Rachida DATI - ce texte. Il a été voté le 10 Août. Il est entré en vigueur au mois de septembre. Savez-vous que nous avons déjà 4 500 décisions rendues sur la base des peines planchers ? C'est-à-dire que dorénavant, les délinquants multirécidivistes savent que cela leur coûtera cher.
Et dans l'excellent résultat que vous avez obtenu, la réponse pénale - grâce en soit rendue aux magistrats - c'est un élément décisif. Rachida DATI, à ma demande, a fait voter à l'Assemblée et ça vient de finir au Sénat, une peine de sûreté pour les « serial killers » et les « serial violeurs ». C'est-à-dire que nous allons faire de grands changements dans le droit Français. Jusqu'à présent, vous arrêtez un violeur, vous arrêtez un criminel, il effectue sa peine, moins les remises de peine, sauf quand il y a les peines de sûreté mais enfin, il sort. Et la société se lave les mains en disant « mais comment ce Monsieur en a pris pour 20 ans, admettons au pire il fait 20 ans, il sort ». Je suis désolé quand on a violé à 22 ans et qu'on sort 20 ans après, on a 42 ans. Et je n'ai pas l'intention de laisser des fauves en liberté. Donc nous avons introduit dans notre droit ce qui n'avait jamais existé avant, une peine de sûreté après la peine de prison c'est-à-dire pour que ces individus sortent, il faudra d'abord qu'ils aient fait leur peine et ensuite que la société décide si oui ou non ils sont dangereux. Et moi j'ai eu cette idée quand je suis venu à PAU cet été. J'y retourne. On était avec Michèle et vous savez quand je vois le mari de la dame, l'infirmière, qui a été décapitée et dont celui qui a fait cela dépose la tête sur le téléviseur avant de partir, et qu'est-ce que je dis moi au mari, quand le magistrat - je ne lui en fais pas le reproche, je décris une situation - dit au mari « je vais rendre un non-lieu parce que l'individu était irresponsable ». Et le mari me dit « s'il y a un non-lieu c'est que cela n'a pas eu lieu, rendez-moi ma femme ». Qu'est-ce qu'on répond ? Qu'est-ce qu'on dit ? Ca ne nous regarde pas, c'est la faute à pas de chance. Cela aurait pu être la situation de n'importe lequel parmi vous. Et bien dorénavant, je me suis dit : il est irresponsable, on va le mettre en hôpital psychiatrique et dans le traitement en hôpital psychiatrique, dans le traitement il y a la notion de permission. Et bien bon courage à celui ou à celle qui rencontrera cet individu. On ne peut pas les laisser en liberté, ce n'est pas vrai. Et les droits de l'homme, ce sont d'abord les droits de la victime.
On a assumé ce débat et que ceux qui ne sont pas d'accord le disent. Comme ceux qui n'étaient pas d'accord quand j'ai voulu les fichiers sur les empreintes génétiques où, soi-disant, ça portait atteinte à la liberté de qui ? De la même façon, je souhaite que les violeurs pointent tous les mois au commissariat ou à la gendarmerie et qu'ils soient entendus, et que ceux qui ne veulent pas se faire soigner ne sortent pas. Et je suis prêt à assumer ces débats devant la société française tranquillement. Mais la priorité pour nous, ce sont les victimes. Pas les coupables, les victimes.
Alors cela n'empêche pas que l'on tendra la main. Nous allons, avec Fadela AMARA annoncer un plan pour les quartiers, que je suis au jour le jour. J'ai des convictions, j'ai pris des engagements et je les tiendrai. Et cela concerne la police et la gendarmerie parce que c'est vous après, lorsqu'il y a des problèmes, qui vous trouvez en première ligne. Je n'ai pas accepté qu'à Villiers-le-Bel il y ait 81 fonctionnaires qui aient été touchés par des projectiles. Je ne serai pas le Président de la République qui acceptera, dans le pays dont il est le Chef de l'Etat, qu'on puisse tirer impunément sur un fonctionnaire ou sur un militaire, ce n'est pas possible. Michèle ALLIOT-MARIE le sait parfaitement bien, on recherche les tireurs, croyez bien qu'on les retrouvera et qu'on ne les laissera pas passer. Parce que je ne veux pas qu'il y ait un seul policier ou un seul gendarme qui se dise : « c'est la nouvelle mode en France, on peut tirer sur nous ! ». 81 de vos collègues ont été touchés, pas un n'a répondu. Hommage soit rendu à la police et à la gendarmerie française.
On va faire un plan où on va arrêter d'investir sur les immeubles, on va continuer ce qui a été lancé bien sûr. Mais permettez moi de vous dire que refaire un immeuble à neuf si vous laissez les gens au chômage dedans, cinq ans après il faut le refaire à nouveau ! Si on pense qu'on résout le problème parce qu'on refait les immeubles, on a tout faux. Moi je pense qu'on aurait d'ailleurs dû commencer par trouver un travail et une formation aux gens. De toute manière c'est fait. Et on va donc analyser la situation de chaque jeune, on lui donnera une nouvelle chance pour une formation qualifiante. Celui qui veut travailler s'en sortira. Celui qui ne veut pas travailler ne s'en sortira pas. Il faut bien comprendre les choses. Et vous, policiers et gendarmes, vous devez savoir que vous vivez dans une société où on connaît les valeurs qui sont celles de notre pays : travail, mérite, effort, récompense. Et je souhaite d'ailleurs que ces valeurs soient celles qui animent la gendarmerie et la police.
Et, j'en terminerai par là, qu'il y ait davantage de fluidité pour vous, qu'on n'attende pas pour vous promouvoir que vous soyez tellement fatigué d'avoir attendu, qu'il y ait un peu plus de valorisation de l'expérience et du mérite. Qu'on n'ait pas peur de nommer des jeunes. Je préfère qu'on prenne des risques et qu'on se trompe parfois en promouvant des gens qui peuvent parfois ne pas être à la hauteur des attentes plutôt qu'en n'en prenant aucun et en décourageant tout le monde. Vous vous êtes engagés dans la police et la gendarmerie, elles doivent être- la police et la gendarmerie - des facteurs de promotion sociale. Voilà le travail que l'on fait main dans la main avec Michèle ALLIOT-MARIE, et peu m'importe qu'on me dise que cela m'intéresse, c'est vrai. Et je vous félicite pour votre travail. Faites simplement attention. Un policier ou un gendarme, il rentre chez lui le soir. La mort ne fait pas partie du boulot. A chaque fois que l'on a un drame comme cela, c'est que l'on n'a pas été des bons professionnels.
Je vous demande beaucoup d'engagement et, en même temps, il y a des procédures. Je vous demande également le respect de vos règles déontologiques parce qu'on ne peut pas accepter ni la familiarité, ni le tutoiement. Vous êtes la police et la gendarmerie de la République. Donc votre tenue doit être impeccable, et cela commence par ne pas tutoyer, et pas de bras pendu dans les véhicules même si on est à deux de patrouille, parce que c'est l'uniforme.
Mesdames et Messieurs, j'espère que vous avez compris, Monsieur le Maire, j'étais bien content d'être ici aux côtés de Michèle ALLIOT-MARIE, de Rachida DATI et de Xavier BERTRAND, à qui je veux dire aussi mes remerciements pour le travail qu'ils font tous les trois.
Bonne année pour vous et pour vos familles.Merci à tous.
Je voudrais remercier le maire de Bordeaux de bien vouloir nous accueillir, cher Alain,
Les parlementaires,
Les ministres,
Michèle ALLIOT-MARIE, qui est chez elle,
Rachida DATI,
Xavier BERTRAND,
Je suis venu d'abord pour vous féliciter pour l'excellence des résultats que vous avez obtenus. Cela n'a pas été facile, ni dans cette ville ni dans ce département. Il a fallu remettre en cause des habitudes. Il a fallu patienter, parce que le taux d'élucidation a commencé à monter avant que les chiffres ne commencent à baisser.
Je me souviens très bien d'être venu ici plusieurs fois, en 2003 et 2004, et cela ne bougeait pas, mais on voyait que cela progressait. Il y avait plus d'activités dans les services, il y avait plus d'élucidation, il y avait plus d'interpellations, mais on n'arrivait pas à faire baisser, à incliner la courbe. A partir de ce moment là, avec vos responsables, on s'est mis à travailler. Qu'est-ce qui n'allait pas ? Là, je voudrais vous remercier tous, parce que vous avez accepté de faire la chose la plus difficile qui est de remettre en cause ses habitudes. Je voudrais remercier tout particulièrement les élus, et tout spécialement le maire de Bordeaux, parce que c'était courageux d'accepter cette idée qu'il y avait trop d'implantations immobilières, d'abord à Bordeaux et sur l'ensemble de la communauté.
Ce n'est pas simple, ce n'est pas facile. Je me souviens très bien des discussions que nous avons eues, parce qu'à chaque fois qu'un poste de police est ouvert, cela fait plaisir aux voisins, mais nous, on raisonne, Michèle et moi, en disant : mais oui, un poste de police, ce sont des fonctionnaires de police ou des militaires de la gendarmerie qui sont à l'intérieur de l'équipement et qui ne sont pas dans la rue. Le passage d'un peu plus d'une trentaine d'installations, je crois, de 33 à 22, c'est-à-dire une diminution d'un tiers en deux ans a été réussi. Il a fallu fermer des postes de police, mais il a fallu la confiance des élus pour pouvoir faire ce travail indispensable. Vous avez accepté de faire quelque chose qui n'a pas été facile pour les « pilotes d'avion », de passer de trois dans la voiture à deux. Le fait de faire avec deux véhicules pour les interpellations, cela permet d'avoir trois personnes, pour garder les trois autres pour intervenir, c'était aussi une nouveauté. Doubler la BAC (Brigade Anti Criminalité) aussi, ce qui me permet de dire un mot sur cette affaire de proximité.
Mesdames et Messieurs, j'ai eu le plaisir d'être ministre de l'Intérieur avant Michèle. Elle a le plaisir de faire un métier que j'ai beaucoup aimé. Cela est vrai, on me dit "vous revenez à vos premières amours". Cela est vrai, cela m'a plus d'être ministre de l'Intérieur. Moi, j'aime travailler avec les policiers, les gendarmes, qui sont des femmes et des hommes qui croient dans leur métier, puis qui ont envie que cela progresse.
Franchement, il faudrait être curieusement fait pour ne pas aimer ce ministère. Un ministère profondément humain. J'ai aimé travailler, mais quand je suis devenu ministre de l'Intérieur, mais qu'est-ce que l'on voyait ! Il y a avait une organisation qui était certainement extraordinaire, mais qui produisait des résultats épouvantables.
Il n'y avait pas une conversation sans que les gens disent : on a peur, on en a assez de l'insécurité. L'insécurité était le premier sujet de préoccupation des Français. Ça et la police de proximité, ils en parlaient, mais les résultats, ils en parlaient aussi les Français. La catastrophe, des fonctionnaires, des militaires démobilisés, des résultats très mauvais, la violence qui avait explosée. Il n'est pas question que l'on revienne à une stratégie qui avait produit des résultats catastrophiques.
En cinq on avait trouvé le moyen d'augmenter de 15% la délinquance. Franchement, comme je ne veux pas croire que c'est parce que les ministres n'étaient pas bons, cela devait donc être la stratégie qui n'était pas bonne. Parce que si la stratégie était bonne, c'est que les ministres n'étaient pas bons. Il faut choisir. Je préfère toujours penser que les gens sont bien.
On a changé complètement la stratégie. On a changé vos équipements, changé vos méthodes, et on a développé un concept de proximité auquel je tiens beaucoup, c'est que la police doit être sur le terrain et pas dans les équipements. La police doit être sur le terrain aux heures où les délinquants sont sur le terrain. Avoir le maximum d'effectifs entre 8 h du matin et 11 h, cela ne sert à rien, parce que nos clients à ce moment là, ils dorment, comme ce n'est pas des gros travailleurs, ils dorment.
Donc, on a redéployé la police. C'est cela la police de proximité. Une police sur le terrain aux heures où les délinquants sont sur le terrain. Et pour faire quoi ? Je peux avoir du tempérament, mais je ne suis pas méchant. Je me souviens d'être allé dans une grande ville du sud, tout le monde s'en souvient, à Toulouse. J'étais en colère ce jour là, pourquoi ? Parce que je découvre, que le taux d'élucidation, tenez-vous bien, était à 11%. Un peu plus de 11% et un peu moins de 12. Je demande à un gradé en allant au poste : "Monsieur quelle est la dernière initiative que vous avez prise ? Il me dit nous avons pris une initiative fantastique. Laquelle ? » En plus, il était content. « J'ai organisé avec mes gars un tournoi de rugby avec les jeunes. Ah bon, formidable, pouvez-vous me dire quel est votre métier Monsieur ? ». Il dit : « je suis gradé, je suis policier ». OK. Vous trouvez que dans une circonscription où l'on trouve un coupable sur 10, il n'y a pas d'autre préoccupation que d'organiser un tournoi de rugby avec les jeunes de la cité. Si la police organise un tournoi de rugby, OK mais qui est-ce qui arrête les délinquants ? Le premier travail de la police comme de la gendarmerie, c'est d'interpeller les délinquants et de protéger les victimes. Si vous ne faites pas ce travail, il n'y a personne qui peut vous remplacer. Comprenez-moi bien, je ne suis pas contre qu'il y ait des activités périphériques mais cela doit rester périphérique avec des résultats impressionnants. J'ai le plus grand respect pour les animateurs sociaux, les animateurs d'associations, les moniteurs sportifs, toutes personnes très utiles mais votre boulot, c'est la sécurité et pour la sécurité, il faut arrêter les coupables et cela c'est capital.
Alors avec Michèle qu'est-ce que l'on va faire maintenant ? On va vous donner les meilleures chances de progresser encore parce que je sais bien qu'avec le statistiques, je vois bien au niveau national, vous êtes à près de 36% de taux d'élucidation et je précise avec la fameuse police de proximité ils étaient à 24, c'est-à-dire qu'en 6 ans, on passe de 24 % à 36% et ce mois-ci, Michèle a obtenu des résultats exceptionnels, puisque vous êtes montés à presque 42. Qu'est-ce que l'on peut faire pour vous aider encore ? On va mettre le paquet sur la police technique et scientifique. Je veux m'en expliquer devant vous, y compris s'il y a les représentants syndicaux - je parle pour la Police et les associations pour les gendarmes, ce n'est pas facile non plus - on a fait un travail 2002-2007 d'augmentation des effectifs, c'est vrai. Moi, je souhaite que maintenant autour du plan préparé par Michèle ALLIOT-MARIE on fasse un travail sur la qualité, moins que la quantité. Je m'explique : les fichiers, les prélèvements, les méthodes d'investigation qui vous permettront de passer de la religion de l'aveu à celle de la preuve. Je veux une police et une gendarmerie qui passent de l'aveu à la preuve. Je sais bien que c'était dans la culture de nos maisons, l'aveu, il est utile mais la preuve c'est la police scientifique. Donc, on va mettre le paquet pour cela et pas simplement à Ecully, mais aussi d'une façon décentralisée pour que vous puissiez, dans vos commissariats, j'y tiens beaucoup, avoir accès à ces fichiers et que l'on puisse être plus efficace.
Deuxièmement, Michèle travaille sur la question : « qu'est-ce que l'équipement d'une police et d'une gendarmerie moderne » ? C'est quelque chose qui est passionnant. On a changé vos équipements, on a changé vos véhicules, je souhaite que l'on aille plus loin vers l'arme non létale pour deux raisons. La première, c'est que je souhaite que l'on puisse vous engager avec moins d'effectifs et plus de sécurité. Vous avez des armes dont vous ne pouvez vous servir que dans des cas bien précis et donc on est obligé bien souvent de vous engager plus nombreux. Avec les armes non létales en revanche, on peut diversifier vos actions. Je souhaite que l'on réfléchisse au flash ball de la nouvelle génération à plus longue portée. Je me souviens quand, en 2002, j'ai annoncé la généralisation du flash ball. Oh la la, qu'est ce que l'on a entendu ? Grâce au flash ball, on a évité bien des drames, notamment dans les émeutes de 2005, mais il faut de plus longue portées pour protéger nos fonctionnaires. J'ajoute également pour ceux que l'on arrête, les armes non létales, c'est mieux. Je souhaite également que l'on réfléchisse aux équipements, notamment lors des problèmes urbains des BAC et des fonctionnaires. Je rêve que l'on généralise les caméras pour tous les véhicules en commençant d'abord par ceux qui interviennent la nuit parce que les caméras, c'est des preuves judiciaires, j'y reviendrai chère Rachida, parce que les caméras c'est dissuasif et enfin parce que les caméras vous protègent de la polémique. Moi, j'en ai eu assez des polémiques à Roissy I, quand on raccompagnait des étrangers en situation irrégulière. Du jour où l'on a mis les associations et les caméras, il n'y a plus eu de polémique et donc une police moderne, c'est une police qui, à l'arrivée, aura des caméras dans tous les véhicules qui interviennent. C'est cela dont on a absolument besoin. Je pense aussi à la police d'hélicoptère, qui est un élément absolument indispensable pour intervenir. Je préfère de beaucoup que dans les grandes conurbations, au lieu que vous soyez motorisés avec des véhicules puissants pour poursuivre les délinquants, vous ayez recours aux hélicoptères. C'est un élément essentiel pour que vous puissiez intervenir. Vous voyez, on est en train de réfléchir à tout cela.
Enfin, dernier point, et c'est la raison de la présence de Madame La Garde des Sceaux, la réponse pénale, la réponse judiciaire. Je veux remercier le Procureur Général, le Premier Président et l'ensemble des magistrats. Et je vais donner un chiffre que je n'ai jamais donné. Vous savez qu'innombrables ont été les policiers et les gendarmes qui, tout au long de ces années, nous ont indiqué « on en a assez d'arrêter toujours les mêmes ». C'est vrai ou ce n'est pas vrai ? Je n'ai cessé d'entendre cela. Et, pendant la campagne présidentielle, j'ai développé l'idée de la nécessité des peines planchers. Et j'ai surmonté la polémique selon laquelle ces peines planchers viendraient contredire le principe d'individualisation de la peine. Absurde ! Je le dis devant les magistrats, si la peine plafond ne vient pas contredire le principe d'individualisation de la peine, je ne vois pas pourquoi la peine plancher viendrait le contredire. On a fait voter - merci Rachida DATI - ce texte. Il a été voté le 10 Août. Il est entré en vigueur au mois de septembre. Savez-vous que nous avons déjà 4 500 décisions rendues sur la base des peines planchers ? C'est-à-dire que dorénavant, les délinquants multirécidivistes savent que cela leur coûtera cher.
Et dans l'excellent résultat que vous avez obtenu, la réponse pénale - grâce en soit rendue aux magistrats - c'est un élément décisif. Rachida DATI, à ma demande, a fait voter à l'Assemblée et ça vient de finir au Sénat, une peine de sûreté pour les « serial killers » et les « serial violeurs ». C'est-à-dire que nous allons faire de grands changements dans le droit Français. Jusqu'à présent, vous arrêtez un violeur, vous arrêtez un criminel, il effectue sa peine, moins les remises de peine, sauf quand il y a les peines de sûreté mais enfin, il sort. Et la société se lave les mains en disant « mais comment ce Monsieur en a pris pour 20 ans, admettons au pire il fait 20 ans, il sort ». Je suis désolé quand on a violé à 22 ans et qu'on sort 20 ans après, on a 42 ans. Et je n'ai pas l'intention de laisser des fauves en liberté. Donc nous avons introduit dans notre droit ce qui n'avait jamais existé avant, une peine de sûreté après la peine de prison c'est-à-dire pour que ces individus sortent, il faudra d'abord qu'ils aient fait leur peine et ensuite que la société décide si oui ou non ils sont dangereux. Et moi j'ai eu cette idée quand je suis venu à PAU cet été. J'y retourne. On était avec Michèle et vous savez quand je vois le mari de la dame, l'infirmière, qui a été décapitée et dont celui qui a fait cela dépose la tête sur le téléviseur avant de partir, et qu'est-ce que je dis moi au mari, quand le magistrat - je ne lui en fais pas le reproche, je décris une situation - dit au mari « je vais rendre un non-lieu parce que l'individu était irresponsable ». Et le mari me dit « s'il y a un non-lieu c'est que cela n'a pas eu lieu, rendez-moi ma femme ». Qu'est-ce qu'on répond ? Qu'est-ce qu'on dit ? Ca ne nous regarde pas, c'est la faute à pas de chance. Cela aurait pu être la situation de n'importe lequel parmi vous. Et bien dorénavant, je me suis dit : il est irresponsable, on va le mettre en hôpital psychiatrique et dans le traitement en hôpital psychiatrique, dans le traitement il y a la notion de permission. Et bien bon courage à celui ou à celle qui rencontrera cet individu. On ne peut pas les laisser en liberté, ce n'est pas vrai. Et les droits de l'homme, ce sont d'abord les droits de la victime.
On a assumé ce débat et que ceux qui ne sont pas d'accord le disent. Comme ceux qui n'étaient pas d'accord quand j'ai voulu les fichiers sur les empreintes génétiques où, soi-disant, ça portait atteinte à la liberté de qui ? De la même façon, je souhaite que les violeurs pointent tous les mois au commissariat ou à la gendarmerie et qu'ils soient entendus, et que ceux qui ne veulent pas se faire soigner ne sortent pas. Et je suis prêt à assumer ces débats devant la société française tranquillement. Mais la priorité pour nous, ce sont les victimes. Pas les coupables, les victimes.
Alors cela n'empêche pas que l'on tendra la main. Nous allons, avec Fadela AMARA annoncer un plan pour les quartiers, que je suis au jour le jour. J'ai des convictions, j'ai pris des engagements et je les tiendrai. Et cela concerne la police et la gendarmerie parce que c'est vous après, lorsqu'il y a des problèmes, qui vous trouvez en première ligne. Je n'ai pas accepté qu'à Villiers-le-Bel il y ait 81 fonctionnaires qui aient été touchés par des projectiles. Je ne serai pas le Président de la République qui acceptera, dans le pays dont il est le Chef de l'Etat, qu'on puisse tirer impunément sur un fonctionnaire ou sur un militaire, ce n'est pas possible. Michèle ALLIOT-MARIE le sait parfaitement bien, on recherche les tireurs, croyez bien qu'on les retrouvera et qu'on ne les laissera pas passer. Parce que je ne veux pas qu'il y ait un seul policier ou un seul gendarme qui se dise : « c'est la nouvelle mode en France, on peut tirer sur nous ! ». 81 de vos collègues ont été touchés, pas un n'a répondu. Hommage soit rendu à la police et à la gendarmerie française.
On va faire un plan où on va arrêter d'investir sur les immeubles, on va continuer ce qui a été lancé bien sûr. Mais permettez moi de vous dire que refaire un immeuble à neuf si vous laissez les gens au chômage dedans, cinq ans après il faut le refaire à nouveau ! Si on pense qu'on résout le problème parce qu'on refait les immeubles, on a tout faux. Moi je pense qu'on aurait d'ailleurs dû commencer par trouver un travail et une formation aux gens. De toute manière c'est fait. Et on va donc analyser la situation de chaque jeune, on lui donnera une nouvelle chance pour une formation qualifiante. Celui qui veut travailler s'en sortira. Celui qui ne veut pas travailler ne s'en sortira pas. Il faut bien comprendre les choses. Et vous, policiers et gendarmes, vous devez savoir que vous vivez dans une société où on connaît les valeurs qui sont celles de notre pays : travail, mérite, effort, récompense. Et je souhaite d'ailleurs que ces valeurs soient celles qui animent la gendarmerie et la police.
Et, j'en terminerai par là, qu'il y ait davantage de fluidité pour vous, qu'on n'attende pas pour vous promouvoir que vous soyez tellement fatigué d'avoir attendu, qu'il y ait un peu plus de valorisation de l'expérience et du mérite. Qu'on n'ait pas peur de nommer des jeunes. Je préfère qu'on prenne des risques et qu'on se trompe parfois en promouvant des gens qui peuvent parfois ne pas être à la hauteur des attentes plutôt qu'en n'en prenant aucun et en décourageant tout le monde. Vous vous êtes engagés dans la police et la gendarmerie, elles doivent être- la police et la gendarmerie - des facteurs de promotion sociale. Voilà le travail que l'on fait main dans la main avec Michèle ALLIOT-MARIE, et peu m'importe qu'on me dise que cela m'intéresse, c'est vrai. Et je vous félicite pour votre travail. Faites simplement attention. Un policier ou un gendarme, il rentre chez lui le soir. La mort ne fait pas partie du boulot. A chaque fois que l'on a un drame comme cela, c'est que l'on n'a pas été des bons professionnels.
Je vous demande beaucoup d'engagement et, en même temps, il y a des procédures. Je vous demande également le respect de vos règles déontologiques parce qu'on ne peut pas accepter ni la familiarité, ni le tutoiement. Vous êtes la police et la gendarmerie de la République. Donc votre tenue doit être impeccable, et cela commence par ne pas tutoyer, et pas de bras pendu dans les véhicules même si on est à deux de patrouille, parce que c'est l'uniforme.
Mesdames et Messieurs, j'espère que vous avez compris, Monsieur le Maire, j'étais bien content d'être ici aux côtés de Michèle ALLIOT-MARIE, de Rachida DATI et de Xavier BERTRAND, à qui je veux dire aussi mes remerciements pour le travail qu'ils font tous les trois.
Bonne année pour vous et pour vos familles.Merci à tous.