2 octobre 2007 - Seul le prononcé fait foi

Télécharger le .pdf

Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, sur la politique en faveur de la réinsertion par le travail, notamment la réforme des minima sociaux et des contrats aidés, à Dijon le 2 octobre 2007.

J'ai dit et répété pendant la campagne que personne ne devait être laissé au bord du chemin. Car je considère qu'une personne - même avec les plus grandes difficultés sociales - peut et doit avoir une place utile dans la société, lui procurant des moyens d'existence dignes.
Aucun modèle social ne peut tenir si on oublie que le travail est le moteur non seulement de la création de richesses mais aussi de la socialisation. C'est pourquoi je veux remettre le travail au centre de nos politiques sociales. Toutes nos actions doivent tendre à la promotion, la revalorisation et la juste rémunération du travail.
Ce n'est plus admissible que, faute d'accès à un moyen de transport, certaines personnes soient assignées à rester dans leur village où elles ne trouvent pas d'emploi. Ce n'est plus admissible que reprendre un emploi ne permette pas toujours de gagner plus.
Quand je dis « travailler plus pour gagner plus », cela concerne aussi et peut être avant tout ceux qui ont le sentiment aujourd'hui que les portes du travail leur sont fermées et que le retour au travail leur coûtera plus sans gagner plus.
Pour réduire la pauvreté et faire reculer l'exclusion, on ne peut pas opposer le travail et la solidarité. Au contraire, il faut les concilier.
C'est dans cette perspective que je veux que l'on réexamine nos minima sociaux, nos prestations sociales et la prime pour l'emploi. Il faut en finir avec une situation où l'on verse des avantages liés à un « statut » de titulaire de minimum social et où ces avantages disparaissent lors de la reprise d'un emploi.
J'ai donc demandé à Martin HIRSCH, Haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, de préparer une réforme des minima sociaux et des aides à la reprise d'emploi. Une première étape est déjà engagée avec l'expérimentation, dans certains départements comme la Côte d'Or, du revenu de solidarité active qui bénéficie à ceux qui reprennent un emploi.
Je souhaite que ce chantier aboutisse en 2008.
Le revenu de solidarité active devra garantir à toute personne qui reprend un travail que ses ressources vont augmenter, et cela dès la première heure travaillée, sans recréer de nouveaux effets de seuils. Nous aiderons ainsi davantage ceux qui font l'effort de reprendre un emploi.
Ce nouveau dispositif devra aussi simplifier les minima sociaux. Car, qu'est ce que demandent les Français aujourd'hui ?
Ils demandent à être assurés qu'en cas d'exercice d'un travail, ils gagneront plus que s'ils vivaient d'allocations. Ils demandent aussi à avoir accès à des dispositifs clairs et compréhensibles par tous. Ils ont le droit de le demander, comme ils en ont aussi le devoir, de s'insérer.
Pour les bénéficiaires d'une allocation de solidarité, le nouveau système offrira donc plus de lisibilité et un meilleur accompagnement vers l'emploi.
C'est un chantier prioritaire qui devra permettre, vingt ans après la création du revenu minimum d'insertion, de rénover notre modèle social en réhabilitant la valeur travail.
Nous allons mener à bien la fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC. On en parle depuis 20 ans. C'est une question de bon sens. Nous allons la faire.
Ce que je souhaite, c'est que désormais les structures administratives s'adaptent aux besoins des demandeurs d'emploi et non plus l'inverse. C'est vrai qu'il existe des guichets uniques. La Côte-d'Or est bien avancée en ce domaine. Cet exemple montre qu'il est possible de rapprocher les deux réseaux pour qu'ils travaillent ensemble.
Mais, ce que je propose, c'est d'aller plus loin.
Au préalable, je tiens à réaffirmer que, bien entendu, les partenaires sociaux conserveront leurs prérogatives en ce qui concerne la détermination des règles d'indemnisation.
La réforme que nous allons conduire va consister à mettre fin au parcours du combattant du demandeur d'emploi en le plaçant, enfin, au centre du système. Il n'aura plus à aller d'un organisme à l'autre pour remplir ses différentes obligations. Le devoir d'un chômeur, c'est de rechercher un emploi, pas de supporter le fardeau de la complexité administrative. Et le devoir de la collectivité nationale, c'est de mobiliser ses moyens au service du retour du chômeur à l'emploi.
Vous le voyez, la fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC est avant tout dans l'intérêt des demandeurs d'emploi, en particulier des plus défavorisés d'entre eux, parce qu'elle s'accompagnera d'une mobilisation considérable des moyens qui leurs sont consacrés.
Aujourd'hui, par exemple, l'UNEDIC compte 14 000 personnes, dont 12 000 ne sont pas au contact du demandeur d'emploi chômeur. L'ANPE compte 28 000 agents, dont 22 000 sont en contact direct avec lui. Grâce aux synergies que permettra la fusion des deux organismes, le nombre de conseillers au contact direct des demandeurs d'emploi augmentera.
Les chômeurs les plus éloignés de l'emploi bénéficieront du suivi intensif et personnalisé dont ils ont besoin. L'objectif est incontestablement « l'emploi de qualité ».
La fusion, c'est enfin un traitement plus équitable de tous les demandeurs d'emploi, car elle améliorera aussi le service rendu à ceux qui ne sont pas indemnisés.
Ainsi, nous serons en mesure de lutter contre le chômage de longue durée, dont le coût est autant social qu'économique.
La réforme des contrats aidés devra également y contribuer.
Depuis trop longtemps, on utilise les contrats aidés pour améliorer artificiellement les statistiques avant de renvoyer, à la fin du contrat, les personnes en insertion, à la case départ, le RMI ou le chômage.
Depuis trop longtemps, nos administrations sont davantage incitées à utiliser les contrats aidés pour gérer la liste des demandeurs d'emploi qu'à s'intéresser à la personne.
Je veux que nous inversions la logique.
Je veux que les contrats aidés renouent avec les deux objectifs qu'ils n'auraient jamais du perdre de vue. Le premier objectif est de « mettre le pied à l'étrier » à celles et à ceux qui ont besoin d'une période de transition vers l'emploi classique.
Le second objectif est de faire bénéficier de la solidarité celles et ceux qui ont des difficultés prolongées mais qu'on ne peut pas condamner à être exclues de tout sous prétexte que leur travail ne serait pas assez « rentable ».
Pendant la campagne présidentielle, beaucoup d'acteurs sociaux m'ont demandé de réformer les contrats aidés. La Côte d'Or a, d'ailleurs, été le premier département à y travailler.
Je demande donc à Martin HIRSCH, en liaison avec Christine LAGARDE, de présenter un projet d'unification de tous les contrats aidés, qui permettra de résoudre les problèmes actuels.
Quels sont ces problèmes ?
Il s'agit, premièrement, de la coexistence d'un trop grand nombre de contrats aidés, avec des logiques différentes et une multiplicité d'acteurs chargés de leur prescription. Comment s'étonner alors que le service public de l'emploi éprouve des difficultés à suivre l'ensemble des dispositifs ?
La création d'un « contrat unique d'insertion » répondra donc aux besoins de simplicité grâce à un régime juridique unique pour l'ensemble des contrats aidés, avec un seul prescripteur. Le système sera plus efficace et aussi plus lisible pour les bénéficiaires.
Le deuxième problème, c'est la rigidité des conditions d'exécution des contrats, précisées jusque dans les moindres détails. Les contrats d'avenir, par exemple ont, sauf exception, une durée hebdomadaire de 26 heures. Pas 25, ni 27. C'est absurde. De même, les durées du contrat de travail sont déterminées par l'administration de manière rigide, sur des considérations purement financières, sans égard pour la situation concrète des personnes. Dans certains endroits et pour certains contrats, c'est 6 mois, à prendre ou à laisser. Ailleurs, c'est 9 mois. Allez savoir pourquoi !
Le « contrat unique d'insertion » devra donc répondre au souci des acteurs de terrain de disposer d'un cadre souple qui soit adapté à la diversité des situations des personnes éloignées de l'emploi et de leurs projets professionnels. Il pourra être conclu pour des durées hebdomadaires et totales variables selon les besoins.
Enfin, et ce sera une petite révolution, les titulaires du « contrat unique d'insertion» seront suivis par le service public de l'emploi, même pendant l'exécution du contrat, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. On n'attendra pas comme aujourd'hui qu'ils terminent leur contrat sans solution pour intervenir.
Avec ce contrat unique nous aurons enfin un véritable outil permettant à tous ceux qui sont en situation d'échec et d'exclusion de retrouver le chemin de l'insertion sociale et professionnelle.
L'insertion a un coût. Il peut être élevé quand elle n'est pas efficace, quand elle est trop rigide. Elle a une richesse : elle est inestimable, c'est celle de la dignité et de l'espoir.Ces réformes seront élaborées au travers des programmes expérimentaux. C'est une méthode qui garantit que les réformes seront bâties sur des fondements solides. C'est pourquoi, je souhaite étendre cette méthode à d'autres domaines, comme celui de l'éducation ou de la santé. Je demande donc à Martin HIRSCH de conduire des expérimentations sociales et de me faire des propositions pour donner un élan sans précédent à la lutte contre la pauvreté.