10 juillet 2007 - Seul le prononcé fait foi
Point de presse de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, sur les relations franco-algériennes et sur le projet d'Union de la Méditerranée, à Alger le 10 juillet 2007.
LE PRESIDENT - Mesdames et Messieurs, chacun comprendra que je veuille remercier le Président Abdelaziz BOUTEFLIKA pour son accueil, pour cette réunion de travail puisque c'était une visite de travail et pour son invitation que je me crois autorisé à révéler, pour une visite d'Etat que j'effectuerai en Algérie dans le courant du mois de novembre. C'est une visite à laquelle le Président BOUTEFLIKA et moi-même attachons une grande importance et c'est la raison pour laquelle nous avons chacun désigné deux de nos plus proches collaborateurs pour la préparer de façon à ce qu'elle produise des résultats concrets et tangibles.
Le Président BOUTEFLIKA m'a fait part de la volonté de l'Algérie de préparer l'après hydrocarbure, d'être considéré comme un partenaire économique et d'être un pays émergent, avec une industrie et des services. Il m'a également fait part de sa volonté que la France aide l'Algérie sur la route de son développement. J'ai indiqué au Président BOUTEFLIKA que, pour ma part, l'amitié se nourrissait davantage de projets, d'actions que de traités, de discours ou de paroles.
Et je crois que sur ce premier point nos montres, si vous me permettez cette expression, ont marqué exactement et strictement la même heure. J'ai dit au Président la volonté de la France de coopérer avec l'Algérie en matière d'énergie sous tous ses aspects, à savoir l'énergie d'aujourd'hui, le gaz, mais aussi l'énergie de demain, le nucléaire civil. La France veut aussi coopérer en matière agroalimentaire et en matière d'industrie. Les entreprises françaises sont prêtes à investir massivement dans cette économie émergente qu'est l'Algérie d'aujourd'hui avec ses moyens et sa solvabilité.
Et puis, j'ai fait part au Président BOUTEFLIKA du projet que porte la France, le projet d'Union de la Méditerranée. J'ai voulu recueillir son avis et ses conseils et lui dire qu'il avait une place tout à fait centrale pour porter ce projet. Il n'est pas un substitut au processus de Barcelone qui n'est pas un substitut au 5 + 5, qui n'est pas un substitut, bien sûr, à l'Union européenne. Il consiste à porter un projet politique, extrêmement fort qui verrait les hommes de la Méditerranée construire la paix et le développement par une union de la Méditerranée, comme il y a soixante ans les Européens ont construit l'Union Européenne.
Autour de projets concrets comme l'environnement, il s'agit de faire de la Méditerranée la mer la plus propre au monde. Il s'agit d'instaurer la paix, la sécurité, auxquelles nous aspirons des deux côtés des rives de la Méditerranée, ainsi que le développement économique et le dialogue des cultures, parce qu'à cet endroit précis de la Méditerranée tout peut se jouer. L'affrontement entre l'Orient et l'Occident ou, au contraire, la paix. C'est en tout cas l'idée que nous défendons avec Bernard KOUCHNER et que nous allons expliquer, pour que cette idée ne soit pas une idée française mais l'idée des hommes et des femmes de la Méditerranée.
La grande expérience du Président BOUTEFLIKA, les conseils avisés qui sont les siens, permettront d'éviter toutes les formes de malentendus qu'il pourrait y avoir pour viser le premier semestre 2008 pour une rencontre entre les Chefs d'Etat et de gouvernement qui donnerait corps à ce projet d'Union de la Méditerranée. Vous le voyez, cette visite de travail est extrêmement riche, extrêmement dense. J'ai été très heureux de retrouver le Président BOUTEFLIKA qui m'avait reçu à de nombreuses reprises ces dernières années. Je n'ai pas connu la guerre d'Algérie, je ne suis pas de cette génération où, naturellement, l'histoire pèse lourd. Je suis venu en Algérie en ami avec la volonté de participer à une entente entre deux peuples souverains, indépendants, qui se respectent, qui ont eu une histoire mouvementée et qui veulent maintenant résolument se tourner vers l'avenir.
J'ajoute que l'Algérie a une place centrale en Afrique parce que l'Afrique du Nord, c'est l'Afrique. On retient souvent le mot « nord », mais l'Afrique compte aussi beaucoup et je dois dire que j'ai beaucoup de plaisir à ces longues heures de discussion avec le Président. Je veux lui redire mon amitié, ma confiance et surtout la volonté de la France de travailler avec l'Algérie pour le développement, pour la sécurité et pour la paix.
QUESTION - Vous avez dit la mémoire oui, la repentance, non. Or, le mot « repentance » signifie dans le dictionnaire Robert : souvenir douloureux et regrets de ses fautes. Est-ce que cela veut dire que la France refuse de présenter ses regrets aux Algériens ? Merci.
LE PRESIDENT - Je viens justement de dire le contraire. Je viens de dire que l'on voulait se tourner vers l'avenir. Et pourquoi de mon point de vue ? Je le dis très librement devant le Président, je n'ai jamais pensé que le Traité d'amitié était une solution. D'abord, parce que lorsque l'on est amis, on n'a pas besoin de l'écrire. Il faut le vivre. Deuxièmement, parce qu'il m'aurait toujours paru étrange que le Président BOUTEFLIKA me demande de renoncer à ce que je suis, et discourtois que je demande au Président BOUTEFLIKA de renoncer à ce qu'il est. Nous avons chacun connu une histoire. Les Algériens ont beaucoup souffert, beaucoup. Je respecte cette souffrance. Mais il y a aussi beaucoup de souffrance de l'autre côté et il faut la respecter. Je ne mets pas l'une sur un piédestal et l'autre en dessous. Je les regarde toutes les deux et je dis c'est l'histoire, c'est le passé. Maintenant, construisons l'avenir. Alors, si chacun veut le réinventer, le réinterpréter, à quoi cela aboutira-t-il ? À de nouveaux malentendus. Alors, ne divisons pas l'avenir en faisant renaître le passé. Je respecte les Algériens, je respecte leur histoire. Je souhaite qu'ils prennent l'histoire de la France telle qu'elle est. Chacun porte sur ses histoires respectives le regard qu'il souhaite et maintenant, construisons l'avenir. Il y a eu trop de souffrances dans le passé. Voila, je crois que je peux dire que c'était vraiment une volonté partagée. Je viens ici ni pour blesser ni pour m'excuser. Je ne veux pas blesser des amis et je n'imagine pas que des amis que je ne veux pas blesser voudraient me blesser à mon tour. Nous n'avons pas parlé comme cela.
Je respecte l'Algérie pour ce qu'elle est, son histoire, ses hommes d'Etat. Je souhaite simplement que la France soit considérée de la même façon. C'est cela, me semble-t-il, un homme d'Etat qui doit essayer de rassembler des deux côtés de la Méditerranée et non pas de diviser.
QUESTION - Faut-il que la France et l'Algérie soient le moteur de cette Union de la Méditerranée, comme le sont l'Allemagne et la France sur le continent européen ?
LE PRESIDENT - À partir du moment où vous dites que deux pays sont les moteurs, cela veut dire que tous les autres sont derrière. Je suis sûr, m'exprimant en son nom, si le Président BOUTEFLIKA le permet, que ce n'est certainement pas ce qu'il souhaite. Mais, naturellement, mon premier voyage hors d'Europe, est en Algérie. Et le premier Chef d'Etat à qui j'exprime, avec Bernard KOUCHNER cette idée, est le Président BOUTEFLIKA. Mais il n'y a pas que l'Algérie, il y a toute l'expérience qui est la sienne et la connaissance qui est la sienne, de cette Méditerranée. Oui, certainement, nous avons un rôle particulier à jouer, mais toute l'idée est que l'Union de la Méditerranée devienne l'idée de chacun. Parce que si elle n'est que l'idée de quelqu'un et notamment de la France, à ce moment-là, chacun se demandera quelle est l'arrière-pensée derrière cette initiative. Ce que je souhaite, c'est la paix et le développement dans la Méditerranée et il n'est pas tout à fait anecdotique qu'avec Bernard KOUCHNER, nous nous soyons d'abord rendus ici, à Alger.
QUESTION - Dans la déclaration d'Alger de 2003, lors de la visite du Président Jacques CHIRAC, il était question d'un partenariat d'exception entre la France et l'Algérie. Avez-vous parlé de ce partenariat d'exception avec Monsieur BOUTEFLIKA ? Et est-ce que vous pensez le signer, comme on le dit, lors de votre visite d'Etat en novembre ? A ce moment-là, que comprendra t-il et a-t-il vocation à se substituer au Traité d'amitié ? Question subsidiaire, puisqu'on parle de coopération, est-ce qu'on va assister à un rapprochement entre GDF et la SONATRACH. Est-ce que vous en avez parlé aujourd'hui ?
LE PRESIDENT - Justement, ce que nous voulons avec le Président BOUTEFLIKA, ce n'est pas qu'on qualifie un accord mais c'est qu'on lui donne du contenu. Tout le temps qu'on passe à savoir si c'est un Traité d'amitié, un partenariat stratégique, un partenariat privilégié, un programme privilégié, on ne le passe pas à mettre du contenu, et c'est ce que nous voulons, le Président BOUTEFLIKA et moi-même. Voilà sur quoi nous allons travailler dans un délai extrêmement rapproché puisque la visite d'Etat à laquelle a bien voulu me convier le Président algérien est pour le mois de novembre.
QUESTION - Monsieur le Président, vous avez deux visions nouvelles, l'Union de la Méditerranée et l'immigration choisie. Est-ce que c'est une relation de cause à effet ? Vous avez dit que l'Union de la Méditerranée ne remplacerait pas le processus de Barcelone, or l'échec est patent. Comment comptez-vous en corriger les échecs, notamment par rapport au conflit israélo-arabe ?
LE PRESIDENT - Si je commence par dire que ce que les autres ont fait est un échec, cela laisse mal augurer de l'idée que nous proposons. Moi, je ne le qualifie pas d'échec. Ils ont essayé, cela avance moins rapidement qu'ils l'avaient prévu. Je ne veux pas construire sur des décombres, donc on va prendre aussi l'héritage de Barcelone.
S'agissant de l'immigration, on a parlé des visas avec le Président. D'abord pour dire combien cela a avancé, et les ministres des Affaires étrangères ont fait un point. Depuis que le double accord de Schengen a été supprimé, il y a moins de délais d'attente pour les visas. Il y a encore des progrès à faire, nous allons en discuter. J'ai toujours pensé que l'on gérait les flux migratoires par un accord, un partenariat entre le pays d'émigration et le pays d'immigration.
QUESTION - Avez-vous abordé la question du nucléaire civil ?
LE PRESIDENT - Les discussions sur le nucléaire sont des discussions que nous menons sur l'énergie dans son ensemble, sous toutes ses facettes. Nous aurons l'occasion, je l'espère, d'avancer un certain nombre de propositions concrètes au mois de novembre.
QUESTION - Une question sur l'Union Méditerranéenne. Est-il exact ou possible qu'un groupe de pilotage soit mis en place pour réfléchir au contour de cette Union. Si c'est exact ou possible, quels pays pourraient en faire partie ?
LE PRESIDENT - Non, pour l'instant, nous avons convenu avec le Président BOUTEFLIKA qu'il fallait expliquer cette idée pour lever les malentendus, n'exclure personne, associer le plus grand nombre. Pour l'instant, nous n'en sommes pas à un groupe de pilotage.
QUESTION - On a un problème au niveau de la région, c'est le problème du Sahara Occidental. Il y a eu, jusque-là, un parti pris de la France basé sur la relation qui l'a toujours unie au Maroc. Vous avez mis en exergue tout à l'heure le fait que vous apparteniez à une nouvelle génération. Quelle est votre vision à ce propos ? Pensez-vous qu'on peut aller de l'avant en ayant une vision beaucoup plus neutre ?
LE PRESIDENT - Vous savez, le Président BOUTEFLIKA m'a même dit qu'il connaissait la position traditionnelle de la France, qu'il ne me demandait pas d'y renoncer, mais qu'il expliquait, lui-même, avec des arguments qui sont les siens et que je respecte quelle était la position de l'Algérie. Je n'en fais pas un point de discorde entre l'Algérie et la France. Franchement, j'ai déjà assez de problèmes à régler. Je reconnais la complexité de cette question et j'espère que tout ceci va pouvoir se régler. L'ONU a pris une résolution et il me semble que celle-ci a été qualifiée, y compris par le Président BOUTEFLIKA, d'intéressante. Donc, les choses progressent, parce que ce qui est très important, c'est qu'à un moment ou à un autre, l'Union du Maghreb puisse se faire sur la base d'une entente, naturellement, entre l'Algérie et le Maroc. On ne peut pas imaginer le Maghreb sans l'Algérie et sans le Maroc.Merci à vous.
Le Président BOUTEFLIKA m'a fait part de la volonté de l'Algérie de préparer l'après hydrocarbure, d'être considéré comme un partenaire économique et d'être un pays émergent, avec une industrie et des services. Il m'a également fait part de sa volonté que la France aide l'Algérie sur la route de son développement. J'ai indiqué au Président BOUTEFLIKA que, pour ma part, l'amitié se nourrissait davantage de projets, d'actions que de traités, de discours ou de paroles.
Et je crois que sur ce premier point nos montres, si vous me permettez cette expression, ont marqué exactement et strictement la même heure. J'ai dit au Président la volonté de la France de coopérer avec l'Algérie en matière d'énergie sous tous ses aspects, à savoir l'énergie d'aujourd'hui, le gaz, mais aussi l'énergie de demain, le nucléaire civil. La France veut aussi coopérer en matière agroalimentaire et en matière d'industrie. Les entreprises françaises sont prêtes à investir massivement dans cette économie émergente qu'est l'Algérie d'aujourd'hui avec ses moyens et sa solvabilité.
Et puis, j'ai fait part au Président BOUTEFLIKA du projet que porte la France, le projet d'Union de la Méditerranée. J'ai voulu recueillir son avis et ses conseils et lui dire qu'il avait une place tout à fait centrale pour porter ce projet. Il n'est pas un substitut au processus de Barcelone qui n'est pas un substitut au 5 + 5, qui n'est pas un substitut, bien sûr, à l'Union européenne. Il consiste à porter un projet politique, extrêmement fort qui verrait les hommes de la Méditerranée construire la paix et le développement par une union de la Méditerranée, comme il y a soixante ans les Européens ont construit l'Union Européenne.
Autour de projets concrets comme l'environnement, il s'agit de faire de la Méditerranée la mer la plus propre au monde. Il s'agit d'instaurer la paix, la sécurité, auxquelles nous aspirons des deux côtés des rives de la Méditerranée, ainsi que le développement économique et le dialogue des cultures, parce qu'à cet endroit précis de la Méditerranée tout peut se jouer. L'affrontement entre l'Orient et l'Occident ou, au contraire, la paix. C'est en tout cas l'idée que nous défendons avec Bernard KOUCHNER et que nous allons expliquer, pour que cette idée ne soit pas une idée française mais l'idée des hommes et des femmes de la Méditerranée.
La grande expérience du Président BOUTEFLIKA, les conseils avisés qui sont les siens, permettront d'éviter toutes les formes de malentendus qu'il pourrait y avoir pour viser le premier semestre 2008 pour une rencontre entre les Chefs d'Etat et de gouvernement qui donnerait corps à ce projet d'Union de la Méditerranée. Vous le voyez, cette visite de travail est extrêmement riche, extrêmement dense. J'ai été très heureux de retrouver le Président BOUTEFLIKA qui m'avait reçu à de nombreuses reprises ces dernières années. Je n'ai pas connu la guerre d'Algérie, je ne suis pas de cette génération où, naturellement, l'histoire pèse lourd. Je suis venu en Algérie en ami avec la volonté de participer à une entente entre deux peuples souverains, indépendants, qui se respectent, qui ont eu une histoire mouvementée et qui veulent maintenant résolument se tourner vers l'avenir.
J'ajoute que l'Algérie a une place centrale en Afrique parce que l'Afrique du Nord, c'est l'Afrique. On retient souvent le mot « nord », mais l'Afrique compte aussi beaucoup et je dois dire que j'ai beaucoup de plaisir à ces longues heures de discussion avec le Président. Je veux lui redire mon amitié, ma confiance et surtout la volonté de la France de travailler avec l'Algérie pour le développement, pour la sécurité et pour la paix.
QUESTION - Vous avez dit la mémoire oui, la repentance, non. Or, le mot « repentance » signifie dans le dictionnaire Robert : souvenir douloureux et regrets de ses fautes. Est-ce que cela veut dire que la France refuse de présenter ses regrets aux Algériens ? Merci.
LE PRESIDENT - Je viens justement de dire le contraire. Je viens de dire que l'on voulait se tourner vers l'avenir. Et pourquoi de mon point de vue ? Je le dis très librement devant le Président, je n'ai jamais pensé que le Traité d'amitié était une solution. D'abord, parce que lorsque l'on est amis, on n'a pas besoin de l'écrire. Il faut le vivre. Deuxièmement, parce qu'il m'aurait toujours paru étrange que le Président BOUTEFLIKA me demande de renoncer à ce que je suis, et discourtois que je demande au Président BOUTEFLIKA de renoncer à ce qu'il est. Nous avons chacun connu une histoire. Les Algériens ont beaucoup souffert, beaucoup. Je respecte cette souffrance. Mais il y a aussi beaucoup de souffrance de l'autre côté et il faut la respecter. Je ne mets pas l'une sur un piédestal et l'autre en dessous. Je les regarde toutes les deux et je dis c'est l'histoire, c'est le passé. Maintenant, construisons l'avenir. Alors, si chacun veut le réinventer, le réinterpréter, à quoi cela aboutira-t-il ? À de nouveaux malentendus. Alors, ne divisons pas l'avenir en faisant renaître le passé. Je respecte les Algériens, je respecte leur histoire. Je souhaite qu'ils prennent l'histoire de la France telle qu'elle est. Chacun porte sur ses histoires respectives le regard qu'il souhaite et maintenant, construisons l'avenir. Il y a eu trop de souffrances dans le passé. Voila, je crois que je peux dire que c'était vraiment une volonté partagée. Je viens ici ni pour blesser ni pour m'excuser. Je ne veux pas blesser des amis et je n'imagine pas que des amis que je ne veux pas blesser voudraient me blesser à mon tour. Nous n'avons pas parlé comme cela.
Je respecte l'Algérie pour ce qu'elle est, son histoire, ses hommes d'Etat. Je souhaite simplement que la France soit considérée de la même façon. C'est cela, me semble-t-il, un homme d'Etat qui doit essayer de rassembler des deux côtés de la Méditerranée et non pas de diviser.
QUESTION - Faut-il que la France et l'Algérie soient le moteur de cette Union de la Méditerranée, comme le sont l'Allemagne et la France sur le continent européen ?
LE PRESIDENT - À partir du moment où vous dites que deux pays sont les moteurs, cela veut dire que tous les autres sont derrière. Je suis sûr, m'exprimant en son nom, si le Président BOUTEFLIKA le permet, que ce n'est certainement pas ce qu'il souhaite. Mais, naturellement, mon premier voyage hors d'Europe, est en Algérie. Et le premier Chef d'Etat à qui j'exprime, avec Bernard KOUCHNER cette idée, est le Président BOUTEFLIKA. Mais il n'y a pas que l'Algérie, il y a toute l'expérience qui est la sienne et la connaissance qui est la sienne, de cette Méditerranée. Oui, certainement, nous avons un rôle particulier à jouer, mais toute l'idée est que l'Union de la Méditerranée devienne l'idée de chacun. Parce que si elle n'est que l'idée de quelqu'un et notamment de la France, à ce moment-là, chacun se demandera quelle est l'arrière-pensée derrière cette initiative. Ce que je souhaite, c'est la paix et le développement dans la Méditerranée et il n'est pas tout à fait anecdotique qu'avec Bernard KOUCHNER, nous nous soyons d'abord rendus ici, à Alger.
QUESTION - Dans la déclaration d'Alger de 2003, lors de la visite du Président Jacques CHIRAC, il était question d'un partenariat d'exception entre la France et l'Algérie. Avez-vous parlé de ce partenariat d'exception avec Monsieur BOUTEFLIKA ? Et est-ce que vous pensez le signer, comme on le dit, lors de votre visite d'Etat en novembre ? A ce moment-là, que comprendra t-il et a-t-il vocation à se substituer au Traité d'amitié ? Question subsidiaire, puisqu'on parle de coopération, est-ce qu'on va assister à un rapprochement entre GDF et la SONATRACH. Est-ce que vous en avez parlé aujourd'hui ?
LE PRESIDENT - Justement, ce que nous voulons avec le Président BOUTEFLIKA, ce n'est pas qu'on qualifie un accord mais c'est qu'on lui donne du contenu. Tout le temps qu'on passe à savoir si c'est un Traité d'amitié, un partenariat stratégique, un partenariat privilégié, un programme privilégié, on ne le passe pas à mettre du contenu, et c'est ce que nous voulons, le Président BOUTEFLIKA et moi-même. Voilà sur quoi nous allons travailler dans un délai extrêmement rapproché puisque la visite d'Etat à laquelle a bien voulu me convier le Président algérien est pour le mois de novembre.
QUESTION - Monsieur le Président, vous avez deux visions nouvelles, l'Union de la Méditerranée et l'immigration choisie. Est-ce que c'est une relation de cause à effet ? Vous avez dit que l'Union de la Méditerranée ne remplacerait pas le processus de Barcelone, or l'échec est patent. Comment comptez-vous en corriger les échecs, notamment par rapport au conflit israélo-arabe ?
LE PRESIDENT - Si je commence par dire que ce que les autres ont fait est un échec, cela laisse mal augurer de l'idée que nous proposons. Moi, je ne le qualifie pas d'échec. Ils ont essayé, cela avance moins rapidement qu'ils l'avaient prévu. Je ne veux pas construire sur des décombres, donc on va prendre aussi l'héritage de Barcelone.
S'agissant de l'immigration, on a parlé des visas avec le Président. D'abord pour dire combien cela a avancé, et les ministres des Affaires étrangères ont fait un point. Depuis que le double accord de Schengen a été supprimé, il y a moins de délais d'attente pour les visas. Il y a encore des progrès à faire, nous allons en discuter. J'ai toujours pensé que l'on gérait les flux migratoires par un accord, un partenariat entre le pays d'émigration et le pays d'immigration.
QUESTION - Avez-vous abordé la question du nucléaire civil ?
LE PRESIDENT - Les discussions sur le nucléaire sont des discussions que nous menons sur l'énergie dans son ensemble, sous toutes ses facettes. Nous aurons l'occasion, je l'espère, d'avancer un certain nombre de propositions concrètes au mois de novembre.
QUESTION - Une question sur l'Union Méditerranéenne. Est-il exact ou possible qu'un groupe de pilotage soit mis en place pour réfléchir au contour de cette Union. Si c'est exact ou possible, quels pays pourraient en faire partie ?
LE PRESIDENT - Non, pour l'instant, nous avons convenu avec le Président BOUTEFLIKA qu'il fallait expliquer cette idée pour lever les malentendus, n'exclure personne, associer le plus grand nombre. Pour l'instant, nous n'en sommes pas à un groupe de pilotage.
QUESTION - On a un problème au niveau de la région, c'est le problème du Sahara Occidental. Il y a eu, jusque-là, un parti pris de la France basé sur la relation qui l'a toujours unie au Maroc. Vous avez mis en exergue tout à l'heure le fait que vous apparteniez à une nouvelle génération. Quelle est votre vision à ce propos ? Pensez-vous qu'on peut aller de l'avant en ayant une vision beaucoup plus neutre ?
LE PRESIDENT - Vous savez, le Président BOUTEFLIKA m'a même dit qu'il connaissait la position traditionnelle de la France, qu'il ne me demandait pas d'y renoncer, mais qu'il expliquait, lui-même, avec des arguments qui sont les siens et que je respecte quelle était la position de l'Algérie. Je n'en fais pas un point de discorde entre l'Algérie et la France. Franchement, j'ai déjà assez de problèmes à régler. Je reconnais la complexité de cette question et j'espère que tout ceci va pouvoir se régler. L'ONU a pris une résolution et il me semble que celle-ci a été qualifiée, y compris par le Président BOUTEFLIKA, d'intéressante. Donc, les choses progressent, parce que ce qui est très important, c'est qu'à un moment ou à un autre, l'Union du Maghreb puisse se faire sur la base d'une entente, naturellement, entre l'Algérie et le Maroc. On ne peut pas imaginer le Maghreb sans l'Algérie et sans le Maroc.Merci à vous.