23 mai 2000 - Seul le prononcé fait foi
Conférence de presse conjointe de MM. Jacques Chirac, Président de la République, Lionel Jospin, Premier ministre et José Maria Aznar, président du gouvernement espagnol, sur les relations franco-espagnoles, la coopération bilatérale dans la lutte contre le terrorisme et dans la réalisation de liaisons de transport, et sur leur position respective concernant l'élargissement de l'Union européenne, Santander le 23 mai 2000.
LE PRESIDENT - Je voudrais d'abord remercier le Président du gouvernement espagnol, José Maria AZNAR, et aussi d'ailleurs la ville et la région de Santander pour leur accueil, en soulignant que jamais les rapports entre l'Espagne et la France, comme l'a évoqué tout à l'heure le Premier Ministre, n'ont été aussi chaleureux et aussi confiants, je dirais peut-être dans l'histoire dans nos relations. Je l'avais bien ressenti comme cela lors de ma visite d'Etat, ici, en octobre dernier.
Naturellement, j'ai tenu à féliciter le Premier ministre AZNAR, et son équipe, pour ses succès politiques, je pense aux dernières élections, et pour ses succès économiques, je pense à la situation brillante, actuellement, de l'Espagne dans ce domaine.
Cette Espagne qui réussit, qui réussit à l'intérieur, qui réussit en Europe, qui réussit sur la scène internationale, est pour la France depuis déjà quelques années un partenaire majeur. Elle l'est de plus en plus.
Nous avons réglé tous nos contentieux. Nous en avions d'anciens, la pêche, l'agriculture. Nos relations économiques n'ont jamais été aussi bonnes, puisque la France est aujourd'hui le premier client, le deuxième fournisseur, le deuxième investisseur de l'Espagne.
Notre coopération policière et judiciaire contre le terrorisme est exemplaire et ne cesse de se renforcer, comme l'ont montré encore tout à l'heure les réunions entre les deux ministres de l'Intérieur. Et l'Espagne peut être assurée de notre soutien dans ce domaine.
Nous évoquons maintenant, sans crispation ni difficulté, les problèmes des liaisons et des transports, avec la ferme volonté de trouver des solutions à ces problèmes, dans le respect des exigences de l'environnement et de celles de la sécurité, mais dans un dialogue tout à fait franc et positif.
Nous avons naturellement, je n'insisterai pas beaucoup puisque José Maria AZNAR l'a évoqué, parlé de l'Europe, à la fin de la présidence portugaise qui a été une excellente présidence, comme l'a montré le Conseil de Lisbonne, puis comme le montrera sans aucun doute le Conseil de Feira.
Et nous avons évoqué naturellement la présidence française. Nous avons fait un tour d'horizon qui nous a conduit à constater notre parfaite intelligence, notre parfaite harmonie pour ce qui concerne la vision de l'Europe de demain, la nécessité de prendre, sous présidence française, les mesures nécessaires pour éviter que l'Europe ne soit dans l'incapacité de prendre les initiatives nécessaires, notamment après l'élargissement. La France et l'Espagne font partie des Etats membres décidés à aller de l'avant dans la poursuite de la construction européenne, à refuser tout risque de paralysie. Il est clair que nous n'accepterons pas un accord minimal qui ne permettrait pas à l'Union de fonctionner efficacement après son élargissement.
Dans le domaine de l'Europe de la défense, je n'ai pas besoin d'être long puisque nous avons la même approche et les mêmes objectifs, notamment pour ce qui concerne le renforcement des structures des forces européennes ou la coopération en matière d'armement.
Bref, nous nous sommes bien préparés à agir dans le même sens, Espagnols et Français, lors du Conseil européen de Feira, au Portugal, naturellement, mais aussi pendant la présidence française. Je m'en réjouis et j'en remercie le Premier Ministre et le gouvernement espagnol.
LE PREMIER MINISTRE - Je m'associe naturellement aux remerciements que le Président de la République a adressés à José Maria AZNAR et au gouvernement espagnol qui nous reçoivent. Notre relation bilatérale est exceptionnellement bonne et, en outre, nous sentons que notre approche des questions européennes qui sont devant nous et qui le seront à l'occasion de la présidence française sont finalement proches. Les rapports de nos ministres, qui sont des points d'étape dans les travaux conduits de façon régulière au plan bilatéral entre nos deux pays, ont montré, aussi bien sur les problèmes de transport, les problèmes d'éducation ou les problèmes de coopération scientifique que sur les problèmes de sécurité, à quel point cette relation bilatérale est excellente.
Dans ce cadre, j'ai pu réaffirmer au Président du gouvernement espagnol notre totale solidarité et coopération dans la lutte contre le terrorisme. Les deux ministres de l'Intérieur veillent naturellement, de façon constante, et nous sommes prêts à examiner comment, dans la période qui vient, nous pouvons accentuer, concrétiser, rendre plus efficace notre coopération dans ce domaine au plan policier, comme au plan judiciaire bien sûr.
Nous avons abordé également avec le Président du gouvernement les questions liées aux liaisons transpyrénéennes. Là aussi, nos deux ministres de l'Equipement et des Transports nous ont montré que des deux côtés des Pyrénées, il y avait une volonté d'avancer dans les projets ferroviaires comme dans les projets routiers avec, c'est vrai, du côté français deux préoccupations que nous avons rappelées qui sont celles de la sécurité, après le terrible drame qui a touché le tunnel du Mont-Blanc, et les questions aussi d'environnement auxquelles les populations locales sont extrêmement sensibles.
J'ai été très heureux de constater que le Président du gouvernement espagnol était tout à fait favorable à la volonté de créer une dynamique du succès pour la conférence intergouvernementale. De ce point de vue, même si nous reconnaissons l'intérêt et l'utilité d'une réflexion à long terme sur le devenir de l'Europe, nous avons une approche pragmatique. Nous pensons que le concept de coopération renforcée peut nous permettre de faire le lien entre le court terme, les problèmes de la conférence intergouvernementale et le problème du long terme.
Au titre des coopérations renforcées, l'euro-11 est certainement un bon exemple de ce qu'il serait souhaitable de faire. La France souhaite donner plus de lisibilité, de visibilité à la conduite politique de la zone euro, parce que c'est sans doute une des façons d'affirmer la force de l'Euro.
Je crois que ces préoccupations sont partagées par le gouvernement espagnol.
L'Europe a la chance d'entrer, maintenant, dans une phase de croissance. Je pense de croissance durable. Nous devons viser à l'entretenir par nos politiques nationales, et par nos coopérations au plan européen. Et si nous sommes capables de garder cette dynamique de croissance, cela nous mettra mieux en mesure de régler les problèmes auxquels l'Europe est confrontée, que ce soient ceux de son organisation ou que ce soient ceux de l'élargissement.
Voilà l'essentiel, M. le Président de la République, M. le Président du Gouvernement, de ce que je voulais ajouter pour compléter vos interventions.
QUESTION - Y aura-t-il du retard par rapport à l'objectif affiché de 2004 en ce qui concerne le TGV Madrid-Barcelone-Perpignan ?
LE PREMIER MINISTRE - Je voudrais, Mesdames, Messieurs, confirmer qu'en ce qui concerne la ligne TVG marchandises et voyageurs, du côté français, nous ne pensons pas avoir de retard au calendrier envisagé. La procédure suit, en effet, son cours normalement, d'ici juin 2001 la déclaration d'utilité publique, d'ici la fin 2000 un appel à candidature pour la réalisation du tunnel et de la liaison ferroviaire. Et les deux ministres de l'Equipement et des Transports sont convenus de demander à la Commission intergouvernementale de fournir une évaluation de la date de mise en service effective, dont nous ne souhaitons pas qu'elle soit retardée par rapport à la perspective de 2004, mais c'est à la Commission de nous donner à cet égard les éléments plus précis.
QUESTION - Monsieur le Président, quel est votre jugement sur la situation actuelle de l'euro ?
LE PRESIDENT - Sur l'euro, je parlerai plus volontiers du relèvement, pour des raisons évidentes dues à la croissance aux Etats-Unis, du dollar. Je répète ce que j'ai eu l'occasion de dire, ce qu'ont dit les responsables français, pour ce qui nous concerne, c'est que l'euro conserve des marges d'appréciation extrêmement importantes, que nous avons totalement confiance dans cette monnaie qui est fondée, aujourd'hui, sur des caractéristiques économiques, en Europe en général, en France en particulier, positives. Et que, par conséquent, et tout à l'heure le Premier ministre l'évoquait à juste titre, il y a lieu non seulement d'exprimer sa confiance, mais probablement de le faire de façon coordonnée au sein de l'euro-11. Parce qu'effectivement, il y a là une structure qui doit émettre les signaux de confiance justifiés dans ce domaine.\
QUESTION - Monsieur le Président de la République et Monsieur le Premier ministre, je voudrais savoir si l'on peut s'attendre à un rôle-clé de la France au Liban, aujourd'hui, alors qu'il y a de très grandes difficultés dans le Liban sud. Est-ce que, par exemple, la France est prête à jouer un rôle moteur dans une force des Nations Unies au Sud-Liban ?
Et M. José Maria AZNAR, demain à Paris, de quel côté votre coeur sera-t-il pour le match de football ?
LE PRESIDENT - Tout ce qui va dans le sens de la paix au Moyen-Orient a l'appui des autorités françaises. Cela va de soi. Aujourd'hui, nous observons le retrait annoncé par les Israéliens de leurs forces dans le Liban sud. Notre préoccupation, c'est que ce retrait puisse se faire de la façon la plus calme possible, en évitant toute provocation. C'est naturellement au conseil de sécurité de décider des initiatives qui doivent être prises, tant pour ce qui concerne les frontières - où sont-elles exactement ? - que pour ce qui concerne la gestion de la force de l'ONU que l'on appelle la FINUL. Et, bien entendu, nous sommes en contact permanent avec le secrétaire général des Nations Unies dans ces différents domaines.
Nous avons mis toute notre intervention pour engager chacun au calme et à la sérénité. Nous souhaitons vivement que la Syrie, qui est un pays avec lequel nous avons de très bonnes relations et qui ne doit en aucun cas être isolé, comprenne que son intérêt n'est naturellement pas de s'associer aux opérations de sécurité à l'égard de la frontière d'Israël, mais de ne rien faire qui puisse, à un titre ou à un autre, être interprété comme, je dirais, un peu une provocation, qu'il s'agisse des actions des milices résistantes, qu'il s'agisse des camps palestiniens qui sont actuellement au Liban, qu'il s'agisse de la capacité pour le gouvernement libanais de prendre les mesures de déploiement des moyens nécessaires, civils et militaires, pour la gestion des territoires libérés.
Pour tout cela, il faut être raisonnable. Il faut que le Liban puisse prendre des engagements de la même nature, et notamment celui de gérer convenablement sa frontière et son territoire, son territoire acquis aujourd'hui après le retrait israélien. Il faut qu'Israël, bien entendu, respecte au pied de la lettre les exigences liées à la résolution 425. C'est essentiel. Pour ce qui concerne la nature du retrait sur terre, sur mer et dans les airs, pour ce qui concerne la frontière elle-même, tout ceci doit être constaté par le secrétaire général de l'ONU et le secrétariat général.
Dans les prochaines heures ou jours, le secrétaire général, ou son représentant, iront certainement sur place pour s'assurer de la part des trois gouvernements correspondants que ces conditions peuvent être remplies. Si elles le sont, le secrétaire général proposera un aménagement de la FINUL. Il proposera d'abord de maintenir la FINUL, dont vous savez que théoriquement elle termine son mandat le 1er juillet, et il proposera probablement un aménagement de la FINUL. Et j'imagine que parmi les pays auxquels il s'adressera, il y aura la France. Eh bien nous verrons. Nous n'avons pas encore pris de décision. Nous ne pouvons pas prendre de décision avant que l'on nous fasse des propositions. Et la seule instance qui peut faire des propositions, c'est le secrétaire général des Nations Unies. Donc nous attendons.
Il va de soi que si les conditions que je viens de rappeler tout à l'heure sont remplies, si la FINUL, par conséquent, doit avoir une mission classique et traditionnelle des opérations de l'ONU, alors la France examinera de façon très ouverte et très compréhensive les demandes qui lui seront faites. Voilà où nous en sommes.
LE PREMIER MINISTRE - La situation sera également favorable pour les autorités françaises puisqu'il y a des Français dans les deux équipes.
QUESTION - M. le Président, M. le Premier ministre français, à quelques semaines de la présidence française de l'Union européenne, le Ministre de l'Intérieur, M. CHEVENEMENT, a fit des déclarations sur l'Allemagne qui ont peut-être été mal comprises mais qui ont choqué certains et la Présidente du Parlement européen, Mme FONTAINE, a jugé qu'il portait atteinte à la crédibilité de la politique européenne de la France.
M. le Premier Ministre, est-ce que vous désavouez ces propos, comme vous le demande Mme FONTAINE, et, M. le Président, que vous inspirent les déclarations de M. CHEVENEMENT ?
LE PREMIER MINISTRE - Cela n'a pas été un objet du sommet franco-espagnol, mais puisque cela se situe dans un cadre européen, je vais réagir brièvement. Pour dire que le ministre de l'Intérieur a expliqué sa déclaration à l'intention des médias français, comme à l'intention des médias allemands, qu'il a regretté une phrase qui avait pu être mal comprise. Je me suis réjoui, sans m'en étonner, de constater que les autorités allemandes et les médias allemands avaient réagi avec beaucoup de calme, car ils n'ont aucun doute sur la qualité de la relation franco-allemande, en particulier après Rambouillet, sur l'importance cardinale de cette relation parmi les relations bilatérales que nous nouons dans l'Union européenne. Et, ici, aussi, cette relation est vivante. Et, dans ces conditions, je pense que nous devrions nous inspirer des Allemands et ne pas en faire une question franco-française.
LE PRESIDENT - S'agissant des derniers jours, vous me permettrez de ne retenir, en ce qui concerne les relations franco-allemandes, que le caractère particulièrement chaleureux et confiant de notre rencontre de Rambouillet.
QUESTION - En vue de la présidence française, quelles sont les convergences et les divergences entre l'Espagne et la France à propos de l'élargissement de l'Union ?
LE PRESIDENT - C'est peut-être plus au Premier ministre espagnol de répondre. Il n'y a pas de divergences : nous avons la même position concernant l'élargissement.
QUESTION - Monsieur le Président, quelle est votre analyse des rapprochements que l'on observe entre mouvements indépendantistes basques des deux côtés de la frontière ? Est-ce que la collaboration entre les forces basques et d'autres milieux indépendantistes en France, je pense aux vols d'explosifs, va vous faire prendre conscience de l'importance du terrorisme espagnol et du fait qu'il concerne aussi la France ? Et allez-vous renforcer la coopération, au besoin en modifiant les législations en vigueur ?
LE PRESIDENT - Ces problèmes ont été longuement évoqués ce matin par les ministres de l'Intérieur dans l'esprit le plus positif, le Premier ministre l'a rappelé à l'instant. Je n'ai pas grand chose à dire de plus. Nous observons naturellement la situation, l'évolution des groupes et leurs relations. Toutes ces choses sont suivies attentivement par le gouvernement et par le ministre de l'Intérieur. Pour ce qui concerne le terrorisme, notre coopération est totale. Nous n'avons pas le sentiment qu'il y a un terrorisme espagnol. Nous savons très bien que le terrorisme c'est le terrorisme, et nous nous mobilisons contre le terrorisme de façon aussi efficace que possible, en liaison évidemment extrêmement étroite avec les espagnols comme il l'a été dit tout à l'heure.
Quant à la collaboration, elle peut, c'est vrai, rendre nécessaire des harmonisations de législation. Le gouvernement espagnol vient d'ailleurs de nous faire un certain nombre de demandes dont certaines portent justement sur les problèmes juridiques. Les ministres en ont parlé ce matin pour essayer de voir comment on peut harmoniser au mieux les choses afin d'être plus efficace. Tout ce que je peux dire, et le Premier ministre français l'a dit tout à l'heure avec toute l'autorité nécessaire, c'est que notre coopération est totale, sans réserve, et continuera à l'être en étant, je l'espère, de plus en plus efficace.\
Naturellement, j'ai tenu à féliciter le Premier ministre AZNAR, et son équipe, pour ses succès politiques, je pense aux dernières élections, et pour ses succès économiques, je pense à la situation brillante, actuellement, de l'Espagne dans ce domaine.
Cette Espagne qui réussit, qui réussit à l'intérieur, qui réussit en Europe, qui réussit sur la scène internationale, est pour la France depuis déjà quelques années un partenaire majeur. Elle l'est de plus en plus.
Nous avons réglé tous nos contentieux. Nous en avions d'anciens, la pêche, l'agriculture. Nos relations économiques n'ont jamais été aussi bonnes, puisque la France est aujourd'hui le premier client, le deuxième fournisseur, le deuxième investisseur de l'Espagne.
Notre coopération policière et judiciaire contre le terrorisme est exemplaire et ne cesse de se renforcer, comme l'ont montré encore tout à l'heure les réunions entre les deux ministres de l'Intérieur. Et l'Espagne peut être assurée de notre soutien dans ce domaine.
Nous évoquons maintenant, sans crispation ni difficulté, les problèmes des liaisons et des transports, avec la ferme volonté de trouver des solutions à ces problèmes, dans le respect des exigences de l'environnement et de celles de la sécurité, mais dans un dialogue tout à fait franc et positif.
Nous avons naturellement, je n'insisterai pas beaucoup puisque José Maria AZNAR l'a évoqué, parlé de l'Europe, à la fin de la présidence portugaise qui a été une excellente présidence, comme l'a montré le Conseil de Lisbonne, puis comme le montrera sans aucun doute le Conseil de Feira.
Et nous avons évoqué naturellement la présidence française. Nous avons fait un tour d'horizon qui nous a conduit à constater notre parfaite intelligence, notre parfaite harmonie pour ce qui concerne la vision de l'Europe de demain, la nécessité de prendre, sous présidence française, les mesures nécessaires pour éviter que l'Europe ne soit dans l'incapacité de prendre les initiatives nécessaires, notamment après l'élargissement. La France et l'Espagne font partie des Etats membres décidés à aller de l'avant dans la poursuite de la construction européenne, à refuser tout risque de paralysie. Il est clair que nous n'accepterons pas un accord minimal qui ne permettrait pas à l'Union de fonctionner efficacement après son élargissement.
Dans le domaine de l'Europe de la défense, je n'ai pas besoin d'être long puisque nous avons la même approche et les mêmes objectifs, notamment pour ce qui concerne le renforcement des structures des forces européennes ou la coopération en matière d'armement.
Bref, nous nous sommes bien préparés à agir dans le même sens, Espagnols et Français, lors du Conseil européen de Feira, au Portugal, naturellement, mais aussi pendant la présidence française. Je m'en réjouis et j'en remercie le Premier Ministre et le gouvernement espagnol.
LE PREMIER MINISTRE - Je m'associe naturellement aux remerciements que le Président de la République a adressés à José Maria AZNAR et au gouvernement espagnol qui nous reçoivent. Notre relation bilatérale est exceptionnellement bonne et, en outre, nous sentons que notre approche des questions européennes qui sont devant nous et qui le seront à l'occasion de la présidence française sont finalement proches. Les rapports de nos ministres, qui sont des points d'étape dans les travaux conduits de façon régulière au plan bilatéral entre nos deux pays, ont montré, aussi bien sur les problèmes de transport, les problèmes d'éducation ou les problèmes de coopération scientifique que sur les problèmes de sécurité, à quel point cette relation bilatérale est excellente.
Dans ce cadre, j'ai pu réaffirmer au Président du gouvernement espagnol notre totale solidarité et coopération dans la lutte contre le terrorisme. Les deux ministres de l'Intérieur veillent naturellement, de façon constante, et nous sommes prêts à examiner comment, dans la période qui vient, nous pouvons accentuer, concrétiser, rendre plus efficace notre coopération dans ce domaine au plan policier, comme au plan judiciaire bien sûr.
Nous avons abordé également avec le Président du gouvernement les questions liées aux liaisons transpyrénéennes. Là aussi, nos deux ministres de l'Equipement et des Transports nous ont montré que des deux côtés des Pyrénées, il y avait une volonté d'avancer dans les projets ferroviaires comme dans les projets routiers avec, c'est vrai, du côté français deux préoccupations que nous avons rappelées qui sont celles de la sécurité, après le terrible drame qui a touché le tunnel du Mont-Blanc, et les questions aussi d'environnement auxquelles les populations locales sont extrêmement sensibles.
J'ai été très heureux de constater que le Président du gouvernement espagnol était tout à fait favorable à la volonté de créer une dynamique du succès pour la conférence intergouvernementale. De ce point de vue, même si nous reconnaissons l'intérêt et l'utilité d'une réflexion à long terme sur le devenir de l'Europe, nous avons une approche pragmatique. Nous pensons que le concept de coopération renforcée peut nous permettre de faire le lien entre le court terme, les problèmes de la conférence intergouvernementale et le problème du long terme.
Au titre des coopérations renforcées, l'euro-11 est certainement un bon exemple de ce qu'il serait souhaitable de faire. La France souhaite donner plus de lisibilité, de visibilité à la conduite politique de la zone euro, parce que c'est sans doute une des façons d'affirmer la force de l'Euro.
Je crois que ces préoccupations sont partagées par le gouvernement espagnol.
L'Europe a la chance d'entrer, maintenant, dans une phase de croissance. Je pense de croissance durable. Nous devons viser à l'entretenir par nos politiques nationales, et par nos coopérations au plan européen. Et si nous sommes capables de garder cette dynamique de croissance, cela nous mettra mieux en mesure de régler les problèmes auxquels l'Europe est confrontée, que ce soient ceux de son organisation ou que ce soient ceux de l'élargissement.
Voilà l'essentiel, M. le Président de la République, M. le Président du Gouvernement, de ce que je voulais ajouter pour compléter vos interventions.
QUESTION - Y aura-t-il du retard par rapport à l'objectif affiché de 2004 en ce qui concerne le TGV Madrid-Barcelone-Perpignan ?
LE PREMIER MINISTRE - Je voudrais, Mesdames, Messieurs, confirmer qu'en ce qui concerne la ligne TVG marchandises et voyageurs, du côté français, nous ne pensons pas avoir de retard au calendrier envisagé. La procédure suit, en effet, son cours normalement, d'ici juin 2001 la déclaration d'utilité publique, d'ici la fin 2000 un appel à candidature pour la réalisation du tunnel et de la liaison ferroviaire. Et les deux ministres de l'Equipement et des Transports sont convenus de demander à la Commission intergouvernementale de fournir une évaluation de la date de mise en service effective, dont nous ne souhaitons pas qu'elle soit retardée par rapport à la perspective de 2004, mais c'est à la Commission de nous donner à cet égard les éléments plus précis.
QUESTION - Monsieur le Président, quel est votre jugement sur la situation actuelle de l'euro ?
LE PRESIDENT - Sur l'euro, je parlerai plus volontiers du relèvement, pour des raisons évidentes dues à la croissance aux Etats-Unis, du dollar. Je répète ce que j'ai eu l'occasion de dire, ce qu'ont dit les responsables français, pour ce qui nous concerne, c'est que l'euro conserve des marges d'appréciation extrêmement importantes, que nous avons totalement confiance dans cette monnaie qui est fondée, aujourd'hui, sur des caractéristiques économiques, en Europe en général, en France en particulier, positives. Et que, par conséquent, et tout à l'heure le Premier ministre l'évoquait à juste titre, il y a lieu non seulement d'exprimer sa confiance, mais probablement de le faire de façon coordonnée au sein de l'euro-11. Parce qu'effectivement, il y a là une structure qui doit émettre les signaux de confiance justifiés dans ce domaine.\
QUESTION - Monsieur le Président de la République et Monsieur le Premier ministre, je voudrais savoir si l'on peut s'attendre à un rôle-clé de la France au Liban, aujourd'hui, alors qu'il y a de très grandes difficultés dans le Liban sud. Est-ce que, par exemple, la France est prête à jouer un rôle moteur dans une force des Nations Unies au Sud-Liban ?
Et M. José Maria AZNAR, demain à Paris, de quel côté votre coeur sera-t-il pour le match de football ?
LE PRESIDENT - Tout ce qui va dans le sens de la paix au Moyen-Orient a l'appui des autorités françaises. Cela va de soi. Aujourd'hui, nous observons le retrait annoncé par les Israéliens de leurs forces dans le Liban sud. Notre préoccupation, c'est que ce retrait puisse se faire de la façon la plus calme possible, en évitant toute provocation. C'est naturellement au conseil de sécurité de décider des initiatives qui doivent être prises, tant pour ce qui concerne les frontières - où sont-elles exactement ? - que pour ce qui concerne la gestion de la force de l'ONU que l'on appelle la FINUL. Et, bien entendu, nous sommes en contact permanent avec le secrétaire général des Nations Unies dans ces différents domaines.
Nous avons mis toute notre intervention pour engager chacun au calme et à la sérénité. Nous souhaitons vivement que la Syrie, qui est un pays avec lequel nous avons de très bonnes relations et qui ne doit en aucun cas être isolé, comprenne que son intérêt n'est naturellement pas de s'associer aux opérations de sécurité à l'égard de la frontière d'Israël, mais de ne rien faire qui puisse, à un titre ou à un autre, être interprété comme, je dirais, un peu une provocation, qu'il s'agisse des actions des milices résistantes, qu'il s'agisse des camps palestiniens qui sont actuellement au Liban, qu'il s'agisse de la capacité pour le gouvernement libanais de prendre les mesures de déploiement des moyens nécessaires, civils et militaires, pour la gestion des territoires libérés.
Pour tout cela, il faut être raisonnable. Il faut que le Liban puisse prendre des engagements de la même nature, et notamment celui de gérer convenablement sa frontière et son territoire, son territoire acquis aujourd'hui après le retrait israélien. Il faut qu'Israël, bien entendu, respecte au pied de la lettre les exigences liées à la résolution 425. C'est essentiel. Pour ce qui concerne la nature du retrait sur terre, sur mer et dans les airs, pour ce qui concerne la frontière elle-même, tout ceci doit être constaté par le secrétaire général de l'ONU et le secrétariat général.
Dans les prochaines heures ou jours, le secrétaire général, ou son représentant, iront certainement sur place pour s'assurer de la part des trois gouvernements correspondants que ces conditions peuvent être remplies. Si elles le sont, le secrétaire général proposera un aménagement de la FINUL. Il proposera d'abord de maintenir la FINUL, dont vous savez que théoriquement elle termine son mandat le 1er juillet, et il proposera probablement un aménagement de la FINUL. Et j'imagine que parmi les pays auxquels il s'adressera, il y aura la France. Eh bien nous verrons. Nous n'avons pas encore pris de décision. Nous ne pouvons pas prendre de décision avant que l'on nous fasse des propositions. Et la seule instance qui peut faire des propositions, c'est le secrétaire général des Nations Unies. Donc nous attendons.
Il va de soi que si les conditions que je viens de rappeler tout à l'heure sont remplies, si la FINUL, par conséquent, doit avoir une mission classique et traditionnelle des opérations de l'ONU, alors la France examinera de façon très ouverte et très compréhensive les demandes qui lui seront faites. Voilà où nous en sommes.
LE PREMIER MINISTRE - La situation sera également favorable pour les autorités françaises puisqu'il y a des Français dans les deux équipes.
QUESTION - M. le Président, M. le Premier ministre français, à quelques semaines de la présidence française de l'Union européenne, le Ministre de l'Intérieur, M. CHEVENEMENT, a fit des déclarations sur l'Allemagne qui ont peut-être été mal comprises mais qui ont choqué certains et la Présidente du Parlement européen, Mme FONTAINE, a jugé qu'il portait atteinte à la crédibilité de la politique européenne de la France.
M. le Premier Ministre, est-ce que vous désavouez ces propos, comme vous le demande Mme FONTAINE, et, M. le Président, que vous inspirent les déclarations de M. CHEVENEMENT ?
LE PREMIER MINISTRE - Cela n'a pas été un objet du sommet franco-espagnol, mais puisque cela se situe dans un cadre européen, je vais réagir brièvement. Pour dire que le ministre de l'Intérieur a expliqué sa déclaration à l'intention des médias français, comme à l'intention des médias allemands, qu'il a regretté une phrase qui avait pu être mal comprise. Je me suis réjoui, sans m'en étonner, de constater que les autorités allemandes et les médias allemands avaient réagi avec beaucoup de calme, car ils n'ont aucun doute sur la qualité de la relation franco-allemande, en particulier après Rambouillet, sur l'importance cardinale de cette relation parmi les relations bilatérales que nous nouons dans l'Union européenne. Et, ici, aussi, cette relation est vivante. Et, dans ces conditions, je pense que nous devrions nous inspirer des Allemands et ne pas en faire une question franco-française.
LE PRESIDENT - S'agissant des derniers jours, vous me permettrez de ne retenir, en ce qui concerne les relations franco-allemandes, que le caractère particulièrement chaleureux et confiant de notre rencontre de Rambouillet.
QUESTION - En vue de la présidence française, quelles sont les convergences et les divergences entre l'Espagne et la France à propos de l'élargissement de l'Union ?
LE PRESIDENT - C'est peut-être plus au Premier ministre espagnol de répondre. Il n'y a pas de divergences : nous avons la même position concernant l'élargissement.
QUESTION - Monsieur le Président, quelle est votre analyse des rapprochements que l'on observe entre mouvements indépendantistes basques des deux côtés de la frontière ? Est-ce que la collaboration entre les forces basques et d'autres milieux indépendantistes en France, je pense aux vols d'explosifs, va vous faire prendre conscience de l'importance du terrorisme espagnol et du fait qu'il concerne aussi la France ? Et allez-vous renforcer la coopération, au besoin en modifiant les législations en vigueur ?
LE PRESIDENT - Ces problèmes ont été longuement évoqués ce matin par les ministres de l'Intérieur dans l'esprit le plus positif, le Premier ministre l'a rappelé à l'instant. Je n'ai pas grand chose à dire de plus. Nous observons naturellement la situation, l'évolution des groupes et leurs relations. Toutes ces choses sont suivies attentivement par le gouvernement et par le ministre de l'Intérieur. Pour ce qui concerne le terrorisme, notre coopération est totale. Nous n'avons pas le sentiment qu'il y a un terrorisme espagnol. Nous savons très bien que le terrorisme c'est le terrorisme, et nous nous mobilisons contre le terrorisme de façon aussi efficace que possible, en liaison évidemment extrêmement étroite avec les espagnols comme il l'a été dit tout à l'heure.
Quant à la collaboration, elle peut, c'est vrai, rendre nécessaire des harmonisations de législation. Le gouvernement espagnol vient d'ailleurs de nous faire un certain nombre de demandes dont certaines portent justement sur les problèmes juridiques. Les ministres en ont parlé ce matin pour essayer de voir comment on peut harmoniser au mieux les choses afin d'être plus efficace. Tout ce que je peux dire, et le Premier ministre français l'a dit tout à l'heure avec toute l'autorité nécessaire, c'est que notre coopération est totale, sans réserve, et continuera à l'être en étant, je l'espère, de plus en plus efficace.\