10 mai 1999 - Seul le prononcé fait foi
Allocution de M. Jacques Chirac, Président de la République, sur les relations entre la France et la Finlande, la cooopération économique et culturelle, l'élargissement de l'Union européenne et les relations de l'Union européenne et de la Russie, Helsinki le 10 mai 1999.
Monsieur le Président, Mon cher Ami,
Madame,
Merci Monsieur le Président pour votre si chaleureux accueil. Mon épouse, ma délégation et moi-même ne l'oublierons pas.
Il y a bientôt quarante ans, recevant à Paris le Président Kekkonen, le Général de Gaulle évoquait les affinités entre nos deux peuples. " Nous, Français, déclarait-il, nous sentons naturellement attirés par le caractère solide autant qu'ardent de vos compatriotes. Nous admirons votre effort social bâti sur la fraternité. Nous mesurons le grand courage des vôtres pour demeurer des hommes libres. Bref, ajoutait-il, nous, Français, rendons hommage à un peuple qui a su s'établir, s'affermir et se maintenir en dépit de tant d'obstacles ".
Exemplaire, la Finlande l'est en effet par son destin. Elle a su, depuis deux siècles, contre vents et marées, contre les ambitions de ses puissants voisins, maintenir le cap de l'indépendance et de la démocratie. Exemplaire, la Finlande l'est par l'âme de son peuple qui sut marier dialogue et fermeté, se faire respecter et assurer sa liberté naguère encore menacée.
Exemplaire, la Finlande l'est par sa pratique démocratique. Dès l'aube de ce siècle, la première en Europe, elle adoptait, au plein sens du terme, le suffrage universel en appelant les femmes à voter. Exemplaire, ce constant recours à la démocratie, comme instinctif, pour sans cesse refonder la cohésion nationale, pour sans cesse, dans les moments difficiles, tremper l'esprit d'indépendance et de résistance de tout un peuple.
Ténacité mais aussi sens aigu des réalités et souci de ne jamais fermer la porte à la négociation : ces qualités de votre peuple qui sont aussi les vôtres, Monsieur le Président, et dont vous aurez besoin ces prochains temps, forcent l'admiration. Au moment où la Finlande s'apprête à prendre la présidence de l'Union européenne, elles sont une chance pour l'Europe.
L'Europe des hommes et des libertés, de la sécurité et de la justice d'abord. Vous en avez fait l'une de vos priorités. Et ce sera l'un des principaux thèmes débattus en octobre prochain au Conseil européen de Tampere.
Mais je pense aussi à l'élargissement de l'Union. De puissantes solidarités vous unissent, depuis bientôt un millénaire, depuis les brillantes heures de la Hanse, à vos voisins Baltes et Polonais, tous candidats à l'adhésion. Elles donnent tout son sens à votre grand projet, à cette dimension septentrionale que vous souhaitez conférer à notre Union. Et il vous reviendra de faire progresser la réforme de nos institutions communautaires pour ouvrir la voie de l'élargissement.
Je pense aussi au développement des relations de l'Union avec la Russie. Hier, la Finlande, sans rien céder sur les principes et sur son intérêt national, était le trait d'union de notre continent déchiré. Ici, à Helsinki, la Conférence sur la Sécurité et la Coopération en Europe a marqué le tournant des relations Est-Ouest.
Dans un mois, à Cologne, l'Union européenne adoptera sa stratégie vers la Russie. Et ce sera la responsabilité de votre présidence de lui donner toute sa dimension, celle d'un vrai partenariat. Les enjeux sont essentiels : coopération politique, économique et culturelle, sécurité de notre continent, protection de son environnement.
Il vous reviendra enfin, Monsieur le Président, de lancer cette Europe de la défense dont la tragédie qui se joue en ce moment même à nos portes, dans l'ex-Yougoslavie, nous rappelle l'urgence. Nous en avons parlé une partie importante de l'après-midi. Ce qui se passe au Kosovo, aucun Européen digne de ce nom ne peut l'accepter. Face à la barbarie, l'Alliance atlantique a su agir avec détermination. L'Europe a fait preuve d'une solidarité sans faille. Elle doit maintenant tirer les leçons de cette crise. Dès le mois prochain, à Cologne, nous devrons dessiner les grandes orientations d'un vrai projet de défense pour notre Union. Mais d'ici là, Monsieur le Président, nous savons que nous pouvons compter sur votre compétence, vos qualités de diplomate et votre coeur pour nous aider à sortir de la crise du Kosovo.
Ces questions, sur lesquelles Finlandais et Français sont d'accord, ont été au centrec de nos entretiens. Et nous sommes convenus de renforcer une concertation politique prometteuse.
Notre dialogue, ce sont aussi nos entreprises qui le portent. Depuis un quart de siècle, et l'accord d'association vous liant à la Communauté européenne, depuis surtout l'entrée de votre pays dans l'Union en 1995, nos entrepreneurs ont appris à se connaître et à s'apprécier. En quatre ans seulement, nos échanges commerciaux ont augmenté de plus de 60 %. Ce soir, j'appelle les investisseurs et les industriels français à s'engager davantage à vos côtés et à s'associer à la croissance vigoureuse de l'économie finlandaise.
Il y a quelques mois, nos deux Premiers Ministres ont décidé d'étendre en priorité notre coopération aux nouvelles technologies de l'information, un domaine où vous vous êtes affirmés au premier rang mondial. Un domaine où excellent nos chercheurs, nos scientifiques et nos industriels. En travaillant davantage ensemble, nous contribuerons à édifier cette " société mondiale de l'information " qui doit favoriser le progrès économique mais aussi la diversité culturelle du monde.
Cette diversité, nous la cultivons depuis toujours à travers le dialogue de nos jeunes, de nos intellectuels, de nos artistes. Il y a déjà plusieurs siècles, nos universités de Turku et de la Sorbonne nouaient leurs premiers liens. Aujourd'hui comme hier les Français accueillent avec plaisir vos interprètes et vos créateurs, vos artistes, vos sportifs. Nous connaissons et admirons, depuis longtemps déjà, l'oeuvre puissante de Mika Waltari. Chaque film d'Aki Kaurismaki est salué en France. Le mois dernier, la soprano Soile Isokoski triomphait à Paris dans une superbe interprétation des Mélodies de Sibellius. Permettez-moi de souligner la présence ici de notre ami commun Ari Vatanen, si populaire dans notre pays comme dans le vôtre.
Notre dialogue ce sont enfin nos ressortissants expatriés qui le font progresser jour après jour. Et puisque vous avez bien voulu ce soir inviter les représentants de la communauté française, vous me permettrez, Monsieur le Président, de vous recommander chaleureusement mes compatriotes, responsables économiques, coopérants, universitaires, chercheurs, présents dans toutes les régions de Finlande, qui ont choisi de mettre leurs compétences au service de l'amitié entre nos deux pays. Qu'ils en soient vivement remerciés.
Je voudrais maintenant, Monsieur le Président, lever à mon tour mon verre. Je le lève en votre honneur et en l'honneur de Madame Martti Ahtisaari à qui je présente mes très respectueux et affectueux hommages.
Je le lève en l'honneur des hautes personnalités finlandaises et françaises qui nous entourent ce soir. Je le lève à la santé du peuple finlandais auquel je souhaite bonheur et prospérité. Je bois à l'amitié entre la Finlande et la France et, Monsieur le Président, au succès de votre future présidence européenne.
Madame,
Merci Monsieur le Président pour votre si chaleureux accueil. Mon épouse, ma délégation et moi-même ne l'oublierons pas.
Il y a bientôt quarante ans, recevant à Paris le Président Kekkonen, le Général de Gaulle évoquait les affinités entre nos deux peuples. " Nous, Français, déclarait-il, nous sentons naturellement attirés par le caractère solide autant qu'ardent de vos compatriotes. Nous admirons votre effort social bâti sur la fraternité. Nous mesurons le grand courage des vôtres pour demeurer des hommes libres. Bref, ajoutait-il, nous, Français, rendons hommage à un peuple qui a su s'établir, s'affermir et se maintenir en dépit de tant d'obstacles ".
Exemplaire, la Finlande l'est en effet par son destin. Elle a su, depuis deux siècles, contre vents et marées, contre les ambitions de ses puissants voisins, maintenir le cap de l'indépendance et de la démocratie. Exemplaire, la Finlande l'est par l'âme de son peuple qui sut marier dialogue et fermeté, se faire respecter et assurer sa liberté naguère encore menacée.
Exemplaire, la Finlande l'est par sa pratique démocratique. Dès l'aube de ce siècle, la première en Europe, elle adoptait, au plein sens du terme, le suffrage universel en appelant les femmes à voter. Exemplaire, ce constant recours à la démocratie, comme instinctif, pour sans cesse refonder la cohésion nationale, pour sans cesse, dans les moments difficiles, tremper l'esprit d'indépendance et de résistance de tout un peuple.
Ténacité mais aussi sens aigu des réalités et souci de ne jamais fermer la porte à la négociation : ces qualités de votre peuple qui sont aussi les vôtres, Monsieur le Président, et dont vous aurez besoin ces prochains temps, forcent l'admiration. Au moment où la Finlande s'apprête à prendre la présidence de l'Union européenne, elles sont une chance pour l'Europe.
L'Europe des hommes et des libertés, de la sécurité et de la justice d'abord. Vous en avez fait l'une de vos priorités. Et ce sera l'un des principaux thèmes débattus en octobre prochain au Conseil européen de Tampere.
Mais je pense aussi à l'élargissement de l'Union. De puissantes solidarités vous unissent, depuis bientôt un millénaire, depuis les brillantes heures de la Hanse, à vos voisins Baltes et Polonais, tous candidats à l'adhésion. Elles donnent tout son sens à votre grand projet, à cette dimension septentrionale que vous souhaitez conférer à notre Union. Et il vous reviendra de faire progresser la réforme de nos institutions communautaires pour ouvrir la voie de l'élargissement.
Je pense aussi au développement des relations de l'Union avec la Russie. Hier, la Finlande, sans rien céder sur les principes et sur son intérêt national, était le trait d'union de notre continent déchiré. Ici, à Helsinki, la Conférence sur la Sécurité et la Coopération en Europe a marqué le tournant des relations Est-Ouest.
Dans un mois, à Cologne, l'Union européenne adoptera sa stratégie vers la Russie. Et ce sera la responsabilité de votre présidence de lui donner toute sa dimension, celle d'un vrai partenariat. Les enjeux sont essentiels : coopération politique, économique et culturelle, sécurité de notre continent, protection de son environnement.
Il vous reviendra enfin, Monsieur le Président, de lancer cette Europe de la défense dont la tragédie qui se joue en ce moment même à nos portes, dans l'ex-Yougoslavie, nous rappelle l'urgence. Nous en avons parlé une partie importante de l'après-midi. Ce qui se passe au Kosovo, aucun Européen digne de ce nom ne peut l'accepter. Face à la barbarie, l'Alliance atlantique a su agir avec détermination. L'Europe a fait preuve d'une solidarité sans faille. Elle doit maintenant tirer les leçons de cette crise. Dès le mois prochain, à Cologne, nous devrons dessiner les grandes orientations d'un vrai projet de défense pour notre Union. Mais d'ici là, Monsieur le Président, nous savons que nous pouvons compter sur votre compétence, vos qualités de diplomate et votre coeur pour nous aider à sortir de la crise du Kosovo.
Ces questions, sur lesquelles Finlandais et Français sont d'accord, ont été au centrec de nos entretiens. Et nous sommes convenus de renforcer une concertation politique prometteuse.
Notre dialogue, ce sont aussi nos entreprises qui le portent. Depuis un quart de siècle, et l'accord d'association vous liant à la Communauté européenne, depuis surtout l'entrée de votre pays dans l'Union en 1995, nos entrepreneurs ont appris à se connaître et à s'apprécier. En quatre ans seulement, nos échanges commerciaux ont augmenté de plus de 60 %. Ce soir, j'appelle les investisseurs et les industriels français à s'engager davantage à vos côtés et à s'associer à la croissance vigoureuse de l'économie finlandaise.
Il y a quelques mois, nos deux Premiers Ministres ont décidé d'étendre en priorité notre coopération aux nouvelles technologies de l'information, un domaine où vous vous êtes affirmés au premier rang mondial. Un domaine où excellent nos chercheurs, nos scientifiques et nos industriels. En travaillant davantage ensemble, nous contribuerons à édifier cette " société mondiale de l'information " qui doit favoriser le progrès économique mais aussi la diversité culturelle du monde.
Cette diversité, nous la cultivons depuis toujours à travers le dialogue de nos jeunes, de nos intellectuels, de nos artistes. Il y a déjà plusieurs siècles, nos universités de Turku et de la Sorbonne nouaient leurs premiers liens. Aujourd'hui comme hier les Français accueillent avec plaisir vos interprètes et vos créateurs, vos artistes, vos sportifs. Nous connaissons et admirons, depuis longtemps déjà, l'oeuvre puissante de Mika Waltari. Chaque film d'Aki Kaurismaki est salué en France. Le mois dernier, la soprano Soile Isokoski triomphait à Paris dans une superbe interprétation des Mélodies de Sibellius. Permettez-moi de souligner la présence ici de notre ami commun Ari Vatanen, si populaire dans notre pays comme dans le vôtre.
Notre dialogue ce sont enfin nos ressortissants expatriés qui le font progresser jour après jour. Et puisque vous avez bien voulu ce soir inviter les représentants de la communauté française, vous me permettrez, Monsieur le Président, de vous recommander chaleureusement mes compatriotes, responsables économiques, coopérants, universitaires, chercheurs, présents dans toutes les régions de Finlande, qui ont choisi de mettre leurs compétences au service de l'amitié entre nos deux pays. Qu'ils en soient vivement remerciés.
Je voudrais maintenant, Monsieur le Président, lever à mon tour mon verre. Je le lève en votre honneur et en l'honneur de Madame Martti Ahtisaari à qui je présente mes très respectueux et affectueux hommages.
Je le lève en l'honneur des hautes personnalités finlandaises et françaises qui nous entourent ce soir. Je le lève à la santé du peuple finlandais auquel je souhaite bonheur et prospérité. Je bois à l'amitié entre la Finlande et la France et, Monsieur le Président, au succès de votre future présidence européenne.