14 juin 1991 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse conjointe de M. François Mitterrand, Président de la République, et M. Vaclav Havel, président de la République tchécoslovaque, notamment sur le rôle des Etats-Unis dans la construction de l'Europe, la notion géographique de l'Europe et l'éventuelle intégration de la Tchécoslovaquie à l'OTAN, Prague, le 14 juin 1991.

LE PRESIDENT VACLAV HAVEL.- Mesdames et messieurs,
- Permettez-moi de vous souhaiter très cordialement la bienvenue à cette conférence de presse organisée à l'occasion des Assises de la Confédération européenne qui vient de se terminer et à l'occasion de la visite du Président Mitterrand qui a participé à la dernière journée des débats des Assises.
- Je pense qu'il n'est pas nécessaire que je résume les débats des Assises, vous avez certainement vous-mêmes suivi de très près leur déroulement. Permettez-moi néanmoins de dire que, personnellement, j'en ai tiré une très bonne impression. J'ai l'impression que ces Assises constituent un premier pas vers une nouvelle Europe unie. Il serait magnifique qu'elles revêtent la même importance que la Conférence de La Haye que le Président Mitterrand a si bien évoquée dans son intervention et qu'elles constituent une plate-forme dans laquelle nait une idée qui va graduellement se mettre en oeuvre.
- La Tchécoslovaquie est déterminée à continuer sa politique dans l'esprit des conclusions des différents groupes de travail et dans l'esprit général de ces Assises.
- Aujourd'hui, après l'arrivée du Président Mitterrand, nous avons consacré notre déjeuner aux différents problèmes des Assises de la Confédération européenne, mais nous avons également évoqué des questions bilatérales. Nous avons constaté que les travaux en vue de mettre au point un nouvel accord entre la France et la Tchécoslovaquie se déroulent très bien : le texte ou le projet de texte est déjà presque terminé et sera signé au moment opportun. Ce sera probablement le premier des accords que la Tchécoslovaquie démocratique concluera avec un autre pays. Je pense que vos questions seront à juste titre adressées surtout au Président Mitterrand : il est notre invité d'honneur et c'est lui qui a formulé, pour la première fois, l'idée de la Confédération européenne. Il est également celui qui a proposé que ces Assises se tiennent ici à Prague.
- LE PRESIDENT.- Je vous remercie. Je tiens à dire le plaisir que j'ai d'être à Prague, une nouvelle fois à Prague, et le plaisir d'avoir pu prendre part à une réunion que je crois importante. Je tiens, cher Président, à vous remercier : l'hospitalité de la Tchécoslovaquie est toujours une bonne hospitalité, très agréable pour un Français.\
QUESTION.- Pourriez-vous clarifier l'un comme l'autre le rôle et la place des Etats-Unis dans tout ce processus, qu'il s'agisse de la réalisation des projets concrets ou de la future confédération ?
- LE PRESIDENT.- Peut-être pourriez-vous nous aider à écrire le livre en 14 volumes que nécessiterait la réponse à vous apporter !.. Tenons-nous en à un rapide résumé, si vous voulez.
- Disons simplement que les intérêts des Etats-Unis et de l'Europe - en tout cas de l'Europe jusqu'ici occidentale, attenant l'Europe centrale et orientale - ces intérêts communs sont multiples et puissants. Dans toutes les batailles pour la liberté, les Etats-Unis et les pays libres d'Europe ont toujours été associés. C'est dire qu'il n'y a aucune raison d'établir a priori une séparation, sauf lorsque la géographie l'impose. Il n'est pas évident que les Américains soient des Européens autrement que par leurs origines. Mais, en même temps, il est évident que nous ne pouvons pas oublier tout ce qui nous est commun et qui est considérable, ni la place considérable des Etats-Unis dans les choix d'aujourd'hui sur la planète et particulièrement sur notre continent.
- Si je voulais aller jusqu'au paradoxe ou jusqu'à l'évidence première, je dirais que l'Europe pourrait se faire sans les Américains mais qu'il serait difficile de la faire sans les Européens. Si elle se fait avec le concours des deux, c'est très bien. Qu'est-ce qui occupera les Européens à mesure que le temps passera ? Ce sera de savoir comment régler leurs problèmes de voisinage. Ils se sentiront naturellement plus proches entre eux, au moins par la géographie, qu'avec les pays qui se trouvent au-delà d'un océan large de 5000 kilomètres.
- Dans tout ce qui touche à la liberté, à la sécurité au devenir de notre civilisation, il faut que nous soyons très unis.
- Il faut que nous soyons unis pour tout ce qui touche à l'organisation pratique, aux moyens de communication, ou à l'environnement par exemple. Ce sont deux questions qui ont été traitées parmi les six qui ont fait l'objet de commissions spécialisées au cours de ces trois journées. Il est évident que si on examine le problème du chemin de fer et des autoroutes, la première pensée qui vient à l'esprit, c'est de savoir comment cela va se passer entre tel et tel pays de l'Ouest ou tel ou tel pays de l'Europe du Centre ou de l'Est et pourquoi pas du Nord ou du Sud. C'est plus commode quand même que d'établir une liaison directe par TGV - même si cela commence bien au Texas - entre Paris ou Madrid et San Francisco.
- M. VACLAV HAVEL.- Je peux difficilement imaginer ce projet sans le concours des Etats-Unis et du Canada. Je peux difficilement imaginer le continent européen sans la coopération avec ces deux pays, parce que la civilisation, la coopération sont tout à fait naturelles.\
QUESTION.- Quelle est votre idée concrète concernant l'entrée des pays au sein de la Communauté ? Quand est-ce que cela aura lieu ?
- Monsieur le Président Mitterrand, que pensez-vous de la langue française, de sa diffusion en Tchécoslovaquie, du système éducatif français et de sa réalisation en Tchécoslovaquie ?
- M. VACLAV HAVEL.- Nous aimerions conclure un accord qui serait avantageux pour nous, ce qui signifie que dans la première étape, cela doit être plus ou moins asymétrique. Dans une certaine mesure, je serais content si la perspective d'une participation à part égale était envisagée. Vers la fin de notre millénaire, nous deviendrons donc membre des Communautés européennes à part entière.
- LE PRESIDENT.- Je me suis exprimé tout à l'heure sur ce point. Le schéma idéal c'est que la Communauté, telle qu'elle existe ou plutôt telle qu'elle devient avec l'unité prévisible sur le plan économique, monétaire et politique, recouvre finalement toute l'Europe démocratique. C'est l'idéal. Si ce chemin devait être le plus court, alors là, ce serait le meilleur. Et tout le reste nous paraîtrait bien faible à côté de cette perspective. Le problème intéresse chacun des pays qui souhaiterait y entrer. Serait-il en mesure de le faire sans en supporter des conséquences pendant quelques années ? La Communauté doit examiner s'il y aura un treizième membre, ce que je souhaite, un quatorzième et dans quelles conditions. C'est cela le bon chemin. D'ailleurs, je ferai observer à cet égard, à M. Haski, que dans la Communauté, il y a douze pays, mais pour l'instant, dans les douze, ne figurent pas les Etats-Unis d'Amérique. Ce qui veut dire que les pays qui entreront dans la Communauté auront certainement une très bonne coopération avec les Etats-Unis, ce que je souhaite aussi, mais ne seront pas dans le même ensemble organique.\
LE PRESIDENT.- Quant à l'éducation, à l'enseignement du français en Tchécoslovaquie, on trouve ici un terrain favorable et amical. On m'a précisément parlé de l'école française, à Prague, qui est trop petite, qui a besoin de locaux nouveaux. L'ambition des enseignants, de notre diplomatie en même temps que de notre ministère de la culture, c'est d'en faire un point fort. Là et dans beaucoup d'autres endroits. Peut-on prévoir de meilleurs crédits pour l'élargissement de cet établissement, plus de place ? On me cite même le cas de membres du gouvernement tchécoslovaque qui n'ont pas pu mettre leurs enfants alors qu'ils le souhaitaient, par manque de place. Je peux vous dire que c'est une école qui regroupe à peu près 150 enfants et que, si l'on pouvait doubler, ce serait très bien.
- M. VACLAV HAVEL.- Nous voulons développer le maximum d'efforts pour que le lycée français soit plus grand, pour qu'on puisse avoir davantage de place que celle que nous avons aujourd'hui, dans la rue Stepanska.\
QUESTION.- Venant d'Helsinki, je ne peux pas m'empêcher de vous demander, pour quelle raison avez-vous préféré traiter tous ces sujets dans une sorte de nouvelle structure au lieu de la CSCE élargie ? La CSCE a quand même déjà fait ses preuves !
- LE PRESIDENT.- Je suis très favorable à la CSCE et je crois que la France a beaucoup contribué à ce que le dernier acte de ce que l'on pourrait appeler "le processus d'Helsinki" se réalise dans de bonnes conditions, à Paris, l'an dernier.
- Ceux qui ont fait Helsinki ont eu une idée riche d'avenir à l'époque. Il faut admettre qu'un certain nombre de terrains évoqués à Helsinki sont restés en jachère tandis que d'autres, au contraire, ont fait un excellent progrès : la réconciliation des blocs militaires, la promesse de continuer dans la Charte, le désarmement et les conditions de sécurité nouvelles pour l'Europe. Tout cela prend bonne tournure grâce à Helsinki.
- Vous savez qu'il faut qu'il y ait l'unanimité des trente-quatre si on doit traiter tous les problèmes dont nous avons parlé. Voyez les difficultés que nous avons au sein de la Communauté, parce qu'il reste encore un secteur trop vaste, où l'unanimité est exigée alors qu'il faudrait davantage de votes ou de décisions acquises à la majorité. L'instrument de la CSCE ne répond donc pas exactement à la question que nous souhaitons résoudre. Maintenant, si elle se transforme, moi je ne demande rien. Si de son côté la Communauté veut devenir celle de l'Europe démocratique tout entière, on ne dira pas Douze mais on dira l'Europe des Trente. Malgré tout je pense que la CSCE a surtout pour objet de régler les problèmes d'armement et de sécurité, ce qui explique d'ailleurs le rôle absolument nécessaire que remplissent dans cette conférence les Etats-Unis d'Amérique et le Canada.\
QUESTION.- Une question pour les deux présidents. Sur la carte, il reste une ambiguïté avec ce dégradé de couleurs et je voudrais vous demander, à l'un et à l'autre, à vos yeux, où s'arrêtent exactement les frontières de l'Europe, je veux dire vers l'est ?
- LE PRESIDENT.- On pourrait réunir un congrès de géographes, non ?... et d'historiens ! J'ai appris cela à l'école communale et je ne l'ai pas oublié.
- M. VACLAV HAVEL.- L'emblème de cette conférence s'est un peu dessiné, n'est-ce pas ? Tout nous prouve que sans aucun doute l'Europe, ce sont les républiques de l'Union soviétique sui se trouvent sur le continent européen, les pays baltiques, l'Ukraine, la Biélorussie et puis encore la moitié de la fédération de la Russie qui se trouve sur le territoire européen. C'est un Etat, oui, mais ce n'est pas inhabituel qu'un Etat soit à moitié sur un continent et que l'autre moitié se trouve sur un autre continent. Cela concerne aussi d'ailleurs la Turquie, n'est-ce pas, par exemple ?
- LE PRESIDENT.- Il faut distinguer quand même dans votre question, dans l'ambiguïté de votre question, pour reprendre vos propres termes. Si vous me demandez ce qu'est l'Europe, je vous réponds, celle de la géographie. Si vous me dites, quelle pourrait être l'Europe à laquelle vous travaillez pour l'instant, je complète en disant l'Europe de la géographie mais avec un contenu démocratique. S'ils ne sont pas démocratiques, ils s'excluent de la construction, ils ne s'excluent pas de l'Europe.\
QUESTION.- C'est une question que je voudrais poser aux deux présidents : quelle leçon tirez-vous, puisque nous parlons de l'Union soviétique, de l'élection de M. Eltsine ?
- M. VACLAV HAVEL.- Aujourd'hui à midi, j'ai adressé un télégramme de félicitations à M. Eltsine à l'occasion de son élection. Par coïncidence, j'ai eu l'occasion de parler avec lui, il y a quelques temps parce qu'il a effectué une visite à Prague. Après de longs entretiens ouverts avec M. Eltsine, je suis arrivé à la conclusion que ce sera un bon Président de la Fédération russe.
- LE PRESIDENT.- Pour une fois qu'il y a des élections libres au suffrage universel en Union soviétique, on ne va pas bouder notre plaisir. Mais ce n'est pas à nous de choisir, je n'ai pas été convoqué pour les urnes. Les Russes, ils choisissent qui ils veulent. Ils ont choisi celui qui leur convenait et je lui souhaite une pleine réussite. C'est d'ailleurs ce que je lui ai moi-même télégraphié.\
QUESTION.- L'Europe centrale se trouve aujourd'hui dans un vide de sécurité, vu la désintégration rapide de l'Union soviétique, nous avons toutes les raisons à nous préoccuper de cela. On m'a dit à maintes reprises que l'on ne peut pas adhérer tout de suite à l'OTAN, cependant ce que l'OTAN a des structures politiques et militaires, et la France qui ne fait pas partie des structures militaires fait partie de structures politiques, tout en se sentant en parfaite sécurité. Ne pensez-vous pas que cela pourrait être une formule pour l'Europe centrale, nous permettant de se sentir sous cette panoplie de sécurité en même temps en n'ayant pas des troupes sur le territoire, ce qui ne provoquerait pas donc l'Union soviétique ?
- LE PRESIDENT.- C'est une idée. Pour bien préciser la position de la France, la France fait partie de l'Alliance atlantique et de ses implications militaires. Simplement, elle ne relève pas du commandement intégré, elle a une stratégie autonome et elle s'exerce dans le cadre de l'Alliance. Et moi, je connais surtout cette alliance sous sa forme militaire étant entendu qu'il n'y a d'alliance militaire que parce qu'il y a communauté de vues politiques et une grande amitié entre, notamment le pays le plus important de cette alliance les Etats-Unis d'Amérique et la France. J'entends la maintenir et la renforcer. Mais nous n'entrons pas dans le commandement intégré, vous aviez raison de le dire.
- Quant au rôle politique de l'OTAN, là-dessus, nous souhaitons avancer prudemment. Est-ce que la formule doit convenir à la Tchécoslovaquie ? Je suis incapable de répondre et j'ai le sentiment que c'est votre Président qui a toute compétence dans ce domaine. Je ne veux en rien peser sur le choix des Tchécoslovaques. Il n'y a déjà plus de Pacte de Varsovie et c'est vrai qu'il y a des déshérences dont vous avez le droit de vous inquiéter. Est-ce que votre pays et d'autres vont adhérer à l'OTAN ? C'est une discussion politique et non pas militaire, avec des conséquences militaires, une discussion politique avec des conséquences militaires. Elle ne m'a pas encore été posée. Si elle m'est posée j'y réfléchirai, mais a priori, je considère la Tchécoslovaquie comme étant aussi attachée à nos idéaux que nous le sommes nous-mêmes. Il n'y a donc pas de difficultés de principe. Vous avez d'ailleurs ajouté quelque chose qui m'a paru très sage, qui consisterait à trouver une formule qui ne permettrait pas à l'Union soviétique d'avoir le sentiment d'être fermé militairement. Que toute la part de l'Europe qu'elle contrôlait ne soit pas désormais une zone qui, même à tort, lui paraîtrait menaçante. Mais je le répète, seule, la Tchécoslovaquie peut répondre à cette question.
- M. VACLAV HAVEL.- Pour ce qui est de l'avis de la Tchécoslovaquie à ce sujet, tout d'abord, il faut dire que l'OTAN n'est pas une association à laquelle il est possible d'envoyer une demande d'affiliation qui est automatiquement étudiée et acceptée. Ce n'est pas aussi facile que vous semblez l'indiquer, nous avons eu des entretiens avec beaucoup d'hommes politiques. Eh bien, quand il était question du problème que vous avez évoqué, c'est-à-dire une certaine appartenance aux organes politiques et non pas militaires, une idée similaire mais un peu atténuée, à saisir une sorte d'association a été envisagée. Même pour cela la situation n'est pas encore mûre pour l'instant.
- LE PRESIDENT.- Les Français se sentent très solidaires de la Tchécoslovaquie, dès lors qu'il s'agirait pour elle d'un problème de sécurité.\
QUESTION.- Nous parlons maintenant de confédération mais chez nous en Tchécoslovaquie, il y a certains problèmes que sûrement vous connaissez, ce sont ceux entre les Tchèques et les Slovaques. Que pensez-vous, que se passerait-il si la Tchécoslovaquie se divisait en deux Etats.
- LE PRESIDENT.- J'ai déjà exprimé mon opinion sur ce problème mais d'une façon plus générale. Actuellement, on voit bien la Yougoslavie, par exemple. J'ai toujours répété et je répéterai là que je souhaite que soit préservée l'unité des Etats et qu'en même temps soient garantis les droits des minorités. On peut faire un certain nombre de distinctions, j'en ferai l'économie. J'en citerai simplement une : la France, par exemple, n'a jamais reconnu l'annexion des pays Baltes. Mais je n'ai pas l'impression que la Slovaquie soit, en tout cas d'une façon majoritaire, autre chose qu'un développement harmonieux au sein de l'Etat auquel elle appartient. Moi, je connais la Tchécoslovaquie et j'aimerais bien m'en tenir là.\
QUESTION.- J'adresse ma question aux deux présidents. M. le Président Mitterrand a insisté dans son discours en préconisant une structure souple et je pense que probablement il faisait référence à la proposition qui est comprise dans la relation du groupe d'étude des affaires générales où l'on parle d'un secrétariat pour la Confédération européenne qui serait établi à Prague. J'aimerais savoir s'il y a sur cette question quelque chose de décidé et quelles seront les échéances et le temps dans lequel on devrait établir ce secrétariat ?
- LE PRESIDENT.- J'ai en effet parlé de structures souples parce que, dans mon esprit, toute structure contraignante échouerait aujourd'hui. Il n'y aurait pas de structure du tout, cela ne me gênerait pas non plus, je préférerais qu'il y en ait mais cela ne me gêne pas. Il faut simplement que les besoins soient reconnus. C'est le travail fait par les cinq commissions qui ont eu à traiter des cinq problèmes répertoriés, choisis par les personnalités qui ont participé à cette rencontre de Prague.
- Pour les besoins reconnus, il faudra répondre. Pour répondre, il faut un travail en commun. Pour que ce travail commun soit utile, il faut un début de structure : voilà la raison. Que cette structure soit un secrétariat, par exemple à Prague, cela serait tout à fait conforme à mes voeux.
- M. VACLAV HAVEL.- Vous m'avez aussi adressé la question. Je pense que cette conférence qui est une rencontre de personnalités n'était pas une assemblée inter-gouvernementale, et qu'elle n'est pas à même de constituer tout de suite, immédiatement et concrètement une institution permanente. Elle peut donner l'inspiration pour la constitution d'une telle institution mais cette institution, c'est quelqu'un d'autre qui doit la créer, pas une rencontre d'intellectuels qui a duré trois jours de suite. Je pense que quelque chose de ce genre doit être formé, car il faut maintenant élaborer dans le détail les projets concrets dont on a parlé dans les groupes. Si nous voulons que cela soit bien élaboré, que le travail soit coordonné il faut quand même de temps en temps que des experts dans les différents domaines se rencontrent. Quand il y a des assemblées si grandes que la nôtre, quelqu'un doit l'organiser. Et même si c'est un secrétariat, alors il doit sans doute exister pour que cela puisse fonctionner et marcher. Mais, à l'étape actuelle, c'est plutôt une idée pour les gouvernements, un sujet à traiter pour les gouvernements.
- LE PRESIDENT.- Je suis tout à fait d'accord avec le processus tel qu'il est indiqué par le Président Vaclav Havel. Le reste serait illusoire. Je crois qu'il ne faut pas confondre. Là nous venons de lancer un mouvement, un mouvement de pensée, débat. Nous n'avons pas créé une structure indépendante des Etats. Nous prendrions là une route tout à fait fausse qui ne nous mènerait à rien. Je suis tout à fait d'accord avec le processus tel qu'il est indiqué par le Président Havel, étant entendu que ceux qui ont pris l'initiative en question continueront de la suivre et essaieront de la pousser plus loin.
- M. VACLAV HAVEL.- Comme vous voyez, avec M. le Président Mitterrand nous sommes d'accord l'un avec l'autre sur toutes les questions.\