17 septembre 1990 - Seul le prononcé fait foi
Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, lors du 56ème sommet franco-allemand, Munich, le 17 septembre 1990.
Monsieur le Chancelier,
- Mesdames et messieurs,
- Vous avez entendu à l'instant le chiffre impressionnant des rencontres au sommet entre nos deux pays ! A quoi s'ajoute le chiffre encore plus impressionnant des rencontres qui m'ont permis de débattre avec le Chancelier de la République fédérale d'Allemagne.
- C'est dire qu'avant les grands événements qui vont se dérouler d'ici la fin de cette année, une longue période s'est déroulée, pendant laquelle nous avons appris à nous connaître, à travailler ensemble, à débattre du sort de l'Europe ainsi que des problèmes touchant à l'équilibre du monde. Nous nous sommes engagés sur la voie tracée par ceux que l'on appelle aujourd'hui "les fondateurs" de l'Europe actuelle au lendemain de la deuxième guerre mondiale.
- Et nous sommes allés plus loin, jusqu'à ce moment tant attendu par les Allemands qui verront leur pays enfin réunifié. On peut dire que nous avons été de bons compagnons associés dans des démarches historiques. J'allais vous dire que nous avons su surmonter bien des obstacles : ceux du passé, ceux du présent qui ont pu se résoudre parce que nous avions les mêmes vues sur l'avenir.\
L'occasion que nous offre Munich ce soir est solennelle puisque nous pouvons prononcer ces paroles à la veille de l'événement qui verra les Allemands se retrouver. Cet événement de grande ampleur aurait pu se produire dans la méfiance réciproque. Si l'on ramène tout, comme dans l'Europe traditionnelle, à des rapports de puissance et de force, c'est à l'avènement d'une Allemagne elle-même grande puissance auquel nous assistons. Nous, Français, nous sommes calés sur notre hexagone, sur la réalité solide très ancienne qui a vu sur le territoire français, ce territoire cohérent, équilibré, ramassé sur lui-même, un peuple lui-même cohérent et nous regardons l'histoire sans complexe, avec le sentiment que nous pouvons nous-mêmes l'aborder avec tous les espoirs que fournit un peuple pour lui-même.
- Et quel que soit le juste orgueil national que l'on puisse éprouver quand on appartient à des peuples comme le vôtre et comme le mien, nous savons bien que nous ne pouvons que dépasser ces notions si nous voulons être à la hauteur de l'histoire que nous vivons. C'est dans ce sens que je comprends la perspective et la construction de l'Europe à laquelle nous travaillons, où, il faut le dire, l'Allemagne et la France ont joué un rôle et continuent de jouer un rôle déterminant. Et, ce n'est pas au nombre d'habitants, ce n'est pas au nombre de kilomètres carré, ce n'est pas non plus au nombre des armées, ce n'est pas non plus au nombre des villes et de leur puissance, ce n'est pas non plus simplement au gré de la puissance économique que l'histoire se déterminera.
- Tout cela, l'histoire nous l'a donné. C'est une chance. Mais nous serions indignes de cette histoire si nous ne comprenions pas qu'après deux guerres mondiales, ce qui nous attend c'est tout autre chose. Et je ne répèterai pas ce qu'a dit le Chancelier Helmut Kohl sur les traits de cette Europe de demain matin, sur la réussite de notre entreprise, celle qui nous conduira au 1er janvier 1993, avec l'évolution des institutions, l'accroissement de la démocratie et de l'unité de vue et de décision qui réinstalleront l'Europe à la place qu'elle n'aurait jamais dû perdre, c'est-à-dire parmi les grands de ce monde. Nous avons d'autres amis, sur d'autres continents, mais il est important que l'Europe sache elle-même ce qu'elle a à faire, en respectant les amitiés, mais en se déterminant elle-même.\
Nous n'allons pas en dire davantage avant que commence ce dîner dans cette admirable salle : c'est là le signe de ce que nous apporte la Bavière, dont on sait le poids, la culture, la richesse et la beauté. Au coeur de l'Europe, il y a beaucoup de leçons à apprendre, et je remercie les autorités dirigeantes, les responsables de la Bavière d'avoir voulu nous réserver ce bel accueil dans ces lieux admirables, en y apportant leur propre tempérament : chaleur, goût de vivre, et pour ce qui les concerne aussi, le goût des vastes entreprises.
- Demain l'Allemagne aura consacré son unité officiellement. Je souhaite que tout ce qui a été dit et fait jusqu'alors continue d'être accompli : ce n'est pas une brisure du destin, c'est, au contraire, une confirmation.
- Nous formons, mesdames et messieurs, des voeux pour vous, au-delà des inévitables difficultés et des inquiétudes que pose tout avenir. Je pense que vous devez éprouver un moment d'émotion sacrée, et notre rôle à nous, c'est de la comprendre et de l'estimer. Mais, après tout cela, tout continuera. Il faudra être capable d'aborder les problèmes avec le regard aussi clair. Comme vous le voyez, à peine les événements de l'Est ont-ils provoqué cet extraordinaire succession d'événements que déjà, dans d'autres régions du monde, cela bouge de telle sorte que la paix est en jeu. Qui pourra jamais dire quand serons-nous en repos ? Jamais sans doute. Mais enfin, je l'ai dit tout à l'heure, on avance. C'est en ce sens que je forme des voeux : bonne chance à l'Allemagne, bonne chance à l'Europe. Elle se fera à force de volonté, de clairvoyance. Les conflits ne manqueront pas, ni les rivalités, ni les incompréhensions. Je ne sais même pas pourquoi je parle au futur : notre route est parsemée de ce genre de choses. Mais voyons grand.
- Merci à la Bavière. Bonne chance à l'Allemagne.\
- Mesdames et messieurs,
- Vous avez entendu à l'instant le chiffre impressionnant des rencontres au sommet entre nos deux pays ! A quoi s'ajoute le chiffre encore plus impressionnant des rencontres qui m'ont permis de débattre avec le Chancelier de la République fédérale d'Allemagne.
- C'est dire qu'avant les grands événements qui vont se dérouler d'ici la fin de cette année, une longue période s'est déroulée, pendant laquelle nous avons appris à nous connaître, à travailler ensemble, à débattre du sort de l'Europe ainsi que des problèmes touchant à l'équilibre du monde. Nous nous sommes engagés sur la voie tracée par ceux que l'on appelle aujourd'hui "les fondateurs" de l'Europe actuelle au lendemain de la deuxième guerre mondiale.
- Et nous sommes allés plus loin, jusqu'à ce moment tant attendu par les Allemands qui verront leur pays enfin réunifié. On peut dire que nous avons été de bons compagnons associés dans des démarches historiques. J'allais vous dire que nous avons su surmonter bien des obstacles : ceux du passé, ceux du présent qui ont pu se résoudre parce que nous avions les mêmes vues sur l'avenir.\
L'occasion que nous offre Munich ce soir est solennelle puisque nous pouvons prononcer ces paroles à la veille de l'événement qui verra les Allemands se retrouver. Cet événement de grande ampleur aurait pu se produire dans la méfiance réciproque. Si l'on ramène tout, comme dans l'Europe traditionnelle, à des rapports de puissance et de force, c'est à l'avènement d'une Allemagne elle-même grande puissance auquel nous assistons. Nous, Français, nous sommes calés sur notre hexagone, sur la réalité solide très ancienne qui a vu sur le territoire français, ce territoire cohérent, équilibré, ramassé sur lui-même, un peuple lui-même cohérent et nous regardons l'histoire sans complexe, avec le sentiment que nous pouvons nous-mêmes l'aborder avec tous les espoirs que fournit un peuple pour lui-même.
- Et quel que soit le juste orgueil national que l'on puisse éprouver quand on appartient à des peuples comme le vôtre et comme le mien, nous savons bien que nous ne pouvons que dépasser ces notions si nous voulons être à la hauteur de l'histoire que nous vivons. C'est dans ce sens que je comprends la perspective et la construction de l'Europe à laquelle nous travaillons, où, il faut le dire, l'Allemagne et la France ont joué un rôle et continuent de jouer un rôle déterminant. Et, ce n'est pas au nombre d'habitants, ce n'est pas au nombre de kilomètres carré, ce n'est pas non plus au nombre des armées, ce n'est pas non plus au nombre des villes et de leur puissance, ce n'est pas non plus simplement au gré de la puissance économique que l'histoire se déterminera.
- Tout cela, l'histoire nous l'a donné. C'est une chance. Mais nous serions indignes de cette histoire si nous ne comprenions pas qu'après deux guerres mondiales, ce qui nous attend c'est tout autre chose. Et je ne répèterai pas ce qu'a dit le Chancelier Helmut Kohl sur les traits de cette Europe de demain matin, sur la réussite de notre entreprise, celle qui nous conduira au 1er janvier 1993, avec l'évolution des institutions, l'accroissement de la démocratie et de l'unité de vue et de décision qui réinstalleront l'Europe à la place qu'elle n'aurait jamais dû perdre, c'est-à-dire parmi les grands de ce monde. Nous avons d'autres amis, sur d'autres continents, mais il est important que l'Europe sache elle-même ce qu'elle a à faire, en respectant les amitiés, mais en se déterminant elle-même.\
Nous n'allons pas en dire davantage avant que commence ce dîner dans cette admirable salle : c'est là le signe de ce que nous apporte la Bavière, dont on sait le poids, la culture, la richesse et la beauté. Au coeur de l'Europe, il y a beaucoup de leçons à apprendre, et je remercie les autorités dirigeantes, les responsables de la Bavière d'avoir voulu nous réserver ce bel accueil dans ces lieux admirables, en y apportant leur propre tempérament : chaleur, goût de vivre, et pour ce qui les concerne aussi, le goût des vastes entreprises.
- Demain l'Allemagne aura consacré son unité officiellement. Je souhaite que tout ce qui a été dit et fait jusqu'alors continue d'être accompli : ce n'est pas une brisure du destin, c'est, au contraire, une confirmation.
- Nous formons, mesdames et messieurs, des voeux pour vous, au-delà des inévitables difficultés et des inquiétudes que pose tout avenir. Je pense que vous devez éprouver un moment d'émotion sacrée, et notre rôle à nous, c'est de la comprendre et de l'estimer. Mais, après tout cela, tout continuera. Il faudra être capable d'aborder les problèmes avec le regard aussi clair. Comme vous le voyez, à peine les événements de l'Est ont-ils provoqué cet extraordinaire succession d'événements que déjà, dans d'autres régions du monde, cela bouge de telle sorte que la paix est en jeu. Qui pourra jamais dire quand serons-nous en repos ? Jamais sans doute. Mais enfin, je l'ai dit tout à l'heure, on avance. C'est en ce sens que je forme des voeux : bonne chance à l'Allemagne, bonne chance à l'Europe. Elle se fera à force de volonté, de clairvoyance. Les conflits ne manqueront pas, ni les rivalités, ni les incompréhensions. Je ne sais même pas pourquoi je parle au futur : notre route est parsemée de ce genre de choses. Mais voyons grand.
- Merci à la Bavière. Bonne chance à l'Allemagne.\